Paige vient de faire cinq tours entiers du parc. En marchand. Et en pleurant. C'est son rituel lorsqu'elle a une peine de cœur. Elle marche et elle pleure, sinon elle casse tout. Paige vient de se disputer violemment avec son copain, Payne. Pour une histoire de vaisselles, de mère casse pied et de dîné avec cette même mère casse pied. Bref. Tout tournait autour de la mère de Payne comme d'habitude !

Paige sait bien que cette dispute ne brisera pas son couple; mais elle est quand même attristé par celle-ci parce qu'elle aime Payne et qu'elle trouve stupide de se disputer avec lui pour une histoire aussi insignifiante. Paige soupire en sortant finalement du parc et en se dirigeant vers le premier bar qu'elle voit. Il est seulement 15 : 00 mais elle a besoin de boire un verre. Ça la calme.

Elle a une chance monstre puisqu'il y a un bar juste en face du parc et qu'il est même ouvert la journée. Elle y entre calmement et le plus discrètement possible histoire de ne pas se faire remarquer.

L'endroit n'est pas bondé mais elle s'y attendait. Il y a un ivrogne qui dort sur une table et un homme au bar, un boisson devant les yeux ( NDA : média 🍺🍻🙇 ). Un homme qui n'a d'ailleurs pas l'air en forme. Mais pas du tout. Il est décoiffé - quoique ça lui va très bien -, ses yeux sont gonflés, sa veste est froissée. Paige remarque également que ses chaussettes sont dépareillées, ce qui l'a stresse au plus haut point !

La jeune femme de vingt-cinq ans va s'assoir près de l'homme du bar qui relève rapidement la tête pour la re-baisser ensuite. Il soupire et il prend finalement son verre d'une main et le boit d'un seul coup.

Paige l'observe attentivement sans réellement savoir pourquoi. C'est le truc de Paige en fait. Observer les gens. C'est son délire. Bien que ça fasse parfois peur, elle adore observer chaque parcelle d'une personne. L'être humain la passionne. L'homme, qui a sûrement remarqué le regard insistant de Paige sur lui, relève une nouvelle fois la tête vers elle, une expression indéchiffrable scotché au visage.

- Vous voulez un portrait ?!, lâche t-il sèchement pour lui faire comprendre qu'il en a assez d'être regardé.

Paige s'échauffe la gorge, gênée et détourne les yeux en soufflant un bref " désolée ". Un silence s'installe dans le bar - déjà silencieux à la base en fait ... Finalement, Paige entend l'homme soupirer.

- Excusez moi de vous avoir parler ainsi, lance t-il. Je ne suis pas dans mon assiette là maintenant et j'ai tendance à m'en prendre à n'importe qui quand je suis en colère.

Paige connaît ça. Elle a le même problème. Elle sourit faiblement à l'homme.

- Ne vous inquiétez pas, je comprend, dit-elle sincèrement.

Il hoche la tête avant de diriger son regard vers son verre. Paige ne dit rien, et lui non plus. Elle regarde droit devant elle, sans vraiment regarder quelque chose de particulier et l'homme, quant à lui, reste immobile. Paige est de nature extrêmement curieuse et elle aimerait beaucoup savoir ce qui tracasse l'homme au point " d'agresser " verbalement une personne inconnue dans un bar un jeudi après-midi. Mais elle se doute bien que ça ne la regarde pas alors elle ne dit rien. Si ça se trouve, il se confiera de lui-même.

Un barman arrive finalement face à Paige et elle commande un verre de vodka. Ça la calme. En attendant sa vodka, Paige joue avec ses doigts, comme une enfant. Et elle pense à Payne aussi. Que fait-il en ce moment ? Lui aussi regrette cette stupide dispute ? Elle l'espère sincèrement. Elle ne veut pas être la seule à regretter. Une larme coule sur sa joue. Elle ne sait d'ailleurs pas pourquoi elle pleure. Sûrement parce qu'elle déteste cette situation dans laquelle elle n'a rien sous contrôle. C'est gênant pour elle.

Le barman revient finalement vers Paige et il pose le verre de vodka devant elle. Elle lui sourit pour le remercier et elle avale le contenu de son verre d'un trait. L'alcool brûle sa gorge mais elle s'en moque. Elle doit oublier.

- Vous êtes ici pour une peine de cœur, pas vrai ?

Paige se tourne vers son voisin qui la regarde attentivement et avec bienveillance. Néanmoins, elle fronce les sourcils.

- Comment le savez-vous ?, demande t-elle méfiante.

L'homme sourit faiblement.

- Je me reconnaît dans vos gestes, avoue t-il. J'ai l'habitude de boire mon verre d'un coup quand j'ai envie d'oublier quelque chose et j'ai supposé que c'était la même chose pour vous - en sachant que je vous ai vu verser une larme, j'en ai directement conclu qu'un garçon était de la partie.

Paige ouvre la bouche mais elle l'a referme aussitôt. Il a raison sur toute la ligne et ce point perturbe Paige.

- Je suis désolé si je vous ai gêné avec mes théories stupides, continue l'homme. C'est juste que je voulais parler un peu avec une personne qui serait susceptible de me comprendre ne serait-ce qu'un minimum.

Paige fronce les sourcils.

- Vous dites ça parce que vous aussi vous êtes ici à cause de votre compagne ?, demande finalement la jeune fille.

L'homme hoche la tête en soupirant. Il reprend son verre et l'amène à sa bouge pour boire le petit fond restant. Il repose le verre violemment sur le comptoir sous le regard analytique de Paige.

- Pour quoi vous êtes-vous disputés avec votre copain ?, demande finalement l'homme en reposant son regard sur Paige.

Paige passe une main dans ses cheveux.

- À cause de sa mère, comme toujours, soupire t-elle. C'est une histoire simple : sa mère me hait mais lui ne le comprend pas. Il pense que ça peut s'arranger mais parfois il y a des gens qui ne sont pas fait pour s'entendre. Et malheureusement pour moi, je ne suis pas faite pour m'entendre avec ma belle mère. Ce qui n'est pas plus mal dans un sens.

L'homme ricane doucement et Paige sourit faiblement. Lorsque le calme revient entre eux, Paige ose demander :

- Et vous ? Pour quoi vous êtes-vous disputé avec elle ? Votre compagne je veux dire.

L'homme soupire en baissant les yeux.

- Parce que je suis con, répond t-il franchement.

Paige ne dit rien, attendant qu'il continue.

- Je suis un abruti qui ne pense qu'à sa gueule et qui crée le mal et le chaos autour de lui. Je suis incapable de m'occuper correctement d'elle, je suis incapable d'être le copain idéal mais je suis incapable de la laisser partir parce que je l'aime malgré tout le mal que je peux lui faire ...

Paige l'écoute attentivement.

- Je sais que je dois m'améliorer, je sais que je dois le faire, continue t-il. C'est soit ça, soit je la laisse. Mais cette dernière option est inconcevable pour moi. Mes actions, mes faits et mes paroles contredisent mes sentiments que j'exprime très rarement. Mais quand je lui dit que je l'aime, je le pense. Je ne peux pas vivre sans elle, c'est mon encrage et je suis paumé si elle n'est pas là. Mais en même temps, je sais que je lui fais beaucoup de mal et ... Et ça me fait autant mal qu'à elle de le savoir ...

Il relève ses prunelles brillantes vers Paige qui ne l'a pas quitté des yeux depuis le début de son discours.

- Vous pensez que je suis fou ?, demande t-il finalement. Vous pensez que je suis taré de l'aimer alors que je la fait souffrir du matin jusqu'au soir ? Vous pensez qu'elle m'aime toujours , malgré tout ce que je lui ai fait ?

Paige ne sait quoi répondre. Elle ne connaît pas la totalité de l'histoire de cet homme mais la détresse avec laquelle il lui parle lui fait savoir à quel point il regrette tout ce qu'il a pu faire à sa bien aimée. Paige comptait lui exposé ses pensées mais son téléphone vibrant dans sa poche l'interrompt. Elle le sort rapidement et lorsque le nom de Payne s'affiche sur l'écran, son cœur rate un battement.

- C'est lui hein ? C'est votre compagnon ?, demande l'homme.

Paige hoche la tête, les yeux toujours rivés sur l'écran de son mobile.

- Répondez lui, dit l'homme. Et dites lui à quel point vous l'aimez. N'attendez pas pour lui dire, s'il vous plait. Ne faites pas comme moi.

Paige lève les yeux vers l'homme qui la regarde avec un grand sérieux et elle se lève du tabouret sur lequel elle était assise. Elle entame sa marche vers la sortie, histoire de prendre l'appelle de Payne dehors mais avant de sortir, elle se tourne vers l'homme et lui sourit.

- Je suis certaine qu'elle vous aimes encore. J'espère en tout cas que tout s'arrangera entre vous parce que vous m'avez l'air vraiment amoureux.

- Je le suis, répond simplement l'homme.

Paige lui lance un dernier sourire avant de sortir du bar, pour répondre à l'appel de Payne. La première chose qu'elle dit en décrochant est " je t'aime et je suis désolée ", comme l'homme lui a dit de le faire. Elle a suivit les conseils de cet homme du bar parce qu'il avait l'air de s'y connaître et que Paige a bien remarqué, malgré le peu de choses qu'il lui a confié que cet homme ne disait pas souvent " je t'aime " à sa copine.

Et Paige ne veut pas finir comme lui. Vraiment pas.