Chère maman
Chère maman,
Tu me manques.
Toutes les filles écrivent ces mots à leur mère.
Comme je voudrais t'écrire toute une lettre comme celles de toutes les filles!
Te dire je vais bien, la ville est jolie, j'ai des bonnes notes et des amis!
Mais je peux pas. Tu sais bien pourquoi.
Je sais que mes lettres te rendent tristes, j'en suis si désolée, je voudrais que tu me croies heureuse, que tu lises ses mots en souriant. Mais j'ai besoin de dire la vérité.
Je te l'ai déjà dit.
Je n'en peut plus de faire bonne figure, de marcher dans la rue la tête haute, de faire comme si ça ne me dérangeait pas d'être seule en cours, de jamais pleurer parce que c'est pour les faibles, de faire comme si rien n'était alors que tout m'affecte.
Si je ne t'aimais pas, maman, je te dirais que j'aurais voulu ne jamais naître. Mais ça te blesserai alors je ne le dit pas.
Ma vie est bien grise, maman chérie!
Je me lève tous les matins avec la peur au ventre,
la peur qu'ils soient pires encore que d'habitude, tu sais, ceux dont je t'ai parlé, et pas seulement, tous en fait, ceux qui me giflent comme ceux qui m'ignorent, ceux qui regardent sans rien dire.
Parfois j'arrive à être tranquille, en sortant la première de la salle de classe et en me refugiant aux toilettes durant toutes la pause, tant pis si je ne manges pas. Non, en fait, même là je ne suis pas tranquille, parce que tranquille ça veut dire sereine, ou à l'abri, et je ne l'ai pas été depuis que je suis partie, ni sereine ni à l'abri.
À la fin de la journée, je pars vite, vite, pour ne pas les croiser, eux, tu sais lesquels, mais pas trop vite, sinon ils le remarquent, et ils viennent.
Je ne prends pas le bus, j'ai bien trop peur d'y croiser quelqu'un que je connais, et donc qui me connait, et donc qui ne m'aime pas.
Pareil à pieds, et puis mon sac est lourd, parce que je suis seule, alors je ne peux pas prendre un livre sur deux.
Alors je rentre à vélo, tous les soirs, même si mes freins sont cassés, tu sais Thomas les a arrachés, le grand musclé dont je t'avais parlé, tant pis, un vélo sans frein c'est déjà mieux que la peur.
Arrivée à la maison je travaille, un peu, pas beaucoup, puis j'arrête, je peux pas me concentrer, j'ai mal à la tête, mal à la lèvre aussi, là où l'autre garçon, Leo, m'a frappée hier, mais ce n'est pas le pire, maman, ça au moins ça cicatrise, mais j'ai mal au coeur aussi, là où il m'ont tous frappée avec leur haine ou leur indifférence, et cette blessure là ne cicatrise pas.
Et je me couche, je dors, sans manger, tout ça me coupe l'appétit .
Quand je dors je suis bien, un peu, pas trop quand même, mais un peu, c'est le seul moment ou je suis bien, même si ça fait longtemps que je ne fait pas de jolis rêves, parce qu'il n'ont pas de jolis souvenirs sur lesquels se baser.
Oh, maman! Elle était pourtant bien, notre vie, avant!
Ah maman, si tu n'étais pas là, je l'aurais laissé tomber, cette vie qui ne m'aime pas, et que je n'aime pas non plus!
Mais tu es là, maman, er mes lettres te font déjà assez mal.
Tu crois que je devrais en parler, maman. Je sais bien que tu penses ça, mais tu vois, là où je suis je connais aucun adulte, et mes professeurs je peux pas aller les voir, ils ne m'aiment pas, c'est au dessus de mes forces, je peux pas, tu comprends?
Non bien sûr tu comprends pas, c'est pas normal, je suis pas normale, je le sais bien, ils me le disent tous, que je suis pas normale, que je suis ratée, toute déréglée.
Et tu sais quoi, maman? Ils ont raison.
Ta fille.
Texte écrit pour le concours de louisedelmont
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