Chapitre 11🌟
— Deux filles qui se ressemblent comme deux gouttes d'eau, des jumelles sans aucun doute. Avant que tu ne m'en fasses la remarque, il est vrai qu'elles sont spéciales. L'une porte des plumes de perroquet, tu sais cet oiseau que nous avait présenté la reine dans ses jours nostalgiques. L'autre n'est pas comparable à une créature. Elle se présente sous la forme d'un corps avec le dos complètement difforme. Des créatures fantastiques je te dis ! Rappelle-moi pourquoi nous avons accepté le boulot ?
— Mais oui Lardo, je les ai vu, tu sais que je vois beaucoup mieux que toi ! Une enveloppe bien rembourrée nous attend à la fin, dit le deuxième, un peu plus malin.
— Non ce n'est pas vrai Carl ! Réponds le dénommé Lardo.
— Oh que si, riposte Carl.
Leurs propos correspondaient à l'exacte description des mutations de Cath et Marie ! Si j'en avais eu l'occasion et la possibilité, je les aurais défendues en m'appuyant sur tout ce qu'avait toujours gardé pour moi. Mais pourquoi ? Je devrais m'en aller et fuir, prévenir les autres, mais non.
Je demeure cachée derrière le mur de la maison, trop curieuse de connaître la suite, et peut être avide d'explications et d'informations.
Des "pas vrai" et des "si " résonnèrent dans tout le village, bonjour la discrétion ! A mon grand étonnement, personne ne semblait dérangé du bruit, des animaux, a priori des cigales continuait de donner leur concert dans les champs alentours. C'est surprenant !
Comme une fille normale, j'aurais pu profiter de leur manque d'attention envers ce qui se passe dans le village et les bruits, pour filer en douce mais non. Je suis une vraie tête de mule !
Un animal vint à passer, un chat sans doute. Il n'est probablement pas assez proche de moi pour que je puisse en déduire son espèce. Je ne peux distinguer que son ombre noire qui se faufile à travers les murs de la maison. J'y jette un coup d'œil, sans pouvoir garder un œil sur les deux hommes.
— Bon finissons-en, je suis plus intelligent et tu es le plus rapide, ça te va comme cela ? Affirme Carl d'une petite voix. Nous faisons équipe depuis des mois, tu devrais le savoir que je te tiens sous haute estime.
— Comme c'est attentionné ! Je suis profondément touché. Je tiens à te donner mes plus pates excuses : allons, ce n'est sûrement pas de ta faute, si la Nature a décidé de m'accorder un cerveau ! Réponds Lardo d'une voix rauque mais heureuse.
— Non, tu n'as rien compris !
Et voilà, ça recommence ! J'aurai voulu rejoindre mon lit et me rendormir, mais c'était trop important pour laisser tomber. Je suis la mystérieuse créature en me faufilant silencieusement autour de la maison. Pour le caresser, je me baisse et heurte le toit avec ma tête. L'animal fuit et le temps que je me relève, une ardoise tombe.
— BOUM !
Les deux hommes s'arrêtent brusquement de parler, tout aussi étonné que moi je ne le suis. Mais je suis morte de trouille.
— Qu'est-ce que c'est que ce bruit ? Demande Lardo en s'approchant de moi, aux aguets.
— Oh ça doit être une des ardoises de la maison. Tu savais qu'elle a été construite avant même que Georges jaillisse du berceau ? Ardoise ou non, cette vieille bicoque a au moins cinquante ans, ça casse vite ce genre de choses. Et puis, ce n'est pas Georges qui montera sur une échelle.
Ils ricanent. De nouveau, j'attire l'attention. Quelqu'un s'approche.
— Oui tu as raison mais pas que ! Viens voir, crie Lardo en s'adressant à son complice.
— Mais qu'avons-nous là ? Une jeune demoiselle ne devrait jamais se promener seule la nuit, qui sait quelles rencontres elle pourrait avoir. Gourmande à ce que je vois, dit Lardo d'un air méprisant en voyant les bonbons éparpillés par terre et le peu de chocolat sur la commissure de mes lèvres.
— Dis-moi, que fais-tu là à une heure aussi tardive ? Demande Carl.
J'étais pétrifiée et me recroqueville sur moi-même. Rien à faire. Il s'approche toujours plus. Je reprends courage et me lève. Qu'est-ce que je devais faire si quelqu'un m'agressait ? Oui, c'est ça.
— Je. . .
— Tu ?
— Je. . .
Sur ce, je lui donne un coup de genou dans l'entre-jambes comme je n'en aurai jamais fait avant. Il hurle de douleur. Je cours et donne l'alerte en criant. Georges ne doit pas se réveiller. Je cours aussi loin que je le pouvais. En cavalant, je contournais les arbres de la forêt.
— Reviens !
Lardo me suivais en traçant. Malgré sa corpulence, il courrait vite. J'avais du mal à le semer. Il parvient à me rattraper avant mon énième virage et m'agrippe les cheveux.
— Lachez-moi !
— Oh que non. Carl, dépêche-toi !
— Je fais ce que je peux. Je ne cours pas à cette vitesse, moi.
— La corde !
— Je l'ai !
— Vite ! Petite, sois gentille, laisse-nous faire et tu aurais la vie sauve.
Le dénommé Carl lui donne la corde alors qu'il arrivait à notre distance. Ils l'enroulent autour de ma taille et me retiennent par le poignet. Je crispe des dents. Il serre fort et je commence à avoir des douleurs dans la main et mon ongle s'est cassé, du sang coule au compte-goutte.
— Qu'est-ce que tu faisais là ?
Je détourne la tête.
— Tu vas répondre oui ? Hurle-t-il en s'adressant à moi.
— Je prenais l'air, je n'arrivais plus à dormir.
— Qu'as-tu entendu ?
— Rien de spécial.
— On ne prend pas de risques, dit-il en bouclant le dernier nœud de son entreprise.
Tout en me tirant, ils quittent le village et passent les contrôles sans trop de difficulté. Ils avaient un laisser-passer signé par la reine elle-même. Malgré mon air de prisonnière en phase de rébellion, les gardes n'y font pas d'objection et nous ouvrent grand la porte. Il était dit que nous reviendrons à l'aube. Ils n'ont pas dit à combien. Je suis conduite dans la nuit sur des chemins et des pentes de plus en plus abruptes. Tout ça, jusqu'à arriver au bord d'une falaise. Nous passons à l'aide d'une passerelle cachée des yeux curieux des passants. Elle avait été faite de façon grossière et n'était pas suffisamment solide pour porter mes ravisseurs.
Je visualise ce qui se trouve à présent devant nous : une petite caverne illuminée par des torches. Sans doute le repère de ses deux messieurs, que je devrais à partir de maintenant appeler des kidnappeurs. La grotte n'est pas très grande, juste assez pour entreposer de la marchandise prohibée et accueillir deux personnes. On y est assez à l'étroit.
Ils me poussent au fond, dans un coin sombre et humide.
— Voilà ton nouveau chez toi, il te plaît ? Dit Lardo avec ironie, en m'observant.
Au fin fond de la grotte, des caisses et des tonneaux sont stockés. Je me laisse glisser sur les fesses pour essayer de les atteindre
— A l'aide !!! A l'aide, je cris par instinct.
— Mais vas-tu te taire ??
— Non, à l'aide, à l'aide, à l'aide, des idiots m'ont capturé !
— Carl passe- moi le chiffon et le chloroforme, tu connais la consigne.
— Qu'est-ce que...
Voici les dernières paroles qui me sont venus avant de sombrer dans le noir complet.
— Tiens, dit-il, ça t'aidera à te calmer.
Lardo me tend au niveau du nez, un chiffon imbibé d'un étrange produit, que je ne connais pas. Le produit a fait effet apparemment. Lardo et Carl se sont attablés pour diner sans penser à moi. A tempéraments réguliers, des pulsations au niveau de ma tête me rendent les choses vraiment difficiles. Bien plus fatigué je ne l'étais et je ne me situe plus dans l'espace.
Si le produit avait agi, la caverne n'est plus que tâches noires et éclats de lumière, c'est une étrange sensation, je dois dire. Mes yeux se ferment peu à peu, quelques bribes de la discussion des deux me parviennent encore aux oreilles, un bruit, un tintement et... plus rien.
« Je prépare mon sac. Je suis quasiment prête, plus qu'une ou deux choses à ranger ou à changer. Je pars pour une journée d'observation. Je serai seule. Seule avec la nature, les oiseaux et le bruit de l'eau tombant d'une cascade ; Le lendemain, ce sera la rentrée. C'est le dernier jour pour profiter de la vie. Ensuite, je ferai de la place aux contrôles, aux interminables exercices de maths, aux professeurs et leurs tics. Aujourd'hui, j'ai décidé d'en faire profiter une autre que moi. J'irai avec une amie. Je monte dans la voiture. Mon amie monte. Nous sortons et nous enfonçons dans la forêt. Il n'y avait personne. Une heure après d'attente et de silence profond, je surprends une biche et ses petits en train de s'abreuver. Je sors mon appareil photo. La batterie est à plat. Je reste indifférente et observe la scène avec mes yeux. Mon amie était partie régler une affaire personnelle. Elle reviendrait. Je l'attends une heure, deux heures, elle n'est toujours pas là. J'entends des bruits, des crissements de roues puis un bruit de fusil. Mathilde criait.Par crainte, je jette inconsciemment l'appareil dans le vide et me précipite vers l'origine des cris. Il y avait deux hommes armés comme pour partir à la chasse. Et à côté, Mathilde, tué d'une balle.
— Nous ne l'avions pas vu, nous sommes navrés.
— J'appelle la police.
— Non, tu ne le feras pas.
Je compose le numéro. Il me le prend et le lance l'eau. Il me menace et tire. Je crie. Non, ça ne s'est jamais passé. Je crie, crie et hurle jusqu'à l'épuisement. »
En réalité, cette scène s'était déjà passée auparavant. Ce n'était pas exactement comme ça, mais une amie avait réellement été blessée par un chasseur alors que nous étions en promenade. Je n'avais pas vu les panneaux de signalisation et les gilets de sécurité qui rôdaient dans les bois. Je m'en souviens comme si c'était hier. Elle gémissait et nous étions là, au milieu d'un bois que nous ne connaissions pas.
J'avais appelé les secours qui l'avait embarquée et placée aux urgences. Elle perdait du sang, mais heureusement, la blessure était superficielle. Néanmoins, elle porta une attelle pendant plusieurs mois. Pour ce qui est des chasseurs, la famille a porté plainte.
— Oh regarde, elle se réveille, je lui en remet ? dit Carl en montrant le flacon.
— Non inutile, nous avons besoin de lui parler, il ne faudrait pas qu'elle se repose de trop, répond Lardo en riant.
— Oui mais. .
—Tais-toi de temps en temps, tu ne dis que des bêtises.
Je me réveille d'un long et profond sommeil, loin d'être agréable. Être allongée sur des pierres n'aide pas vraiment. J'ai l'impression d'être revenus de très loin, mais non, je me suis endormie à cause de ce fichu produit à la noix, sans aucun doute une sorte de somnifère.
— Coucou ma jolie, bien dormi ? Demande Lardo.
— Non ce ne serai pas ce mot que j'emploierai, et ne m'appelez pas "ma jolie" puisque ce n'est et ce ne sera jamais le cas, !
J'ai vraiment dit tout cela ?
— C'est comme cela que tu veux la jouer ? Eh bien, soit.
Il me tira vers la sortie et m'emmena de nouveau sur la passerelle. Là, il me lança et poussait les cordes de façon à tanguer le pont. Je m'agrippe du mieux que je le pouvais sur les côtés et pleurais comme jamais. Rien ne l'atteignait, ni mes cris, ni mes hurlements ni même mes pleurs.
—On fait moins la maligne.
Il continuait et osait me menacer de fendre l'une des cordes de suspension. Je me calmai et me ramena à a la raison. Il me voulait vivante. Je savais des choses qu'il ne voulait sûrement pas que je divulgue au village entier.
—D'accord, je suis prête !
Moi prête ? Je n'ai pas toute ma tête aujourd'hui. Qu'est—ce que je raconte ? Je l'agace plus qu'autre chose.
Il me prend par le poignet, me traine au fin fond de la grotte, à l'opposé du stockage de nourriture. Ensuite, il me plaque au mur et m'attache une corde autour des poignet, attaché par un anneau de chaque côté. Mes bras sont en verticale, le sang descend, je le sens. Il veut me torturer, certes, mais pour obtenir quoi ? J'avais mal, les anneaux me brulaient la peau et laissaient déjà des traces rouges au niveau de mes mains. Je grogne.
— Tu ne croyais tout de même pas que j'allais t'emmener du côté de la nourriture, pour que tu te goinfres de sucreries à n'en plus finir, tu rêves ma jolie ! dit Lardo en fronçant les sourcils.
C'était donc des provisions.
— Quel votre but ?
— But de quoi ?
— Vous m'avez très bien comprise.
— Hum de faire venir tes amies, pour vous livrer tous à notre chef, le leader, mais ne t'inquiète pas ma jolie, nous avons déjà un homme de terrain, il est sur place depuis un bout de temps déjà.
— Qui ça ? Qui est votre chef ? Qui est l'homme sur place ?
— Doucement ma jolie, c'est moi qui pose les questions ici !
— Oui mais dépêchez-vous !
— D'abord, que faites-vous ici ?
— Nous venons chercher la potion de désir.
— C'est tout ?
— Oui.
— Bon, et vous êtes combien ?
—Cinq.
— Vous êtes humains ? Rien que de te regarder me répugne. C'est ce que vous êtes, la souillure d'une merveilleuse création.
— Oui, pourquoi ça vous étonne ?
— Tais-toi !
Je décide de l'assommer de question. Il finirait par craquer.
— Votre chef ? Votre but ? Qui êtes-vous ?
— Une question pour une réponse de ta part.
— Soit.
— Notre chef est la reine, une véritable leader ! Et pour ce qui est de l'homme de terrain...
Je l'interromps une fois de plus.
— Pourquoi la reine ?
— C'est à toi de me dire ce que tu sais à propos de Georges.
— Georges ? Ce n'est qu'un habitant du village. Non ?
— Si, si. Je n'ai rien dit.
Depuis, la petite salle à manger, Carl déclare :
— Ce n'est pas un complice ? C'est ce que tu m'avais dit pourtant. On compte sur lui pour la suite. Mais d'abord trinquons !
— Pas maintenant Carl, pas maintenant.
Lardo soupire. Décidemment, je crois que Carl ne sait pas tenir un secret. Georges est donc un complice. On aurait dû s'en douter. Lardo reprend et me répond le plus simplement possible :
— La reine, comme tu le sais est humaine, elle a échoué dans sa mission, et veut la même chose pour vous. Elle ne peut supporter le fait que vous puissiez réussir, elle est tout bonnement jalouse ! Elle sait que la potion de désir est difficile à obtenir. Elle attend depuis des années quelqu'un pour aller lui chercher à sa place. Quand elle vous a vu, elle s'est de suite décidée, mais pour cela il fallait un otage. Et c'est toi que la Nature nous a fait cadeau.
La reine est jalouse de nous, c'est une chose. Et Georges, c'en est une autre. Beaucoup de révélations et beaucoup de traîtres.
— Quand vous êtes arrivé, George s'est proposé, il déteste les enfants et encore moins les plus intéressants que lui. Il possède la plus grande et garnie maison du village, il est le plus important après la reine et il veut le rester. Il reste tout de même fidèle à sa femme.
Je suis restée bouche bée, sans avoir pu toucher un mot de la réponse de Lardo. Il était évident que je soupçonnais quelque chose mais de là, à vouloir échafauder un plan, par simple jalousie ? Mais dans quel monde vit- on ?
— Que ferez-vous des autres ?
— Ce n'est plus notre problème, à présent. On a fait le boulot.
Il y a maintenant cinq minutes que Lardo est parti chercher ses affaires. Selon lui, on devrait quitter la ville pour ne pas éveiller les soupçons. Les gardes nous auront sans doute oublié mais il ne faut pas que je m'apitoie sur mon sort. Je n'aurai pas trente-six occasions de fuir. C'est le moment.
L'idée d'une évasion m'était plusieurs fois venu à l'esprit, aujourd'hui, je devais passer à l'action. Torches, provisions et une assurance de réussir me sera définitivement nécéssaire. Je m'étais rassise à ma place et examinait attentivement la suite des évènements. Mes ravisseurs s'était autorisée une pause et ont finis par s'endromir, exténuée du travail qu'il venait d'exécuter en amenant « une gamine » au point de rendez-vous. Je lève les yeux au ciel. Trop peu expérimentés pour comploter.
L'aube approche à grand pas. C'est le moment ! Touts les indices pouvant conduire les autorités sur les lieux devaient disparaitre. Aucun témoin. La torche à la main, je la jette sur les sacs en toile. Un départ d'incendie se propage et gagne du terrain à mesure que je progressais dans la réussite.
Une simple réserve d'urgence dans l'une des sacoches j'évacue les lieux
Le feu crépit doucement, dans la nuit. C'est exactement le même bruit d'un feu de camp, le même silence quand on oublié de l'éteindre et que tout le monde dort. Le feu se propage tranquillement sans que nul ne s'en aperçoive. Je m'éloigne tout en tournant la tête, le long du chemin. La route m'épuise un peu plus, le poids de mes réserves pèse sur mon dos. Je me retourne : l'intérieur de la grotte est en cendre, plus une seule trace des deux hommes, sauf deux squelettes ensevelit. Un sentiment de culpabilité envahit mon cœur. Tout meurtrier devait ressentir l'émotion que j'étais en train de ressentir. La liberté ne conciliait pas quiétude et réussite.
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