Le matin était calme, le soleil se levant doucement derrière les collines, projetant une lumière dorée sur la petite ville. Les rues s'animaient peu à peu, les volets grinçants laissant entrer les premiers rayons de chaleur. Soraya ouvrit les yeux, le regard fixé sur le plafond de sa chambre.

Un sentiment d'inconfort profond la rongeait depuis quelques semaines, un vide qu'elle ne parvenait pas à expliquer. Chaque jour semblait dépourvu de sens, comme si elle était une actrice forcée à jouer un rôle dans une pièce qu'elle ne comprenait pas. Elle inspira lentement, cherchant à se convaincre que tout allait bien, mais la sensation de vertige persistait.

— Soraya, dépêche-toi, tu vas être en retard ! cria une voix familière depuis le rez-de-chaussée.

Elle se redressa, frotta ses yeux fatigués et se prépara rapidement. L'école était une routine qu'elle appréciait, mais elle avait du mal à s'y investir pleinement ces derniers temps. En traversant la cuisine, elle adressa un sourire distrait à sa mère avant d'attraper son sac et de sortir.

Dans la rue, tout semblait étrangement normal. Pourtant, une énergie pesante planait autour d'elle. Les visages familiers des voisins qu'elle croisait chaque matin n'arrivaient pas à combler ce vide intérieur. Le chemin jusqu'au lycée était ponctué de regards curieux. Soraya, étrangère dans cette ville, était pourtant devenue la « petite protégée » de beaucoup.

En arrivant devant les grandes grilles de l'établissement, elle sentit une légère nausée. L'impression étrange que tout était déjà arrivé auparavant, comme si elle répétait un cycle dont elle ignorait l'origine. Elle secoua la tête et entra dans la cour, où les élèves se réunissaient en petits groupes.

— Soraya ! Tu es encore dans la lune ? lança Tsumugi en s'approchant avec un sourire taquin.

Tsumugi était une des rares personnes avec qui Soraya se sentait bien. Son énergie débordante et son sourire constant étaient contagieux. Mais aujourd'hui, même sa présence n'arrivait pas à dissiper le malaise de Soraya.

— J'avais juste besoin d'un moment pour respirer, murmura-t-elle en ajustant son sac.

— Eh bien, évite de trop respirer, ou tu risques de manquer le cours de maths ! Allez, viens, on y va.

Dans la salle de classe, les voix s'élevaient en un brouhaha constant. Soraya s'installa à sa place habituelle, près de la fenêtre. Le professeur entra, mais elle n'écouta qu'à peine ce qu'il disait. Ses pensées étaient ailleurs, son esprit tiraillé entre la réalité et un monde qu'elle ne pouvait pas décrire.

Le vertige la frappa soudain. Une douleur aiguë au crâne la fit grimacer, attirant les regards inquiets de Tsumugi et d'autres camarades.

— Soraya ? ça va ?

Elle hocha la tête, mais ses maux de tête ne faisaient que s'intensifier. Des flashs d'images floues traversèrent son esprit. Une ruelle sombre. Une silhouette avec un couteau. Un cri étouffé. Elle ferma les yeux, essayant de reprendre son souffle.

— J'ai besoin de sortir, murmura-t-elle en se levant brusquement.

Dans le couloir, le silence était pesant. Ses jambes tremblaient, et elle s'appuya contre un mur. Les visions continuaient, de plus en plus nettes. Elle vit un visage qu'elle ne reconnaissait pas, des sensations de peur qui lui retournaient l'estomac.

Puis tout devint noir.

Soraya s'éveilla dans un environnement inconnu. Elle était allongée dans un lit, entourée par des ombres mouvantes. Sa tête lui faisait mal, mais son esprit était clair. Elle savait. Elle comprenait enfin ce vide, cette douleur.

Elle était morte.

Et elle était de retour.

Une haine froide et brûlante à la fois l'envahit. Une détermination nouvelle se forgea dans son regard. Elle allait trouver celui qui lui avait volé sa vie. Et elle allait le détruire.