XI.1 ― Le bal des menteurs
✧・゚: *✧・゚:* Chapitre XI *:・゚✧*:・゚✧
Le bal des menteurs - Partie 1
Les lumières de la ville s'effaçaient à l'horizon, étoiles multicolores et hors de portée en cette douce nuit. Le véhicule urbain avait depuis longtemps passé le portail sous haute surveillance qui marquait l'entrée du domaine impérial, après de longues minutes à être inspecté sous tous les angles, un traitement similaire réservé à ses occupants. Les soldats de la Légion rattachée au Bureau de Sécurité Intérieure se distinguaient de leurs confrères participant à la Guerre de Conquête par l'éclat argenté de leurs armures.
Saxa n'avait su distinguer le visage caché derrière le casque intégral de celui qui avait contrôlé son identité. Avoir l'impression de se trouver face à un humain de chair et d'os l'aurait peut-être aidé à ne pas frissonner lorsqu'il avait pris sa main pour scanner ses empreintes digitales et vérifier sa présence sur la liste des invités. Ainsi accoutrés, les soldats ressemblaient plus à des robots sans âme, grands antagonistes des pièces de théâtre d'anticipation qui faisaient trembler les plus jeunes et donnaient raison aux plus réfractaires face à l'évolution des technologies.
Cinq ans après son premier contact avec les membres du BSI, lorsque ces derniers étaient venus sonner à la porte de la maison familiale, Saxa les trouvait toujours aussi terrifiants. L'aurige espérait qu'ils se feraient discrets dans la salle de réception, bien d'autres soucis se bousculaient dans son esprit pour que son passé vienne s'y ajouter.
Assise dans le sens de la marche, Saxa se redressa un peu sur le siège doublé de cuir crème qu'elle occupait. Son mouvement fit voleter le tissu fin de son élégante palla maintenue en place par le diadème argentée qui scintillait entre les mèches de son chignon. L'étole gracieuse avait été découpée dans un tissu similaire à celui dont sa robe était composée. Un dégradé de teintes froides, allant du noir d'encre au violet le plus profond, se déclinait le long de sa jupe aux nombreux replis et de ses manches amples. Même sous la lueur tamisée de l'intérieur du véhicule, les minuscules pierres brillantes cousues sur l'étoffe donnaient l'impression que des milliers d'étoiles enveloppaient le corps de Saxa.
Lorsqu'on l'avait apportée dans sa chambre d'hôtel, Saxa s'était immédiatement demandé combien avait coûté la confection d'une telle merveille. La question était née de sa curiosité teintée d'une pointe d'amertume. Tant d'argent qui aurait pu aller dans la conception du monoplace ou l'amélioration des infrastructures de Venator.
Saxa avait gardé ces réflexions pour elle car Thusnelda lui avait bien fait comprendre l'importance de la réception de ce soir. Installée à la diagonale de la pilote, la responsable de communication s'était également parée de sa tenue la plus élégante, tout de vert et de bleu marine, qui n'arrivait cependant pas à la cheville de l'habit de lumière dans de Saxa. Il ne fallait pas qu'elle fasse de l'ombre aux vraies vedettes de la soirée.
— Je le répète encore une fois pour être certaine que c'est bien assimilé, commença Thusnelda. Il est important que cette soirée se déroule sans accroc et qu'on se fasse remarquer dans le bon sens du terme.
— Dommage qu'on ait jamais été très doués pour ça, railla Senmout.
La femme blonde porta sur son voisin de droite un regard assassin auquel il répondit par un haussement d'épaules. Saxa devinait que Senmout préfèrerait être ailleurs mais en tant que directeur de l'équipe, sa présence était requise. Comme Thusnelda, le Nilien portait une tenue qui lui donnait un air élégant sans pour autant se noyer dans le faste. Les couleurs ocre et terre cuite de son ensemble de costume s'accordaient avec ses bijoux et son maquillage dorés. Les pierres turquoise de son bracelet apportaient une touche de contraste plutôt plaisant à l'œil.
— C'est trop important pour qu'on se permette de plaisanter, réprimanda Thusnelda. Tout le gratin impérial, ou presque, sera présent. Cette réception est notre seule chance d'attirer l'attention d'une gens noble et d'obtenir un accord de parrainage.
Mieux que d'être financé par une entreprise florissante, s'offrir les faveurs des grandes gentes rapportait argent et notoriété — donc potentiellement plus de sponsors. Entre auriges, ils aimaient bien appeler cette pratique « sponsoring de luxe » et Saxa comprenait pourquoi. Les nobles impériaux offraient souvent des sommes plus importantes et donnaient accès à un réseau étendu de partenaires. Encore fallait-il se faire remarquer.
Bien sûr, il y avait derrière cela d'obscures manœuvres politiques qui échappaient à Saxa et ses collègues. Après tout, les auriges et ceux qui les entouraient n'étaient que du divertissement pour ceux qui se trouvaient au sommet de l'Imperium. Des soldats de plomb qui s'affrontaient sur une piste de métal. Des jouets que l'on habillait comme des dieux pour ravir leur goût des belles choses.
Saxa se sentait mal à l'aise vis-à-vis de tout ça mais cela faisait autant partie du sport que le reste. Elle s'était promis de prendre sur elle et de respecter les consignes de Thusnelda comme elle le faisait lors des interviews. Cela ne durerait qu'une seule soirée de toute manière.
Leur véhicule privé s'arrêta devant l'escaliers d'entrée du palais impérial. Le bâtiment s'étendait sur des ares entiers et exultait de toute la richesse de la famille régnant depuis des siècles sur l'Imperium. La montée des marches était le seul moment de la soirée ouvert aux médias et des drones virevoltaient autour des invités qui défilaient dans leurs plus beaux atours. Le tour de l'équipe Venator vint plus tôt que Saxa n'aurait voulu.
Un sourire plus ou moins convaincant sur ses lèvres peintes de mauve, elle sortit après Senmout et Thusnelda, Avad sur ses talons. Le coéquipier de Saxa arborait une tenue traditionnelle de Gundeshapur, une longue tunique saphir brodée d'or et un drapé de soie rouge aux franges légères. Le jeune homme avait passé de longues heures entre les mains d'un coiffeur qui avait transformé ses cheveux raides et rebelles en de magnifiques boucles qui lui donnaient un air vraiment différent. Et tout comme Saxa, son cou, ses poignets, ses doigts et oreilles portaient de somptueux bijoux loués pour l'occasion.
La jeune femme prit une longue inspiration, la tête tournée vers le grand escalier. Senmout et Thusnelda atteignaient presque le bas des marches alors que leurs pilotes n'avaient toujours pas bougé. Peu certaine de ce que cela donnerait, Saxa se tourna vers son équipier et lui tendit son bras, l'invitant ainsi à le saisir s'il le voulait bien. Avad darda sur elle ses yeux de nuit, et la dévisagea comme si elle venait de se transformer en affreuse gorgone prête à le dévorer. Saxa soupira :
— La cohésion d'équipe, tout ça, tout ça. Juste pour les journalistes.
Saxa vit l'hésitation dans son regard mais il saisit finalement son bras dans un geste un peu maladroit qui lui allait bien. Sa coéquipière lui répondit d'un sourire et ensemble ils s'avancèrent vers l'escalier. Les objectifs des drones pointés vers eux, ils montèrent les marches avec leurs plus beaux sourires. Saxa n'eut même pas à se forcer. Drapée dans sa tenue digne d'une princesse, elle se sentait plus puissante que jamais. C'était dans ces moments-là qu'elle réalisait le pouvoir des apparences.
De l'autre côté des caméras, quelqu'un devait sûrement commenter les ensembles luxueux portés par les pilotes, la moindre de leur attitude mais ce n'était que quelques instants, juste le temps d'arriver en haut où attendaient leurs deux autres collègues. Dès que le groupe eut passé le duo de gardes à l'entrée et pénétré dans le couloir du palais, Avad relâcha le bras de Saxa.
Un domestique en tunique blanche les accueillit dans le hall d'entrée et les guida jusqu'à la salle de réception. Les couloirs qu'ils traversèrent étaient ornés de la bannière impériale. L'aigle majestueux de la gens Junius, représenté de profil, semblait les suivre de son œil unique et omniscient.
De grandes colonnes soutenaient le plafond de la salle de réception déjà bien remplie lorsque les membres de Venator y entrèrent. Une centaine de convives, tous plus élégants les uns que les autres, s'étaient dispersés dans l'immense pièce. Leurs rires et discussions enjoués résonnaient, et effaçaient presque la performance des musiciens qui jouaient près du mur Sud où se bousculaient quelques amateurs de danse. Le champagne coulait à flot dans les fontaines ouvragées, décorées de sculptures dédiées à Bacchus, le dieu de la fête.
Saxa aurait aimé passer la soirée aux côtés de ses collègues mais Thusnelda ordonna au groupe de se séparer pour couvrir plus de terrain. Plus ils engageaient de conversations, plus ils auraient de chance de toucher un potentiel noble intéressé.
— Mais n'oubliez pas de prendre du temps pour passer une bonne soirée aussi, intervint Senmout. Enfin, si vous prenez du plaisir au milieu de toutes ces paillettes.
— Tu n'aimes pas goûter à ce genre de luxe de temps en temps ? lui demanda Saxa pour reporter un peu plus le moment de la séparation.
Son directeur afficha un sourire railleur.
— Mon père est sénateur, je suis techniquement dans mon élément.
Cette révélation surprit Saxa qui n'imaginait pas Senmout et Amunet issus de ce genre de milieu. Les enfants Sed-Saqqarah n'avaient rien de politiciens, ils ne vivaient que pour la course, pour Venator. Les places au Sénat se transmettaient souvent de génération en génération dans une même famille, Saxa se demanda comment le paternel du Siwan avait pris les choix de carrière de ses enfants.
— Allez, file, la congédia Senmout d'une tape sur l'épaule. Et n'oublie pas de les flatter, ils adorent ça.
Saxa aurait aimé que cela soit aussi facile, mais après son inclusion dans moins d'une dizaine de conversations, elle se sentait déjà lasse et épuisée. Sans surprise, les nobles employaient un ton très infantilisant à son égard, son statut de nouvelle venue sur la grille en rajoutant une couche. Elle obtint quelques encouragements vides et fades, des compliments sur sa robe stellaire et des moqueries qui se voulaient subtiles sans l'être réellement vis-à-vis de sa légitimité à occuper le second siège de Venator. Etonnamment, ce qui la blessait le plus restait le rabaissement continuel de son écurie.
— Je me demande toujours comment Venator a fait pour ne pas finir en bas du classement l'année dernière, moqua une magnifique femme qui portait une toge lilas.
A son cou, son collier d'or sombre dessinait la forme d'une tête de lion. Le bijou marquait son appartenance à la gens Augustus — Thusnelda leur avait fait apprendre les noms des familles les plus influentes. La seconde lignée la plus importante de l'empire, dont était issue la mère du prince héritier, comprenait nombres de branches secondaires et cousins éloignés sans réel poids politique. Saxa ignorait si cela valait le coup d'insister auprès de cette matrone, même si obtenir un parrainage de la gens Augustus serait vraiment une chance unique pour Venator.
— En tout cas, ma chère, reprit cette dernière, j'espère que votre saison ne se terminera pas sur un combat de rue avec votre coéquipier. Même si, en toute honnêteté, c'était très plaisant à regarder l'année dernière.
La matrone n'était pas la première à évoquer ce sujet tabou au sein de l'écurie ce soir. Saxa s'en souvenait très bien tant cela avait fait parler les médias. Avad Enkiddu et Kaeso Aedinius qui en viennent aux mains après une collision en piste, de quoi alimenter les spectateurs avides de drames. Saxa n'avait toujours pas osé demander à son partenaire ce qui avait causé un tel débordement.
De ce qu'elle connaissait d'Avad, il faisait preuve de calme et de retenue en toute circonstance. Même si on l'avait frappé en premier, elle l'imaginait mal répliquer avec véhémence. Cela cachait sûrement quelque chose de plus profond qui resterait un mystère tant qu'Avad refuserait de s'ouvrir à elle, et elle ne le pousserait pas à le faire — même si, elle voulait savoir!
Les apparences, encore et toujours, prévalaient même sur les capacités de pilotage.
— C'est sur les marches du podium que j'envisage de terminer ma saison, répondit Saxa.
Son audace provoqua un rire chez la riche femme qui trinqua sa flute de champagne avec celle de l'aurige avant de s'éloigner. Saxa laissa échapper un soupir las. Dans sa main, la coupe remplie au tiers d'alcool pétillant avait rencontré plusieurs de ses sœurs sans jamais mener à des résultats concluants. Senmout serait-il déçu si elle ne ramenait aucune offre de partenariat ?
Pendant ces ruminations silencieuses, Saxa un plateau de hors-d'œuvre entra dans le champ de vision de Saxa. Elle en piocha un au passage. Le feuilleté à la crème d'olive entre ses doigts, Saxa se mit à déambuler au hasard dans la salle de réception. Aucune trace de Senmout, ni même de Thusnelda, noyés dans la masse de convives. Seuls les auriges se reconnaissaient par leurs tenues extravagantes composées pour attirer l'attention, et une fois de plus, l'un d'entre eux se détachait de tout le reste.
La pilote mâchait la dernière bouchée de son amuse-bouche quand elle passa près d'un attroupement plus fourni que les autres. Au milieu du cercle formé, Iulius Donatus rayonnait, littéralement. De l'or sur tout le corps, de la broche aux motifs solaires qui retenait sa toge à la branche de laurier factice accrochée entre ses mèches châtain. De la poudre scintillante entourait ses yeux charmeurs, iris qui mêlaient toutes les nuances de vert et de bleu. Un océan de couleurs froides dans lequel il était difficile de ne pas se noyer.
Le rire du Champion éclata, exclamation musicale que s'empressèrent d'imiter ses locuteurs. Saxa se rendit compte qu'elle le fixait depuis un peu trop longtemps et avala une gorgée de son champagne en regardant ailleurs, si cela pouvait préserver les apparences. Si ses pilotes concurrents peinaient à s'offrir la considération des nobles, ces mêmes aristocrates se battaient pour voir le nom associé à celui de Donatus. Il était le prodige, l'enfant doré, l'incarnation du courage et de la force promus par la société impériale.
Malheureusement pour ces patriciens, Plus Ultra volait déjà sous la bannière des gentes Dexia et Augustus qui leur rapportait à elles seules plus que la moitié des autres petits nobles réunis.
L'entourage de Donatus se dissipa petit à petit jusqu'à ce qu'il se retrouve enfin isolé et à la portée de Saxa. Elle le vit clore ses paupières quelques instants et s'adonner au même harassement fugace que la jeune femme quelques minutes plus tôt. Peut-être était-ce enfin le moment ? Saxa n'aurait jamais l'air aussi sûre d'elle que ce soir-là, parée de morceaux d'étoiles. Juste quelques mots avant le début des hostilités, un encouragement rapide, un sourire d'approbation, elle prendrait tout ce qui pourrait lui faire croire que le Champion en titre la reconnaissait.
Elle termina le reste de sa coupe d'une traite, la posa sur une table couverte de nourriture et s'avança vers Donatus qui s'en venait justement dans sa direction. Elle sourit sans forcer, ajusta vite sa palla, sa couronne et prépara quelques mots. Lorsqu'elle se trouva tout près de lui, elle s'étonna de la pensée furtive qui vint se frayer un chemin dans son esprit :
Par Minerve, je ne l'imaginais pas si grand...
Cela n'éteignit pas sa confiance et alors qu'elle se trouvait à distance suffisante pour qu'il l'entende par-dessus la musique et les discussions voisines, elle ouvrit la bouche, prête à le saluer...
Les mots restèrent bloqués au fond de sa gorge lorsqu'il passa sans même lui accorder un regard. Donatus traça sa route jusqu'à un couple de patriciennes en robes jaunes avec lesquelles il engagea tout de suite une conversation animée.
Saxa interrompit son mouvement, les bras le long du corps. Il était passé sans se rendre compte de sa présence, de son existence. Elle voulait lui laisser le bénéfice du doute, croire qu'il ne l'avait simplement pas vue — il mesurait une tête de plus qu'elle, peut-être que s'il avait baissé les yeux, il l'aurait remarquée. Mais après les paroles d'Eneas, après les moqueries des nobles, Saxa ne pouvait s'empêcher de penser qu'elle était tout simplement insignifiante.
Une débutante de plus qui se ferait écraser par les grands noms.
— Excuse-le, lui dit une voix grave, Atroposia nous a demandé de nous rendre disponibles pour tous les patriciens qui aimeraient engager la conversation. Et évidemment, Iulius est très demandé.
Saxa leva la tête vers celui qui s'adressait à elle.
Sethi Akh-Amset se remarquait souvent moins que son illustre coéquipier et pourtant, lui aussi avait connu la gloire lors de ses jeunes années. Ce soir-là, il avait délaissé le rouge de Plus Ultra pour revêtir une belle tunique blanche dont les échancrures sur les côtés laissaient apparaître les motifs encrés sur sa peau noire. Le collier pectoral, composé d'une myriade de perles multicolores, attaché autour de son cou méritait sa place dans une galerie d'exposition. Ces mêmes joyaux irisés se retrouvaient entre le lacis de ses tresses réunies en chignon. Avec son maquillage élégant et sa barbe bien taillée, il ressemblait aux figures peintes des anciens rois tombés lors de la conquête du couloir du Nil.
Une comparaison des plus appropriées pour ce double Champion surnommé le « prince d'Aswan ». Akh-Amset méritait autant d'admiration que son jeune équipier.
Il n'avait juste pas la même aisance que Donatus face aux caméras.
— Je ne sais pas à quelle réaction je m'attendais à vrai dire, marmonna timidement Saxa.
L'expression neutre sur le visage d'Akh-Amset n'aidait pas la jeune femme à deviner ses pensées à son égard. Saxa sentit ses joues chauffer sous l'embarras. Elle se demanda si elle n'aurait pas préféré qu'Avad soit là pour l'empêcher de se ridiculiser comme l'autre jour.
— Tu es Saxa Caecilia, c'est ça ?
L'aurige d'Aswan s'approcha d'elle, une coupe de champagne dans chaque main. Les pierreries de ses bracelets s'entrechoquaient à chacun de ses mouvements.
— Oui, répondit la pilote. Je vole pour Venator.
Akh-Amset hocha la tête.
— Leto Peleos et toi m'avez tout l'air d'être des éléments prometteurs, et pourtant, vous commencez avec les moins bonnes équipes du plateau. Je suivrai ta carrière et la sienne avec intérêt.
Saxa replaça une mèche rebelle derrière son oreille dans un geste nerveux. Quelque chose lui disait qu'Akh-Amset n'était pas du genre à dire ce genre de chose dans le simple but de lui remonter le moral.
— Merci, monsieur Akh-Amset...
— Je t'en prie, appelle moi Sethi, je ne suis pas vieux à ce point.
Ils partagèrent un sourire rieur avant que Sethi lui souhaite bon courage pour la fin de la soirée. Il s'éloigna pour rejoindre un homme blond, que Saxa supposa être son compagnon, et lui tendit l'une de ses coupes de pétillant.
De son côté, Saxa suivit son conseil. Elle rassembla son courage, la tête haute aussi assurée qu'avant la tombée des feux et repartit affronter la noblesse en manque d'attention.
✶
Le vin sucré glissa contre la langue de Senmout. Produit dans les plus beaux vignobles de Kephallonia, le rosé présentait une saveur unique et raffinée, un nectar à la hauteur des patriciens qui s'en abreuvaient. Ce soir, alors qu'il avait l'occasion de se mêler à eux, le Siwan n'allait pas se priver de partager leurs mets les plus délicieux.
Enfants, Senmout et Amunet n'avaient jamais aimé ce genre de réceptions. Leur politicien de père les avait emmenés aussi souvent que possible, fier de présenter sa progéniture à ses confrères du Sénat. Les yeux dorés de Meneptah brillaient de fierté à l'époque où il pensait faire de ses enfants ses dignes successeurs, défenseurs des intérêts de Siwa auprès du gouvernement impérial. Cet éclat s'était vite tari lorsque Senmout avait révélé préférer les données chiffrées aux discours démagogues et qu'Amunet s'était montrée plus épanouie en aidant les autres à se dépasser, plutôt qu'en vivant dans le mensonge.
Chaque début de saison qui le ramenait au palais impérial rappelait à Senmout cette période qui paraissait si lointaine. Cette réception lui rappelait aussi à quel point il était peu doué pour l'hypocrisie, ni même pour se vendre lui et son équipe.
Le jeune homme évoquait tantôt les progrès réalisés sur le plan technique. Si cela ne donnait aucun résultat, il tentait de mettre en valeur les compétences de ses pilotes, la constance d'Avad et le potentiel de Saxa. Ce qui fonctionnait avec l'un, se montrait vain avec l'autre et il était difficile de prévoir la réaction de ces gens tout bonnement déconnectés de la réalité.
Après tout, la série alpha n'était que divertissement pour eux. Ils ignoraient la machinerie complexe derrière ce qui leur permettait de frissonner toutes les semaines, les dangers réels auxquels s'exposaient les auriges. Les patriciens voyaient cela comme du spectacle, rien de plus.
Senmout aurait aimé leur offrir du spectacle ce soir, et faute d'y être parvenu, il espérait que ses pilotes avaient eu plus de succès que lui. Venator ne cracherait sur aucun financement supplémentaire, bien que cela paraissait mal parti.
Senmout salua un homme âgé engoncé dans une toge sénatoriale et se décala vers la piste de danse, un peu délaissée à ce moment de la soirée. La deuxième partie du buffet venait d'être servie et attirait les plus gourmands. Pour sa part, Senmout avait déjà mangé plus que de raison.
Malgré la profusion de soieries et pierreries, les auriges parvenaient à se démarquer, tous plus ou moins parés des vêtements les plus remarquables. Les créateurs de mode à l'origine de telles pièces avaient dû s'en donner à cœur joie pour saisir l'opportunité de montrer leur travail aux plus nobles.
— Senmout !
Le Nilien se tourna dans la direction de cette voix qu'il identifia comme celle d'Aelia. La gérante de Mons Sylvius rayonnait dans sa robe parme, assortie aux fleurs épinglées dans ses cheveux. En une foulée, elle arriva devant son collègue, ses lèvres maquillées d'un rouge profond.
— Mes félicitations, je ne pensais pas que tu resterais aussi longtemps, badina-t-elle.
— Tu n'as pas parié avec Nerva, cette fois ?
Aelia leva les yeux au ciel.
— J'aurais aimé, mais je n'ai pas réussi à lui parler. Il prend cette soirée beaucoup trop au sérieux ! Toi aussi, d'ailleurs...
— Facile à dire quand on est déjà assuré du soutien du patriarche Regilis, répliqua Senmout.
— J'avoue que cet apport financier a été un bon argument lors de la négociation du contrat de sa fille, marmonna Aelia.
Ce fut au tour du Siwan de regarder vers le haut avec un soupir exaspéré. Au moins, Octavia Regilia se distinguait des autres pilotes payants par ses bons résultats et sa personnalité solaire. On en oublierait presque sa noble ascendance.
— Ah, le voilà enfin. Par ici, Cato ! s'égosilla Aelia.
Senmout contint au mieux son envie de s'enfuir à l'entente de ce nom. Il l'aurait fait sans la peur de passer pour un gamin devant le gratin impérial.
Cato se frayait un chemin entre les fêtards, un verre rempli d'écarlate dans chaque main. Les lumières tamisées de la salle de bal soulignaient sa stature robuste identique à celles des statues héroïques exposées près des colonnes. Le pilote arborait les mêmes pièces d'armure aux ornements complexes que les soldats de pierre, taillées dans un matériau translucide, étincelant comme le pur des cristaux de glace. Pas de casque pour lui, mais une tiare imitant des coulées gelées était posée sur ses mèches brunes. Seul le vert-de-gris de ses yeux apportait une touche de couleur à sa silhouette, morceaux de printemps au milieu de l'hiver.
Senmout remercia la faible luminosité qui dissimulait ses rougeurs. Il termina de les effacer derrière le cristal de son vert et but le fond de vin d'une traite. A l'instant où Cato aperçut le Nilien, son expression se ferma, le faux sourire jusqu'alors servi aux nobles envolé. Aelia ne capta rien de l'échange embarrassé entre les deux hommes et remercia son aurige qui lui tendit l'un des verres dans un geste robotique.
Les minutes suivantes furent tout aussi gênantes. Aelia se lança dans une session de colportage concernant des gens dont Senmout n'avait jamais entendu parler pour certains. Le jeune homme ne l'écoutait qu'à moitié cela dit, hochant la tête ici et là pour faire croire à sa collègue qu'il suivait. Cato adopta un comportement similaire, bien qu'il fasse mieux semblant que le Siwan. Facile de deviner lequel des deux avait subi le plus d'entraînement pour parler aux médias.
Même si Senmout évitait de croiser le regard de Cato, il sentait le poids de ses yeux braqués sur lui à chaque fois qu'Aelia lui tournait le dos. Cette deuxième rencontre fortuite en quelques jours paraissait presque comme un coup du destin malicieux, une occasion tendue pour recoller les morceaux ou, au contraire, terminer de briser le peu qu'il restait entre eux.
Aelia héla le prénom de Nerva après avoir reconnu son ami dans la foule. Elle s'éloigna sans forme de salut, à la rencontre de ce public qu'elle imaginait sans doute plus réceptif que le précédent. Le silence qui suivit son départ eut l'effet d'une averse gelée mais au moins ils se retrouvaient seuls, plus ou moins. Personne ne faisait vraiment attention à eux pour le moment. Alors Senmout prit son courage à deux mains et essaya de donner des tonalités naturelles à sa réplique :
— Elle me fatigue parfois...
Le Siwan s'attendait à ce que Cato se ferme encore plus mais il enchaîna :
— Elle me fatigue souvent. Mais c'est une excellente cheffe d'équipe. Elle n'a peut-être pas l'autorité d'Atroposia Dexia, ni l'esprit de Nerva, mais elle sait s'entourer des bonnes personnes. Et elle se préoccupe du bien-être d'Octavia et du mien.
— Tu devrais être plus honnête avec elle, alors.
L'évocation de leur rapide discussion d'il y a quinze jours était tout ce que Senmout avait pour le moment. Il ne voulait pas remonter plus loin, il estimait qu'il n'en possédait pas les droits.
Cato semblait soudain pris d'une profonde fascination pour le contenu de son verre.
— Je n'ai pas envie de lui donner plus de problèmes à gérer... Merci de ne lui avoir rien dit, au fait.
— C'est rien. Je n'ai pas à me mêler à vos histoires de toute façon, j'ai déjà bien assez de boulot dans ma propre équipe.
Senmout s'en voulut un peu d'avoir refermé la porte aussi rapidement. Il craignait aussi les oreilles indiscrètes et les rumeurs qui se répandaient vite dans le secteur fermé de la série alpha. Senmout avait déjà eu sa dose de scandales pour remplir toute une vie avec l'affaire Avad/Kaeso.
Sur leur estrade, les musiciens entonnèrent une mélodie entraînante qui relança un peu l'intérêt des convives pour la piste de danse. Au loin, Senmout vit Aelia inviter Nerva à l'accompagner, ce dernier n'acceptant qu'après de nombreuses sollicitations. Le jeune homme reconnut l'air mené par la flûtiste qui soufflait à pleins poumons dans son aulos. Un rythme de cithare et le claquement des crotales accompagnaient ses accords.
Même sans la partie chantée qui l'accompagnait traditionnellement, l'Épitaphe de Séikilos charmait toujours son public, même les moins mélomanes. Tout l'Imperium connaissait cette chanson lyrique, hymne à l'amour de l'art poétique et de la danse. Cela évoquait tout autre chose à Senmout qui ne comprenait pas très bien la langue hellénique de la chanson d'origine — ironique pour un ancien étudiant de l'université de Dianalexra. L'harmonie des cordes, vents et percussions étaient chargées de souvenirs agréables, d'avant que sa vie ne devienne une succession de situations compliquées.
— Tu te souviens de la fête de clôture de notre cycle secondaire ?
Cato s'en souvenait lui aussi. Comment pourrait-il en être autrement ? Les deux adolescents qu'ils étaient à l'époque avaient passé la soirée la plus folle de leur vie qui s'était achevé sur une prestation maladroite de la danse associée à cette musique. Ils avaient beaucoup ri ce soir-là, mais c'était une autre époque, avant que leurs carrières respectives ne les entraînent sur des chemins différents.
Senmout était prêt à laisser la Dévoreuse se repaitre de son cœur si cela lui permettait d'y retourner, même un court instant.
Arrête. Pense au Championnat, à tes futures performances. C'est tout ce qui doit compter.
— Je me souviens, répondit laconiquement Senmout.
— Tu veux qu'on les rejoigne ?
Senmout se tourna vers lui de façon peut-être un peu brusque. Le regard de Cato braqué sur lui et sa main ouverte dans sa direction ne mentaient pas. Il était on ne peut plus sérieux.
Des dizaines d'excuses bancales lui vinrent — « tout le monde nous regarde », « on est plus censé être amis », « je ne mérite pas ta sympathie ». Senmout se rabattit sur celle qu'il supposa la plus à même de faire renoncer le pilote.
— Tu sais que je ne suis pas un très bon danseur, marmonna-t-il. J'ai oublié tous les pas.
Cato haussa un sourcil. Le trait de poudre argentée qui soulignait son regard scintillait tel un glacier au soleil.
— Alors, laisse-moi guider. Ça t'ennuie tant que ça de ne pas avoir le contrôle ?
Piqué au vif, le Siwan le fusilla du regard.
— Là n'est pas la question.
Ou peut-être un peu, mais la fierté de Senmout l'empêchait de le dire tout haut. Sentant que ses paroles ne convaincraient pas Cato, il déposa son verre vide sur le plateau d'un esclave qui passait et s'avança vers le groupe de danseurs. Le pilote le suivit et Senmout crut deviner de la satisfaction amusée dans la façon dont sa bouche se tordit.
Senmout s'arrêta au milieu de la foule, dans le coin le plus dense qu'il ait trouvé pour s'abriter des regards extérieurs. Si Aelia pouvait danser avec Nerva sans se soucier des conséquences, alors il pouvait le faire avec Cato. Cela ne signifiait rien du tout. Mieux valait éviter de se faire remarquer tout de même.
Cato se plaça face à lui et tendit sa main droite face au Nilien. Senmout laissa quelques secondes courir avant de poser sa paume contre la sienne. Sa peau dégageait une chaleur surprenante et presque réconfortante. Il en oublia presque le monde autour de lui et les regards plus ou moins discrets que leur accordaient les plus curieux. Il n'y avait plus que les ombres floues des autres couples dansants, le rythme de la musique et la présence familière de Cato.
— On reprend au prochain couplet, indiqua-t-il.
Senmout répondit d'un marmonnement incompréhensible et tous deux attendirent la fin du refrain, immobiles, le regard de chacun portés vers un point aléatoire de la pièce. Cato donna le signal au changement de tempo, alors que la flûte reprenait son solo.
— Deux pas à droite.
Senmout s'exécuta sans écarter sa main de celle de son partenaire. Il bougea au gré des notes de musique, à droite puis à gauche. Ses yeux fixaient ses pieds et ceux de Cato jusqu'à ce qu'il se sente à l'aise, en harmonie avec les mouvements du pilote et ceux des autres danseurs.
Cato lui murmurait les indications, si bas que seul Senmout pouvait l'entendre, une confidence partagée d'eux seuls. Bientôt vinrent s'ajouter des mouvements de bras et des rotations en mesure avec la musique qui accélérait à l'approche du premier refrain.
Senmout se laissa petit à petit emporter, les mêmes gestes répétés à intervalles réguliers avec plus ou moins de maladresse. Il complexait d'autant plus que face à lui, les mouvements de Cato glissaient avec tant de grâce qu'on pourrait le croire sous l'emprise divine de Terpsichore, la muse de la danse des croyances du Noyau Extérieur. La cape blanche qui complétait la toilette de l'aurige ondulait au gré de ses balancements, un voile de clarté léger et délicat.
Et toujours, leurs mains restaient l'une contre l'autre, à jamais liées par le fil invisible de la destinée. Cinq ans de silence l'avaient fragilisé mais il tenait toujours.
Il tiendrait toujours.
La mélodie continuait à s'emballer, plus vite, toujours plus vite. Senmout aurait pu s'y perdre sans Cato. Et pour une fois, la perte de contrôle ne le dérangeait pas. Les musiciens entamèrent la dernière partie du morceau, une cacophonie harmonieuse complexe et hors du temps.
Une note de cithare, le bras gauche en l'air, puis une redescente langoureuse et ondulante, une vague sensuelle et gracile.
Le claquement des crotales, un tour complet yeux dans les yeux, l'or dans le vert grisâtre, le désert dans la glace.
Dernière note d'aulos, un pas en avant l'un vers l'autre, la main de Senmout sur l'épaule de Cato, celle de Cato dans le creux de sa hanche. Leurs visages si proches que le Nilien pouvait distinguer le contour si fin des lentilles de contact du pilote.
Respirations erratiques, joues rougies par l'effort.
Senmout ne s'était pas rendu compte jusqu'à maintenant de toute l'énergie qu'il avait dépensée et la fatigue le frappa en même temps que le tonnerre d'applaudissements adressé au groupe de musique.
Senmout savait que c'était le moment, que la bulle enchantée devait être éclatée et pourtant... A défaut d'être un succès pour l'équipe, il refusait que cette soirée ne s'achève sur les mêmes non-dits. Il refusait de perdre Cato une seconde fois.
— Hum... Écoute, Cato, je...
— Wow, Cato ! C'était génial !
Tout se brisa en un instant. Les deux hommes exécutèrent un pas en arrière, le contact brisé à jamais. Senmout ne s'attendait pas à cette étrange sensation de vide que cela provoqua. Entre les danseurs qui terminaient de se disperser, Aelia battait des mains pour féliciter la performance de son pilote, imitée par un Nerva plus mesuré à ses côtés.
L'expression froide de Cato revint aussi vite qu'un vaisseau à pleine vitesse, la bouche retroussée par l'embarras.
— Tu m'avais caché tes talents de danseur, continua sa directrice. Un autre à rajouter sur la liste ! Dommage que les caméras soient interdites ici, ça aurait bien plu à tes fans, ça.
Heureusement qu'il n'y avait pas de caméras, oui ! pensa Senmout. Il espérait que Thusnelda n'avait rien vu de tout cela. La noblesse et les membres des autres équipes se chargeraient bien vite de diffuser l'information, et il préférait attendre au moins le lendemain avant de se faire jeter. Un directeur d'écurie qui danse avec le pilote leader d'une équipe adverse, on aura tout vu !
Cela ne signifie rien. Rien du tout. Concentre-toi, Senmout !
Les gazouillis d'Aelia et les marmonnements gênés de Cato furent interrompus par une voix aux tonalités mécaniques qui résonna dans l'ensemble de la salle de réception.
— Sa Majesté Domitius Secundus Junius, imperator divin et souverain de l'univers connu, et son Altesse le princeps héritier Nero Junius-Augustus !
Enfin !
Toutes les têtes se tournèrent vers l'entrée principale de la grande salle. Des gardes prétoriens en armure bronze se déployèrent dans une parfaite synchronisation pour offrir le passage au souverain et maître de tous les êtres respirant l'air des planètes de l'Imperium.
Une toge d'un rouge éclatant accentuait l'allure victorieuse de l'Imperator Domitius, tout comme la couronne de lauriers argentée posée fièrement sur une épaisseur de cheveux blancs. Fabriquée en ikhôrium pur, elle se transmettait à chaque nouvelle génération régnante de la dynastie Junius. D'autres bijoux d'or et de pierres précieuses complétaient l'image de puissance de celui qui se faisait appeler Imperator, l'Invictus, un dieu incarné dans ce plan de l'existence destiné à unir tous les peuples de l'univers. L'âge ne lui octroyait pas un air plus faible, mais plus sage.
Derrière lui, son petit-fils Nero n'obtint qu'un quart de l'attention portée à son auguste aïeul. L'arrivée de Domitius fût accueillie par l'ensemble des convives qui s'inclinèrent en cœur. Au moment de se redresser, un vieil homme percuta Senmout, imitée par une autre femme qui le suivit en direction du souverain. Sa silhouette disparut derrière la masse informe de fidèles désireux d'échanger avec le maître de l'univers.
Le Nilien hésita à les suivre. Être parrainé par l'homme le plus puissant de l'Imperium serait le plus grand des honneurs, une sorte de consécration. Depuis la retraite de Veturius, Domitius n'avait pas désigné de favori parmi les auriges qui avaient défilé sur la grille. Se pouvait-il que cette nouvelle saison marque un tournant ?
Senmout soupira en silence. Même si c'était le cas, cela lui paraissait évident que son choix se porterait sur les équipes de tête et leurs pilotes au palmarès rutilant de gloire. Il entendit la voix d'Amunet dans sa tête qui le pressait de tenter sa chance...
Concentré, il devait rester concentré. Cela commençait par arrêter de se faire remarquer. Le mieux à faire pour sauver son image et celle de son équipe était de faire profil bas pour le reste de la soirée.
Soirée qui ne faisait que commencer.
─── ⋆⋅☆⋅⋆ ───
Même en coupant le chapitre, les deux parties sont hyper longues aaaah
J'adore ce chapitre pourtant, notamment cette première partie où on continue à rencontrer du monde (Sethi le GOAT~) et à développer la relation entre Cato et Senmout hihi
J'espère que ça vous a plu, même si on s'écarte un peu du contexte habituel des courses. N'hésitez pas à me laisser votre avis !
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