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« Déteste-moi. Fais-moi un truc, déteste-moi. »
𝐒𝐨𝐦𝐞𝐫𝐬𝐞𝐭 𝐡𝐨𝐮𝐬𝐞, 𝐋𝐨𝐧𝐝𝐫𝐞𝐬 - 𝟏𝟔𝐡𝟓𝟓
J'accompagnais harmonieusement mes bras qui suivaient les mouvements de mon corps, mes pieds étant parallèles dans mes bottines en daim, j'effectuais quelques mouvements de déhanchés tout en restant fluide dans ma démarche. Une autre mannequin croisait mon chemin sur ma route, celle-ci venait tout juste de regagner la scène tandis que je la quittais sous l'œil attentif du public. Je faisais le tour des différents chapiteaux où se déroulait le défilé afin de retrouver mon agent ainsi que le reste des autres filles qui devaient encore défiler. Je repérais rapidement Pietro parmi la foule, je lui faisais signe que je revenais d'ici peu, je me dépêchais d'aller me changer dans l'espace cabine qu'avait installé les organisateurs, un peu plus tôt dans la matinée. Je retirais ma pièce de collection pour enfiler ma tenue de ville d'aujourd'hui, je n'avais pas duré plus longtemps que dix minutes, le temps pressait déjà et je devais encore passer à mon appartement pour faire ma valise. Je repartais pour Paris dès ce soir, seulement pour des vacances que j'allais passer auprès des miens. Mon vol était à dix-huit heures, j'avais pris un vol direct qui me ferait normalement arriver sur les coups de vingt-deux heures, une fois arrivé là-bas je devais retrouver mon petit frère qui s'était proposé de venir me récupérer à l'aéroport. Après plusieurs mois de travail à la chaîne je m'étais enfin décidé à me prendre des vacances, en même temps je n'avais pas eut d'autres choix que d'en prendre, ma santé s'était un peu affaiblie depuis quelques semaines. J'avais revue mon médecin traitant pour m'assurer que cette rechute était simplement liée à mon travail et non à ma névrose, en réalité c'était un peu des deux. Suite à ça j'avais demandé à mon agent d'annuler quelques uns de mes rendez-vous du mois prochain, je devais éviter de me surcharger de travail si je voulais être en forme.
Je finissais par retourner auprès de mon agent, je récupérais mon sac à dos que j'avais emmené pour la journée, je suivais sagement mon ami jusqu'au parking du Somerset House. J'avais pris soin d'éviter les médias en remontant dans le van que nous avions pris pour venir jusqu'ici, mon chauffeur démarrait en direction de Kesington, la ville où nous habitions avec Pietro. J'étais descendue la première de la voiture comme l'italien habitait à quelques mètres plus loin de mon immeuble, un simple signe de main avait suffit pour que l'on se dise au revoir et j'étais ensuite monté dans mon immeuble. Comme ce matin je me trouvais de nouveau seule dans l'appartement, Naël travaillait encore à son bureau donc je ne le verrai pas du tout de la soirée. On se croisait souvent en coupe-vent, on essayait quand même de s'appeler au téléphone pendant nos pauses du midi, la base.
Ayant toujours mon sac sur le dos, je me dirigeai vers la pièce de mon dressing où j'avais laissé ma valise vide pour mon prochain séjour à Paris. J'avais regardé approximativement la météo et il n'allait que pleuvoir durant la majorité du temps, et les températures n'étaient pas non plus très chaudes. J'avais donc pris des vêtements chauds pour le mois, deux paires de baskets, des affaires de toilettes et quelques bricoles inutiles qui pèseraient lourd dans ma valise. Je repassais par la cuisine pour me prendre quelque chose à me mettre sous la dent durant mon voyage, je savais que je n'allais pas beaucoup manger vu ce qu'on nous servait dans l'avion. Avant de partir je vérifiai de n'avoir rien oublié, je reprenais ma valise en main que je faisais rouler jusqu'au bout du couloir de mon immeuble. J'avouais que j'appréhendais légèrement ce retour en France, je savais le bourbier qui m'attendait là-bas. J'appréhendais beaucoup mes retrouvailles avec mon ex, j'imagine que de son côté aussi il l'appréhendait, ça faisait des années que je n'avais pas voulu écouter ses explications et j'allais enfin finir par le faire. En fait ce voyage n'allait même pas être des vacances.
[...]
Nous sortions tout juste des embouteillages parisiens, mon frère en avait profité pour augmenter sa vitesse, au fil des minutes j'apercevais déjà les panneaux de notre quartier, cette cité où nous avions grandi. Il se garait devant l'immeuble où vivait notre père, je l'avais vu nous espionner depuis la fenêtre de son balcon puis descendre jusqu'au hall de son bâtiment. Imrân me racontait que notre père n'avait pas arrêté de le saouler avec mon arrivée ici depuis que je les avais prévenu que j'allais venir en France. On ne s'était vu qu'au mois de décembre et depuis je n'étais plus revenu, c'était normal que je manquais à mon père. Je pense qu'il devait aussi se sentir seul dans son appartement, c'est sûr que ce n'était plus du tout la même vie que lorsque j'étais petite et que j'allais une semaine sur deux chez lui avec mon frère. Au moins avec nous il ne pouvait pas s'ennuyer. En semaine j'essayais quand même de l'avoir au téléphone où bien de lui envoyer un petit message quand j'avais le temps, je sais que ça lui faisait toujours plaisir.
— C'est bon de te revoir parmi nous. Me confiait mon père, après m'avoir enlacé dans ses bras.
Il avait insisté pour porter ma valise jusqu'à son étage alors je n'avais pas voulu le contredire. On s'était installé dans la salle à manger, papá nous avait ramené ses albums photos qui traînaient dans un placard de sa chambre. Mon frère avait voulu commencer par celui du mariage de nos deux parents, j'avais senti mon père mal à l'aise lorsqu'on avait commencé à regarder les premières photos. Les photographies dataient mais elles étaient toujours aussi belles avec le temps.
— Maman qui sourit c'est pas tout les jours. Commentait mon frère. J'suis sûr qu'elle a eut mal aux joues à force de sourire comme ça.
C'est vrai qu'à cet époque elle paraissait vraiment heureuse, ça se voyait. Elle était jeune et amoureuse. Mais tout ça c'était résolu maintenant, les choses avaient bien changé.
— Comment on peut aller voir ailleurs avec une nana pareille ? Dis-je à voix basse.
Malheureusement pour moi j'avais parlé un peu trop fort puisque mon père m'avait reprise.
— Mais c'est vrai, ok elle n'était pas la femme parfaite et de toute façon elle existe pas, mais je comprend pas..t'es quand même passé de maman à Natacha, y'a un écart entre les deux.
— Je confirme..mais tu sais l'écoute et la communication, c'est tout ce que ta mère ne savait pas faire. Tu vois comment elle est, ce qui compte ce sont ses petits problèmes à elle et le reste ne compte pas. Ça a toujours été comme ça, c'est son petit monde avant celui des autres.
— Son petit monde comme tu dis, elle l'a bien oublié quand t'a eut une autre femme et ça a été à nous de devoir gérer ses crises, pas à toi. J'ai dû loupé plein de jours de cours cette année là, j'ai failli redoubler.
J'avais préféré couper court à la conversation pour éviter que l'on se dispute plus longtemps. Imrân continuait de défiler les pages de l'album du mariage pendant que j'étais allé faire un tour dans mon ancienne chambre d'adolescente. La décoration était toujours la même hormis quelques cadres photos qui avaient été changé de place, je retrouvais mon ancien poste de musique y compris de vieux cd de ma jeunesse. En voulant les remettre à leurs places j'avais percuté une boîte à chaussures que j'avais malencontreusement renversé sur les côtés, je restais sceptique face à ce que je venais de découvrir. J'avais pris soin de retourner le couvercle de la boîte, des dates y avaient inscrites au stylo indélébile.
« 2006-2012 », lisais-je.
Plus je regardais ces photos et plus je me demandais comment c'était possible qu'elles soient encore là alors que je les avais brûlé sur le barbecue de mon ancienne maison. Si elles étaient encore là ça voulait dire que mon père en avait fait des copies sans que je ne le sache, honnêtement je n'en voyais pas l'intérêt.
— T'aurais pu nous dire que t'étais revenu. Arrivait Stan, suivit de Tonio.
En voulant vite ranger les photos dans la boîte j'en avais fait tomber une que Stan avait directement ramassé.
— C'est mon père qui les a gardé, je savais pas qu'il en avait fait des copies. Me justifiais-je.
— Tu fais ce que tu veux, c'est tes histoires. Nous on est juste venu te proposer d'aller faire un tour, les gars sont tous allé au resto des Castillo. M'expliquait-il. Ça pourrait être cool que tu viennes.
J'acceptais sans broncher sa proposition, terminant de ranger ce que j'avais déplacé à leurs places. Je suivais les garçons jusqu'à la porte de sortie, faisant signe à mon père et mon frère que je reviendrais un plus tard dans la soirée. Nous étions monté dans la voiture de Tonio pour nous rendre en centre-ville, on s'était garé dans une ruelle située à quelques mètre du restaurant. Les garçons s'étaient tous installé en terrasse, la bande s'étaient étalé sur deux tables de quatre, on avait ensuite suivi sur une autre table d'à côté qui se trouvait à proximité de celle de mon meilleur ami. Je n'étais pas étonné de voir qu'il avait ramené son boulet avec lui, j'aurais juste préféré qu'elle ne soit pas là pour aujourd'hui. Noa m'avait directement dévisagé dès qu'elle m'avait vu arriver auprès des garçons, et j'avais ensuite fait de même après m'être assise sur ma chaise.
— T'es définitivement de retour sur Paname ? Me posait Karim, situé à la même table que celle de mon meilleur ami.
— Nan, je viens seulement pour les vacances.
J'avais senti Noa se mettre à me regarder du coin de l'œil lorsque je m'étais mise à parler avec Karim. Elle non plus n'avait pas changé, il n'y avait que ses cheveux qui avaient changé, comparé à avant elle les avait coupé en un carré long, ça lui allait plutôt bien. Physiquement elle avait vraiment du charme mais mentalement c'était tout autre chose, je ne comprenais toujours pas comment Rafaël avait pu se remettre avec elle. À l'époque elle l'avait quitté pour un autre et il avait l'air de lui avoir pardonné.
— J'en connais un qui va être content. Susurrait la brune sans aucune discrétion.
J'imagine qu'elle devait faire référence à Nabil, je n'avais eut qu'une seule relation avant celle-ci que je vivais actuellement.
— Et sinon..Raf' m'a dit que t'allais bientôt te marier, félicitations. Me félicitait-elle en m'accordant un sourire que je n'avais pas pris en compte, le trouvant hypocrite.
J'espérais que Rafaël n'allait pas l'amener à mon mariage, je l'avais déjà prévenu par rapport ça, mais connaissant son côté têtu je sentais qu'il ne respecterait pas ma demande. Pour le moment les faire-part n'étaient pas encore prêts mais je pouvais déjà avoir une petite liste d'invités dans ma tête. Je n'en avais parlé qu'à Stan et il m'avait donné son propre avis face aux différentes personnes que je souhaitais inviter pour mon mariage. J'avais prévu d'inviter toute la bande des garçons avec qui j'avais grandis, le problème c'est que je n'avais plus gardé contact avec eux depuis que j'avais quitté la France. Stan m'avait prévenu que certains garçons ne viendraient sûrement pas pour cette raison, sur ce point là j'étais en tort. Je n'aurais pas dû les zapper pendant autant de temps même si je l'avais fait uniquement pour mon bien. Je sais qu'ils m'en voulait et je m'étais excusé pour mon comportement.
Je n'étais resté qu'une heure avec eux, Tonio m'avait gentiment ramené chez mon père puis je l'avais salué avant de remonter jusqu'à mon étage. En rentrant j'avais retrouvé mon petit frère devant la télé tandis que mon père passait un coup de téléphone dans sa chambre.
— Quand est-ce que vous allez vous voir ? Brisait-il le silence pour me parler, diminuant le volume de la télévision pour m'écouter.
À vrai dire je n'y avais pas vraiment réfléchi, voire pas du tout. Je sais que le corse attendait un message de ma part afin que l'on puisse s'expliquer tout les deux sauf que de mon côté je n'en voyais pas l'intérêt, je lui avais déjà laissé le temps de pouvoir le faire il y'a des années de cela. Maintenant c'était trop tard.
— J'en sais rien, je suis même pas sûr de le faire. Avouais-je. Pourquoi tu me regardes comme ça ? C'est vrai. C'est bien de parler mais pour quoi faire ? Il a été très clair, je ne lui suffisais pas.
Mais il n'y avait pas que ça, il y avait aussi le fait qu'il ait embarqué mon frère dans sa course poursuite, sans oublier ses affaires personnelles dans lesquelles il avait mêlé mon petit frère.
— Ouais mais il a peut-être dit ça sur le coup de la colère. Il a très bien pû dire des trucs qu'il pensait pas. L'excusait mon morpion.
— N'excuse pas l'indéfendable. Rétorquais-je, n'étant pas d'accord avec son opinion à lui. Je crois que tu as oublié dans quoi il t'a entraîné, tu veux que je te rafraîchisse la mémoire ?
— C'est pas la peine. Souffla-t-il. Mais tu devrais quand même écouter ce qu'il a à te dire, on sait jamais ce qui peut se passer.
— Il va rien se passer, tout ça c'est fini. Il fait partie de mon passé maintenant.
Ça m'étonnait un peu de le voir se soucier de mes problèmes avec mon ex, surtout de l'entendre défendre quelqu'un qu'il avait insulté des années plus tôt.
— Faut que je t'avoue quelque chose. M'annonçai mon frère, tout en affichant une mine dépitée.
Il m'avait fallu cinq bonnes minutes pour comprendre le sens de ses mots, de comprendre qu'il n'avait que fait de me mentir depuis le début. Quel menteur. À l'époque j'avais avalé toute ses conneries, une par une, sans douter une seule fois de sa parole. Idiote comme j'étais, j'avais préféré le croire lui plutôt que mon propre copain, ce qui d'un côté était tout à fait logique.
— Je t'ai menti, je me suis entraîné tout seul dans ces histoires. Se confiait mon frère pour l'une des rares fois où nous parlions de sujets sérieux ensembles. On m'a jamais forcé à faire quelque chose, je le faisais de moi-même. Et pour l'accident c'est moi qui ait insisté pour venir, je connaissais les risques mais j'suis quand même monté avec les gars. C'était pas de sa faute.
Plus je l'entendais parler et plus je sentais ma colère monter à petit feux. Un sentiment de culpabilité se mêlait en prime dans mon corazón. Je commençais à me sentir coupable au fil des minutes qui passaient, coupable de ne pas avoir voulu écouter le garçon que j'avais aimé durant ma jeunesse. Peut-être que si je l'avais fait nous n'en serions pas là aujourd'hui, peut-être même que nous serions encore ensembles, dans notre ancien appartement où nous avions décidé d'adopter un animal de compagnie.
— Tu te rends compte de ce que tu dis ? Haussais-je ma voix, laissant échapper un rire jaune de mes lèvres. T'avais tellement peur d'assumer tes actes que t'a préféré rejeter la faute sur quelqu'un d'autre, t'a pas honte ? T'a accusé Nabil à ta place et je t'ai directement cru. Mais qu'est-ce que j'suis conne ! M'insultais-je à voix basse. T'es qu'un égoïste ! Pendant six ans j'ai crû que c'était lui le responsable de tout ça alors qu'en fait c'était que des putain de mensonges !
J'avais passé des années à le blâmer sans savoir le véritable fond de l'histoire. Et si j'avais pris l'initiative de le quitter c'était surtout pour cette raison, pour tout les bobards que m'avait raconté mon frère. En fait je l'avais quitté inutilement.
— J'suis désolé-
— Ça suffit pas ! M'agaçais-je pour de bon, le faisant légèrement sursauter. J'te rappelle que je l'ai quitté en partie pour cet accident, le reste j'étais prête à l'améliorer, on aurait largement pu éviter une séparation ! Et toi t'a tout gâché !
Je n'étais pas prête àlui pardonner cette erreur, je n'allais jamais oublier son aveux, jamais. Je ne l'avais pas laissé finir que j'étais immédiatement ressorti dehors, marchant dans les rues piétonnes de ma ville pour me rendre jusqu'au studio d'enregistrement qu'avait l'habitude d'utiliser les artistes du quartier. J'avais contacté Stan sur Instagram et il m'avait confirmé que Nabil était bien avec lui au studio. Après une quinzaine de minutes de marche j'arrivais enfin à destination, j'avais pû rentrer sans problème puisque l'accès avait toujours été ouvert aux personnes dans le besoin. Je croisais un ami de Nabil sur ma route, il m'indiquât le chemin qui menait jusqu'à la petite cours qui donnait vue sur le local. Je le retrouvais adossée face au mur de la propriété, un joint à la bouche et la capuche de son sweat qui recouvrait une grande partie de ses cheveux. Quelques unes de ses mèches bouchées se faisaient balayer par le vent frais qui s'abattait sur notre cité. N'ayant aucune réaction de sa part, j'avais fini par deviner qu'il m'avait confondu avec l'un des garçons, j'avais donc continué à ne pas faire de bruit jusqu'à ce qu'il se rende compte de ma présence.
— Je t'avais dit de me prévenir quand tu reviendrais. Me reprochait le brun après m'avoir salué de la tête.
— Le principal c'est que je sois venue.
Comparé à la dernière fois que je l'avais vu il paraissait beaucoup plus fatigué, ou peut-être bien qu'il était déjà comme ça depuis son concert à Londres. Je n'avais pas dû faire gaffe à ce détail là comme il avait porté des lunettes de soleil durant tout le long de son show.
— Mon frère m'a reparlé de votre accident et de ses autres histoires..il m'a tout dit. Lâchais-je. Imrân a menti depuis le début, maintenant je sais que t'es pas coupable de ce qui lui est arrivé.
— Ça fait au moins dix piges que j'te le dit sauf que t'a jamais voulu m'écouter. Je faisais que de dire la vérité mais ça te suffisait pas, ma parole valait pas un sous. Rageait le corse, m'adressant un regard lourd de conséquences.
Je me sentais bête depuis que j'avais appris la vérité. Si j'aurais creusé un peu plus le fond de cette histoire on en serait jamais arrivé là, on aurait toujours été ensemble, ou peut-être pas.
— Quel bâtard..L'entendais-je insulter mon frère. Il a même pas eut les couilles d'assumer ses choix, il a préféré raconter de la merde sur mon dos. C'est de sa faute si on s'est séparé.
— Mais y'avait pas que ça, peut-être que ça aurait jamais marché entre nous, tu l'as dit toi-même, je te donnais pas assez d'amour.
Il aurait certainement été plus heureux avec une autre fille, moi j'étais compliqué et peu démonstrative, à l'époque je n'étais pas faite pour lui.
— Il faut se rendre à l'évidence, on n'était pas fait pour être ensemble.
— Tss..tu parles comme si tu regrettais tout. Riait-il jaune, écrasant son mégot sous sa paire de basket. C'est sûr que moi j'suis pas aussi bien que ton anglais. J'ai pas été à la bonne école et j'suis pas non plus de bonne famille.
C'était mentir si je disais que ses mots ne me touchait pas, je n'avais jamais aimé l'entendre se rabaisser.
— J'comprends même pas comment tu l'as ramassé ce mec là, ton style a bien changé, avant c'était les gars comme moi qui te faisait rêver.
— Les gens changent, tu sais c'est bien de s'ouvrir un peu plus au monde. Si je me souviens bien t'a toujours préféré les blondes et pourtant je suis l'opposé.
— Parce que t'étais di-
Malheureusement il n'avait pas pu avoir le temps de terminer sa phrase car Stan l'avait appelé depuis la cabine dans lequel il enregistrait. Nabil lui avait demandé d'attendre quelques minutes de plus le temps que l'on termine notre conversation, cependant mon téléphone s'était mis à sonner et je ne pouvais pas reculer cet appel, l'ayant déjà reculé deux premières fois. J'avais donc décroché alors qu'il repartait rejoindre son ami après avoir râlé dans sa barbe des mots que je n'avais moi-même pas compris. De mon côté je retournais sur mes pas, écoutant attentivement mon emploi du temps du mois prochain, comme je l'avais demandé à mon agent malgré sa réticence. Je sais qu'il voulait éviter de me parler boulot mais je ne lui demandais pas la mort, je voulais simplement connaître mes rendez-vous du mois d'avril. Je n'avais pas oublié que j'étais venue ici pour me reposer, pour souffler de toute cette pression que j'avais quand je travaillais. Je n'avais pas oublié mes objectifs, si j'étais retourné dans mon pays natal c'était pour pouvoir retourner plus en forme à Londres. Mon médecin m'avait conseillé de lâcher mon job et c'est ce que je faisais. Je priais simplement pour que ces prochaines semaines ne soient pas gâchées.
[...]
𝐐𝐋𝐅 𝐑𝐞𝐜𝐨𝐫𝐝𝐬, 𝐏𝐚𝐫𝐢𝐬 - 𝟐𝟎𝐡𝟐𝟓
On s'était tous réunis en cercle afin de bosser une dernière fois sur les p'tits détails qui concernait la collection de vêtements qu'on voulait sortir avec mon frère. C'était une collection d'été qu'on allait sortir l'année pro. Que la famille, c'est comme ça qu'elle allait s'appeler. Nos reufs étaient venus nous filer un coup de main comme on avait besoin de plusieurs avis externes. Au total on avait retiré une dizaines d'articles sur lesquels on comptait retravailler plus tard dans l'année, ceux-là seraient prévu pour une deuxième collection printemps-été. Dès qu'on avait finit cette p'tite réunion on remballait toutes les affaires dans une pièce à part, qui nous servait de réserve. Je fus le premier à quitter les locaux, j'attendais Issam dans le hall du bâtiment. Dix minutes s'écoulaient sur la montre, je soufflais, blasé. Il traînait encore à dire au revoir aux autres alors qu'il les appelait tout te le temps sur snap. Cinq minutes de plus se comptabilisait et je partis m'asseoir dans ma caisse. J'me gênais ap pour lui fourrer un coup de klaxon histoire qu'il comprenne que j'étais pressé de rentrer chez oim, de rentrer graille et de nehess. Il descendait enfin, j'attendis à peine qu'il pose son cul sur son siège pour démarrer. Mon reuf a tenté à plusieurs reprises de me faire la conv' et je l'avais gentiment recalé, en lui faisant comprendre que j'avais pas forcément envie d'être bavard.
Je grillais quelques vitesses afin d'arriver plus vite chez oim, j'me dépêchais de garer ma voiture et de monter rapidement jusqu'à mon appart. Je passais à peine la porte que je soufflais, saoulé parce qu'Éris avait ramené une "pote" à elle. J'aimais aucune de ses cops mais elle c'était la pire, chaque fois qu'elle venait ici c'était pour faire sa commère, critiquer mes moindres faits et gestes que lui racontait l'italienne. Elle faisait toujours genre devant moi à me faire des sourires alors que j'savais très bien qu'elle me taillait par derrière. Elle me prenait trop pour un bouffon.
— T'es rentré. Se réjouissait la brune en venant me faire un câlin, me foutant du fond de teint sur mon pull.
Ça et les traces de gloss c'était tout ce que je détestais, elle le savait en plus à chaque fois j'lui faisais la remarque. Quoi qu'elle faisait elle me saoulait. Elle était trop sur mes côtes et j'aimais pas ça. Il fallait que je mette fin à cette "relation". J'savais quand est-ce que j'allais lui parler, j'attendais seulement qu'Issam retourne sur Toulouse. J'voulais pas qu'il y'ait de mauvaises ambiances pendant sa semaine de vacances.
— Miskine le pull. Commentait mon reuf.
— Tu saoules Éris. Râlais-je dans ma barbe de façon à ce que sa pote ne m'entende pas.
Je filais dans ma chambre pour me changer, je laissais les autres discuter entre eux.
Un sourire s'installât au coin de mes lèvres quand je vis ma boule de poil en train de nehess sur mon lit. Même si elle me saoulait à gratter la porte de ma piaule pour venir pioncer avec moi, même si elle me gonflait à faire ses griffes partout sauf sur son arbre à chat, je la kiffais. J'me sentais jamais seul avec ce chat. J'avais jamais été chaud pour avoir un animal mais quand l'arménienne l'a ramené à notre ancien appart j'ai pas eut le choix que de l'accepter. Et depuis que j'suis célib c'est comme si j'avais un gosse à ma charge. Râja a sept piges mais moi j'suis persuadé que dans sa tête elle doit penser qu'elle à moins d'un an.
J'enfilais de nouvelles sapes puis je retournais dans la salle à manger. Éris avait ramené des pizzas avant que je ne rentre du bureau, ça m'arrangeai parce que j'avais grave la flemme de faire à manger. Issam était venu me rejoindre dans le canap', on avait laissé les filles à table pour être tranquille. De base on aurait dû passer une soirée rien qu'entre reuf mais j'avais l'impression que l'italienne allait vouloir rester pour la nuit. Sa présence me gavait et elle le savait. Quand on s'embrouillait j'étais cash avec elle, j'lui disais tout ce que je pensais. Elle essayait de faire des efforts sur pleins de choses mais pour moi c'était jamais assez. Je la trouvais collante et lassante. Depuis le jour où elle a vu Mahalia faire des couvertures de magazines, elle s'était mise en tête de passer des castings pour devenir modèle photo. Ça me faisait trop pire parce qu'elle était trop ridicule. Ça aussi j'lui avais dit sauf qu'elle voulait pas m'écouter.
— J'espère que tu m'as prévu des activités pour ma semaine ici. Me confiait mon frère d'une autre mère.
— J'ai tout prévu igo. Après demain je t'emmène à la montagne, on va skier.
— Jure ?! S'excitait Issam, le sourire aux lèvres.
— Sur la tête à Yanis que c'est vrai. J'ai tout réservé quand t'avait le dos tourné. Quelques gars de la bande viennent avec nous, ça va être hella.
— T'es le meilleur Ladif !
Je vis que l'italienne s'était arrêté de parler pour écouter ce que je disais.
— Y'en a qui ont de la chance. L'entendais-je râler.
— Faut pas être jalouse, on se voit jamais Bilna et moi donc c'est compréhensible. Se mêlait mon frère.
— Nabil on peut parler seul à seul ? Réclamait-elle.
Sa pote s'en allait et Issam était tipar dans ma chambre.
— Tu pars en voyage sans me le dire ?
— J'te dois rien, t'es pas ma meuf. Arrête de croire que j'dois tout te dire alors que c'est pas le cas. Je te l'ai déjà dit, t'aura jamais ta place dans mon cœur, il est pris.
— Qu'est-ce qu'elle a de plus que moi ?
La discussion ressemblait à une dispute de couple sauf qu'on n'était pas un couple.
— Même si j'te réponds ça va rien t'apporter. Gardais-je mon avis. Par contre y'a une question que j'me pose. Tu comptes retourner quand en Italie ? T'es venue t'installer en France peu de temps après notre rencontre, t'a pris un appart avec une de tes potes mais-
— Je compte pas repartir Nabil. Riait-elle jaune. J'ai refais ma vie ici.
— Ok. Et bah refais là loin de oim, loin de mes proches et arrête de vouloir copier mon ex, c'est flippant.
— Va te faire foutre ! M'insultait-elle, en reprenant son sac et son manteau avant d'aller claquer ma porte.
J'avais aucun regret de cette relation, j'me sentais plus libre maintenant.
[...]
𝐌𝐚𝐡𝐚𝐥𝐢𝐚
Ce soir nous fêtions l'anniversaire de mon demi-frère, ses trente ans. Il avait réuni toute sa famille, ses amis et sa copine à qui je n'avais pas adressé la moindre attention. Je n'étais venue que pour mon frère et non pour madame, je sais qu'elle espérait que l'on s'explique dans la soirée mais ce n'était pas une bonne idée. Aujourd'hui c'était un jour de fête. À l'occasion de ce jour si spécial j'avais fait l'effort de taper parmi mes robes de soirées que je gardais bien au chaud dans mon dressing. Je n'en avais ramené seulement deux pour les vacances, l'une était de couleur lila et celle que je portais aujourd'hui était de couleur bleu royal. Celle-ci je me l'étais acheté à Londres dans une petite boutique de la ville, elle m'avait directement plu, pour son effet froncée, son col bénitier et ses fines bretelles qui descendaient de manière croisé dans mon dos. Cette robe était sublime.
De temps à autre je checkais mon téléphone, voir si je n'avais pas de messages de mon fiancé mais je n'avais rien du tout. Ça faisait quelques jours que je n'avais pas de ses nouvelles et ça m'inquiétait un peu. Je sais qu'il était très pris par son boulot mais ce n'était pas une raison pour m'esquiver. Je le trouvais bizarre. Il ne fallait pas que je me torture l'esprit avec ça, j'allais attendre patiemment de rentrer à Londres pour pouvoir régler mes comptes avec lui.
— Tata ! Entendais-je depuis le jardin.
— Reste pas dehors mon bébé, tu vas tomber malade.
Ma nièce grandissait beaucoup trop vite. Je n'arrivais pas à me dire qu'elle avait eut onze ans en début d'année. Pour moi elle restait toujours mon petit bébé.
— J'essayais d'appeler Nabou parce que y'a pas la wifi ici. Râlait Thaïs.
Ses parents lui ont offert son premier téléphone pour son anniversaire et depuis ça elle n'arrêtait pas d'appeler Nabil, matin, midi et soir.
— Il m'a dit de te faire des bisous. Enchaînait ma nièce.
— Du grand Nabil..Disais-je, pas étonnée de ses propos.
— Il m'a dit que la laverie va fermer, t'es pas trop triste ?
Visiblement Nabil lui disait tout. Thaïs en connaissait beaucoup plus sur notre histoire que mon propre père.
— Nan, c'est du passé maintenant.
Je voyais qu'elle se retenait de me répondre, comme si elle avait peur de me dire le fond de sa pensée.
— Tu peux me parler mon bébé, je vais pas te juger. La rassurais-je.
— Tonton Nabou il t'aime vraiment..il va être malheureux si tu te maries avec quelqu'un d'autre. Se confiait-elle. Maman me dépose chez lui tout les mercredis, je lui fais passer le temps. Quand maman peut pas me déposer il passe me prendre après les cours, on va manger dehors et après on regarde des films à la maison. Maman l'invite souvent à rester manger avec nous pour pas qu'il soit tout seul. Nabil c'est le meilleuuur tonton, avec Naël j'ai pas ça du tout !
Ce serait mentir si je disais que son petit discours ne me touchait pas. Ma nièce aimait énormément mon ex, y compris ma grande sœur ainsi que mon père même si il ne l'avait vu que peu de fois. J'avais même l'impression que ma mère l'appréciait bien plus qu'à l'époque où je n'étais encore qu'une ado. Mon frère m'avait raconté qu'elle demandait souvent des nouvelles de Nabil. C'était ironique parce qu'elle ne l'aimait pas au départ.
— Il a de la chance de t'avoir. La complimentais-je, fière de la petite fille qu'elle était. Je sais qu'il vit une période compliqué depuis que je l'ai quitté, j'en suis pas fière.
J'aurais voulu rajouter une chose qui me tenait à cœur, qui me pesait depuis que je connaissais la vérité. Malheureusement je n'avais pas pu ajouter une autre phrase, mon demi-frère était venu nous chercher pour que l'on aille se mettre à table. Au cours de la soirée j'avais éteint mon téléphone pour être tranquille, sans à avoir à supprimer toutes les notifications que je recevais. J'ignorais qu'à côté de ça le corse essayait de me joindre, j'ignorais qu'il s'était rendu dans notre ancien repère et qu'il m'y attendait. J'ignorais qu'il pleurait à l'intérieur de cette laverie, revoyant des photos de nous que mon père lui avait donné. À cette heure-ci j'ignorais tout, je me sentais heureuse auprès de mes proches mais je ressentais une petite pointe dans le cœur sans savoir pourquoi. Je n'avais pas compris que l'on était connecté.
Cette connexion que nous avions toujours eut même en étant loin de l'autre, et cela depuis le début.
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erisromano Kensington 📍
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