Levant les yeux, d'un arbre en deuil
Je vis tomber la triste feuille
Quand, ballotée d'humeur morose,
S'exhala son parfum de rose

Si coeur vaillant voulût agir
De roc lui bâtir un empire
Se pencher pour la recueillir
Il eût fait vent, il l'eût fait fuir

Les yeux bleuis d'amer, les joues
Rouges d'automne sans bijoux
Je l'attendis, debout, au seuil
Levant les yeux, d'un arbre en deuil

Dans les rafales, fières, fortes
D'affres folâtres, foudres mortes
Je vis tomber la triste feuille
Frôlant de près le froid cercueil

Les vives larmes des nuées
Telles des armes, dénuées
D'espoir et de mansuétude
Meurtrissent à grands coups d'habitude

Le ciel atone, image habile
De morne gris et d'inutile
Laissât son ombre s'élargir
Si coeur vaillant voulût agir

Vibra en moi la lourde chute
Soudain perdue dans l'azimut
Je vis tomber la triste feuille
Levant les yeux, d'un arbre en deuil