RETOUR A WHYTEFOOL
Les semaines passèrent. Poirot avait retrouvé un certain équilibre. Tout était redevenu une routine jusqu'à ce que le téléphone ramène le détective et le capitaine plusieurs semaines dans le passé.
Miss Lemon arriva dans le bureau de Poirot, affolée.
« Un appel de Mlle Alice Carrow pour vous M. Poirot. »
A ces mots, Poirot devint livide, mal à l'aise.
« Un appel, Miss Lemon ? Prenez-le, je vous prie.
- Mais elle désire vous parler personnellement, M. Poirot. Un accident est arrivé à Lady Bentley. »
Hastings et Poirot se regardèrent et le détective se ressaisit.
« Très bien, je le prends. »
Et Poirot décrocha le combiné.
« Mlle Carrow, ici M. Poirot. Que se passe-t-il ? »
La voix du détective était sèche, distante. Il était redevenu la froide machine à penser, mais cela ne dura qu'un temps, Poirot se leva, bouleversé.
« Nous arrivons, mademoiselle. Appelez la police. Ne vous inquiétez pas, je vous promets que nous arrivons le plus vite possible. »
Puis le détective raccrocha, le visage blême.
« Poirot, que se passe-t-il ?, demanda à son tour le capitaine, inquiet. Lady Bentley est souffrante ?
- Elle est morte, Hastings. Elle a été assassinée. Empoisonnée. Nous partons immédiatement. »
Il fallut tout de même boucler des valises puis compter le temps du voyage, plusieurs heures, pour rejoindre Whytefool et retrouver le manoir Bentley. Dans le train, Poirot refusa de prendre un repas, il resta assis, concentré, sur son siège tandis que le capitaine rejoignait le wagon-restaurant. Arrivé au manoir Bentley, l'heure du déjeuner était passée depuis longtemps. Alice Carrow accourut à leur arrivée. Des longs cheveux bouclés, châtain clair, des yeux verts lumineux, mais le sourire était triste et le regard éteint. Elle se précipita sur les deux hommes qui descendaient de la voiture qu'ils venaient de louer à la gare et elle saisit les mains de Hercule Poirot avec soulagement.
« Ho M. Poirot ! Quel bonheur de vous revoir !
- Mademoiselle ! Que s'est-il passé ?
- Ma tante est... Elle est... morte... »
Et Mlle Carrow se mit à sangloter, elle serra les mains du détective avant de se jeter dans ses bras en pleurant. Poirot était mal à l'aise puis, machinalement, il serra la jeune femme contre lui. Il adopta une voix douce pour lui parler, il lui parla en français sans s'en rendre compte. Mlle Carrow eut un petit rire désolé et leva son visage en larmes de la veste du détective.
« Je n'ai pas compris ce que vous avez dit, M. Poirot.
- Je vous ai dit de vous calmer, mademoiselle, répondit Poirot, gêné. Et de me faire confiance.
- Je me sens mieux à vos côtés. »
Elle sourit doucement au détective et Poirot lui rendit son sourire. Puis elle s'écarta enfin et s'excusa d'avoir mouillé sa veste.
« Ce n'est rien. Menez-nous à la chambre de Lady Bentley. Et si vous le pouvez, racontez-nous ce qu'il s'est passé. »
Poirot semblait tout à coup redevenu lui-même. Hastings en fut estomaqué. Il était redevenu l'homme gentil, affable qu'il connaissait depuis toujours. Poirot prit d'autorité la main de Mlle Carrow et la posa sur son bras pour pénétrer dans le manoir et lui redonner du courage. La jeune femme se mit à raconter toute l'affaire, sa tête se posant instinctivement sur l'épaule du détective, comme elle le faisait des semaines auparavant lors de leurs promenades autour du lac.
« Ma tante s'est plainte de maux de tête après le petit-déjeuner puis elle s'est étendue. J'ai fait appel au médecin une heure plus tard lorsque ma tante s'est mise à vomir. Lorsque le docteur Pritchard est arrivé, Lady Bentley était morte. »
Pour éviter le retour des larmes, Poirot glissa sa main sur celle de la jeune femme et la serra. Il la regardait avec un sourire bienveillant qui lui permit de se ressaisir. Elle reprit :
« J'étais affolée. Je ne savais pas quoi faire, le docteur m'a conseillée de m'étendre pour me calmer, mais j'ai préféré vous téléphoner immédiatement. Je savais que je pouvais avoir confiance en vous.
- Et vous avez bien fait. Poirot est là pour vous aider. Et trouver la vérité. »
Ils se sourirent encore, si proches l'un de l'autre.
« La police est là, elle interroge les domestiques.
- Nous verrons ça plus tard. Ne vous inquiétez pas de ça. Menez-nous à votre tante. »
Le détective soutenait Mlle Carrow pour monter l'escalier. Elle était devenue si faible et perdue face à cette tragédie. Le capitaine fut étonné de faire le rapprochement entre cette scène et ce qui s'était passé auparavant. Maintenant, c'était Poirot qui guidait Mlle Alice Carrow et l'aidait à marcher.
La jeune femme entraîna le détective et son compagnon jusqu'à la chambre de Lady Bentley. En chemin, ils percutèrent l'imposant sergent Tops. Ce dernier eut l'air mécontent de rencontrer le célèbre détective belge venu piétiner ses plate-bandes.
« M. Hercule Poirot, je présume ? Vous venez finir le travail que vous avez bâclé la dernière fois ?
- Quel travail, monsieur ?, demanda humblement le détective.
- Votre suicide, M. Poirot ! Nous avons eu nos informations. »
Le visage du petit Belge devint livide le regard s'endurcit et Poirot répondit sèchement :
« Je vous remercie de votre attention à mon égard, monsieur. Ne vous inquiétez pas pour moi.
- Ho ! Je ne m'inquiète pas pour vous, M. Poirot, mais que vaut la parole d'un dépressif suicidaire dans une cour de justice ? Bonne journée. »
Et le sergent partit d'un bon pas, content d'avoir mouché ce petit détective belge prétentieux.
« Quel butor !, s'exclama Hastings.
- Un vrai malotru, ajouta Alice Carrow.
- Un homme plein de bon sens, asséna Poirot. Ma... petite erreur m'a fait perdre toute crédibilité. Il va falloir trouver des preuves solides pour que la police accepte de croire Poirot.
- Mais si vous avez raison ?
- Mademoiselle, Poirot est un dépressif suicidaire. Que vaut la parole d'un tel homme face à celle d'une sergent sérieux et appliqué ? Certainement bien noté par sa hiérarchie. Il a raison.
- Mais vous êtes Hercule Poirot ! »
La jeune femme parlait avec un ton exalté qui fit rougir le petit détective.
« Qui n'a plus toute sa tête. N'importe quel avocat cassera mon témoignage avec un flacon de somnifères. Allons voir votre tante ! »
Mlle Carrow obéit et ils entrèrent dans la chambre de Lady Bentley. La malheureuse était étendue sur son lit, le docteur Pritchard à ses côtés. Lorsqu'il les aperçut, il s'approcha avec étonnement et soulagement.
« M. Poirot, capitaine Hastings ! Ainsi cette chère Mlle Alice vous a appelé à l'aide. Je suis content de vous voir.
- Vous êtes trop gentil. Le sergent Tops ne semble pas de votre avis. »
Un sourire un peu triste, Poirot tentait un brin d'humour.
« Il ne croit pas à l'empoisonnement. Il penche pour une cause naturelle.
- Qu'est-ce qui vous pousse à penser à un empoisonnement ? »
Le docteur prit une forte aspiration avant de soupirer longuement.
« Je ne sais pas si vous êtes au courant mais Lady Bentley recevait des lettres de menace depuis quelques mois. »
Mlle Carrow ouvrit de grands yeux étonnés, elle allait ouvrir la bouche mais se tut sur un geste de Poirot.
« Oui, nous sommes au courant. Lady Bentley nous en a parlé. »
Le docteur fut surpris de la réponse du capitaine Hastings.
« Bien, donc cette chère Lady m'en a parlé aussi il y a quelques jours. Je sais enfin ce qui a dégradé autant sa santé ces dernières semaines.
- Un nouveau bulletin de la paroisse est arrivé ?
- Oui, M. Poirot. Il y a deux jours. Pourquoi ?
- Pourquoi ne pas nous avoir contacté ?, demanda Hastings, attristé.
- Je l'ignore, capitaine. Peut-être ne voulait-elle pas vous déranger, M. Poirot.
- Je lui en avais fait le serment. Je l'aurai aidée et protégée.
- Elle devait penser à votre santé et ne pas vouloir éveiller de mauvais souvenirs. Votre tentative... »
Le docteur Pritchard avait parlé gentiment, sans aucune intention de juger mais Poirot se fâcha.
« Je regrette assez cette stupidité. Si le meurtre de Lady Bentley a pu avoir lieu à cause de ça, je me sens responsable de la mort de cette malheureuse ! »
Dans son emportement, Poirot avait lâché la main de Mlle Carrow, elle saisit doucement le bras du petit Belge qui se calma et s'excusa de son comportement.
Puis il alla voir la morte. Les yeux avaient été fermés, mais le visage reflétait encore une souffrance atroce. Poirot sortit un gant de sa poche qu'il enfila prestement. Il ouvrit la bouche de Lady Bentley, il observa aussi les yeux, révulsés, avant de saisir une main pour en examiner les doigts, les ongles. Ceci fait, il se mit à déambuler dans la pièce. Près de la porte, il ramassa quelque chose qu'il glissa dans sa poche. Enfin, il retira le gant et le plia bien proprement avant de le ranger.
« Bien ! Vos conclusions, docteur Pritchard ?
- Vue la rapidité de la mort et les souffrances endurées, je penche pour un alcaloïde très puissant, peut-être du cyanure ou de la strychnine. Ou un de leurs dérivés. L'autopsie nous le dira. »
Un petit soupir désolé rappela aux hommes de loi la présence inopportune de la jeune femme. Poirot lui serra à nouveau le bras. Apaisant.
« C'est vous qui allez opérer l'autopsie ?
- Figurez-vous que le sergent Tops ne jure que par son médecin personnel. C'est le docteur Howell qui va s'en charger. Ce soir.
- Bien, nous serons sûrs ce soir.
- L'heure de la mort est déjà connue : après le petit-déjeuner, dit étourdiment Hastings, puisque Lady Bentley est morte devant Mlle Carrow. Ho, pardon mademoiselle, reprit le capitaine. »
La jeune femme s'était remise à pleurer. Poirot fusilla Hastings du regard et poussa Mlle Carrow à aller s'étendre dans sa chambre. Une fois, l'infirmière disparue, Pritchard prit la parole pour entrer dans le vif du sujet :
« Je ne voulais pas en parler devant Mlle Carrow mais cette histoire d'empoisonnement doit être réglée au plus vite. Dans son intérêt. Je suis vraiment soulagé que vous soyez là, pour elle.
- Mais pourquoi ?, demanda Hastings, naïvement.
- Mais pour le testament de Lady Bentley, bien sûr, répondit Poirot. C'est Mlle Alice Carrow qui hérite de tout ?
- Oui. Et je suis bien placé pour le savoir. J'ai été témoin du testament. Les domestiques reçoivent tous de petits legs, j'hérite également de cinq cent livres.
- Diable !, s'étonna Hastings.
- Je suis le médecin personnel de Lady Bentley depuis des années, reprit sèchement le docteur. Depuis la mort de Lord Bentley en fait. Sinon, tout revient à la nièce de Lady Bentley, mademoiselle Alice Carrow.
- Pas d'autres héritiers potentiels ?
- Non, M. Poirot.
- De quand date ce testament ?
- Un an. Depuis que Mlle Alice a emménagé chez sa tante et a abandonné son poste d'infirmière à l'hôpital de Richmond.
- Cui Bono ? Toujours la même question et ce depuis des siècles !
- Oui, M. Poirot, sourit le docteur. Et je crains que le sergent Tops ne cherche pas plus loin que le mobile. »
Le docteur Pritchard salua les deux hommes et quitta le manoir.
« Cui Bono ?
- A qui profite le crime ? C'est du latin.
- Merci Poirot, j'avais saisi. Mais vous croyez que Mlle Carrow a pu... »
Le visage du détective se ferma et une sourde douleur se vit dans ses yeux.
« Je veux voir la dernière lettre de menaces et le bulletin de la paroisse. Nous devons nous préparer à contrer le sergent Tops. Je vous ai dit que ma parole n'aura aucune valeur pour lui, il lui faut du concret. »
Il ne fallut que quelques minutes pour découvrir le bulletin de la paroisse. Il traitait de la dernière foire agricole de la saison. Novembre était le mois durant lequel la campagne s'endormait pour un long hiver.
« J'aimerai savoir comment est livré le bulletin... Hastings, pourriez-vous rencontrer le révérend de la paroisse ?
- Et vous ?
- Je vais me colleter avec le sergent Tops. Je veux voir le dernier billet et savoir où il en est. Il faut aussi que j'interroge les domestiques. J'ai besoin de son aval pour mener cette enquête. A tout à l'heure Hastings !
- Bien Poirot ! »
Le capitaine disparut à l'instant en direction du presbytère. Whytefool était un petit village, trouver le révérend ne devait pas poser de problème.
Poirot prit son courage à deux mains et chercha le sergent Tops. Ce dernier était en train de se charger des domestiques. Il y avait cinq personnes au service de Lady Bentley. Un majordome, un jardinier qui faisait office de cocher, une cuisinière et deux bonnes. Ils étaient tous rassemblés dans le salon et écoutaient le pensum du sergent Tops. Lorsque le détective se présenta, le sergent prit un air pincé, comme si un importun était arrivé.
« Mais voici notre célèbre Hercule Poirot. Je vous laisse, la place est chaude. »
Le sergent allait sortir mais Poirot le retint par le bras. Ce qui eut le don d'agacer le policier.
« Veuillez me pardonner, monsieur, mais j'aurai besoin de vous parler.
- Je ne tiens pas à vous aider, monsieur le détective. D'ailleurs à quel titre êtes-vous présent ?
- C'est la défunte qui m'a engagé et...
- Bien entendu ! Une morte peut difficilement dire non.
- Et Mlle Carrow m'a appelé à l'aide.
- Mlle Carrow ? Elle ferait mieux de se chercher un avocat digne de ce nom. Elle est la seule suspecte en lice.
- Vous acceptez la thèse de l'empoisonnement du docteur Pritchard ? »
Le sergent Tops eut l'air ennuyé d'avoir parlé trop vite. D'un geste, il attira Poirot dans un coin.
« Je ne vous aime pas M. Poirot car je n'aime pas les détectives privés qui viennent se coller dans les pattes de la police. Mais je vous connais de réputation et je serais stupide de ne pas vous faire confiance.
- Votre confiance m'honore, sergent Tops, dit le détective belge en s'inclinant.
- Mes hommes ont découvert un flacon de poison, de l'arsenic, dans les affaires de Mlle Carrow. De plus, je ne sais pas si vous le savez mais pour le testament...
- Mlle Carrow hérite de tout, » finit Poirot en souriant.
Le sergent Tops s'arrêta, surpris, puis reprit sèchement :
« Le docteur Pritchard a la langue bien pendue. Bref, le poison et le mobile me suffisent. Il ne me manque que les aveux. Je les obtiendrais au poste de police.
- Je suppose que si je vous demandais d'attendre les résultats de ma propre enquête, vous y verriez un inconvénient ?
- Oui, j'y verrais un inconvénient, répondit le sergent, un mauvais sourire aux lèvres.
- Bien. Je n'ai plus qu'une demande avant de vous libérer, sergent Tops. »
Le sergent eut un regard ennuyé puis souffla bruyamment.
« Puis-je voir la dernière lettre de menaces ? »
Pour la première fois, le policier parut ébranlé.
« La lettre de menaces ? Quelle lettre de menaces ?
- Celle que Lady Bentley a reçue il y a deux jours.
- Il y a deux jours ? Mais je ne suis pas au courant de cette histoire. Qui vous en a parlé ?
- Lady Bentley. C'est pour cette raison qu'elle m'a engagé. Elle craignait pour sa vie et ma santé m'a empêché de mener à bien mon enquête.
- Vous avez des preuves de ce que vous avancez ?, » demanda le sergent Tops, suspicieux.
Hercule Poirot sourit, cela se passait exactement comme il l'avait prédit. La parole de Poirot avait perdu toute valeur.
« Non, je n'ai aucune preuve, admit le détective.
- Avez-vous vu ces messages ?
- Non, fut forcé d'avouer Poirot. Mais le capitaine Hastings les a eus en main. Elle recevait des lettres de menaces depuis trois mois.
- Hé bien ! Trois mois ! Comme vous y allez ! Et Lady Bentley n'est pas venue m'en parler ? Difficile de croire en votre histoire.
- Mais cela change toute l'affaire, vous ne croyez pas ?
- Trouvez-moi ces fameuses lettres de menaces et l'affaire changera réellement pour moi. »
Le sergent Tops partit sans attendre. Poirot l'entendit annoncer à ces hommes qu'ils allaient arrêter mademoiselle Alice Carrow.
Le sang de Poirot se glaça mais il ne pouvait rien faire pour s'opposer à Tops. Rien pour le moment. Puis, respirant profondément, le petit Belge entra dans un salon où attendaient les domestiques et s'approcha d'eux avec un doux sourire.
« Mesdames, messieurs. Je vous remercie de votre patience. Je souhaiterais vous interroger, si vous n'y voyez pas d'inconvénient ? »
Les serviteurs de Lady Bentley se regardèrent les uns et les autres, puis le majordome le plus âgé, sans nul doute l'intendant du domaine, accepta au nom de tous. Pour le repos de leur maîtresse.
Poirot s'assit et commença les interrogatoires. Il fit sortir tous les domestiques du salon, sauf le majordome.
« M. Wilson, M. Poirot. Je suis au service de Lady Bentley depuis trente ans.
- Je me souviens de vous, M. Wilson, dit Poirot en souriant. Vous m'aviez été très utile pour défendre votre maître. »
Le vieux majordome baissa la tête, gêné, et reprit :
« Je croyais que vous ne m'aviez pas reconnu, M. Poirot. La dernière fois...
- La dernière fois ne compte pas, j'étais malade et ne me rendais compte de rien. Aujourd'hui, j'ai de nouveau besoin de vos services. »
Et comme une mécanique bien huilée, le vieux serviteur récita sa leçon, sensiblement la même que celle de Mlle Carrow. Le petit-déjeuner normal, les maux de tête, les vomissements, l'affolement de Mlle Alice, le docteur arrivé trop tard...puis l'empoisonnement découvert grâce au cyanure que venait de leur apprendre le sergent Tops.
« Mlle Carrow est très douce et bienveillante, M. Poirot. Vous avez du vous en rendre compte par vous-même. »
Cette petite phrase fut suivie d'un petit sourire que Poirot préféra ne pas relever.
« Elle hérite de tout, n'est-ce-pas M. Wilson ?
- Lady Bentley n'a jamais eu d'enfant, ce fut le drame de sa vie, M. Poirot. Il était convenu depuis longtemps avec Sir Bentley que la jeune Alice serait l'héritière du domaine.
- Et vous, qu'en pensez-vous ?
- Je ne sais pas, M. Poirot. Je vois mal Lady Bentley prendre sciemment du poison.
- Était-elle effrayée ? Se sentait-elle menacée ?
- Lady Bentley était égale à elle-même, M. Poirot. Elle n'aurait jamais montré ses sentiments devant les domestiques.
- Je vous remercie, M. Wilson.
- J'espère vous avoir été utile, M. Poirot. »
Le détective répondit par un sourire et un hochement de tête. Durant l'interrogatoire, Poirot avait entendu l'arrestation de Mlle Carrow. Cela s'était passé de manière très digne. Seul le bruit des pas dans l'escalier puis l'exclamation de détresse de la jeune femme l'en informèrent. Cela brisa le cœur de Poirot qui, en bon Anglais qu'il voulait être, ne montra aucune émotion.
Il poursuivit ses interrogatoires avec sérieux et application. Mais les autres témoignages furent identiques à celui du majordome. Madame s'était levée comme à son habitude, elle a pris son petit-déjeuner avec appétit puis s'est plainte de maux de tête. Plus tard, dans sa chambre où elle s'était étendue, Lady Bentley s'est mise à vomir. Mlle Carrow, rapidement affolée par les souffrances de sa tante, avait appelé le docteur Pritchard. Lorsque ce dernier arriva, la pauvre femme était morte depuis peu.
« Est-ce quelqu'un a pris le petit-déjeuner ce matin-là avec Lady Bentley ?
- Mlle Carrow, comme tous les matins, » répondit la bonne chargée du service.
Les deux femmes avaient donc mangé et bu ensemble, devant la bonne. C'était elle qui avait rempli les tasses et préparé les toasts beurrés. D'ailleurs, la malheureuse était angoissée d'avoir fait cela. Elle s'attendait à être arrêtée par le sergent Tops, car le poison ne pouvait qu'avoir été placé là.
« Lady Bentley n'a donc rien bu, ni mangé après le petit-déjeuner ?
- Pas à ma connaissance, M. Poirot.
- Lady Bentley a-t-elle mangé ou bu quelque chose de différent de Mlle Carrow ?
- Non, elles ont toutes deux mangé et bu la même chose. »
Mais à cette affirmation péremptoire, la cuisinière opposa un démenti lorsque le détective lui posa la même question.
« N'oubliez pas la confiture de roses, M. Poirot !
- La confiture de roses ?
- C'est le péché mignon de Madame, enfin c'était. Et Mlle Alice a eu de la chance car d'habitude elle en mange aussi. Cette fois, elle a du préférer la myrtille. Pour une fois.
- Certainement, » sourit Poirot avec amabilité.
La confiture de rose fut récupérée à la cuisine. Il ne suffit qu'à Poirot de la sentir pour déceler l'odeur caractéristique du poison. Cyanure ! Lady Bentley ne devait pas en avoir mangé beaucoup sinon la mort aurait été beaucoup plus rapide. Mais cela n'arrangeait pas le détective. Cela faisait beaucoup de coïncidences dans cette affaire : Mlle Alice Carrow possédait le flacon caché dans ses affaires et elle n'a pas pris, exceptionnellement, de confiture de rose ce jour-là. Cela pourrait être utilisé contre elle, même si cela lui avait sauvé la vie.
Hercule Poirot termina ses interrogatoires avec M. Crocker, le jardinier et homme à tout faire de la maison. C'était un vieil homme sauvage et solitaire qui ne vivait que pour son jardin...et madame... Pour lui, la mort de Lady Bentley était voulue, préméditée depuis longtemps et tous étaient des coupables potentiels.
« On est tous pareils, M. Poirot. On adore cracher sur les gens. Ce que je fais là, tout le monde l'aurait fait. Madame, tout le monde l'aimait mais son argent...
- Vous voulez dire que tout le monde avait un mobile pour tuer Lady Bentley. Quel est le vôtre ?
- Je suis joueur, M. Poirot, sourit le vieil homme sans aménité. Et perdant, la plupart du temps. Je parie sur les courses de chevaux, donc je dois payer mes dettes.
- Je comprends. Cet héritage tombe très bien pour vous.
- Oui, M. Poirot. Il tombe très bien. Et pour votre gouverne, j'ai du cyanure dans mon matériel de jardinage. Cela tue admirablement bien toutes les mauvaises bêtes.
- Vous manque-t-il un flacon ?
- Impossible de répondre, M. Poirot. Je ne tiens pas un inventaire de ce que je possède.
- Est-ce que tout le monde sait où se trouve le poison ? »
Crocker se pencha en avant avec une mine de conspirateur. Poirot n'apprécia pas l'odeur de l'haleine du vieil homme. Whisky ?
« Vous voulez savoir si Mlle Alice, sous ses airs de gentille fille, cache une âme d'empoisonneuse, hein M. Poirot ? Hé bien, oui, elle savait où se trouvait le poison. Je lui ai même montré comment le diluer dans de l'eau pour pouvoir le rendre plus facile à utiliser.
- Dieu ! Mais pourquoi avez-vous fait cela M. Crocker ?
- Elle voulait savoir comment on pouvait tuer les guêpes qui incommodaient madame dans la serre. Je ne hais pas les guêpes mais elles ont la manie de faire leur nid au pire endroit. Même dans une serre.
- Pourquoi ne pas vous être occupé vous-même de ces guêpes ? »
Un blanc dans la conversation, Crocker perdit son sourire et regarda Poirot droit dans les yeux.
« Parce qu'il n'y avait pas de guêpes dans la serre de Lady Bentley, M. Poirot. Je suis payé pour me charger de ce genre de choses. »
Le silence dura quelques minutes. Les petites cellules grises s'étaient mises à fonctionner. Crocker s'agita sur sa chaise puis se leva, agacé.
« Si vous n'avez plus besoin de moi, j'ai du travail !
- Attendez, M. Crocker ! Vous ne m'avez pas encore parlé des mobiles concernant les autres domestiques.
- Je ne vais pas vous mâcher le travail. Madame a dit que vous étiez un grand détective. Bonsoir. »
Poirot se retrouva seul dans le salon. Il ne se sentait pas bien. Il se leva pour attendre le retour de Hastings. La police était partie depuis longtemps. Il était temps pour eux de partir à leur tour. Et dans le hall d'entrée, le détective rencontra le capitaine en grande conversation avec une des bonnes, Laurence.
« Ha Poirot ! Le bulletin de la paroisse est posté tous les vendredis. C'est la femme du révérend Mitchell qui se charge de la distribution. Difficile de soupçonner une telle personne, non ? »
Poirot ne répondit pas. Son visage fermé, son regard dur surprirent le capitaine mais Hastings continua son discours.
« Mlle Laurence était en train de m'expliquer que Lady Bentley voulait voir le plus vite possible le bulletin de la paroisse. Donc il était déposé sur la console dans l'entrée et aussitôt transmis à madame. C'est cela mademoiselle ? »
La servante rougit en répondant :
« Oui M. Hastings.
- Restait-il seul longtemps sur la console ?, demanda Poirot.
- Cela dépendait de Mlle Alice, monsieur. C'est elle qui venait le chercher pour le donner à madame. Mlle Alice ne laissait pas longtemps attendre madame. Cinq ou dix minutes au maximum.
- Le bulletin arrive à quelle heure ?
- Trois heures, monsieur. Parfois quatre heures mais pas plus tard.
- Comment est-il emballé ?
- Il n'est pas emballé, monsieur, puisqu'il est livré dés sa parution par Mme Mitchell.
- Bien sûr. Merci mademoiselle. »
La jeune femme fit une rapide révérence avant de disparaître.
Poirot porta une main à son front et ferma un instant les yeux, en proie à un malaise.
« Poirot, vous vous sentez bien ? »
Le détective ne répondit pas mais vacilla sur ses pieds. Hastings saisit le petit homme par les épaules pour le stabiliser. Le capitaine était inquiet pour son ami. Poirot était devenu livide.
« Poirot, vous devriez vous asseoir. Vous n'avez rien mangé depuis ce matin. Il vous faut un repas consistant. Et du repos. »
Le détective se laissa entraîner par le capitaine jusqu'à une chaise dans le salon. Puis Hastings le regarda se remettre lentement de son vertige, les yeux toujours fermés, les mains toujours posées sur les bras solides du capitaine.
« Comment vous sentez-vous Poirot ? Je vais vous chercher un verre d'eau. »
Mais avant qu'il ait pu partir, Hastings fut retenu par les mains crispées du détective qui serrèrent ses bras.
« Elle a été arrêtée, Hastings !, dit Poirot en ouvrant les yeux.
- Mlle Carrow ? Mon Dieu ! Sur quelle preuve ?
- Le poison dans ses affaires et le testament ont suffi à convaincre le sergent Tops.
- Vous le saviez déjà, mon cher Poirot, » dit Hastings, compatissant.
Poirot se sentait très mal. Il ne supportait pas l'idée de devoir accuser à son tour Mlle Carrow mais le détective luttait contre l'homme en lui.
« La confiture de rose et le bulletin de la paroisse ne jouent pas non plus en sa faveur. Cela fait beaucoup de coïncidences...
- Mlle Carrow me semble quelqu'un de trop intelligent pour laisser des preuves aussi compromettantes dans ses affaires, vous ne croyez pas Poirot ? Et puis, tout le monde pouvait accéder au bulletin de la paroisse, vu qu'il n'était pas pas emballé. »
Le capitaine essayait de rattraper la situation mais Poirot semblait indifférent à tout.
« Peut-être croit-elle que je suis l'alibi parfait...
- Mais vous avez dit que votre parole ne valait plus rien après votre tentative de... »
Le mot « suicide » était encore tabou entre eux. Poirot ne releva pas et reprit simplement :
« Imaginez, mon cher Hastings, une jeune fille attendant avec impatience un héritage. Elle prépare l'assassinat de sa tante minutieusement avec des lettres de menaces puis elle passe à l'action lorsqu'un impondérable se présente. Un détective venu soigner sa dépression arrive, elle le...charme...et en fait un témoin haut dessus de tout soupçon pour l'épauler. Donc, sans crainte, elle empoisonne la confiture de sa tante, brûle les lettres de menaces et cache le flacon de cyanure dans ses affaires. Elle sait pertinemment que la police va l'arrêter mais elle sait aussi que le détective va la sortir de là. Par tous les moyens ! »
Poirot se tut un instant, les yeux posés sur le sol.
« Mais la jeune femme a fait une erreur de calcul. Elle n'a pas pensé que la parole de ce célèbre détective ne serait pas suivie. Seul le nom du détective l'avait intéressée. A aucun moment, cette idée ne lui est venue. C'est la seule chose qui l'intéressait..., répéta Poirot, d'une voix lasse.
- Je trouve que vous allez vite dans vos conclusions, mon cher ami, et que vous ne rendez pas justice à Mlle Carrow. Et puis, je ne vois pas l'intérêt pour Mlle Carrow de brûler tous les billets puisque ce doit être la seule preuve qui peut la sauver de la potence.
- Peut-être..., » murmura Poirot.
Le détective voulut se lever mais un nouveau vertige le força à se rasseoir. Hastings courut à la cuisine chercher quelque chose à manger.
C'est alors que la seconde bonne, une gamine de quinze ans, entra dans le salon et vit M. Poirot, pâle, assis dans un coin. Elle s'approcha, à la fois curieuse et inquiète.
« Vous vous sentez bien, M. Poirot ?
- Oui, je vous remercie, répondit le petit Belge en souriant.
- Cela ne vous dérange pas que je fasse le ménage ? Je n'ai pas eu le temps de le faire avec toute cette histoire. Je vais me faire crier.
- On vous traite si durement ? », demanda Poirot alors qu'un nouveau malaise le prenait.
Le détective ferma les yeux et se concentra sur sa respiration.
« Non, pas toujours, mais Laurence est toujours pressée de finir. A chaque fois que je perds du temps à faire mon ménage, elle se met dans une de ces colères ! C'est pas ma faute à moi si les gens salissent autant la nappe ou les tapis ! Elle a qu'à patienter, bientôt elle saura ce que c'est que de faire le ménage pour une famille nombreuse ! »
Tout en bavardant à bâtons rompus et en se plaignant, la jeune fille ramassait les miettes tombées par terre durant le petit-déjeuner. Puis elle lissait la nappe, vérifiant s'il ne restait plus de tâches ou s'il fallait en changer.
Poirot ouvrit enfin les yeux et répondit par politesse :
« Une famille nombreuse ? Je ne vous suis pas...
- Ben oui ! Vu que maintenant, elle va se marier avec M. Stocker, le pharmacien. Avec l'argent qu'elle reçoit de Madame, elle quitte le service pour devenir madame Stocker. Elle a bien du courage, M. Stocker n'est pas beau. Figurez-vous qu'il a une barbe rousse. Immonde ! Faut aimer le poil ! Moi, je préfère votre ami, le capitaine Hastings. D'ailleurs, c'est quoi son prénom ?
- Arthur, répondit machinalement le détective. Elle ne pouvait pas se marier avant ?
- Ben non ! Vu que M. Stocker refuse d'épouser une servante. Quel sale bonhomme ! Comme si on avait la peste ou je sais pas quoi ! Laurence était triste et en colère. Vous imaginez bien comme elle pouvait se défouler sur moi ! « Annie ! T'as pas fait le tapis ! Et la chambre de Madame ! Et les miroirs ! »
- C'est Laurence qui s'est chargée des chambres ce matin ?, demanda Poirot, d'une voix plus ferme.
- Pas toutes, elle a fait que celle de Mlle Alice. Et celle de Madame a été abandonnée en plein travail. Par ordre du médecin lorsqu'il a demandé à ce qu'on appelle la police. Je vais m'en occuper juste après.
- Il va y avoir d'autres changements suite à la mort de Lady Bentley ?
- Je sais pas, M. Poirot. M. Wilson nous disait que Mlle Alice devait devenir la nouvelle maîtresse, à moins qu'elle soit pendue. »
Et la jeune fille se troubla dés que ces mots eurent quitté sa bouche.
« Ho, pardon M. Poirot. J'oubliais que vous et Mlle Alice étiez ensemble, » dit la petite Annie en rougissant.
Une voix appela la petite bonne tout à coup et Annie disparut en un éclair, soulagée de quitter la pièce et le regard consterné du petit homme belge.
« Vous et Mlle Alice étiez ensemble ». Ces mots sonnèrent un instant Poirot. Ensemble ? C'était ce que pensait tout le monde ? Cela surprit le détective. Il devait y avoir quelque chose qui lui a échappé.
Poirot se leva, il voulait partir mais il eut un dernier vertige et s'évanouit enfin. Lorsqu'il revint à lui, il était étendu sur le canapé dans le salon, un arrière-goût de cognac dans la bouche, le col ouvert et les yeux bleus d'Hastings étaient fixés sur lui avec inquiétude.
« Poirot ! Vous m'avez fait une de ses peurs ! Comment vous sentez-vous ?
- Cela va mieux, merci mon ami. »
Poirot voulut se redresser mais une faiblesse l'en empêcha. Il se fustigea d'être aussi diminué.
« Vous devez manger, Poirot ! »
Et Hastings colla entre les mains du détective un sandwich au jambon bien garni. Poirot le prit sans conviction et le mâcha lentement. Les forces lui revenaient peu à peu. Puis il réussit à se redresser et à s'asseoir.
Hastings soupira, dépité, puis soutint le petit Belge lorsque ce dernier descendit du canapé.
« Poirot ! Vous êtes incorrigible ! Vous ne pouvez pas rester tranquille une minute ?
- Il faut que je rende visite au pharmacien M. Stocker. »
Hastings avait rarement vu Poirot aussi fébrile.
« Diable ! Pourquoi une telle impatience ?
- Il y va de la liberté de Mlle Carrow ! Je dois prouver son innocence et M. Stocker est peut-être un témoin-clé.
- Vu l'heure qu'il est, cela attendra demain. Et vu votre état, je ne vous laisserai rien faire de plus avant demain. Je vous emmène à l'hôtel. »
Poirot grogna quelque chose d'inintelligible en mâchant hargneusement le sandwich.
« A moins qu'il n'y ait une autre raison que de vouloir prouver l'innocence de Mlle Carrow ? »
Hastings avait demandé cela doucement, en essayant de ne pas brusquer son compagnon. Poirot eut l'air gêné de répondre. Il se tenait debout, vacillant, entre les bras ouverts du capitaine, prêts à le réceptionner en cas de nouveau malaise.
Hastings contemplait le détective avec compassion.
« C'est à cause de Mlle Carrow, n'est-ce-pas ? »
Poirot ne dit rien, il semblait concentré sur ses pieds.
« Vous l'aimez, n'est-ce-pas ? »
A ces mots, Poirot leva les yeux sur Hastings avec colère et retrouva une voix sèche pour rétorquer :
« Poirot ne tombe pas amoureux Hastings ! Je vous interdis de faire de telles suppositions ! Je veux juste sauver cette malheureuse jeune femme qui a placé sa confiance en moi. En route ! »
La colère avait redonné de l'énergie à Poirot qui put marcher quelques pas en direction de la porte. Il voulait absolument quitter cette maison. Mais Poirot avait présumé de ses forces, le capitaine Hastings le prit bientôt par le bras et l'entraîna jusqu'au village de Whytefool, jusqu'à l'auberge qu'il avait trouvée plus tôt et où il avait pris deux chambres. Où il avait fait venir leurs bagages.
C'était l'heure du repas depuis longtemps. Le capitaine pressa le détective jusqu'à la salle à manger de l'auberge et le fit asseoir de force.
« Maintenant, vous mangez un vrai repas ! »
Le détective ne répondit pas. Il avait encore le sandwich à la main. Il laissa le capitaine commander pour lui. Poirot n'avait pas faim mais il devait admettre qu'il était fatigué. Le repas arriva bientôt. Hastings observait le détective d'un air sévère et attendit que Poirot commence à manger. Enfin !
« Je suis désolé, Poirot, mais je ne tiens pas à vous voir vous effondrer de nouveau. »
Le petit Belge ne répondit pas. Il essayait tant bien que mal de se forcer à manger. S'intéresser à la nourriture était encore difficile pour lui. L'indifférence était devenue une habitude.
« Ne vous excusez pas, mon ami. J'ai présumé de mes forces et je suis encore affaibli. Il me faut l'accepter.
- Et y remédier, » sourit Hastings, en servant un peu de vin au détective.
Poirot sourit à son tour et s'évertua à finir son assiette. Hastings avait fait l'effort de commander un plat susceptible de plaire au détective, même le vin avait été choisi selon les critères de Poirot. Il devait faire de son mieux pour son compagnon.
Le capitaine n'osa pas lancer la conversation sur Mlle Alice Carrow. Il laissa le détective tranquille puis l'accompagna à sa chambre. Il était tard lorsque Poirot s'étendit enfin pour essayer de se reposer quelques heures... Essayer de ne pas penser à Mlle Carrow qui passait la nuit, seule, dans sa cellule...
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