
🐺2🐺
Je commence à reculer, tout doucement, mais ma cheville proteste. Je vais devoir survivre encore quelques minutes.
Je m'arrête, et détaille sommairement mes adversaires.
Le premier qui est sorti du buisson, est un homme grand, aux courts cheveux de jais et aux pupilles comme deux puits sans fond. Tout dans sa démarche est calculé, il dégage une impression de contrôle permanent, et je me surprends à avoir le réflexe de baisser le regard.
Comme je m'en rends compte, je le fixe avec détermination dans les yeux. Une brève lueur de surprise les traverse, mais s'évanouit aussitôt.
Ses deux acolytes me donnent une impression plus effacée, comme soumise, et ils ne regardent pas leur chef. Leurs cheveux sombres et leurs regards noirs me font penser à une fratrie.
Ils s'avancent doucement, d'une démarche féline et sûre, pour commencer à m'encercler.
Je recule de plus en plus, sans lâcher le meneur du regard. Rien ne transparaît sur son visage, c'est comme si rien ne peut l'atteindre. Il se contrôle parfaitement.
Les deux frères se trouvent à présent chacun d'un côté. Si je veux fuir, c'est maintenant ou jamais.
Mais à peine ai-je formulé cette pensée que le meneur prend la parole, d'une voix grave et profonde, avec des accents rocailleux :
- Si j'étais toi je me soumettrais. Tu ne sais pas de quoi je suis capable.
Je garde le regard figé dans le sien, et répond de la même manière, d'une voix que je ne me reconnais pas tant elle est grave :
- Vous n'êtes pas moi, et vous non plus vous ne savez pas de quoi je suis capable.
On ne sait pas qui il est, mais il ne nous marchera pas sur les pieds !
Cette pensée jaillit dans mon esprit à la vitesse de l'éclair. Je plisse les yeux, à cause de la légère douleur apparue. Cette voix... Ce n'est pas la mienne.
- Soumets-toi, et on ne te fera aucun mal, articule le meneur.
Ses yeux fixent toujours les miens. Je peux sentir une force qui m'incite à ployer, à baisser le regard, mais je n'en fais rien et la relègue dans un coin de ma tête. Je redresse même encore la tête, défiant ouvertement cet inconnu. Me soumettre ? Quelle drôle d'idée !
Mais il faut que j'agisse. Si je continue ce petit jeu, je finirai encerclée. Les deux frères du meneur sont de plus en plus derrière moi, et mon but est du même côté. Et en plus, le regard noir que je soutiens devient de plus en plus insistant, de plus en plus fort.
Je finis par buter dans une nouvelle racine, mais au lieu de m'étaler dans la neige, je saute par dessus. Je me raidis à l'atterrissage, craignant pour ma cheville, mais elle semble être de nouveau fonctionnelle.
Ni une ni deux, je fais volte-face, surprenant mes agresseurs et me laissant ainsi une ou deux secondes d'avance. Je vole par-dessus la neige, le cœur battant sous l'adrénaline. Mes pieds poussent sur le sol et mon visage est fouetté par le vent. Le froid qu'il me fait ressentir me revigore et me donne la force de bondir sur la porte d'entrée.
Fébrile, je sors les clefs, les introduis dans la serrure et fonce à l'intérieur, claquant la porte derrière moi en m'y appuyant, prête à contrer un assaut extérieur.
Mais rien ne vient, et je jette un coup d'œil prudent dehors. Personne. Seules les traces de pas dans la neige prouvent que je n'ai pas halluciné.
Je ferme la porte, ébranlée. Ma tête tourne, et mes jambes me lâchent, délaissées par l'adrénaline. Je me rattrappe au mur avant de tomber sur le carrelage et me traîne jusqu'aux escaliers, que je monte vacillante pour aller échouer sur mon lit, la tête dans l'oreiller, épuisée par ma course folle.
C'est un bruit sourd, comme un choc, qui me sort de ma douce torpeur.
Je me lève, encore à moitié endormie, et passe un œil à la fenêtre. Ce que j'y vois me fait retomber dans mon lit, déconnectée. J'ai dû rêver.
Car dehors, je viens de voir les trois hommes de la forêt, accompagnés d'énormes chiens du type huskies. Enfin, pour ce que j'en sais des races de chiens, ils pourraient être des bergers allemands... Ils étaient occupés à frapper des bouts de métal sur le sol, et à se parler entre eux.
Ils m'ont retrouvée. Ce n'est pas si étonnant, car à la réflexion, je les ai guidés jusqu'à la maison. Une pensée horrible traverse mon esprit. Et si j'avais mis Lorraine en danger ?
Mais qui sont ces gens ? Que veulent-ils ? Et pourquoi m'avoir poursuivie, pour ensuite le demander de me... Soumettre ?
Trop de questions fusent dans ma tête. Je soupire et ferme les yeux, le temps de les reléguer au fond de ma tête et de me calmer. Je les rouvre quelques secondes plus tard pour regarder l'heure. Ma montre affiche quatre heures...
Il me reste quatre heures à tuer avant que Lorraine ne revienne...
Je descends du lit, et vais dans le salon. J'y ai aperçu une télé, tout à l'heure. Effectivement, un écran plat dernier cri m'attends juste en face du canapé. Lorraine doit avoir un boulot qui paye bien pour se permettre un tel luxe...
Je saute comme une gamine sur le canapé moelleux, et aggripe la télécommande.
Les chaînes qui passent ne sont pas intéressantes. Télé-réalité, émissions culinaires, et dessins animés pour enfants. Mais je dégote une chaîne animalière qui passe un documentaire sur les canidés. Je décide d'opter pour le documentaire.
En voyant une scène entre une meute de loups, je replonge dans mes souvenirs datant de l'orphelinat. Depuis toute petite, je suis fascinée par les canidés. J'explique cette attirance par ma... Différence. Tous les livres parlant des renards, loups, chiens, et autres que je trouvais, je les lisais avec passion. J'apprenais tout ce qu'il y avait à savoir. Le seul livre qu'il manquait était sur les différentes races de chiens, à mon grand désespoir. Mais bientôt il n'y eu plus de documentation à l'orphelinat.
Je reporte mon attention sur le documentaire, mais des bruits extérieurs continuent de se faire entendre. Je les ignore, mais au bout d'une heure je n'en peux plus. J'appuie sur pause d'un doigt rageur.
Les poings serrés, je me lève et fonce vers la porte. Je sais que ce que je vais faire est stupide, mais je m'en fiche. Là, je suis énervée.
Je pousse la porte avec force et hurle aux hommes qui me fixent depuis la route, à environ trente mètres :
- Foutez le camp ! Vous faites trop de bruit !
Et je rentre comme une tornade avant d'avoir eu le temps de voir leurs réactions.
Je retourne dans le fauteuil, et remets la télé.
Mais au bout de quelques minutes, les bruits reprennent. Je grogne de mécontentement, et me lève comme une furie. Je me jette sur la porte, et hurle comme une folle :
- Non mais vous avez fini ?!! Vous comprenez pas ce que veut dire "moins de bruit"?!!
Cette fois je ne rentre pas, et reste sur le pas de la porte, à les regarder, furieuse. Les hommes me regardent aussi, et nous nous affrontons du regard.
Vite, les deux frères soumis cessent de me regarder et continuent leur insupportable besogne, dont j'ignore le but, mais qui aggresse mes tympans. Leur meneur me fixe encore dans les yeux, et je soutiens son regard avec fierté. Mes ongles rentrent dans ma peau, tant mes poings sont serrés, mais je n'y prête pas attention.
Tout mon être est focalisé sur le trentenaire ténébreux.
Du sang finit par goutter de mes paumes. Il gèle presque aussitôt qu'il touche la pierre des escaliers. Mais encore une fois, je m'en moque.
C'est alors que les énormes chiens, qui n'ont pas bougé un poil pendant tout le début de l'affrontement, se mettent à hurler.
Un spasme me secoue le corps. Ma tête bascule en arrière sans que je ne puisse la contrôler et mes yeux se lèvent vers le ciel, mon corps se cambre, mes muscles se raidissent. Je ne peux plus bouger. Mes bras tendus de part et d'autre de mon corps ne répondent plus. Je suis complètement immobilisée.
Je commence alors à paniquer. Le meneur avance doucement jusqu'à la limite de la propriété. Je ne peux pas le voir, mais mon ouïe me dit ce que j'ai besoin de savoir. Ses pas crissent sur la neige, et il approche toujours.
Mais soudain, il s'arrête. Je l'entends forcer quelque chose, mais apparemment sans résultat puisqu'il recule. Sa respiration un peu plus rapide qu'avant me prouve qu'il a dû faire un effort.
Je soupire de soulagement, mais de courte durée, car l'homme dit aussitôt, très bas, de manière à ce que je saisisse bien la menace :
- Si tu ne sors pas, nous reviendrons chaque jour, chaque nuit. Tu ne peux nous échapper. Tu as franchi la frontière.
Ma respiration se bloque dans ma gorge. Qu'est-ce que ça signifie cette histoire ?!
Je suis de plus en plus paniquée, à cet instant. Mais finalement, je me rends compte que je peux bouger mes doigts. Petit à petit, je reprends le contrôle de mon corps dans une avalanche de fourmillements, et je baisse la tête pour voir mes agresseurs, ignorant la légère tension dans ma nuque.
Mais je ne vois que les traces qu'ils laissent derrière eux dans la neige.
Je rentre doucement dans la maison, vidée. Je n'en peux déjà plus. Et si c'était comme ça pendant tout l'été ?... Ils ont bien dit qu'ils reviendraient...
Oui, mais ils ne peuvent pas franchir un certain point...
Allons donc, j'entends des voix maintenant... Je dois vraiment aller dormir.
Mais cette voix a raison. Le meneur s'est arrêté à un moment, comme bloqué par quelque chose...
La certitude qu'il ne pourra pas entrer dans la maison calme un peu mes nerfs. Mais il faudra que j'en parle à Lorraine. Des gens louches rôdent autour de sa maison, elle doit être au courant.
Néanmoins, mon instinct (encore lui) me souffle que ce ne serait pas une bonne idée. Et, encore une fois, je l'écoute. Ça m'a plutôt réussi, jusqu'ici.
Je me rassieds dans le canapé, et regarde la fin du documentaire. J'embraye ensuite sur un reportage au Canada, dans les montagnes. Ça passe le temps...
Je me lève en entendant une clef dans la serrure. Mes muscles ankylosés proteste légèrement. Je vais à la rencontre de Lorraine en essayant de faire bonne figure, et apparemment c'est magistralement raté.
- Tiens, tu as l'air épuisée Lyka... Ça va ?
- Oui, oui ne t'inquiète pas. Et toi ? Le travail ? je lui demande, en changeant de sujet.
- Oh, je ne vais pas t'embêter avec mes histoires. Dis-moi, ça te dit d'aller en ville demain ?
J'acquiesce timidement, et elle sourit. Ça a l'air de vraiment lui faire plaisir de m'emmener en ville. Et puis, je suis curieuse de voir le village arriéré dont m'a tant de fois parlé Irène lorsqu'elle dénigrait sa sœur. Car oui, les deux sœurs ne s'apprécient pas tant que cela. Elles sont les opposés parfaits d'après ce que je connais d'elles.
La journée se finit plutôt bien, Lorraine et moi parlons de tout et de rien, puis je monte me coucher avec bonheur.
Avant de m'endormir, je me surprends à prier que tout ce que j'ai vécu aujourd'hui ne soit qu'un cauchemar très réaliste, et qu'à mon réveil je retrouverai Lorraine souriante me disant que je me suis endormie dans le canapé juste lorsqu'elle est partie travailler...
Mais la réalité va me prouver le contraire.
🐺🐺🐺
Hello!😁
Voici donc le deuxième chapitre !
Ça commence à bouger, Lyka se rend petit à petit compte que ce village n'est pas banal. La forêt cache un secret... 😉
Avez-vous des idées sur l'identité des triplés ? 😎
Que pensez-vous qu'ils essayent de faire, aux abords de la maison ? Avec des chiens ? 😏
J'ai hâte de lire les commentaires, n'hésitez pas à exprimer vos ressentis par rapport à cette histoire, et Rdv au prochain chapitre !!! ❤️
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