15| une chance d'être heureux tous les deux
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d o n g h y u c k
LA PREMIÈRE FOIS QUE j'ai découvert que j'avais envie d'embrasser Mark Lee, le soleil disparaissait derrière la mer et ses doigts couraient inlassablement le long des cordes de sa guitare bleue. Je chantais pour lui sans m'arrêter, tout simplement parce qu'il me l'avait demandé et que j'aurais tout fait pour lui. Pendant de longues minutes j'avais évité son regard parsemé d'étoiles qui me détaillait et m'effrayait et puis j'avais fini par abandonner le combat et j'avais ancré mes yeux dans les siens avec plus d'aplomb que je n'en avais jamais eu.
- Pourquoi est-ce tu rougis 'Hyuck ? m'avait-il demandé.
Ses lèvres formaient son fameux sourire en coin et j'avais hésité avant de répondre. J'étais presque sûr que mon attirance pour lui était réciproque et pourtant, il y avait toujours cette petite part de moi qui doutait. Peut-être que je m'étais tout imaginé et que je n'étais rien de plus qu'un bon ami pour lui ?
- Parce que tu me perturbes. Tu me regardes avec trop d'intensité, tu t'en rends même pas compte.
Il avait ri. Et moi j'avais souri parce que j'étais heureux de le voir rire plutôt que pleurer.
- Je te regarde comme tu mérites d'être vu.
Une vague de chaleur m'avait envahi et mes joues, déjà rouges, étaient devenues plus qu'écarlates. Mark avait posé sa guitare sur le sable blanc et s'était approché de moi. Moi aussi, je m'étais avancé de manières à ce que nous ne soyons séparés par quelques centimètres seulement.
-Tu es sûr que tu veux me laisser faire ça ? il m'avait demandé à quelques centimètres de mes lèvres.
Et comme j'avais acquiescé, nos lèvres s'étaient découvertes, s'étaient appréciées et avaient appris à s'aimer.
*
J'ÉTAIS ASSIS SUR un des bancs un peu isolés de la cour, un sandwich au thon acheté à la boulangerie située en face du lycée dans la main. De là où j'étais, je pouvais observer les collégiens, les primaires et les maternelles et je les enviais parce que si je me souvenais bien, à ces périodes de ma vie, je n'avais autant de problèmes.
- Qu'est-ce que tu fais là ? j'ai demandé, sourcils froncés.
Je venais souvent manger ici, seul ou bien accompagné, et jamais je n'avais croisé Jaehyun jusque là. Je ne le connaissais pas réellement ; il était plus vieux et bien plus populaire que moi et dans ce lycée où les lois des groupes étaient encore bien trop présentes, nous n'avions jamais eu l'occasion de partager des moments ensemble. Cependant, je savais pertinemment qui il était pour Taeyong et je savais aussi ce qui s'était passé entre eux quelques semaines plus tôt.
- Je sais pas trop a-t-il répondu. T'es pas censé être dans l'auditorium ?
Je me suis levé de mon banc pour rejoindre le sien et lui ai proposé un morceau de mon repas qu'il a refusé.
- Je sèche, j'ai un peu peur de voir quelqu'un j'ai avoué en mordant dans le pain.
Un silence plutôt confortable s'est installé entre nous. Je ne savais pas à quoi il pensait mais moi, je pensais à Mark comme d'habitude. Je m'étais fait avoir, encore une fois, par son sourire charmeur, ses yeux brillants et ses belles paroles. Je m'étais laissé faire et j'avais accepté de baisser un peu mes barrières parce que je n'avais jamais su lui résister. Un simple baiser, c'était tout ce que nous avions partagé avant que l'irruption de Jeno ne nous sépare. Un simple baiser, rien d'extraordinaire mais ce simple baiser m'avait fait réalisé que quoiqu'il fasse, j'étais éperdument amoureux de lui.
- Taeyong va mal, tu sais.
Il a tenté de garder une expression neutre, en vain. Je savais que c'était un sujet délicat pour lui mais je voulais échapper au flot de pensées qui m'envahissait l'esprit.
- Oh, et bien, je suis désolé pour lui mais pourquoi est-ce que tu me dis ça ?
J'ai ricané avant de jeter la fin de mon sandwich dans une poubelle. Je n'avais plus faim.
- Jaehyun, je te dis ça pour que t'ailles lui parler j'ai expliqué doucement, comme à un enfant. Vous ne pouvez pas continuer à vous ignorer jusqu'à la fin de votre vie.
Il a secoué la tête.
- Ecoute, tu sais pas de quoi tu parles donc j'te conseille de lâcher le morceau a-t-il répliqué agacé.
- Tu as raison. Je ne sais rien de ce qu'il s'est passé entre vous deux j'ai menti. Mais ce que je sais, c'est que Taeyong est vraiment pas bien et que la seule personne qui pourrait l'aider à aller mieux, c'est toi.
- Quand tu dis qu'il va mal, qu'est-ce que tu veux dire ?
- Et bien, il ne sourit plus, il ne rit plus, il ne mange même plus, il a dégluti, maintenant il passe ses midis au gymnase et il te dessine sans cesse. Il a rempli des pages et des pages de dessins qui te représentent. Toi en train de sourire, toi en train de jouer au basket, toi en train de dormir, toi avec des étoiles dans les yeux. T'es partout dans sa tête. Un léger rire nerveux s'est échappé de sa gorge. Ouais, c'est un peu flippant.
- Donghyuck, c'est pas parce qu'aujourd'hui il me dessine qu'il m'aime, c'est plus compliqué.
J'ai baissé les yeux et je n'ai rien ajouté. Compliqué semblait être l'adjectif qui qualifiait toutes les histoires d'amour du monde. Et pourtant même l'amour pouvait être synonyme de souffrance et de chagrin, il y avait tellement de personnes qui attendaient impatiemment de découvrir ce sentiment. Je me demandais pourquoi.
- Est-ce que tu l'aimes, Jaehyun ?
- Hum, je-peut-être, je sais pas trop. J't'ai dit que c'était compliqué.
- Admettons qu'i y ait une minuscule part de toi qui soit tombée amoureuse de Taeyong, alors ça vaut le coup. Parce que je peux te garantir que lui, il t'aime éperdument. Vous vous aimez et c'est tout ce qui compte. Je me suis rendu compte que j'étais un peu niais mais j'étais lancé. Tu dois sûrement avoir peur de la réaction des gens quand ils vont découvrir que tu n'es pas le parfait petit hétéro qu'ils pensaient que tu étais, surtout celle de tes parents mais je te jure que rien n'est insurmontable. Tes parents t'aiment beaucoup trop pour te renier, j'en suis certain. Regarde-moi, j'ai fait mon coming-out il y a deux ans et même si ça a été un peu compliqué pour mon père maintenant tout va bien.
- Donghyuck, n'essaie pas de me faire croire que tous les parents réagissent de la même manière. Si faire son coming-out était aussi facile que tu le dis, alors personne ne resterait enfermé dans le placard toute sa vie il a grogné.
J'ai soupiré. Jaehyun avait raison, j'étais trop optimiste. Les choses n'allaient pas devenir aussi simples en un claquement de doigt.
- Je suis désolé. Mais il faut juste que tu saches que tu as énormément de chance d'avoir quelqu'un qui t'aime autant que Taeyong et de l'aimer en retour. C'est inestimable et moi, j'aimerais tellement que Mark- je me suis mordu la lèvre, conscient que j'en avais peut-être un peu trop dit, enfin bref. Il n'est pas trop tard pour arranger les choses.
Sans rien ajouter, je me suis levé et me suis dirigé vers le sous-sol, le laissant planté là. Le cours devait déjà être terminé alors j'ai accéléré pour arriver à l'auditorium avant que tout le monde ne soit parti, avant qu'il ne soit parti. Je ne pouvais pas me permettre de donner des leçons de vie aux autres sans même essayer de les appliquer moi-même.
Je suis arrivé à temps, Mark était encore là. Mais Mark était avec Mina et je suis vite redescendu sur terre. Renjun m'a aperçu et s'est précipité vers moi.
- Où est-ce que t'étais ? T'as raté plein de potins ! s'est-il exclamé en s'approchant de moi. Tu devineras jamais : le couple de l'année s'est séparé a-t-il continué sans même me laisser le temps d'ouvrir la bouche.
Mais je n'écoutais déjà plus ce qu'il me racontait. Je me sentais bête, bête d'avoir cru que si on y mettait assez de volonté, on avait, peut-être, une chance d'être heureux tous les deux. Bien fait pour moi et mes utopies, je me contenterais de la réalité.
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