Mother Love
5 ans
« Maman ? »
Catherine Collin se tourna vers sa fille qui venait de lui tirer la main pour attirer son attention. Elle sourit en la regardant froncer les sourcils et observer ce qui se passait autour d'elle sans comprendre. Elle avait l'impression que son tutu blanc la rendait encore plus menue qu'elle ne l'était d'ordinaire.
« Pourquoi on est ici ? »
Elle passa un main dans ses cheveux châtains. « C'est pour ton premier cours de danse. »
La petite fille ne dérida pas et leva les yeux vers sa mère pour plus d'explications. « Mais pourquoi ? »
« Pour que tu puisses t'amuser. » Elle s'accroupit pour se mettre à sa hauteur et frotta sa joue afin d'en effacer une trace de chocolat. « Tu vas voir Lucie, dans quelques années tu repenseras à ce moment et tu réaliseras que tu ne pourras jamais te passer de la danse. Tu en auras besoin toute ta vie afin de te sentir pleinement heureuse et libre. »
Lucie écarquilla de grands yeux et se tourna vers la démonstration qui était donnée par des danseuses plus âgées alors que sa mère passait un bras autour de sa taille et posait son menton contre son épaule.
La démonstration terminée, elle regarda de nouveau sa mère la bouche grande ouverte et des yeux verts brillants d'une lueur nouvelle et éclatante. « Moi aussi je vais faire ça ? »
« Bien sûr, » répondit-elle sans pouvoir s'empêcher de sourire de toutes ses dents face à l'impatience de sa fille, « tu seras même la meilleure de toutes. »
Elle l'embrassa sur la joue avant de la relâcher et de la regarder courir en direction du groupe auquel elle avait été assignée.
Durant toute la durée du cours, la jeune mère couva sa fille du regard, l'observant s'épanouir dans un univers qu'elle venait tout juste d'intégrer, mais qu'elle semblait déjà avoir adopté comme étant une part importante de sa vie.
8 ans
Elle était en retard.
Lucie attendait patiemment assise sur le canapé qui se trouvait près de la porte que sa mère arrive pour l'emmener à sa répétition de danse, mais elle était en retard. Elle lui avait pourtant promis qu'elle serait à l'heure pour l'emmener.
Alors qu'elle regardait la porte sans ciller, les jambes se balançant dans le vide, celle-ci s'ouvrit vivement sur Catherine Collin qui déchaussa ses talons le plus vite possible avant de s'activer tout autour de la pièce.
Lucie se leva donc et la suivit jusqu'à sa chambre tout en l'observant attentivement. « On y va ? »
Sa mère leva la tête quelques secondes vers elle en lui faisant un sourire d'excuse. « Je suis désolée ma chérie, mais une réunion de dernière minute vient d'être organisée. Adrien va donc t'emmener ce soir. »
Lucie essaya de dissimuler sa déception sans pour autant pouvoir s'empêcher de lui poser une autre question. « Mais vous venez quand même ce soir au gala avec papa ? »
« Évidemment qu'on vient te voir ! » S'exclama-t-elle d'un ton joyeux en la poussant en direction de la porte d'entrée, ses affaires en main. « On ne louperait ça pour rien au monde. » Elle la regarda ensuite dans les yeux, ceux-ci identiques à ceux de sa progéniture. « Je te le promets. »
Satisfaite de cette réponse, Lucie lui fit un sourire et partit rejoindre Adrien pour qu'il puisse l'emmener à sa répétition.
Le soir même, elle observait le public à la recherche de ses parents depuis les coulisses. Elle allait monter sur scène dans quelques minutes, mais elle ne les avait pas encore repérés. Elle commençait d'ailleurs à se demander si sa mère avait tenu sa promesse.
Toujours sans savoir, elle dut prendre sa place sur scène en compagnie de ses coéquipiers et observa le rideau se lever et les projecteurs se braquer sur eux. Après avoir pris un réel plaisir à danser devant un véritable public, ses yeux se posèrent sur sa mère qui applaudissait à l'unisson avec les autres et un sourire apparut sur ses lèvres alors qu'ils saluaient.
Lucie partit la rejoindre dès qu'elle en eut l'occasion et se jeta dans ses bras tout en déblatérant un flot de paroles impressionnant tant l'excitation était présente.
« Papa n'est pas là ? » Finit-elle tout de même par demander en le cherchant du regard.
Mais sa mère secoua la tête et replaça une mèche de cheveux qui s'échappait de sa coiffure. « Non, il a eu un empêchement. Mais tu as été géniale ce soir si tu veux mon avis. »
Cette lueur devenue familière illumina le vert des iris de Lucie.
13 ans
Jamais Lucie ne s'était donnée autant de mal dans la réalisation d'une chorégraphie qu'elle n'était en train de le faire. Elle donnait tout ce dont elle était capable, suant sang et eau et tout ce qu'il fallait pour que ce soit parfait.
Lorsque la musique se stoppa, elle ne put s'empêcher de sourire. Celui-ci retomba cependant rapidement lorsqu'elle aperçut sa mère la regarder d'une expression vide alors qu'elle avait une conversation téléphonique.
Elle grimaça involontairement avant de regarder autour d'elle pour s'assurer que personne ne l'avait vue. Le moral dans les chaussettes, elle la rejoignit et attendit patiemment qu'elle termine. Lucie essayait de ne pas montrer d'émotions et gardait une expression neutre pour ne pas trahir ce qui se passait au fond d'elle.
« Il faut que j'y aille. » Déclara Catherine Collin un fois avoir raccroché. « Il y a eu un problème au travail. »
Elle ouvrit la bouche, ayant du mal à ne pas faire en sorte que son ton soit désespéré. « Mais il y a encore plusieurs danses que j'aimerai te montrer, je suis sûre que tu- »
« Je sais Lucie, mais il faut vraiment que je parte, c'est assez urgent. »
Elle attrapa son sac et ses clés de voiture avant que son regard ne croise celui de sa fille pendant quelques secondes. Ces yeux identiques aux siens qui semblaient désormais la fuir. Il n'en fallut pas plus pour qu'elle détourne le regard et ne s'approche de la porte.
« N'oublie pas, la perfection est la plus belle des récompenses. » Conclut-elle avec détermination.
Et elle tourna les talons et s'éloigna, son téléphone à nouveau vissé à l'oreille.
Lucie la regarda partir avec tristesse, lassée d'assister à la même scène de plus en plus souvent. Elle se remémora le premier cours de danse qu'elle avait pris lorsqu'elle avait cinq ans. Mais, contrairement à ce que lui avait dit sa mère, ce n'était pas pour se rendre compte de l'importance qu'avait pris la danse dans sa vie, mais plutôt la relation spéciale qui la reliait à sa mère ce jour-là.
Non seulement elle avait l'impression que ce lien n'existait plus, mais ça semblait être à des années lumières.
Prenant une grande inspiration et refoulant ses larmes, Lucie releva le menton et se redressa avant de partir rejoindre ses amies.
Publié le 24 juin 2019
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