6. Georges
Georges dépose le dernier carton de pots de beurre de cacahuètes à terre près des autres cartons contenant Nutella, cornichons, petits piments et encore pleins d'autres choses dans le genre. Il pousse un soupire de soulagement et il se dirige lentement vers une chaise pour s'y assoir et reprendre son souffle. Georges est plutôt fier de lui. Il a réussi à transporter tout seul la dizaine de cartons qu'on lui a livré ce matin ! Cela prouve que même à cinquante-trois ans, Georges garde la forme ! Il sait qu'il va falloir qu'il se relève pour aller ranger le contenu de ses cartons en rayon avant l'arrivée des clients. Il est seulement 7 : 00 mais Georges sait que le temps qu'il range les rayons, une heure sera passé et la supérette commence à se remplir vers 8 : 10. Il faut que tout soit en ordre avant que les premiers clients se pointent. Georges est tout seul ici alors il faut qu'il agisse rapidement et efficacement.
Il ouvre le carton contenant les pots de cornichons et il en saisit deux. Il se dépêche d'aller au rayon des cornichons et il y place les deux pots. Et il répète l'opération jusqu'à ce que le rayon de pots de cornichons soit pleins. Il fait la même choses avec les produits des autres cartons.
Plus il se déplace et plus ses jambes lui font mal, bien qu'il fasse des allés-retours sur de courtes distances.
Finalement, la cloche de la porte, indiquant qu'un client est entré dans la supérette interrompt Georges dans son rangement. Georges fronce d'ailleurs les sourcils en jetant un bref coup d'œil à l'horloge. Il est seulement 7 : 40. " Ils arrivent tôt aujourd'hui ! ", pense Georges en se dirigeant vers l'entrée.
Il fut plus que surpris de voir entrer monsieur Edwards, un des locataires de l'immeuble d'en face. Il devrait normalement être parti pour le travail à cette heure ! Georges le voit chaque matin à 6 : 00 monter dans sa voiture en soupirant. Maintenant qu'il y pense, c'est vrai qu'il ne l'a pas vu ce matin. Il s'avance chaleureusement vers monsieur Edwards.
- Bonjour monsieur Edwards !, s'exclame t-il en lui serrant la main.
Monsieur Edwards sourit en saisissant la main de Georges. Georges allait ouvrir la bouche pour commencer une conversation avec l'homme face à lui mais il fut interrompu par la cloche de la porte sonnant à nouveau.
Georges fut surpris de plus belle lorsque la belle mademoiselleDolman - la compagne de monsieur Edwards - entra dans la supérette un fin sourire aux lèvres.
- Bonjour Georges !, s'exclame t-elle trop joyeusement au goût du vieil homme. Comment allez-vous ?
Elle lui serre la main alors que Georges hoche la tête en souriant.
- Je vais bien mademoiselle Dolman, et vous ?
- Ça va très bien !
Georges sourit alors que la jeune demoiselle glisse sa main dans celle de son compagnon de gauche. Ce geste rend Georges réellement sceptique. Ces deux là ont la fâcheuse habitude de se disputer souvent. Il le sait - bien qu'il ne loge pas dans le même immeuble qu'eux - pour plusieurs raisons.
Déjà, les locataires de l'immeuble en parlent tout le temps. À chaque fois qu'il y en a un qui entre dans la supérette, la conversation tourne autour du couple du B349. Généralement, c'est la petite Deb Donovan du B348 qui en sait le plus. Normal, elle habite à côté. Cette jeune fille est un véritable moulin à parole et la plupart des sujets de conversations qu'elle a avec son copain, Peter Miles - le fils des gérants de la boutique de locations de DVD - tourne autour de monsieur Edwards et mademoiselle Dolman.
En plus de cela, mademoiselle Dolman et monsieur Edwards sont rarement ensemble. Monsieur Edwards part tôt le matin et rentre tard le soir. Ça, c'est une constatation de Georges qui le voit partir et qui le voit rentrer. Et puis, quand mademoiselle Dolman vient à la supérette, elle a souvent les yeux gonflés et la voix cassée par les larmes.
C'est pour toutes ces raisons que Georges a du mal à comprendre ce qui se passe en ce moment.
- C'est très rare de vous voir ensemble ici et surtout aussi tôt, fait remarquer Georges avec le plus de délicatesse possible.
Mademoiselle Dolman et monsieur Edwards se lancent un regard complice.
- En effet, répond finalement monsieur Edwards. Mais aujourd'hui j'ai pris un jour de congé et j'ai décidé de passer ce jour avec ma bien aimée.
Georges hoche la tête en souriant alors que mademoiselle Dolman entreprend de passer ses mains autour du cou de monsieur Edwards et de lui donner un baiser sur la joue ( NDA : média 😘👄💄💋 ). Il doit avouer qu'ils sont mignons. Mais cela ne va pas durer, il le sait.
- Bon, nous allons aller faire nos courses maintenant par ce que nous avons encore beaucoup de choses à faire !, s'exclame mademoiselle Dolman en commençant à marcher. On se retrouve à la caisse Georges !
Georges hoche la tête et le couple s'engouffre dans un rayon. Il les suit du regard et dès qu'il ne les voit plus, il soupire en passant une main sur son visage.
- Espérons qu'ils ne casseront rien si ils se disputent dans un rayon, chuchote Georges pour lui-même.
Il soupire une nouvelle fois avant de se diriger vers le carton contenant les pots de beurre de cacahuètes. Il l'ouvre doucement et saisit un pot. Il marche ensuite lentement vers le rayon qui contient les même pots. Il y arrive assez vite, malgré la lenteur de ses pas. Il se place devant les autres pots de beurre de cacahuètes et il pose le pot qu'il tient dans la main avec les autres. Il tourne rapidement la tête et il remarque que mademoiselle Dolman et monsieur Edwards sont dans le rayon à sa gauche.
Mademoiselle Dolman sourit toujours, sa liste de course à la main. Elle vient tout juste de saisir un sachet de riz qu'elle pose ensuite délicatement dans le panier que tient monsieur Edwards. Ce dernier observe avec attention sa compagne qui est à présent concentrée sur les petits pots d'épices devant elle.
Georges ne peut s'empêcher de sourire. Il les trouve si adorable. Georges a bien conscience que ce moment est un moment de repos pour le jeune couple. Mais il sait aussi que c'est une façade. Le rideau se lèvera bientôt et le spectacle commencera enfin. Le soucis c'est qu'il ne se passera pas aussi bien que pendant les répétitions ...
Georges retourne finalement à l'entrée de la supérette - plus particulièrement aux cartons contenant les autres pots de beurre de cacahuètes. Il continu à remplir des rayons, tout en jetant de brefs coups d'œil aux seuls clients qu'il a pour le moment. Le vieil homme ne peut s'empêcher de remarquer qu'à chaque fois qu'il passe près du couple, mademoiselle Dolman n'a plus le même sourire que la fois précédente. Son sourire devient de plus en plus flou et Georges se doute bien que monsieur Edwards doit lui parler d'un sujet qui fâche.
Quand Georges vient placer le dernier pot de petits piments dans le rayon correspondant, il ne peut s'empêcher d'écouter la conversation mouvementée qu'entame le couple dans le rayon d'en face.
- Tu te fiche de moi ou bien ?!, s'exclame mademoiselle Dolman en se tournant vivement vers monsieur Edwards.
On peut clairement voir que la jeune femme est très irritée.
- Je n'ai pas le choix ma puce, répond calmement monsieur Edwards. J'ai pris un jour de congé aujourd'hui alors que c'est habituellement ma plus grosse journée. J'en assume les conséquences en terminant plus tard lundi.
Mademoiselle Dolman rit froidement.
- C'est comme ça que tu vois la seule journée que nous allons passer ensemble dans la semaine ? Comme quelque chose qui aura des conséquences sur ton job ?!
Monsieur Edwards soupire en s'approchant plus de sa compagne.
- Je t'en pris, ne dit pas n'importe quoi. Je suis vraiment heureux de passer ma journée avec toi bébé. On en a besoin en plus.
Mademoiselle Dolman passe une main dans ses cheveux. Monsieur Edwards pose ses mains sur sa taille et il la rapproche de lui.
- Je suis désolé si je t'ai fait sous-entendre que ça n'était pas important. Je me suis mal exprimé.
Mademoiselle Dolman hoche la tête pour ensuite la poser sur l'épaule de l'homme face à elle. Elle la relève quelques secondes plus tard.
- Pourquoi tu ne finirais pas tard vendredi plutôt ?, propose finalement mademoiselle Dolman, relançant le sujet de départ. Je voudrais vraiment que tu sois là lundi soir à mon rendez-vous.
Monsieur Edwards soupire.
- Je ne peux pas chérie. J'ai toujours terminé tôt le vendredi et ...
- Non mais je rêve !, s'exclame mademoiselle Dolman en se dégageant des bras de son compagnon. Tu te fou de moi ?! Tu es réellement en train d'essayer de trouver une excuse pour ne pas finir tard le vendredi tout ça pour pouvoir regarder ta stupide série télévisée ?!
Monsieur Edwards soupire en passant une main dans ses cheveux.
- On parle de ma santé là !, continue mademoiselle Dolman en élevant la voix. Je voudrais que tu sois présent si jamais le médecin m'apprend quelque chose de grave et toi tu es prêt à me laisser affronter ça toute seule pour une série ?!
- Ne dit pas n'importe quoi !, réagit finalement monsieur Edwards.
Et arrête de tout dramatiser.
Ce ne sont que des migraines, pas de quoi en faire un fromage !
Mademoiselle Dolman saisit le paquet de riz précédemment mit dans le panier et elle le balance sur monsieur Edwards qui le rattrape de justesse, au grand bonheur de Georges qui aurait détester ramasser tous les grains de riz si le paquet avant explosé !
- T'es un sale con !, cri mademoiselle Dolman. Tout ce qui compte pour toi c'est ta merde de télévision et ton stupide boulot !
- Arrête bon sang !, s'exclame monsieur Edwards. Tu ne vas pas me faire une crise pour un rendez-vous enfin ! Je ne peux pas déplacer mes heures de rattrapage que j'ai déjà placé lundi, point ! C'est comme ça que ça marche au boulot ma grande !
- Le boulot, rit froidement mademoiselle Dolman. Encore et toujours ton boulot de merde qui nous gâche la vie !
- On a déjà parler de ça, lance monsieur Edwards avec agacement. Ce job c'est toute ma vie et il est arrivé bien avant toi. Je le fais passer avant tout. Même avant toi.
Un grand silence s'installe et même Georges est estomaqué par cette réplique. Il peut néanmoins remarquer la petite larme coulée sur la joue rose de mademoiselle Dolman.
- Whaou, dit finalement mademoiselle Dolman. J'espère réellement que ta prochaine copine acceptera ça. Personnellement, j'ai un peu de mal.
Elle essuie d'un geste brusque sa larme avant de se diriger à la hâte vers la sortie de la supérette. Monsieur Edwards ne bouge pas, il l'a regarde partir. Il se rend bien compte de ce qu'il a dit à présent. Il regrette sûrement.
- Merde !, cri t-il finalement en donnant un coup dans le panier qu'il avait lâché quand mademoiselle Dolman est partie.
Il passe une main sur son visage et il commence à marcher. Il s'arrête quand il croise le regard de Georges. Ce dernier aurait voulu s'excuser d'avoir espionner tout ce temps. Mais il n'en a pas le temps puisque monsieur Edwards sort de la supérette avant même qu'il ai pu ouvrir la bouche.
Georges soupire en allant ramasser le panier pleins de nourritures que le couple a abandonné au milieu du rayon. Il s'applique à replacer chaque article dans le bon rayon tout en se repassant la scène qu'il vient de voir dans son esprit.
Le rideau s'est levé. Et le spectacle s'est vraiment mal déroulé ...
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