************* Aisha ***************

J'enlevai mes bijoux et les posai sur la coiffeuse et m'apprêtais à enlever mon collier quand une main se posa sur la mienne.

Mon regard croisa le sien dans le miroir puis il dégagea  doucement mes doigts en effleurant légèrement mon cou et posa les siens sur le fermoir de mon collier.

Délicatement, il dégagea mes cheveux et l'enleva avant de le déposa sur la table.

- tu étais très jolie aujourd'hui.

- je ne le suis pas toujours alors?

- si, mais j'aime te voir dans une robe traditionnelle, ça te va tellement bien

- merci. Tu n'es pas mal non plus dans ce bazin. Da nga gueune thiofé ( tu es encore plus beau)

- lolou dou débat ( personne ne va le contester)

- hiiiii

Il éclata de rire alors que je le repoussais doucement.

On revenait du baptème de la fille de Cathy et Khadim.

Une cérémonie toute simple juste pour lui donner le prénom.

Un moment d'émotions qui nous a quasiment tous fait pleurer.

Une petite Arame...

Je soupirais, en baissant les yeux

- qu'est ce qui chagrine ma femme?

Mon regard croisa encore celui de Salif dans le miroir avant qu'il ne pose sa main sur ma taille pour me tourner doucement vers lui.

- je repense à bébé Arame...

Il soupira également

- quelle vie! On en perd ses mots en repensant à tout ça mais c'était écrit que ça devait se passer ainsi.

- Salif, promets moi que si un jour il devait m'arriver quelque chose...

- hey hey, que veux- tu qu'il t'arrive?

- j'en sais rien! La vie est si imprévisible. Stp, promets moi que si je devais mourir avant toi, tu te relèveras et que tu continueras... pour toi, pour Haby, ta famille et....

- Aisha, arrête de dire des bétises!

-quand je regarde Omar, j'ai si mal!

- je sais, moi aussi je souffre pour mon ami.

- promets le moi.

- bébé, il ne va rien t'arriver et je serai toujours là, près de vous, quoiqu'il arrive, tant que j'aurai un souffle de vie.

Il me regardait d'une manière qui me troublait toujours.

Je me souviens encore quand je rêvais qu'il me regarde ainsi, avec ces yeux brillants, qui traduisaient tant de choses qui n'avaient pas besoin de mots.

Pour toute réponse, je me blotissais dans ses bras, fermant les yeux pour profiter de cette chaleur réconfortante qui était si apaisante.

De petits pas arrivaient près de la porte accompagnés de petits cris.

- pa... pa..... pa......pa....

- quelle ingrate!!!!! Son premier mot va vraiment être Papa? Sérieusement????

Salif se détacha de moi en rigolant et en allant accueillir sa fille qui arrivait aussi vite qu'elle pouvait poursuivie par Bintou

- ma princesse est là!

- ahhhhhhhhhh... Pa........pa

Elle criait comme une malade à chaque fois qu'elle voyait son père même quand ils n'étaient séparés que depuis quelques heures seulement!

À quel moment, j'ai perdu ma fille?

Non les enfants, quels traitres, vraiment!

Mais ils étaient beaux à voir tous les deux.

Salif lui parlait toujours comme si elle comprenait tout ce qu'il lui disait et quelques fois, elle l'écoutait si attentivement que ça me dépassait.

Ils sont vraiment fusionnels tous les deux et ça se voyait qu'il l'aimait tellement!

Quelques fois, ils sortent ensemble pour aller faire des courses et il s'habille en maillot de foot et baskets et devinez quoi?

Il l'habillait aussi en baskets et en maillot de foot de son équipe préférée en Rose bien sûr!

Quand je les voyais sortir de manière si assortis, j'avoue que je me sentais un peu exclue.

- sois pas jalouse maman, on est beaux, je sais!

Voilà tout ce qu'il me lançait avant de sortir avec sa fille dans les bras.

Ils ont leur " truc" quoi!

- bébé, l'heure file, habille la et on se prépare, tes parents nous attendent et tu connais ton père.

- oui avant l'heure c'est pas l'heure et après l'heure, ce n'est plus l'heure mais il doit savoir qu'on est au Sénégal! Lui quand il te dit " soyez là à 20h", il veut qu'à 19h59, tu sonnes à la porte! Ah non! Fi Dakar leu dé! ( on est à Dakar ici!)

- tu le lui diras tout à l'heure si tu veux.

Salif partit se préparer tranquillement sans un mot de plus sachant que je parlais dans le vide mais que j'allais me préparer pour éviter qu'on ne soit en retard.

Mon père détestait ça!

Et pourtant, il est médecin, non?

Quel médecin respecte l'heure de ses Rdv, dites le moi!

Quand je lui rétorque ça, il me repond qu'il se déplaçait chez ses patients et n'avait jamais 1 minute de retard!

Pfff

Dépêchons-nous, je ne gagnerai pas cette bataille de toute façon.

Près de 2 heures plus tard, nous arrivions à l'appartement où s'étaient installés mes parents en centre ville de Dakar.

Il n'était vraiment pas mal et Salif les avait aidé à le trouver.

Nous trouvions déjà sur place Racine qui vivait avec eux le temps de son séjour, Badou et Rachel qui envisageaient sérieusement de s'installer au Sénégal et.... ELLE???

Qu'est ce qu'elle faisait là?

- bonsoir,

- ah, vous êtes enfin là!

Salif jeta un rapide coup d'oeil sur sa montre avant de me regarder, l'air de dire " waaaa ... mais????" il était exactement 20h01 minute.

J'eus envie de rigoler sérieusement mais celle que j'avais sous les yeux m'avait ôté toute envie de rire et ma bonne humeur s'était envolée!

- bonsoir Papa,

- salut ma chérie. Hé qui voilà, mon petit coeur

- salut!!! Lança Racine alors que Rachel accourait vers Haby évidemment!

On s'embrassa tous chaleureusement alors que maman venait d'arriver dans la pièce et me prit dans ses bras dès qu'elle me vit.

Après avoir salué Salif qui disait bonjour à.....

bref!!!! Peu importe! J'entendis ma mère dire

- vous connaissez déjà Guilanie.

- comment l'oublier?

- Aisha ne commence pas stp. Oh elle est trop mignonne comme ça ma petite fille

L'autre me toisa de haut en bas avant de se tourner tout sourire

- bonsoir Salif, je partais de toute façon.

- bonsoir Guilanie

Elle fit une pause pour regarder Haby, l'air attendri

- Guilanie, reste diner avec nous stp

- Aziz et ma fille m'attendent, je ne peux vraiment pas mais merci quand même. Et Salif, votre fille est magnifique.

- merci

Elle va arrêter de s'adresser à mon mari, oui?

J'arrachais presque Haby des bras de maman avant de m'éloigner sous son regard choqué

- ça .... ça m'a fait très plaisir que tu sois venue Guilanie et je t'appelle demain comme convenu pour que tu me donnes l'info

L'info? Quelle info?

- avec plaisir et merci encore pour cette belle après midi

Elle a passé toute l'après midi ici?

Je jetais un regard mauvais à ma mère et me dirigeais vers ma soeur et son mari pour m'installer à côté d'eux juste au moment où je rencontrais le regard amusé de Salif.

Tchipppp qu'y a- t- il d'amusant ici?

- au revoir entendis- je encore

Ohhhh mais rentre chez toi, c'est bon!!!!!

- Aisha...ma chérie. Tu fais de la peine à ta mère en te comportant ainsi

- papa stp ne dis rien.

Il me regardait avec une mine désolée tandis que Salif venait s'installer non loin de nous en terminant sa conversation avec Racine.

Ils se lancèrent alors dans une discussion animée à laquelle je ne pris pas part pour me tourner vers ma soeur.

- elle vient souvent ici?

- qui Guilanie? Euh, je ne sais pas mais je sais qu'elle et maman se voient

- que penses- tu d'elle?

- elle est gentille tu sais Aisha...

- mais?

Elle me regarda attentivement

- il n' y a pas de mais.

- attends, Rachel, tu ne vas pas me dire que cette histoire de la mêler à notre héritage ne choque que moi?

- ce n'est pas ce que je dis. Tu sais, maman a toujours été .... très particulière et maintenant que je connais toute l'histoire de sa vie, je comprends mieux les choses

- qu'entends- tu par ... particulière?

- en fait...

- chérie, tu veux encore attendre ou tu veux qu'on leur dise?

Badou venait d'enlacer sa femme et lui avait parlé à voix basse, semblant tout excité

- je croyais qu'on devait leur dire après le diner?

Rachel le fusilla du regard

- ça ne changera rien de toute façon

- et qu'est ce que vous devez nous dire?

Papa qui avait des oreilles partout s'incrusta dans la conversation attirant l'attention sur nous au moment même où maman revenait dans le salon avec un plateau chargé.

Rachel se leva aussitôt pour l'accueillir

- qu'est ce que tu fais? Laisse nous nous en occuper!

- mais non! J'ai l'habitude tu le sais

Je fis descendre Haby et me levai pour aller chercher le reste dans la cuisine sans un mot.

Tandis que j'arrangeais le plateau et disposais les amuse gueule dessus, l'esprit ailleurs, je l'entendis parler

- tu vas être désagréable toute la soirée?

Je me retournai pour faire face à ma mère qui me scrutait

- ce n'est pas mon intention

- alors passons une bonne soirée, stp, gâche pas tout

Je soupirai avant de hocher la tête et de rejoindre les autres

- bon vu que vous êtes tous là, Badou et moi voulions vous annoncer que nous allons avoir un bébé

- quoi! Oh mon dieu! Mon coeur je suis tellement contente

Ma mère la prit dans ses bras et elle s'y blottit comme une petite fille.

Elle était jeune Rachel et n'avait que 23 ans.

Même si elle semblait fofolle avec Racine, elle avait les pieds sur terre et était très mature comme j'avais pu le constater.

- je suis ravi pour vous, félicitations Badou

Mon père lui serra la main et ses beaux frères aussi s'y sont mis chaleureusement

- Badou, laisse moi te dire que j'ai pitié de ton fils, ma soeur risque de le rendre dingue!

- et qui te dit que ce sera un garçon d'abord han?

Et voilà c'était reparti ces deux là n'arrêtent jamais!

- fiche lui la paix, viens là petite soeur. Oh mon dieu! Haby va avoir une autre cousine!

- voilà toi au moins t'as compris que ce sera une fille!

- n'importe quoi! Lança notre frère

On ne le calculait même pas et avec maman on aurait dit 3 adolescentes à parler, faire des projets et on ne tenait vraiment plus en place.

A part ce petit incident, le diner se passa très bien.

On était en famille et qu'est ce qu'on était bien!

Maman avait invité tante Sarah et les filles mais Paulèle préparait ses examens, kadia n'avait pas envie de sortir et tante Sarah avait apparemment quelque chose à faire.

Je ne sais pas mais j'ai la sensation désagréable de délaisser Kadia.

Je fais de mon mieux pourtant pour qu'elle redevienne celle qu'elle était mais elle a tellement changé et avec ma vie complètement bouleversée ces derniers mois, je n'ai pas été aussi proche d'elle que je le voudrai.

Elle ne me laisse pas le faire d'ailleurs et j'ai du mal à trouver comment m'y prendre.

A cette idée, mon coeur se serre et je n'ai plus qu'une envie, aller lui parler et c'est ce que je vais faire dès demain.

************** Salif ****************

Badou était fou heureux et cela se voyait.

Son sourire ne le quittait plus et il ne faisait que regarder sa femme et la toucher, lui prendre la main et la serrer contre lui.

Ils étaient beaux à voir et je l'enviais presque ces moments que je n'ai pas vécu.

Voir ma femme m'annoncer qu'elle attendait notre enfant et voir ces changements s'opérer en elle, son ventre grandir et sentir ce petit être bouger.

Des moments inoubliables dit-on?

C'est fou comment Aisha m'a transformé.

Ce genre de pensées ne m'avaient jamais traversé l'esprit auparavant et je me découvre une âme sensible, trop sensible.

Que nous est- il réellement arrivé?

Omar d'abord, moi, Tanor?

Le fait de prendre de l'âge aussi doit expliquer ces évolutions.

En tout cas, tout ce que je nous souhaite à tous, c'est une famille unie.

Tanor est sur la bonne voie et Omar... dieu sait que je ne voudrai qu'une chose, remonter le temps et modifier tellement de situations, prendre d'autres décisions et faire d'autres choix.

Mais c'est impossible alors il ne me reste plus qu'à continuer à le soutenir et prier pour qu'il trouve une paix intérieure.

Un jour peut être, dieu mettra sur son chemin une femme qui saura panser ses plaies et raffermir ses cicatrices, lui faire vivre une autre vie.

Arame....

Que la terre te soit légère et que la petite Arame dont Cathy et Khadim nous ont gratifié, soit celle qui saura nous faire aller de l'avant.

Les questions d'Aisha et la promesse qu'elle voulait me faire faire m'ont par contre beaucoup troublé.

Je n'envisage plus d'être loin d'elle, de ma famille alors imaginer qu'il puisse leur arriver quelque chose était une chose que je me refusais.

J'avais hâte qu'elle tombe enceinte, j'en faisais presque une obsession, un désir d'agrandir ma famille, comme si le temps nous était désormais compté.

Pourquoi cette sensation ne me quitte- t- elle pas?

Ce sentiment désagréable que je devais faire au plus vite et réaliser le maximum de choses dans cette vie avant que....

Avant que quoi?

Elle se tourna à cet instant précis et je la vis comme au ralenti m'adresser un sourire dont j'étais et serai toujours le seul destinataire.

- Salif, je sais qu'elle est belle ma soeur mais ça fait 2 fois que Badou te parle mais tu ne l'entends pas

- pardon?

- non Bro vas y me dit Badou

- désolé, j'étais ailleurs

- on a remarqué ouais

- te gêne pas pour nous, ce petit est trop impoli!

Je ne pus m'empêcher de rire , les entrainant avec moi

Racine- sérieux les mecs je vous plains, les femmes Durville sont belles mais elles ont un caractère de..... humm humm...

Badou- tu sais qu'elles vont te buter?

Racine- je sais oui

Salif- Rachel m'a l'air plutôt douce

Les deux se regardent d'une drôle de manière avant que Badou ne se mette à faire un geste de la main en plissant les yeux comme s'il réfléchissait

- vois- tu  ma femme est la force tranquille qui s'insinue dans les coins et recoins de ton esprit pour y faire passer des messages insidieux qui te poursuivent où que tu ailles...

Je le regarde un moment essayant de comprendre avant d'éclater carrément de rires

Racine- une vraie sadique hum... hum... je confirme fais gaffe à toi mec

- ah non, je n'en peux plus! C'est de famille alors! Aisha a l'air inoffensive comme ça mais faut pas la chercher! Elle va te pousser dans tes derniers retranchements et tu n'auras plus qu'une envie c'est de l'étrangler. Je ne sais pas où cette histoire avec Guilanie va finir mais je sens que si ça continue,ce sera l'enfer chez moi.

Badou- elle n'a pas l'air de beaucoup de l'aimer mais Rachel m'a raconté et j'avoue que je comprends un peu sa réaction.

- je ne comprends pas trop non plus ce souhait de ta mère Racine. Tu sais pourquoi elle a voulu lui céder ces parts?

Racine- écoute j'en sais peut être pas plus que toi mais c'est ma mère hein, je l'adore mais.... elle s'est souvent comportée bizarrement.

- c'est à dire?

- elle est toujours passée d'un extrême à l'autre sans transition. On n'a jamais compris certaines de ses réactions Rachel et moi. Je vais vous raconter un truc, quand j'étais plus jeune, j'avais un camarade de classe qui s'en prenait à moi. Je n'ai jamais été un grand bagarreur alors je préférais mes livres et me plonger dans mes jeux vidéos que trainer avec les autres. Ce camarade par contre, me pensait faible parce que j'étais toujours dans mon coin et un jour, il m'a coincé au détour d'une rue pour soi disant me spolier de mon argent de poche. Seulement aussi grand et costaud qu'il pouvait être, ce qu'il ne savait pas, c'était que je faisais de la boxe. Je l'ai alors terrassé rapidement et il a dû être amené à l'hôpital avec un nez cassé. Ses parents en ont fait toute une histoire voulant porter plainte mais ma mère est juste sortie un jour et est rentrée me disant simplement que je n'entendrai plus jamais parler de cette histoire.
Effectivement, il ne m'embêtait plus et m'évitait carrément dans le collège quand on se croisait.
Des années plus tard, alors que j'étais à l'université, j'ai recroisé ce camarade qui m'a raconté le fond de l'histoire. En fait, ma mère s'est pointée chez eux à l'improviste avec une liste de parents qui avaient témoigné que leur fils en avait fait de même avec leurs enfants, seulement ces derniers n'avaient rien osé dire. Elle leur a vivement conseillé de retirer leur plainte au risque que leur fils se retrouve dans une maison de correction avec toutes les plaintes qu'elle inciterait les autres parents à déposer et qu'ils feraient mieux de revoir leur mode d'éducation.
Il m'a expliqué que ça avait chauffé mais que ses parents avaient effectivement retiré leur plainte.  Contre toute attente, ma mère était revenue les voir quelques semaines plus tard ou plus précisément, pour le voir.
Quand elle s'est rendue chez eux, elle s'est rendue compte qu'ils ne devaient pas avoir beaucoup de moyens et devaient se saigner pour mettre leur fils dans cette école privée.
Elle a parlé à mon camarade comme à un adulte pour lui dire qu'il devait éviter de gacher sa vie et être reconnaissant d'avoir des parents qui se sacrifiaient pour lui et qui étaient prêts à tout pour le défendre.
Elle s'est engagée à prendre en charge toutes ses études s'il travaillait dur à l'école et ramenait de bons résultats.
Ses parents n'en croyaient pas leurs oreilles mais c'est bien ce qu'elle a fait et ce camarade avec qui je suis toujours en contact, est aujourd'hui un ingenieur renommé.
Ma mère n'a jamais su que j'étais au courant de cette histoire jusqu'à récemment.
A l'époque, je ne comprenais pas comment elle pouvait se le permettre financièrement et lui en ai voulu de privilégier un étranger à ses propres enfants.
On ne manquait de rien mais pour avoir quelque chose qui était important pour nous, il fallait vraiment le mériter.
Cette histoire avec Guilanie a fait remonter ces souvenirs et il y a quelques jours, je lui en ai parlé avec tout le ressentiment que j'avais gardé en moi.
Elle recommençait et cette fois-ci Aisha en fait les frais. Rachel et moi on s'en fout un peu de cet héritage mais ce n'est pas le cas d'Aisha et c'est normal alors qu'elle reagisse ainsi. Au début, je pensais qu'elle avait une autre raison mais privilégier une étrangère comme elle l'a fait dans le passé, n'est pas une bonne idée au risque de gacher leur relation.
On a discuté de beaucoup d'autres choses qui m'ont permis de comprendre ses réactions et la seule conclusion à laquelle j'arrive malheureusement c'est que cette histoire vécue avec ses parents lui a laissé d'enormes séquelles. J'aime ma mère et ça me fait de la peine alors je compte juste m'atteler à la rendre heureuse autant que je peux, comme l'a fait mon père jusqu'ici.

Badou et moi avons écouté attentivement Racine nous parler et je ne savais plus que penser.

- vous venez manger les garçons? Venait de nous interpeller Eric

J'étais toujours pensif quand on se leva pour nous diriger à table.

Mon regard se posa alors sur Nancy Durville pour imaginer qu'elle n'a pas dû effectivement sortir indemne de tout ce qu'elle a vécu et qui l'a marquée encore plus qu'on ne le croyait.

Son regard sur ses enfants était rempli de l'amour, celui d'une mère, irremplaçable.

************* Aisha ***************

- allez! Ouvre cette porte!

Celle-ci s'ouvra à toute volée, laissant apparaitre une Kadia, les cheveux en bataille et les yeux enflés tellement elle avait dormi.

- mais ça va pas de faire tout ce boucan!!!! T'es folle ou quoi?

- si tu veux! Aujourd'hui de gré ou de force tu vas sortir de cette chambre.

Elle se tourna en me lançant un énorme tchiiiip alors que je la suivais me foutant royalement de ce qu'elle pensait.

- Kadia Kane, tu vas...

- Stop!

Elle s'engouffra à nouveau sous sa couette mais je tirai sur celle-ci brutalement et allais ouvrir les rideaux

- ahhhhh, putain Aisha tu fais chier!

- qu'est ce que tu crois faire comme ça? Kadia, libre à toi si tu ne veux pas me parler mais tu vas écouter ce que j'ai à te dire!

- qu'est ce que tu as à dire de si important? Vas y crache le morceau qu'on en finisse!

Je m'asseyais sur le lit pour la regarder, le coeur serré

- je veux retrouver ma cousine, mon amie, celle qui me fait toujours rire quelque soit les circonstances, celle qui m'a toujours incité à aller de l'avant, celle sans qui, je ne serai peut être pas avec le père de ma fille aujourd'hui. Tu m'as toujours soutenue alors à moi de le faire

- tu ne me dois rien Aisha et je vais bien

- non, tu ne vas pas bien. Tu crois que ta mère se sent comment en te voyant ainsi?

- ma mère se sent plutôt bien avec son nouvel " ami" je dirai!

- qu'est ce que tu racontes?

- elle croit que je ne le sais pas mais je sais qu'elle a quelqu'un dans sa vie

- pfff n'importe quoi! Et même si c'est le cas, tant mieux pour elle, au moins elle ne se morfond pas contrairement à toi! Tu dois te reprendre en mains Kadia, retrouver une activité professionnelle, sortir, faire des choses de ton âge. Regarde toi, tu me désespères! Stp commence par aller te doucher, on va sortir.

- je ne vais nulle part.

- c'est ce qu'on verra!

Elle me regarda et comprit que je ne comptais pas lâcher l'affaire.

Se trainant dans la salle de bain comme si elle allait à l'abattoir, ça se voyait qu'elle n'avait qu'une envie, me tuer.

Une fois qu'elle fut douchée et habillée, je lui demandais de prendre son sac car on avait un rdv.

Elle me suivit sans grande conviction et on prit ma voiture direction le centre ville où je nous avais pris un rdv.

Quelque soit les maux, une bonne séance de massage et de détente était un bon début pour les soulager.

Elle était un peu réticente et ronchonne au début mais au fil de la séance, elle commençait à se détendre.

Je commençais à discuter avec elle comme on le faisait auparavant se racontant les faits divers du moment et rigolant de bétises sur facebook.

Cela la détendait et elle commençait à prendre goût à ce massage.

En sortant de l'institut, on avait retrouvé une nouvelle jeunesse et elle pensait qu'on allait rentrer mais non non, on ne faisait que commencer.

Le salon de beauté se situait heureusement non loin de là et elle fut surprise d'être accueillie comme une reine.

C'était les consignes que j'avais donné, on devait prendre soin d'elle des pieds à la tête.

Elle me regardait étonnée alors que je l'encourageais à y aller.

- tu es folle!

- oui, de toi!

- qu'est ce que je disais? Salif est vraiment dans la merde!

- il t'envoie d'ailleurs un message.Tu devais le rappeller apparemment et il attend toujours!

- mais si je l'ai fait et il était sur messagerie.

- en plus tu mens?

Elle courut derrière la bonne femme, ne demandant pas son reste avec son gros popotin moulé dans ce jean qui lui allait si bien.

Kadia a toujours été bien foutue même si ces derniers temps, elle avait perdu du poids, cela n'enlevait rien à son charme, seulement elle se laissait aller et devenait terne et éteinte.

Je m'installais confortablement pour faire un simple shampoing et un brushing alors que j'avais demandé la totale pour elle.

2 heures plus tard, on sortait de là comme des princesses.

Le sourire que j'avais aux lèvres ne me quittait plus et surtout mes yeux ne se détachaient plus de Kadia.

Elle était magnifique!

Les filles avaient fait un travail remarquable sur ses cheveux et le résultat de ce maquillage était juste époustouflant!

Le fait de se voir ainsi l'avait mise de bonne humeur.

- tu vois, c'était pas si difficile?

Elle me fixa et inspira profondément des larmes perlant sur ses beaux yeux.

- Hey, ça viendra. Tu oublieras un jour tout ceci. Kadia, les personnes qui t'ont engendré ne définissent pas la personne que tu es. Il n'y a qu'à voir ma mère. Alors reprends toi, je t'en prie. Ne te préoccupe pas de ce que pensent les gens. Montre leur que tu n'es pas seulement la fille de Demba Kane mais tu es toi, Kadia, une fille forte avec une mère formidable et des gens qui t'aiment.

- tu vas me faire pleurer si tu continues.

- fais le et je te tue. J'ai payé une fortune pour ce maquillage!

Elle sourit et pour la première fois depuis très longtemps, c'était là un vrai sourire.

- merci Aisha

- tu as déjà fait tellement plus pour moi. Allons déjeuner maintenant, je meurs de faim.

On sortait de l'institut et sur le pas de la porte, une personne faillit nous rentrer dedans et....... non mais c'est pas vrai!

- tu ne peux pas regarder où tu vas!!!!

- ça va! Excuse moi!

- tchiipp t'as vraiment décidé de me pourrir la vie!

Elle se stoppa net et me toisa

- tu la pourris toute seule ta vie! Non mais pour qui tu te prends?

- hé hé on va se calmer les filles!

- kadia restes en dehors de ça. On ne veut pas de toi dans nos vies, est ce que tu comprends ça?

- mais je l'avais compris et saches que je n'ai que faire de ta vie de petite fille de bourge! Si ce n'était ta mère, je n'aurai jamais eu affaire à une femme de ton genre!

- de mon genre? Non mais je rêve! Kadia allons nous en, elle n'en vaut même pas la peine. Et arrêtes de tourner autour de ma mère, moi vivante,tu n'auras jamais la plus petite action de cette entreprise.

- t'as vraiment rien compris! Bref laisse tomber j'ai mieux à faire!

Elle me bouscula presque en entrant dans l'institut me faisant bouillir de rage!

- Aisha.....

- laisse tomber Kadia!

- mais qui est- ce?

- juste une inconnue qui veut s'immiscer dans ma vie, me piquer une part de mon héritage et s'accaparer ma mère!

************ Kadia **************

- quoi?

Mais qu'est ce qu'elle raconte? J'ai raté un épisode on dirait!

Ma cousine était hyper énervée et je dus d'ailleurs lui signaler que son téléphone sonnait.

- Aisha, ton téléphone!

Elle ouvrit son sac rageusement et répondit de très mauvaise humeur

- allô

-.........

- rien. Ça va. Je m'apprêtais à aller déjeuner

-.........

- pourquoi pas? Ok. A tout de suite.

- ........

Elle continuait à marcher précipitamment en direction de sa voiture me faisant presque courir.

- Aisha ralentis, je n'ai pas une forme olympienne, je te signale!

Elle déverouilla la voiture et je m'installais à l'interieur alors qu'elle démarrait presque immédiatement.

- on va déjeuner avec Salif.

- chiii Aisha nak, tu sais vraiment que j'ai honte de le voir en ce moment!

- tu lui expliqueras pourquoi tu l'évitais une bonne fois pour toutes!

- t'es vraiment vache de me faire ce coup là!

- ohhh arrête, tu sais que Salif t'adore. Ça lui fera plaisir au contraire.

Je soupirais de dépit et m'en voulais de ne pas lui avoir parlé comme il le souhaitait.

Après tout Salif était mon ami mais je ne me sentais pas de lui parler, sincèrement.

On se gara devant un restaurant huppé du centre ville et je baissais tout de suite les yeux sur mes habits.

- t'es vraiment sérieuse? T'as vu ce que je porte?

Aisha me jeta un coup d'oeil

- quoi? T'es belle même en jean et puis tes escarpins font l'affaire, allez viens!

Effectivement, le portier ne me regarda pas de travers, c'était déjà ça.

En avançant devant tout ce monde, je me sentais bizarre comme si tous les yeux étaient braqués sur moi.

Me reconnaissent- ils?

Vais- je encore une fois me faire interpeller comme la fille du meurtrier?

Ces questions me taraudaient l'esprit si bien que je faillis cogner Aisha qui venait de s'arrêter devant moi mais quand je levai les yeux, tout mon corps se figea alors que je rencontrai un certain regard.

Oh non.

Je crois que tout le monde s'est mis en mode pause.

Je glissai un regard vers Aisha qui semblait aussi surprise que moi.

Tourner les talons et prendre mes jambes à mon cou était inenvisageable devant tout ce monde et je venais seulement maintenant de réaliser réellement quelque chose.

Je n'avais RIEN à me reprocher.

RIEN.

Alors je fis ce que personne n'attendait, et me tournai vers les deux hommes.

- bonjour Salif, je suis ravie de te revoir ..... et toi également Omar.