
Chapitre ①⑧
Bonsoir les amis ! ^-^
Merci de votre patience (je suis en plein dans mon mémoire de master qui est une histoire entière à écrire, c'est long et laborieux, je dois tout rendre le 15 juin), voici la suite de Poupée !
Bonne lecture ~ ♥
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Je ne peux pas croire qu'il n'y a aucune manière de faire disparaître un trou noir.
Ce serait cohérent, en tout cas, qu'il existe une théorie qui essaie de le prouver. Je crois en avoir déjà entendu parler sans avoir continué mes recherches là-dessus - probablement que ça fait partie des choses qu'il m'a empêché d'approfondir.
— Grouille Jungkook, on va plus rien avoir à déjeuner !
— Ouais j'arrive.
Si j'avais espéré retrouver l'envie d'étudier ces questions en postulant à l'université spécialisée, le refus m'a bien calmé. J'ai cru abandonner définitivement l'idée de replonger dans mes bouquins de physique quantique pour me consacrer à la littérature et uniquement à celle-ci, faute de mieux... Et me voilà à écrire un fichu mémoire qui lie les deux.
— Tu fais quoi, à la fin ? râle Jimin.
— Deux s'condes.
Il soupire, la main sur la poignée de notre chambre.
J'écris mon mémoire. Voilà ce que je fais. Je me suis levé deux heures avant mon ami pour écrire, sinon, j'allais devenir taré. Complètement fou. Parce que je me suis réveillé toutes les putain de demi heures jusqu'à craquer et attraper mon ordinateur pour taper, taper, taper, me surprenant à ne plus réussir à m'arrêter.
— T'es tout pâle, tu le sais ? Si tu manges rien tu vas nous faire une syncope entre deux conférences.
— Pas dormi.
— Bah t'aurais dû, tu verrais ta tête.
Je renifle en continuant d'écrire pour terminer mon paragraphe.
Dormir ?
Comment ?
Comment, quand j'ai les lèvres qui brûlent encore de la peau qu'elles ont dévoré cette nuit ? Comment, quand les muscles de mes bras ne cessent de se contracter au souvenir des doigts qui les ont puissamment pressés ? Comment, quand tout ce dont mon esprit se souvient, c'est son regard d'abord si perdu, candide, qui a finalement imité le noir du ciel lorsqu'il s'est posé sur ma bouche, ma gorge, comme si lui aussi avait espéré autant que moi ce moment ?
Comment j'étais censé fermer un œil quand j'ai dû me retenir chaque lente seconde de ne pas le rejoindre de nouveau pour le maintenir sur son lit, pour voir plus de cette peau miel qui scintillait même dans la nuit, pour rassasier ce qu'il a créé : le plus avide, terrible, des appétits ?
— Jungk...
— Je suis là.
D'un coup de main, je clos mon ordinateur et le pose sur mon lit. Je me redresse, la nuque tendue, les doigts raides, pour lacer mes chaussures et quitter la chambre avec Jimin. En sortant, je regarde immédiatement sur ma gauche au fond du couloir pour trouver cette porte close qu'il a laissée entrouverte il y a quelques heures à peine afin que je la franchisse.
Une fois sur deux, mon esprit me convainc que c'était un rêve. Une fois sur deux, je ferme les yeux une fraction de seconde quand un de ses soupirs me revient en tête comme s'il était de nouveau là, contre moi, ou plaqué à cette putain de porte contre laquelle il m'a cloué à son tour comme si je ne pesais rien, comme si mes muscles ne faisaient pas trois fois les siens.
Il m'a eu en beauté. Je n'ai pas riposté, mais j'ai le drôle de sentiment que, même si je l'avais fait, il aurait trouvé un moyen de me maîtriser.
À cette pensée, mon estomac se compresse comme un trou noir rétrécirait - et c'est là, précisément, que je me questionne davantage encore sur sa possibilité à s'évaporer. Peut-être parce que l'avoir embrassé m'a injecté une dose de dopamine si extrême que j'ai la soudaine impression que ce puits béant, dans mon corps, a des chances de se clore.
Je m'inquiète de l'immense désillusion qui m'attend. Alors je me prépare à toute éventualité - qu'il m'évite lâchement étant la plus probable. J'aviserai. Pour le moment, je ne préfère pas y penser. Je veux continuer de flotter, si tant est qu'avoir les mains qui vibrent férocement de pouvoir l'empoigner de nouveau est flotter.
Je n'ai jamais ressenti ça.
— Oh, les autres sont là ! Je pensais qu'on les avait ratés pour le déjeuner. Imaniii !
Avec Yoongi, avec mes coups d'un soir - je n'ai jamais ressenti ça.
— Jimin, Jungkook ! Vous partiez sur une grasse mat', là, non ? sourit Imani.
— La faute à Jungkook, il a bossé son mémoire comme un acharné ce matin.
Hoseok et Namjoon sont également là.
Pas lui.
Ça aurait été trop facile. Il ne m'accordera pas de le voir de sitôt : comme si ça avait un prix. Je retiens un léger sourire en ne le trouvant pas autre part dans la grande pièce.
— Il n'est pas là, m'envoie Namjoon.
Je dévie mon attention de monsieur Pyon qui mange en compagnie de ses collègues de l'US pour la porter sur le délégué des deuxième année.
— Je sais, affirmé-je.
Il me fixe de longues secondes tandis que je tire la chaise restante pour m'y installer. Sur la table, les trois M2 se sont déjà bien servis dans le buffet. Imani pousse les assiettes vers nous, je saisis une pâtisserie et un fruit.
Hoseok évite mon regard.
Fais chier.
— Bon, bilan de la veille, ça s'est très bien passé. Monsieur Daniel est même venu nous féliciter pour notre organisation ! Aucun problème sur tous les fronts. Hôtel OK, bus OK, comportement OK, s'extasie Imani.
— C'est génial ! Ça va donner une belle réputation à notre atelier, renchérit Jimin.
— Oui. On a tous fait du beau travail, acquiesce Namjoon.
J'ai tendance à oublier que je fais partie de cet atelier, que j'ai moi aussi mené à bien ce projet. Je hoche la tête à mon tour même si je n'ai étrangement pas l'impression que c'est à moi qu'on s'adresse.
— Le programme du jour est d'ailleurs plus léger : à dix-huit heures, l'université de Daegu a organisé une sorte de journée portes ouvertes version miniature. Il y aura des stands sur le campus pour présenter leurs différentes filières. Une belle initiative de leur part, ça achèvera le weekend sur une note plus légère.
— En partant hier j'ai vu des stands de nourriture en train d'être montés ! intervient Hoseok.
— Oh mais c'était ça ! Je me demandais pourquoi ils sortaient des guirlandes colorées.
— Vous pensez qu'il y aura de l'alcool ?
Je croque dans ma pomme en les écoutant chacun leur tour exprimer leur excitation sur cette espèce de fête déguisée. Mon regard se perd finalement sur monsieur Pyon en pleine discussion. Monsieur Daniel est là, mais pas avec lui. Il est à une autre table. Je me remémore leur presque engueulade d'hier - à la conférence qu'ils ont partagé en début d'année, je n'ai pourtant pas eu l'impression qu'ils étaient en conflit. Qu'a-t-il bien pu se passer ? Je suis curieux sur leur passé à tous les deux. Depuis combien de temps est-ce qu'ils se connaissent ?
Et pourtant est-ce que j'ai tant l'impression qu'ici, tous cachent de très lourds secrets ?
Non.
Un secret.
Tous semblent cacher un seul et unique secret.
Quand je quitte monsieur Pyon des yeux, c'est dans ceux de Namjoon que je tombe. Un instant, j'arrête de mâcher, surpris de comprendre que ça fait un moment qu'il paraît m'épier. Je serre la mâchoire en le défiant à mon tour.
Namjoon me fixe un peu trop souvent. Et il fixe un peu trop souvent Taehyung, aussi. Ce dernier prénom me pousse à durcir davantage mon regard sur le délégué. Mes épaules se tendent, mon torse s'emplit d'air.
Il abandonne en premier la joute visuelle, et moi, j'attends impatiemment la fin du repas pour rejoindre le bus afin de m'éloigner au plus vite de ces types et leur hypocrisie sans pareille.
Quand nous entrons dans le car vingt minutes plus tard, je tente de regarder derrière moi, de le chercher, mais Jimin m'entraîne jusqu'au fond en apercevant Imani et Hoseok nous faire de grands signes.
— Vous avez tous pensé à prendre vos sacs ?
— Oui ! répondent les autres en chœur.
Namjoon acquiesce, micro en main, tandis que j'attache ma ceinture en tentant de calmer ma jambe qui tressaute si vite et mes sourcils qui n'ont de cesse de se froncer.
— Gardez les bien sur vous durant la journée, le chauffeur refuse qu'on les laisse dans la soute. On se retrouve à l'université de Daegu, achève-t-il.
Le fond du bus est animé, mais je ne porte attention à rien ni personne. À plus personne, parce que soudain, une main fine à souhait agrippe la rambarde intérieure, tire pour s'y hisser, puis des mocassins bien cirés claquent sur le sol en moquette du véhicule sur le point de démarrer.
Il ne jette pas un seul coup d'œil vers nous quand il monte.
Ma mâchoire se serre à répétition. J'ai à peine le temps de le voir. Il s'assied avec son ami sur la première rangée, si bien qu'il ne lui faut être debout qu'une fraction de seconde une fois dans le bus avant de s'asseoir. Je me redresse sur mon siège quand j'aperçois ces mèches miel, ce cou fin et ces bras longs qui bougent lentement, si lentement, mais tout disparaît de nouveau avant même que je ne puisse distinguer les traits de son visage. Je suis bien trop loin de lui cette fois pour observer son bras posé sur l'accoudoir. Je ne décèle rien. Pendant tout le trajet, je ne décèle rien.
C'est la même chose quand nous descendons. Pire encore : si j'essaie de me précipiter vers la sortie, je me mange l'attente infernale que requiert la descente d'une vingtaine d'étudiants avant moi. Je presse les sièges sur lesquels je m'accroche en marchant au putain de ralenti sans pouvoir une seule seconde accélérer la cadence. Je me mets même à en pousser certains, car mon cœur s'emballe de ne pas pouvoir le rattraper même si je n'ai aucune idée de ce que je pourrais bien faire après une telle nuit - lui parler ? Simplement le regarder ?
Enfin, Jimin et moi arrivons à quitter le bus. Je fais un tour sur moi-même ; à gauche, à droite, à côté de Namjoon, de monsieur Daniel...
— Le quartier libre commence dès maintenant ! N'oubliez pas la présentation de l'école en fin d'après-midi. Nous aurons une heure pour la découvrir, après quoi nous reprendrons la route pour Séoul. Bonne journée à tous !
...Rien.
Finalement, je jette un œil par-dessus mon épaule vers les grandes portes d'entrée de la faculté, comme si mon intuition me l'avait conseillé.
Putain.
Je m'immobilise un instant en voyant ce dos droit, cette posture bien tenue et ces épaules tendues se fondre dans l'antre de l'université. Comme une ombre dont on m'aurait autorisé à ne percevoir qu'une partie fragmentée.
Son appétence pour les disparitions ne tait pas ma conclusion : il m'évite. D'une manière ou d'une autre, il m'évite.
Jimin me rejoint aux côtés d'une Imani que je trouve de plus en plus étrange elle aussi. Je n'ai pas l'impression que c'était moi qu'elle ignorait au repas ; je peux la voir distante avec tout le monde. Son regard se perd au loin, sur le campus vert où des élèves installent les stands dont parlait le délégué des deuxième année ce matin.
Quand nos yeux se croisent, j'ai l'impression d'y voir l'un de mes reflets les plus anciens.
**
— Merci à tous pour votre écoute.
Un tonnerre d'applaudissements éclate pour la jeune fille qui vient de nous expliquer en une heure ce que nous serions probablement capables de voir à la vitesse de la lumière. Dès que les bancs commencent à claquer contre les dossiers, signe que les étudiants quittent l'amphithéâtre, je me reconnecte au monde. À mon tour, je me saisis de mon sac lourd qu'il m'est pénible de porter depuis ce matin pour quitter la grande salle, similaire à celle où Taehyung avait donné son cours sur les trous noirs hier.
Hier. Ça me semble déjà si loin.
Comme si ce que nous avions vécu cette nuit avait créé une faille dans le temps. Hier n'est plus hier pour moi : tout ce qui se trouve avant que mes doigts ont pu courir sur sa peau, avant que mes lèvres n'aient pu s'attacher aux siennes, me semble inexistant, inintéressant. Des souvenirs que je jette volontiers contre ceux qu'il m'a offerts, écrasants, si massifs que tout ce qui gravitait autour depuis hier a été englouti. Le seul qui persiste encore depuis le début du voyage est le son de sa voix qui s'infiltre inlassablement dans mes oreilles à mesure qu'il nous explique la théorie des trous de ver.
Je pousse la porte et m'étire une fois dans le grand couloir. C'est comme si je vivais constamment hors du temps depuis ce matin. Chaque fois que je clos les paupières, son visage réapparaît comme une douce torture dont on refuse de me libérer. Je soupire en ajustant mon sac sur mes épaules, épuisé. J'aurais dû me forcer à dormir davantage. Une seule question a tourné en boucle dans mon esprit jusqu'aux premières lueurs de l'aurore.
...Et maintenant ?
En pivotant sur ma gauche pour chercher ma prochaine destination, Jimin m'ayant abandonné pour des conférences côté lettres, je décèle une chevelure que je reconnaîtrais entre mille. J'entrouvre les lèvres, m'apprêtant à l'appeler, mais elle marche drôlement vite.
Tiens ?
Intrigué, je slalome entre les étudiants de Daegu pour la suivre. Elle ne cesse de ramener sa main vers son visage et je ne saisis pas ce qu'elle y fait - est-elle en train d'éponger des larmes ? Ses pas sont durs, je m'essouffle à la suivre jusqu'à une allée reculée, sorte de cul de sac en pierre qui donne sur le campus intérieur où le bruit s'amenuise. Personne ne semble errer ici.
Personne, à part...
— ...Imani ?
Dos à moi, elle sursaute et se tourne de moitié avant de se raviser. Je fronce les sourcils en m'approchant lentement.
— Ça... Ça va ! s'empresse-t-elle.
Je cesse tout mouvement. Sa voix est chargée de sanglots.
— Ça a pas l'air, là, réponds-je.
Elle renifle, rit de gêne. Quand j'essaie de la contourner, elle fait en sorte que je ne puisse pas voir sa figure trempée.
— Imani...
— C'est bon Jungkook, je t'assure, un peu de stress c'est tout. C'est ce voyage, tu sais, on avait beaucoup à préparer. Je suis du genre émotive tu vois, je craque pour un rien et après je...
— Imani.
J'attrape ses bras pour ne plus qu'elle m'échappe. Au loin, des pas nous avoisinent puis s'évaporent. Elle expire lourdement, bouleversée, et quand je saisis son menton de deux doigts pour redresser sa tête vers moi, la vision de sa peau baignée de larmes m'inquiète plus que je ne veux bien l'avouer.
— Qu'est-ce qui se passe ? soufflé-je.
— Je t'ai dit, c'est l'angoisse de la préparation et...
— Pas à moi, Imani.
Je les connais, ceux-là. Ces pleurs-là. Ils naissent de l'estomac. Des tripes. Ce n'est pas de l'anxiété mais de la cuisante douleur.
— C'est... C'est juste... Oh, mon Dieu, pardon..., panique-t-elle quand un nouveau sanglot l'étrangle.
Ses traits se tordent, elle prend une inspiration sifflante, les poings serrés, les yeux durement clos tandis que j'épouse ses joues noires de mes paumes.
— Jungkook..., gémit-elle, la voix aiguë.
Sa poitrine se lève et s'abaisse si vite qu'un instant, j'ai peur qu'elle suffoque. Elle secoue les mains face à elle, son regard se perd sur mon torse. Je la berce doucement pour la ramener à la réalité.
— Respire. Imani, resp...
— S'il te plaît.
Là, enfin, elle plante ses orbes dilatés dans les miens. Et je sais qu'au-delà de me voir, elle souhaite soudain que quelqu'un, que moi, je la voie. Ses lèvres tremblantes se stabilisent, ses pupilles vacillantes se glacent, son front plissé s'affaisse d'une stupeur que je ne comprends pas.
Ses doigts attrapent mes avant-bras tendus vers elle. Longtemps, elle jongle entre mes deux yeux, longtemps et lentement, jusqu'à ce que sa bouche ne s'entrouvre de nouveau et qu'elle ne murmure, suppliante à souhait :
— Dis-moi que ça va... Aller...
Je fronce les sourcils. Elle hoquette.
— Imani...
— S'il te plaît, j'ai si mal... J'ai...
Elle porte une main contre son cœur. Son attention se perd de nouveau entre nous, cette fois jusqu'à nos pieds.
— J'ai... Tellement... Mal..., chuchote-t-elle au ralenti, comme si son horloge avait été déréglée, freinée contre son gré.
Je m'empresse de la tirer contre moi, bouleversé à mon tour par ce que je viens de voir. De cet éclat, dans son regard, qui trahit paradoxalement une chose qui vient de s'éteindre. Quand la douleur est trop puissante, presque terrifiante, que le corps décide d'abandonner un bout de l'âme si ça lui permet de se sauver.
— Jungkook... Je veux... Être plus...
J'ai déjà vécu ça. Je connais ça. Le voir sur elle me convainc de la serrer plus fort encore contre moi.
— ...Je v-veux être plus que...
Je ne la vois plus, mais je peux deviner que par-dessus mon épaule contre laquelle je la serre, ses yeux voguent dans l'allée sans plus vraiment la distinguer. Ils ne font que rendre compte de sa présence. Constater le monde sans plus en faire partie, le temps d'un instant, d'une pause dans le temps.
— ...qu'une poupée.
Et alors survient le plus grand silence de l'univers.
Je me revois avec Jimin, la veille, à agir comme une supernova exactement comme Imani est en train de le faire. Ma main imite celle de mon ami hier, passant sur le dos et les bras de l'étoile qui vient d'exploser pour la réchauffer au sein du grand froid, du grand vide, dans lequel on plonge toujours après s'être ainsi laissé aller.
— Shh, ça va aller, Imani.
Elle pleure avec plus de calme. Non pas de retenue, parce qu'elle n'a plus rien à retenir pour le moment. Mais avec plus de fatigue. Je la pousse doucement pour de nouveau saisir ses pommettes.
— Tu sais que t'es belle même quand tu pleures ?
— Menteur, sourit-elle.
— Oui.
Elle s'immobilise, me lance un regard laser avant de me frapper le bras. Je mime une expression de douleur.
— Tu sais que t'es v-vraiment un con, renifle-t-elle.
— Redis ça et j'balance sur le groupe que t'as chialé.
— Mais qui m'a envoyé un soutien émotionnel pareil...
Je ris en essuyant ses larmes du pouce.
— Imani.
— Non. Je veux pas en parler. S'il te plaît.
Je soupire. C'est mieux quand c'est moi qui dis ça, je comprends pourquoi Jimin force, maintenant.
— Tu vas me laisser repartir sans aucune info croustillante là ?
— Jungkook.
— Ok je vois.
On se fixe l'un l'autre, puis elle se met à rire de nouveau en reculant. Elle ajuste ses tresses, son taille basse et sort un miroir de poche afin de constater les dégâts. Je recule en croisant les bras contre mon torse, dos au mur, pour l'observer se repoudrer devant moi.
— T'es au courant que je vais devoir mener l'enquête si tu me dis rien ?
— Je pensais que tu te fichais de tout ça.
— Ah ?
Silence. Elle prend une inspiration en rangeant son truc de torture bizarre pour les cils puis s'approche de moi. Je peux toujours voir ses yeux rieurs qui ne le sont plus. Depuis ce matin, quelque chose n'allait pas. J'avais vu juste.
— Je suis mauvaise langue, tu t'es bien intégré.
— On va vraiment parler de moi ? la questionné-je en penchant la tête sur le côté.
Elle continue de remettre ses fringues en place en souriant d'un air embarrassé. Je vois bien qu'elle regrette d'avoir craqué. Moi, je ne regrette pas. Plus j'en sais sur eux tous, mieux c'est, quand bien même Imani est celle que j'aurais aimé la moins voir souffrir ainsi.
— On devrait y aller. Il reste deux heures avant la petite fête de fin, on doit profiter des dernières conférences.
— Mmh mmh. Et là je dois faire comme s'il ne s'était rien passé ?
Elle clôt les paupières. Je me décolle de la paroi murale en fichant de nouveau mon sac sur mes épaules.
— J'ai compris.
— C'est ridicule de toute manière, je t'assure, souffle-t-elle.
— Ça avait pas l'air. Mais OK.
Elle me lance un regard reconnaissant qui m'empêche de justesse de lui forcer la main. Suite à cela, elle hoche la tête dans ma direction, me remercie, puis m'envoie un doux sourire avant de quitter notre petite cachette pour les couloirs bondés. Un soupir me quitte ; je n'aurais pas cru que ce week-end serait si chargé en émotions.
En tout cas, je ne suis visiblement pas le seul à avoir vécu une nuit qui m'a chamboulée.
— Jungkook, j'en profite.
On marche côte à côte avec lenteur. Je ne suis pas certain qu'on s'apprête à aller assister à une énième conférence ; elle tente de le masquer, mais Imani est toujours abattue et bouleversée. Et moi, j'en ai ma claque d'écouter des gens parler.
Alors, comme deux âmes dans la même perdition, parce que je ne sais pas ce qui lui arrive mais j'en ai ma petite idée, nous errons ensemble, découvrons la belle bâtisse de l'université de Daegu, jusqu'à déboucher sur un campus interne similaire à celui de l'UG.
En balayant du regard les étudiants qui se prélassent, un livre à la main pour certains, en pleine discussion animée pour d'autres, je prends conscience que l'université générale n'est pas une université à part. Elle ressemble à celle-ci. Et celle-ci me plaît. Ce qui ne me plaisait pas, en vérité, c'est d'avoir été refusé à l'université spécialisée.
— Tu devrais être plus sympa, tu sais... Avec Hoseok.
Je lève les yeux vers le ciel bleu, fermant l'un d'eux quand le soleil frappe ma rétine. On s'arrête, Imani joint ses mains manucurées contre son sac en bandoulière qui pend le long de son épaule fragile.
— Dis-moi pourquoi, lancé-je, sans lâcher les étoiles invisibles, cachées derrière le bleu éclatant, que j'ai hâte de retrouver cette nuit.
Je la sens m'observer en coin.
— Dis-moi pourquoi vous êtes tous aussi bizarres.
Silence. Puis soupir, mais pas de lassitude.
— Si je te dis que c'est parce que nous non plus, nous ne comprenons rien, est-ce que tu me crois ?
Je baisse lentement la tête vers elle. Les rayons chauds sèchent les dernières larmes qui demeurent sur sa peau.
— Tu viens de te trahir seule.
— Comment ça ?
— T'as l'air vachement renseignée sur mes pensées. Comment tu sais de quoi je parle, là, hein ?
— Jungkook, je t'en prie. On sait tous que tu parles de Taehyung.
Silence. J'ai le cœur qui bat vite, si vite, mais je l'ignore.
— Qu'est-ce qu'il a ? osé-je, avec une certaine appréhension dans l'articulation de cette question, probablement de peur d'enfin recevoir une réponse.
Mais la plus décevante de toutes me parvient : Imani hausse les épaules, elle-même contrariée.
— Je te le jure, Jungkook... Je n'en sais rien. J'aimerais tant comprendre, moi aussi.
— Hoseok sait quelque chose ?
— Je ne crois pas. C'est... On...
— Vous n'en parlez pas.
— Mmh.
— De qui vous avez peur, hein ?
Silence. Je me poste devant elle quand je la devine sur le point de se dérober à mon regard.
— De Namjoon ? murmuré-je sombrement.
Elle déglutit, clôt les paupières.
— S'il te plaît, Jungkook.
— S'il te plaît quoi ? Tu crois que je sais pas que c'est pour lui que tu viens de chialer ?
Elle écarquille les yeux.
— Et Daniel ? Qu'est-ce qu'il a à voir là-dedans ?
— Mais j'en sais rien, je te dis ! s'emporte-t-elle.
— Tu sais bien quelque chose. Putain Imani, tu sais forcément quelque chose.
Elle se passe une main sur le front. Je m'en veux de lui faire subir ça maintenant, mais je n'en peux plus. De leurs mensonges, des non-dits, de la tension ambiante qui semble détruire Taehyung. Il faut que ça cesse.
Je vais faire en sorte que ça cesse.
— Taehyung et Namjoon...
Je reporte mon attention sur elle, surpris qu'elle reprenne la parole.
— Ils... Ils sont très, très proches. Si quelqu'un sait quelque chose, c'est Namjoon.
Et là, je comprends.
— Mais Namjoon ne te dit rien, soufflé-je, abasourdi.
Elle reste muette, ce qui confirme mes craintes.
Je le savais. Depuis le début, je savais qu'il isolait Taehyung. Putain de merde. Je l'ai jamais senti.
— Je vais te le demander une seule fois, Imani.
Je pose une main sur son épaule pour appuyer le sérieux de ma demande. Elle se pince les lèvres, stressée.
— Est-ce que tu crois que Namjoon est un danger pour Taehyung ?
Elle les entrouvre maintenant. Son regard coule derrière moi, puis glisse sur mon torse, comme perdu, comme inquiet aussi, surtout, jusqu'à ce qu'elle renoue le contact visuel avec, soudainement, une drôle de sincérité :
— Non.
Et je me serais attendu à tout, tout sauf à tant de solidité, de lucidité, dans cette réponse dont elle ne semble absolument pas douter.
**
Le soleil a basculé du jaune à l'oranger. Dehors, tandis que les étudiants quittent l'université pour le grand campus qui juxtapose le bâtiment usé, s'extasiant comme si l'été approchait et que l'année était terminée malgré la saison qui s'achève et prévoit les périodes hivernales prochaines, je prends une grande inspiration avant de la relâcher.
Imani a fini par me quitter pour écouter une ultime conférence qui ne m'a personnellement pas intéressé. J'ai achevé la journée à écrire mon mémoire sur un des bancs en pierre blanche que j'ai croisé, au beau milieu d'un couloir peu bondé. C'est Jimin qui m'a réveillé en m'envoyant un message pour me demander où j'étais. Me voilà à suivre la foule vers cet espèce de clap de fin bien organisé : une vingtaine de stands en tout genre (présentation des filières, nourriture, boissons...) ont été fièrement dressés dans l'herbe verte. Il y a même des guirlandes décoratives qui lient les stands entre eux, créant une sorte d'allée colorée.
— On dirait un marché de Noël mais à la fin de l'été ! commente Jimin, des étoiles plein les yeux.
— Merci le réchauffement climatique, interviens-je.
— Ah, t'es là. Ça a été cet après-midi ?
Je coule un regard vers Imani, au loin, qui échange avec Hoseok. Elle a l'air d'aller mieux.
— Ouais. Et toi ?
— J'ai été à quatre conférences en tout, attends je vais t'expliquer chacune d'entre elles.
Je hoche la tête sans l'écouter tandis qu'il détaille trait pour trait tout ce qu'il a appris dans la journée. On commence doucement à se diriger vers les différents stands, ou devrais-je plutôt dire que Jimin me tire par le putain de poignet partout où il veut aller. Près d'un stand style Harry Potter en moins bien, une nana nous sourit de toutes ses dents, les mains sur les hanches.
— Ah, des étudiants de l'UG !
— On a l'air tant que ça de pas venir de l'US ? lancé-je.
Elle perd son sourire. Jimin serre mon poignet.
— Il... Il plaisante ! Oui, on vient de l'UG, enchanté !
Elle concentre toute son attention sur lui quand elle comprend qu'il est le plus aimable de nous deux, et de ce fait, j'arrive à reculer quelque peu.
— Je suis la présidente de la section lettres ! Si par hasard tu es en licence...
— Je suis en master, précise-t-il.
— Oh, eh bien si un jour tu es intéressé pour faire un second master et que les lettres t'intéressent, laisse-moi te montrer le programme de nos masterants et les associations qu'on a mis en place !
— Nous aussi on a une association ! Enfin, c'est plutôt un atelier d'écriture qui fait fonction événementiel et...
Je les laisse à leur rencontre. Trop pris par cette nouvelle conversation, Jimin ne remarque même pas que je m'absente. Je slalome entre les stands sans trop d'intérêt : art, politique, encore des lettres...
...Où sont-elles ?
Les sciences, je veux dire - où sont-elles ? Même ici, elles se cachent d'une drôle de manière.
— C'est tout au fond, Jungkook.
Je fais vivement volte-face à l'entente de cette voix.
— Monsieur Pyon ? Bonsoir !
— Bonsoir.
Je m'approche de lui, tout sourire.
— Il fait chaud, n'est-ce pas ?
— Oui, c'est étonnant pour un début novembre.
— Le temps n'a plus de sens, répond-il en laissant son attention glisser sur un stand à ses côtés.
J'acquiesce. Comme si ses mots intensifiaient mes bouffées de chaleur, je décide d'ôter mon pull à capuche pour ne me retrouver qu'en t-shirt. Il m'envoie un sourire tandis que j'enfile de nouveau mon sac à dos.
— As-tu apprécié ce week-end ?
— Plus qu'apprécié. J'ai... C'était vraiment enrichissant.
Je déglutis.
Enrichissant.
— Je suis d'accord. Je ne t'ai pas vu à ma conférence aujourd'hui.
— Oh, c'est vrai... Une amie a eu un souci et...
Je me tais un instant face à son regard fixe. Il semble attendre une justification plus valable.
Merde.
— A vrai dire ça m'est un peu sorti de la tête, je suis désolé.
— Ne t'en fais pas. Il me semble qu'elle a été filmée, tu pourras la retrouver sur le site de l'US d'ici quelques jours.
— Ah ! Tant mieux, m'empressé-je.
Quand le silence dure, je décide de m'incliner bas, la main serrée sur mon sweat qui pend au-dessus du sol.
— Je suis heureux de vous avoir vu, monsieur.
— Tout le plaisir est pour moi.
Je me redresse. Ses lèvres s'étirent une dernière fois dans la bienveillance que je retrouve chez monsieur Daniel - et je me questionne de nouveau sur leur altercation. Il ne part pas, il attend que ce soit moi qui le fasse. Lorsque je le quitte après un dernier coup d'œil, je soupire, heureux de prendre conscience de cet espèce de lien que je tisse avec ce professeur que j'admire tant.
Je suis ses conseils et m'éloigne des premiers stands pour rejoindre le bout. J'en perçois un, énorme - bienvenue au pôle sciences. Sorte d'arche en carton qui fait deux fois ma taille par-dessous lequel je passe. L'ambiance ici est plus calme, presque intimiste. Les étudiants parlent plus bas, discutent plus longuement. Je m'essuie le front du dos de la main, replaçant mes cheveux en me postant devant le cursus du master sciences théoriques. Il n'y a personne ici, ce n'est qu'un stand consultatif.
Des brochures, des affiches et des programmes sont disposés ça et là sur la table. Je pouffe discrètement face à l'image de la célèbre photo d'Einstein qui tire la langue à la caméra.
Un détail attire mon attention : en consultation, un livre de Stephen Hawking. Je le saisis d'une main pour le feuilleter distraitement. Je ne l'ai jamais lu : il fait partie des ouvrages que j'ai jetés quand Yoongi a gravé dans mon crâne l'idée que j'étais incapable de comprendre le travail des scientifiques et des astronomes que j'adorais. Un frisson meurt avant de naître, car je clos les paupières pour ne pas le laisser m'envahir.
Et puis, soudain, un parfum.
Une sensation.
Un meilleur, bien meilleur frisson.
Je me fige, les yeux rivés sur une page précise dans le livre sans même réussir à la lire. C'est comme si mon dos était tout à coup épris d'une chaleur plus agréable que celle des derniers soleils de l'été qui vient de s'achever. Mes pupilles se redressent pour se darder sur une affiche qui vulgarise la relativité. La peau de ma nuque me pique intensément, j'ai l'impression que mes pieds s'enfoncent dans un sol mouvant.
Il s'est arrêté derrière moi. Comme s'il s'assurait au préalable que je prenne conscience de sa présence avant qu'il ne la manifeste en se positionnant à mes côtés.
Je ne le regarde pas. Je reporte mon attention sur le livre que je ne lis toujours pas, les traits tirés de surprise que je m'efforce de cacher tandis que, du coin de l'œil, je peux voir sa veste chocolat dans le creux de son coude dégagé par sa manche proprement retroussée.
— Le rayonnement de Hawking, lit-il.
Je lutte puissamment pour ne pas clore de nouveau les paupières à l'entente de cette voix que j'ai cherché tout au long de la journée.
Mon cœur tremble tandis que mes doigts essaient de ne pas le faire sur les pages que j'écarte encore.
— Je ne l'ai jamais lu, avoué-je dans un souffle.
— Jamais ?
Je hoche la tête si lentement que je me demande s'il l'a aperçu. Je n'arrive pas à le regarder, je ne sais pas si lui le fait. Finalement, je ferme le livre pour caresser doucement sa couverture et son titre, Une brève histoire du temps.
— Je voulais en parler durant ma conférence, se confie-t-il.
— Du rayonnement de Hawking... ?
Enfin, je lève la tête vers lui. Il ne me rend pas mon œillade. Ma gorge s'assèche tandis que lui observe calmement les affiches qui me fascinaient quelques secondes plus tôt. L'orangé du soleil sur sa peau miel me rappelle notre première rencontre, dans cette salle de classe, ce soir-là où je suis arrivé en retard.
— Oui.
— Pourquoi ne pas l'avoir fait ? m'enquis-je sans hausser la voix.
Je remarque à quel point mon langage change en sa présence.
— Parce que quelqu'un m'a demandé d'expliquer la théorie des trous de ver, j'ai dû faire un choix.
Mon cœur s'arrête, je crois, car ses mots doublés de son visage qui me fait enfin face me liquéfient sur place. Les rayons s'empressent de gorger sa rétine, le noisette au coeur du blanc trouve mon noir si simple, si basique, et pourtant, il ne le quitte soudain plus.
Il n'a pas parlé du rayonnement de Hawking parce que j'ai levé la main. Il a changé son programme pour moi. Pour moi.
— Je suis désolé, sunbae.
— Ne le sois pas.
Il m'expose de nouveau son profil au nez droit. Mon regard tombe sur son arc de cupidon comme façonné dans la pierre, sur cette mâchoire dure, ce cou plus délicat que ma langue a parcouru sans vergogne, sans honte.
Sans aucune putain de honte.
— Tu as disparu, aujourd'hui, renchéris-je.
Il cille sans hâte.
— J'étais là.
Silence. Je le crois. Parce que je n'ai que conscience d'à quel point il est capable de se fondre dans la masse. Il est aussi brillant qu'il sait s'éteindre dans la foule.
— Je t'ai vu me chercher, ajoute-t-il.
Je le quitte immédiatement des yeux pour les clore. Je ne méritais pas cette attaque en traître. Il l'a fait exprès, pas vrai ? Ma langue se fait emprisonner par mes dents.
— C'est quoi, le rayonnement de Hawking ?
Et je le vois. L'ombre de son sourire, parce qu'il est évident que j'ignore sa remarque précédente. Je le vois autant qu'il me comprime l'estomac. Sa main libre plonge délicatement dans sa poche, ne laissant plus que son poignet décoré d'une fine montre en cuir à mes yeux voraces.
— C'est une théorie qui avance la possible évaporation d'un trou noir.
Je fronce les sourcils, surpris.
— Les trous noirs peuvent s'évaporer... ?
Alors... Alors ils le peuvent ? Est-ce qu'ils peuvent...
— En théorie, oui. Mais ça n'est pas prouvé. Hawking a théorisé qu'un trou noir puisse rayonner, c'est-à-dire émettre près de lui-même des particules positives et négatives.
Sans cesser de fixer le stand, il dirige son visage vers moi, et cette inclinaison si délicate, presque irréfléchie, me pousse à faire de même pour me rapprocher de lui.
— Le vide est composé de cela. Des particules positives et négatives. Elles s'annulent constamment, donc elles créent le vide. Mais près d'un trou noir, certaines d'entre elles sont séparées de leur pair, avalées par la masse du trou noir. S'il y a suffisamment de particules négatives qui entrent dans celui-ci, alors il sera en manque d'énergie positive pour les annuler, et les négatives vont l'absorber petit à petit jusqu'à le faire s'évaporer.
J'entends les pulsations effrénées de mon cœur battre jusque dans mes tempes. Les longs cils de Taehyung projettent une ombre sur le haut de ses pommettes dessinées, je le constate en encaissant son explication si naturellement formée. La maîtrise qu'il a de ces sujets au point de si facilement les simplifier me donne envie de discuter avec lui pendant des heures, non, des nuits entières.
Je ne peux m'empêcher de le détailler de nouveau. Lui et son beau langage. Lui et son intelligence. Lui et sa jolie, si jolie nuque.
— Sunbae.
Ses cheveux volent doucement au vent. Il reporte enfin son attention sur ma figure qui ne cherchait que cela, de l'attention, son attention, et le soleil qui tombe ne l'aveugle plus. Ses orbes noisettes redeviennent chocolat. Son expression est indéchiffrable.
— Ton sac me semble lourd.
Silence.
— Il l'est.
— Alors donne-le moi, soufflé-je.
Là, seulement là, il regarde ma main qui pend le long de mon flan, remonte vers mon poignet, longe mon avant-bras dans un ralenti si étouffant que j'en ai du mal à respirer, jusqu'à achever sa course sur mon biceps où il s'attarde plus longtemps.
Je finis par tendre ma paume vers la sienne, et lorsqu'il lève doucement le coude pour déposer les lanières de son sac de voyage en son creux, une satisfaction immense me saisit des pieds à la tête. Je le serre puissamment sans m'en apercevoir, mais ce sont ses yeux, qui glissent une dernière fois sur mon muscle maintenant tendu, qui me le font savoir.
Il incline à peine la nuque pour me remercier, et comme j'aimerais qu'il ne le fasse pas. J'aime trop ça, j'aime bien trop ça pour qu'il me remercie.
La masse du contenant qui lui appartient pèse entre mes doigts comme le mien sur mon dos, et j'aime bien trop que lui n'ait rien à porter en retour. Je me rends compte d'à quel point j'aime que ce simple détail ne soit pas équitable.
Une lueur traverse ses orbes assombris par le manque de soleil soudain. Le ciel se grise. Cet éclair, dans son regard, qui me laisse entendre qu'il a très bien compris ce à quoi je pense. Et là encore, aucune honte ne m'habite.
— Quand nous rentrerons à Séoul, il se fera tard.
J'acquiesce.
— Ma voiture est garée sur le parking de l'université. J'ai prévu de raccompagner Imani chez elle. Si tu as besoin qu'on te ramène, fais-le moi savoir.
Je mets du temps à répondre, beaucoup de temps, parce que ma respiration manque de s'emballer, parce que je dois réfléchir avant de parler auquel cas je risque de paraître complètement fou. Complètement taré.
— J'y penserai. Merci, sunbae.
Et ce n'est qu'après avoir entendu mes derniers mots qu'il se détourne sans plus de cérémonie, parce que c'est ce qu'il attendait.
Que moi, en revanche, je lui sois audiblement poli.
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Heheeee pas mal de choses dans ce chapitre ;)
Les amis, nous entamons la seconde partie (et dernière) de l'histoire, étant donné que Poupée se terminera normalement au 40ème chapitre (45 max). Tout va enfin se démêler petit à petit, je suis certaine que quelques uns parmi vous vont commencer à comprendre ce qui se trame... :p
Et parce qu'on me pose souvent la question : oui, étant donné le premier baiser passé etc, le slow burn commence à arriver à terme. Je ne dis pas que tout va être tout parfait, il y a encore pas mal de péripéties, mais le Taekook va être de plus en plus présent à partir de maintenant ♥
Nous nous approchons des 200K... Hiiiiiii !!!
Je vous souhaite une bonne soirée les amis, prenez grand soin de vous, et à bientôt pour la suite ! (laissez-moi rendre mon mémoire avant please (15 juin) et je reviens pour le chapitre 19!) ♥
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