12| deux adolescents qui pètent les plombs
12
d o y e o n
J'ÉTAIS EN RETARD. J'étais en retard et je détestais ça alors je m'étonnais moi-même d'être aussi souriante alors que mon tram s'était arrêté en plein milieu des rails à cause d'un accident de voiture un peu plus loin sur la route. En temps normal, j'aurais déjà insulté une ou deux personnes et je serais descendue du tram en râlant mais grâce à la bonne humeur qui m'habitait depuis la veille, je m'étais contentée de soupirer. Dans tous les cas, je n'y pouvais rien.
Mon téléphone a vibré dans mon sac et j'ai passé de longues secondes à le chercher parmi le bordel qui régnait dans mon Chanel. Après cette recherche effrénée, j'ai enfin pu sortir l'objet convoité. J'avoue avoir été déçue de voir qu'il s'agissait d'un simple message de Chæyeong, une Cheerio, qui nous prévenait de la décision de la coach Sunmi de nous rajouter deux heures d'entraînement par semaine.
Faire partie des cheerleaders du lycée était un réel engagement et porter l'uniforme était plus contraignant qu'il n'y paraissait. Souvent, je songeais à tout arrêter puis, je me souvenais que sans cette tenue rouge, je n'étais plus rien. Je redeviendrais cette gamine timide, incapable d'aligner trois phrases sans bégayer. Parce que, c'était ce qu'était la vraie Kim Doyeon. Derrière tous ces masques de petite princesse, de peste imbue d'elle-même et incapable de faire preuve de gentillesse, j'étais juste une petite fille qui s'était inventée un personnage digne d'une série Disney Channel pour faire face au monde. Mes parents m'avaient toujours appris que le monde était cruel alors j'étais devenue plus cruelle encore.
-Dix minutes de retard, pas très ponctuelle Mademoiselle Kim.
Je lui ai présenté mes excuses avant de m'installer sur la chaise restante. Il contrastait avec mon humeur. Mon grand sourire détonait face à son expression inhabitullement morne. Je n'avais pas l'habitude de le voir aussi fermé, du moins avec moi. Deux semaines plus tôt, lorsque nous avions eu notre premier «rendez-vous galant», il avait été beaucoup plus avenant. Pour la première fois, je me trouvais face à un Tæyong qui semblait en colère ; en colère contre moi.
- Ça va pas ? j'ai demandé en fronçant les sourcils.
J'ai souri en remarquant que ma boisson préférée était posée sur la table, heureuse qu'il ait gardé ce détail en mémoire cependant, mon sourire a bien vite disparu face au regard dur qu'il posait sur moi, me mettant mal à l'aise.
- Je ne t'aime pas, tu sais ?
C'était sec. Et ça faisait mal. Je ne prétendais pas que tout le monde m'aimait, rien que dans ma soi-disant bande de potes, je ne pouvais même pas dire que la moitié m'appréciait cependant, eux avaient la décence de ne pas me le dire honnêtement. C'était dans ces moments là que je me rappelais que Taeyong ne venait pas de chez mous, il était un petit nouveau dans nos sphères et bien qu'il ait réussi à s'y insérer avec facilité, il lui manquait encore quelques codes de notre société dont l'hypocrisie faisait partie.
- Wow, hum, ça fait toujours plaisir. Merci Taeyong.
J'ai été obligée de lui répondre avec désinvolture même si j'avais juste envie de me mettre à pleurnicher comme une enfant. Pourtant mon masque d'intouchable n'a pas semblé suffire puisque le regard du garçon assis en face de moi s'est adouci.
- Yeonie..? Yeonie, tu pleures..?
J'ai secoué la tête avant de passer mes mains sur mes joues et de me rendre compte que si, de grosses larmes étaient en train de s'échapper. En moins de trente secondes, Taeyong s'est retrouvé agenouillé devant moi, l'air inquiet tout en essuyant les gouttes d'eau salée qui roulaient le long de mon visage. Son aveu avait été la goutte d'eau qui avait fait débordé le vase, je ne pouvais pas me retenir plus longtemps. Parce que je n'en pouvais plus de ce rôle que je n'aimais pas et que pourtant j'étais obligéee de tenir, de devoir supporter les remarques acerbes de ma mère qui reportait la colère des coups de mon père sur moi, de constamment être sous la pression de ces putains de notes alors que je n'en avais même pas besoin puisque mon avenir était déjà tout tracé, bref, je n'en pouvais plus.
- Je... je sais pas pourquoi, j'suis désolée Tae' j'ai bégayé en essayant d'arrêter mes sanglots.
Plus il me regardait avec cette espèce de pitié dans les yeux et plus mes pleurs redoublaient. Je détestais ça, qu'il me voit comme cette petite chose fragile qu'il fallait protéger. Je n'étais pas une demoiselle en détresse et je n'avais certainement pas besoin d'un chevalier pour venir me sauver. J'avais plutôt besoin d'une bonne dose d'antidépresseurs comme plus de la moitié des adolescents de notre siècle.
- Écoute-moi, tu as le droit de lâcher prise, okay ? T'es pas toujours obligée d'être toujours aussi stoïque, laisse-toi aller. Sérieux, vous êtes tous des ravagés qui pensent que personne ne voit à quel point vous êtes tous tristes a-t-il déballé d'une traite.
Plus il parlait, plus la veine de son front ressortait. Il était en colère mais pas seulement contre moi, contre les gens comme moi, ceux qui ont grandi dans des jolies cages dorées dans lesquelles ils seront enfermés toute leur vie.
- Tu parles mais depuis que je te connais, je t'ai jamais vu extérioriser tes sentiments. Tu te contentes d'être une éponge à sentiments pour les autres en espérant que personne ne remarque à quel point tes cernes te bouffent le visage et à quel point t'es maigre Tae' j'ai répliqué, ayant enfin réussi à retrouver le calme.
Il n'a pas répliqué parce qu'il savait très bien que j'avais raison. Il a baissé les yeux vers le parquet et j'ai remonté son visage pour le forcer à me regarder moi. Certains clients nous observaient comme si nous étions des singes dans un zoo, à croire qu'ils n'avaient vu deux adolescents qui pètent les plombs.
- Moi, je te vois j'ai ajouté.
Je ne sais pas qui a fait le premier pas. Tout ce que je sais, c'est qu'après cela, nos lèvres se sont rencontrées. Ce n'était pas vraiment un baiser romantique, lui-même l'avait dit : il ne m'aimait pas, nous avions juste tous les deux besoin d'un petit remontant et nous étions ensemble au bon moment.
J'ai souri en repensant à la discussion que j'avais eu avec Jæhyun et je me suis dit sue finalement, j'avais fait une bonne action en l'éloignant un peu de Taeyong, parce qu'un garçon comme lui, capable de le regarder avec toutes les étoiles du monde dans les yeux et de m'embrasser comme s'il allait crever après, l'aurait brisé.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro