Chapitre 27
« Mon cher fils... »
En voyant les premiers mots de la lettre écrite par son père, Lili se retint pour ne pas déchirer la feuille. Elle reprit sa lecture, un peu à contre-cœur.
« Je sais que cela fait longtemps que je ne fais plus partie de ta vie. Je regrette que tu m'aies renié ainsi. Nous aurions pu recommencer, repartir de zéro, mais ça ne s'est pas fait. »
Lili se retint d'exploser de rire. Même sur le point de mourir, M. de Castel restait toujours aussi hypocrite et perfide.
« Si je t'écris ceci, c'est que je vais bientôt mourir. Une solution sans doute lâche, mais je pense que c'est la seule. Il se trouve que je suis endetté jusqu'au coup et mes amis n'ont plus aucune confiance en moi. »
« Tu m'étonnes ! » pensa ironiquement Lili. Prêt à tout pour se faire un maximum d'argent, M. de Castel trahissait tout le monde, y compris ses soi-disant « amis ».
« Même si tu m'as renié, sache que je te laisse la somme de deux millions de dollars. Sache également que je pardonne toutes tes erreurs. C'est donc le cœur et l'âme en paix que je pars rejoindre ta pauvre mère. Nous serons enfin réunis pour l'éternité.
Adieu mon fils,
John de Castel. »
En lisant cette dernière partie, Lili n'eut plus du tout envie de rire.
Qu'est-ce qu'avait fait décider son père pour qu'il lui lègue tout son héritage alors que Lili avait vu son nom rayon du testament ? Et comment osait-il parlé de sa mère de la sorte alors qu'il ne l'avait jamais aimé ?
« Sache également que je pardonne toutes tes erreurs » ... De quelles erreurs parlaient-ils ? Cette phrase augmentait le dégoût profond que Lili vouait envers son père. Même sur son lit de mort, il ne refusait d'avouer qu'il était le seul fautif, qu'il était le seul responsable de leur dispute.
- Alors ? Que dit cette lettre ? demanda Athéna.
Lili lu la lettre à voix haute.
- En conclusion, mon cher père me lègue deux millions de dollars avec des milliards de dettes.
- Et l'entreprise Farmassium, ajouta Ahmès.
- Mais, attends... Si M. de Castel te l'a légué, ça veut dire que tu es...
- ... La nouvelle PDG ! termina Lili.
Mais bien sûr ! Elle n'y avait pas pensé !
- Mais alors, ça change tout ! fit Cecily. On va pouvoir savoir tous les secrets que renferment cette entreprise...
M. Durray s'agita.
- En fait... Le bâtiment entier a été réduit en cendre par M. de Castel. Il s'est suicidé une demi-heure plus tard dans sa villa.
- Génial... Donc, M. de Castel ne sera jamais accusé des effets secondaires que produisaient les médicaments et on ne saura jamais qui a vraiment tué les employés de Farmassium ainsi que le Premier Ministre...
- Je répète pour la énième fois, que ce sont Scott Parker, Boris Torson et Olivier Joycott qui ont commis ces crimes, fit l'inspecteur.
- Et cette théorie est très probable, dit Cecily.
Tout le monde la regarda, l'air surpris.
- Quoi ? Mais tu étais la première à contredire..., commença Athéna.
- Eh bien je me suis trompée, coupa la jeune femme. J'ai trouvé ceci, dans les affaires de Mary.
Elle tendit le journal à M. Durray.
- Ils étaient surnommés les Compagnons Sanglants. Ils ont déjà tenté d'assassiner le Premier Ministre de l'époque. Ayant échoué, ils ont recommencé aujourd'hui, et ça a marché.
- Mais pourquoi avoir tué ma gouvernante et les autres employés ? demanda Lili.
- Je ne sais pas... Par crise de folie, sans doute...
- Puis-je voir la malle dans laquelle tu as trouvé ça ?
Cecily se leva. Elle invita les autres à la suivre.
- Non, j'ai besoin de prendre l'air, dit Lili.
- Je t'accompagne, tu as besoin de soutient. Après cet effondrement soudain et la mort de ton père, tu dois être sous le choc, répondit Athéna.
Cecily savait que les deux jeunes femmes cherchaient juste à la laisser seule avec l'inspecteur. Mais, ça n'allait pas se passer comme ça !
- Ahmès ! murmura-t-elle sur le bout des lèvres.
Celui-ci haussa les épaules, d'un air désolé et suivit Athéna et Lili.
« Bande de traîtres » pensa Cecily. Ils allaient lui payer !
Cecily se dit qu'après tout, elle allait juste accompagner un inspecteur de police dans un endroit comportant de potentiels preuves pour une enquête. Ce n'était pas la mer. Mais la jeune femme se sentait étrangement mal à l'aise lorsqu'elle se trouvait seule avec M. Durray.
- Voilà la malle où j'ai trouvé cet article. Elle comporte tous les souvenirs de Mary.
M. Durray fouilla dans la malle. Un lourd silence s'installa. Cecily observa l'inspecteur. Il avait les sourcils froncés et une ride barrait son front. Un détail qu'avait observé la jeune femme lorsqu'il réfléchissait, lorsqu'il était anxieux ou encore lorsqu'il était en colère. Cecily s'attarda sur ses cheveux blonds et son corps digne de celui d'un dieu. Elle se demanda alors s'il était en couple. Cecily chassa cette pensée de sa tête. Elle s'en fichait royalement de savoir s'il était ou non. Et puis, peut-être que M. Durray était homo. Ou bi. Peu importe d'ailleurs. Elle s'en fichait.
Pour couper court à ces pensées stupides, Cecily brisa le silence.
- Vous ne trouvez pas qu'il y a beaucoup de suicides en ce moment ? D'abord il y a les trois compères, puis M. de Castel... ça commence à faire beaucoup.
- Oui, répondit seulement M. Durray.
Nouveau silence.
- L'époux de Mary travaillait dans la marine ? demanda l'inspecteur.
Cecily confirma.
- Il est décédé dans un naufrage ?
- Comment le savez-vous ? fit Cecily en écarquillant les yeux.
- Observations, Mademoiselle Fardom, observations.
M. Durray brandit une médaille.
- Ce n'était pas un simple marin. Il était médaillé. Quant à la nature du décès, ce n'est que par pur instinct. Puis-je néanmoins prendre ceci ?
Il saisit un manteau ayant appartenu à l'époux de Mary.
- Je ne sais pas... Mary y tient beaucoup...
- C'est pour faire des analyses...
- Des analyses, c'est-à-dire ?
M. Durray lui sortit son sourire malicieux, celui qui faisait battre le cœur de Cecily à mille à l'heure.
- Secret professionnel, Mademoiselle Fardom...
- Secret professionnel ? Depuis quand vous me cachez des choses ? On a quand même résolu une enquête !
M. Durray éclata de rire.
- Une enquête ? Rien que ça !
- Bon, d'accord, on vous a seulement aidé...
Cecily se rendit compte qu'ils s'étaient tous deux rapprochés. Elle eut soudainement chaud. Très chaud.
La jeune femme sentit les doigts de l'inspecteur frôler sa main. Elle sentit des frissons dans tout son corps.
Avant qu'elle ne puisse faire quoique ce soit, les lèvres de l'inspecteur se posèrent sur les sienne. Le cerveau de Cecily cessa alors de fonctionner. Soudain, la jeune femme se recula vivement.
- Qu'est-ce qu'il vous prend ? demanda-t-elle agressivement.
- Je suis désolé... Je... Je pensais que...
- Et moi je pensais que c'était un comportement d'adolescent, comme vous avez dit ! Je pensais qu'il fallait oublier, passer à autre chose, qu'on n'était pas fait pour être ensemble !
- Lorsque j'ai dit ça, c'était après notre baiser sous l'emprise de l'alcool. Enfin, toi, tu l'étais. Moi, non. Je savais parfaitement ce que je faisais. Ce soir-là, n'en pouvant plus, j'ai cédé. Je sais que c'est très impoli et j'aurais dû me contenir. J'ai dit qu'on devait oublier ce baiser pour éviter que tu sois mal à l'aise. Je ne voulais surtout pas gâcher notre relation plus ou moins amicale. En ce qui me concerne...
M. Durray s'interrompit. Il n'avait pas l'habitude de dévoiler comme ça ses sentiments. Mais là, il n'avait pas le choix.
- En ce qui me concerne, reprit-il, je ressens une certaine attirance à ton égard. Enfin, au début, ça l'était. Cette attirance s'est accroît de jours en jours. Aujourd'hui, ce n'est plus seulement de l'attirance... C'est quelque chose de plus fort. De plus intense. C'est bien plus que de l'amitié. Voilà mes sentiments que je ressens pour toi, Cecily. Si tu ne ressens pas la même chose, ce que je peux tout à fait comprendre, jamais au grand jamais, je ne tenterai une approche ni même te dévoilerai mes sentiments. Ils resteront néanmoins intact, si ce n'est plus.
Prise au dépourvu, Cecily ne su comment réagir. M. Durray avait de fortes attirances, étaient-ce les mêmes battements de cœurs, les coups de chauds et les fortes envies d'embrasser ? Ressentait-il cette sensation de vide, comme la jeune femme avait lorsqu'elle n'était pas dans la même pièce que Weylan ?
Pourtant, Cecily avait dû mal à croire qu'on puisse s'attacher à elle. C'était impossible. Elle n'était personne.
- Je pense que vous vous trompez sur vos sentiments, Monsieur, lâcha-t-elle le plus froidement possible. Ou du moins, c'est ce que vous ressentirez durant deux-trois mois, puis, vous me lâcherez. Personne ne s'est jamais intéressé à moi et ça restera ainsi.
Alors qu'elle allait partir, M. Durray la retint. A ce contact, un nouveau frisson traversa Cecily.
- Mais moi je le suis et je le serais toujours, dit-il. J'en suis sûr au plus profond de moi.
La jeune femme croisa son regard pétillant de sincérité. Les yeux verts de M. Durray enveloppèrent le corps de la jeune femme et firent fondre son cœur. Cecily se précipita sur lui et l'embrassa à son tour. La jeune femme fut tellement rapide que Weylan tomba à la renverse.
Ne supportant pas les contacts physiques, Cecily fut étonnée de constater que c'était très agréable. Tellement agréable qu'elle ne voulait plus se décoller du corps de Weylan. La jeune femme lui laissa néanmoins quelques minutes de répit afin qu'il puisse respirer.
, murmura Weylan en caressant les cheveux de la jeune femme.
- Seulement pour la vie ? Je préférerais pour l'éternité.
Il éclata à nouveau de rire ce qui provoqua chez Cecily une nouvelle vague de frisson.
- Va pour l'éternité !
***
Ahmès, Lili et Athéna marchaient dans le parc, située tout près de l'immeuble où ils logeaient.
- Ça va, Lili ? demanda Athéna. Même si j'ai sortie une excuse afin de laisser Cecily et Weylan seuls, il n'empêche que tu dois être sacrément secoué avec la mort de ton père, la destruction de l'entreprise...
- Je vais très bien. Je me sens apaisée, même. C'est étrange, mais depuis que M. de Castel est mort et que Farmassium a été réduit en cendre, c'est comme si un poids s'était libéré de mes épaules. Je me sens légère, à présent. Je sais que c'est cruel de dire ça, mais, maintenant que mon père n'est plus là et que j'ai hérité de sa fortune, des portes s'ouvrent...
- D'ailleurs, il ne t'avait pas rayé de son testament ?
- Oui. Mais étrangement, il a changé d'avis. Je n'ai pas envie de savoir le pourquoi du comment... Non. A présent, j'ai envie de profiter. J'ai envie de réaliser mon rêve. Plus rien ne me retient, maintenant.
Athéna et Ahmès s'échangèrent un regard. Ils savaient que le rêve dont parlait Lili était de commencer sa transition.
- Alors fonce ! lui dit Ahmès.
- Oui... Mais... J'ai peur...
- Peur de quoi ? Lili, tu as toujours rêvé de ça !
- Je ne l'ai pas dit à Ruby. Elle croit que je suis un homme... J'ai peur de sa réaction.
- Si elle t'aime vraiment, elle te comprendra et te soutiendra, dit Athéna.
- J'espère. Je n'ai pas envie de la perdre.
- Plus tôt tu lui diras, mieux ce sera.
- En tout cas, fit Ahmès, je ne sais pas si c'était une bonne idée de laisser Cess et Weylan seuls... Connaissant Cessy, je parie qu'elle lui a foutu une gifle lorsqu'il a tenté une approche...
- Tu crois ? répondit Athéna. Mmmh... Je n'espère pas... Ils vont tellement bien ensemble !
- Eh bien, allons voir, fit Lili. Tout de façon, je dois demander à l'inspecteur si je peux voir le corps de M. de Castel...
- Pourquoi veux-tu le voir ?
- Pour m'assurer qu'il est bien partit, que plus rien ne peut m'empêcher de faire ma transition...
***
M. de Castel était là, allongé, les yeux clos, le visage pâle. Recouvert d'un simple drap blanc, il paraissait si insignifiant sans son costume fait sur mesure. Lili ne ressentit rien en voyant son cadavre, si ce n'est du dégoût. Elle s'en voulut d'avoir de tels sentiments, ce n'est pas ce qu'une fille ressentirait en voyant ainsi le cadavre de son père. Mais, pour Lili, cela faisait longtemps qu'elle n'avait plus de géniteur. Pourquoi pleurerait-elle un homme qui était étranger à ses yeux ? Pourquoi pleurerait-elle un homme qui n'avait cessé de la rabaisser et de la rejeter ?
Lili avait les yeux secs. Même en se forçant, elle n'arrivait pas à verser une larme.
- Adieu, Monsieur.
Ce fut tout ce qu'elle trouva à dire. Puis, elle tourna les talons, sentant qu'une page était en train de se tourner.
***
Athéna, Ahmès, Cecily et M. Durray attendaient dans la voiture. Après que Lili ait demandé à voir le corps de M. de Castel, M. Durray lui avait appris que le cadavre était au crématorium et attendait d'être incinéré. Lili, accompagnés des quatre jeunes gens s'était donc rendu au crématorium mais avait demandé qu'elle soit seule lors de son entrevue avec le cadavre. Lorsqu'Ahmès, Lili et Athéna étaient retournés dans l'appartement, ils avaient pu constater que M. Durray et Cecily étaient tranquillement assis dans la cuisine, l'un en face de l'autre. Rien ne laissait paraître qu'il s'était longuement embrassé quelques minutes auparavant. Les trois jeunes gens avaient même cru qu'il ne s'était rien passé et se trouvaient alors un peu déçu. Mais, dans la voiture, les regards complices que s'échangeaient Weylan et Cecily ne leur avaient pas échappé.
- Je crois qu'on a un nouveau couple, avait chuchoté Athéna à Ahmès et Lili.
En attendant cette dernière dans la voiture, Ahmès et Lili observaient Cecily et l'inspecteur s'échanger des regards et des petits sourires.
- C'est mignon, commenta Ahmès tout bas.
- C'est débille, oui ! répondit Athéna.
- Qu'est-ce que vous dites ? fit Cecily en les regardant dans le rétroviseur.
- On disait : « Lili prend toute sa vie ! », répondit Athéna du tac au tac.
- La voilà, commenta l'inspecteur.
Lili entra dans la voiture.
- Mes amis, une page vient de se tourner, déclara-t-elle solennellement.
- Amen, fit Ahmès sur le même ton ce qui fit éclater de rire Cecily suivit de l'inspecteur.
***
- Bonsoir à tous, bienvenu dans cette édition spécial World Panic. Bonsoir Patrick, pouvez-vous nous explique ce qu'est que le World Panic ?
- Bonsoir Olivia, bonsoir à tous. Le World Panic regroupe toutes ces catastrophes naturelles qui défilent dans le monde depuis deux-trois jours, catastrophes naturelles, qui, je le rappelle, sonnent comme une fin du monde. Plus de cinq cent mille personnes victimes du World Panic sont privées de foyers. Écoutons tout de suite ces trois témoignages recueillis par nos reportes.
- Notre maison a été complètement démolie à cause d'un tremblement survenu dans notre région... Nous dormons dans un gymnase, comme tous les autres habitants... Ce n'est pas facile, mais nous avons un toit, contrairement à d'autre...
- Mon immeuble a été complètement brûlé. Je m'estime chanceux, je n'ai eu aucunes blessures, contrairement à d'autres habitants qui ont été gravement atteint. Je suis très inquiet pour ma famille qui habite en Jamaïque ; tout est inondé !
- Moi, ça fait vingt-quatre heures que je n'ai plus de logement. Il n'y a plus assez de place pour dans le gymnase de ma ville. Je ne suis pas le seul dans ce cas-là. Il y en a même qui sont à la rue en étant malade ; les hôpitaux sont tellement surchargés qu'ils sont obligés d'attendre des heures, voir des jours.
Athéna coupa la radio.
- C'est intolérable ! Il faut faire quelque chose ! On ne peut pas rester, là, les bras croisés !
Cela faisait deux jours que les médias relataient des témoignages de victimes du World Panic.
- Oui, mais quoi ? fit Cecily.
- Déjà, commençons par descendre et constater le nombre de gens qui sont à la rue !
- Je sais, on pourrait mettre en place un stands de ravitaillement ? proposa Ahmès.
- Bonne idée !
- Dommage que Weylan ne soit pas là, il cuisine vraiment bien, dit Cecily.
- J'espère que tu ne dis pas cela uniquement parce que tu es folle de lui.
Cecily leva les yeux au ciel, exaspérée.
Peu de temps après, munis de couvertures et d'une marmite remplie de soupe faite par Cecily et Ahmès, les jeunes gens se rendirent dans les endroits où les bâtiments étaient détruits.
Ils posèrent la marmite sur une table improvisée. Bientôt, une longue file d'attente s'étalait sur tout le boulevard.
- Bon courage, souhaita Athéna en tendant trois bol de soupes pour une femme et ses deux enfants.
- Merci, c'est généreux ce que vous faites.
- Oui, mais c'est dommage d'attendre une catastrophe climatique pour s'occuper des gens dans la rue...
Les jeunes gens passèrent la semaine à servir une centaine de personnes par jour, avec parmi elles, des sans-abris. Plusieurs autres bénévoles avaient rejoint les jeunes gens. A la fin de la semaine, plusieurs autres stands s'étaient installés dans les endroits où les bâtiments avaient été détruits.
- C'est génial que notre idée se répande ! dit Ahmès un soir alors que les jeunes gens rentraient.
- C'était ton idée, à la base ! Tu peux être fier de toi, dit Athéna.
- Malheureusement, il y a encore beaucoup de décès à cause des problèmes de logements et de soins...
- Il faudrait des médecins bénévoles, soupira Cecily.
- Il y en a, répondit Athéna. Mais, ils sont débordés. Il n'y en a pas assez.
- J'ai une nouvelle à vous faire part..., annonça Lili.
- Tu vas te marier ?
Lili leva les yeux au ciel.
- Mais non... J'ai fais mes petits calculs... Et lorsque j'aurais remboursé les dettes de mon père, il me restera l'argent pour ma transition et bien plus encore ! Je ne saurais quoi faire de tout ce fric... C'est pourquoi j'ai décidé d'investir dans des associations ou des organisations qui font tout pour que notre monde s'améliore malgré ce qui se passe en ce moment.
- Mais Lili c'est trop bien !
- L'argent ne permet pas de faire ressusciter les morts, mais au moins, il permettra de soigner les vivants et de réparer ou de limiter les dégâts...
- Moi aussi, j'aimerai annoncer quelque chose, intervint Athéna.
Il eut un silence, puis elle déclara :
- J'ai décidé de fonder ma propre entreprise de vêtements entièrement recyclés.
- Ah ! s'exclama Lili. Nous avons retrouvé notre Athéna forte et déterminée !
Les jeunes gens continuèrent leur route, persuadés que malgré l'obscurité qui régnait sur Terre, existait un petit rayon de soleil.
***
Ayant été rapidement au courant du projet d'aider les victimes du World Panic, l'inspecteur s'était mis aux fourneaux. Alors qu'il mélangeait la pâte, le téléphone de la maison sonna. Il s'essuya les mains et décrocha.
- Allô ?... Oui... Oui, je vous la passe... Lili ! appela-t-il. C'est pour toi !
La concernée entra dans la cuisine et prit le combiné.
C'était Ruby.
- Ruby ! Ça va ?
- Oui... Non... Ecoute... Je ne peux pas te le dire au téléphone... Rejoins-moi au parc qui est près de ton logement...
Elle raccrocha brusquement. Lili resta interdite un moment, puis, elle reprit ses esprits. Elle posa le téléphone et sortit de l'appartement en ignorant les interrogations de Weylan.
Lili se rendit près de l'entrée du parc et attendit. Longtemps. Elle n'était pas à l'aise dans ses vêtements masculins. Lili avait d'ailleurs pris la décision d'avouer son secret à Ruby. Après tout, maintenant qu'elles étaient ensemble, il fallait qu'elle sache...
Ruby arriva enfin, toujours aussi élégante dans une robe en velours vert.
Lili se précipita vers elle et l'embrassa. Ruby se laissa faire un moment, puis la repoussa. Lili la regarda avec étonnement.
- Victor... J'ai quelque chose à te dire...
- Moi aussi !
- Laisse-moi finir, s'il te plaît. C'est important. Écoute, j'ai une tournée mondiale. Elle est prévue depuis longtemps mais j'ai oublié de t'en parler, je suis tellement désolée. Elle durera un an. Je pars demain. Viens avec moi.
Prise de court, Lili resta silencieuse un instant. Partir avec Ruby voulait dire renoncer à sa transition.
- Ruby... Je ne peux pas..., murmura Lili.
- Pourquoi ? Qu'est-ce qui te retiens ici ?
- Il y a mes amis, je dois régler des choses chez le notaire à propos de l'héritage de mon père et puis...
Lili allait lui avouer son secret lorsque Ruby lui dit :
- Eh bien, nous pourrons communiquer par téléphone et grâce aux réseaux sociaux...
- Ruby, je dois te dire...
Une sonnerie de téléphone retentit.
Ruby décrocha.
- Allô ?... Quoi ?... Maintenant... Mais ce n'était pas prévu !... Bon, j'arrive.
Elle raccrocha.
- J'avais oublié que j'avais répétition... Je suis désolée... En tout cas, je suis rassurée. J'avais peur que tu me quittes...
- Pourquoi te quitterai-je ?
- On ne se verra plus pendant un an...
- C'est très long, certes, mais je t'aimerai toute ma vie, dit Lili en l'attirant vers elle.
- Victor, moi aussi, je t'aimerai toute ma vie, répondit-elle en l'embrassant.
Après le baiser, Ruby se leva et s'éloigner en lui lançant une nouvelle fois un « je t'aime » et partit.
Victor.
Ce prénom resta au travers de la gorge de Lili. Il fallait qu'elle revienne à la réalité : Ruby aimait Victor et non Lili.
Lili resta quelques minutes assises sur le banc, le regard vide. Ces minutes se transformèrent en heures.
- Lili..., appela une voix lointaine.
La jeune femme se reconnecta à la réalité. Elle était couchée sur le banc. Il faisait nuit noire et il pleuvait. Ahmès, Cecily et Athéna étaient penchés au-dessus d'elle. Lili se releva en position assise et fondit en larmes.
- Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda Athéna.
- C'est Ruby..., sanglota Lili. Elle part pour un an...
Athéna passa un bras autour de ses épaules.
- Allez, viens. Rentrons.
Une fois réchauffés, les quatre amis s'assirent dans le salon. Lili leur rapporta la conversation qui s'était déroulée quelques heures plus tôt.
- Comment m'avez-vous retrouvé ?
- Ne te voyant pas revenir, Weylan nous a raconté ton départ précipité après l'appel de Ruby Diamond, raconta Cecily. Son instinct d'inspecteur a pris le dessus ; il a su que quelque chose clochait. Dès que la nuit a commencé à tomber, il s'est précipité au commissariat pour lancer des équipes à ta recherche.
- Ah oui, des équipes, carrément !
- Je l'ai appelé lorsqu'on est rentré. Il était rassuré bien sûr. Mais, je t'avoue qu'il était également légèrement vénère quand il a appris que tu étais juste à côté de chez lui, alors qu'il a envoyé une cinquantaine d'agents à l'autre bout de la ville et même celle situés aux alentours.
- Si tu voyais le sourire bête que tu affiches en ce moment..., soupira Athéna.
Cecily se garda bien d'ajouter que malgré l'inquiétude qui l'avait saisi en apprenant la disparition de son amie, une vive jalousie l'avait toutefois piqué lorsque M. Durray avait pris son visage froid et autoritaire (son masque d'inspecteur, comme disait Cessy) et s'était précipité au commissariat. Aurait-il réagi de la même façon si ça aurait elle qui se serait volatilisée ? Cecily se trouvait stupide de penser cela alors qu'elle était cent pour cent sûre que Weylan ne ressentait strictement rien envers Lili. Il avait tout simplement réagi parce que Lili faisait partie de son cercle de connaissance. Cecily lui en était d'ailleurs reconnaissante. Mais, elle ne pouvait pas s'empêcher d'avoir en elle cette pointe de jalousie. M. Durray était à elle, et à personne d'autre.
- Bon, eh bien, je vais me coucher avant que la tempête Weylan arrive, plaisanta Lili en se levant.
- Ne t'inquiète pas, Lili, lui dit Athéna. Ruby t'aime, qui que tu sois.
- Je te conseille de la mettre au courant de ta transition le plus tôt possible.
Lili jeta un regard plein de gratitude à ses amis et s'en alla. Arrivée dans sa chambre, elle jeta un coup d'œil à son miroir. Ses cheveux longs étaient encore mouillé par la pluie. Soudain, elle fronça les sourcils et observa son visage de plus près. Lili constata que quelques poils de barbe avaient poussé sur ses joues. Elle fondit en larme. Elle n'en pouvait plus de ce corps d'homme ! Lili calma ses sanglots et saisit une pince à épiler.
Une demi-heure plus tard, Lili observa le résultat dans le miroir. Malgré la coupe féminine et les couches de maquillage, elle restait toujours Victor. Lili ouvrit son ordinateur et démarra une conversation vidéo avec Ruby. Par chance, celle-ci répondit.
- Bonjour, Ruby. Je ne suis pas Victor. Je suis Lili de Castel.
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