L'alarme du réveil retentit telle une sentence et Jungkook se recroquevilla en position fœtale. 

Quand son père débarqua, il n'hésita plus une seule seconde et s'extirpa de son cocon. Vivre dans le danger n'était pas son but. Après avoir enfilé son uniforme et consommé un léger petit-déjeuner, un train-train matinal d'un commun affligeant, il s'engagea dans les ruelles adjacentes menant à son lycée. 

Les vacances s'étaient déroulées à merveille. Sa toute nouvelle maison collait parfaitement à ses attentes. Il était même parvenu à convaincre ses parents d'adopter un chat, maintenant que le déménagement était fini. 

À présent assis à sa table, il se joignit à la conversation de Jin et Namjoon. Quelques minutes plus tard, Jimin fit son entrée et s'affala à ses côtés.

La discussion s'acheva par l'arrivée de Monsieur Kim. Son manteau aux tons noirâtres déposé sur le dossier de la chaise professorale, il procéda à l'appel. Ensuite, il récupéra les devoirs-maisons. Jungkook l'observait faire. Le souvenir impérissable d'eux réunis dans son ancienne chambre lui revint en mémoire, pour la énième fois...

Et lorsque ses pensées empruntèrent une voie plus que douteuse, il s'ordonna de revenir sur Terre. Une scène improbable mais bien réelle, émoustillant son imagination à n'en plus finir. L'attirance croissante qu'il ressentait jouait pleinement son rôle. Et il n'arrivait plus vraiment à l'amoindrir lorsque l'individu en question rayonnait de charme, juste sous ses yeux.

Ce jour-là, sa mère n'avait pas tardé à les rejoindre : peu après qu'il lui ait notifié ses erreurs.

Bien que les critiques négatives eurent immanquablement heurté son égo, l'initiative du professeur lui avait permis de retravailler les points soulevés. S'il s'était tu, Jungkook serait sans doute resté avec ses réponses erronées et sa note en aurait pâti. 

Le cours débuta sans plus de cérémonies, n'étant pas du genre patient lorsqu'il y avait un programme à boucler. Et à peine eut-il commencé à déblatérer sa leçon que l'esprit de Jungkook divagua de nouveau. Toutes ses résolutions partirent, une fois de plus, en fumée. 

Des étoiles commencèrent même à tapisser le fond de ses iris, tandis qu'il détaillait le corps de l'homme schématisant une succession de phénomènes au tableau. Lorsqu'il portait sa blouse de laboratoire, certaines parties étaient camouflées. Actuellement vêtu d'habits civils, le lycéen avait donc le champ libre pour découvrir plus amples courbes ; des cuisses d'une fermeté séduisante, une mâchoire adroitement tracée, un cou aux allures captivantes, des avant-bras dévoilés par ses manches retroussées... Il fantasmait complètement. Il avait un sérieux problème.

Mais Jungkook n'était pas complètement timbré au point de perdre toute notion de lieu. Se faire choper en flagrant délit n'entrait pas dans ses plans ! Si son emplacement le préservait assez bien du regard d'autrui, il veillait tout de même à re-focaliser son attention sur le tableau parsemé de craie quand c'était nécessaire. Sans oublier qu'il prenait note des explications de la leçon.

Lorsque la récréation survint, les deux compères furent les premiers à partir. Le règlement scolaire prohibait les stationnements au sein des salles afin d'éviter tout vol d'affaires personnelles -bien que dans cet établissement, les actes répressibles se comptaient sur les doigts d'une main.

« Et alors avec Jisu, il s'est passé quoi ? Hier soir tu as promis de me raconter. »

Un long monologue s'engagea.

/Début du flashback/

Devant les portes du cinéma, Jimin combattait ardemment ses peurs et se retenait de prendre ses jambes à son cou pour s'enfuir en cavalant. Par messages, ils avaient appris à se connaître. Plus les jours passaient, plus la curiosité les poussait à braver les limites des formalités et Jimin tombait toujours un peu plus raide dingue de la jeune fille.

Le duo prit place au centre de la salle de cinéma, un seau de pop corn niché entre les deux sièges. 

Avec subtilité, leurs coudes se frôlèrent et Jimin crut décéder sur place. La respiration suspendue, l'arrêt cardiaque n'était pas loin. Il ressemblait purement et simplement à un bâton perdu au beau milieu d'humains. À vrai dire, bien qu'il ait déjà flirté par le passé, il n'avait jamais autant pris à cœur ce type d'événements. 

Son ventre se mit à grouiller, un douloureux mal de ventre se profilait et il se maudit pour ne pas l'avoir anticipé. Le stress lui provoquait de multiples réactions physiques, tout comme son meilleur ami. 

Il s'excusa brièvement auprès d'elle et se rua vers les toilettes du cinéma.

/Fin du flashback/

« Et elle a compris ? s'enquit le plus jeune, compatissant.

- J'espère pas. Sinon je peux faire une croix sur nous.

- Eh, c'est pas une diarrhée aiguë qui va entraver votre amour.

- Ne remue pas le couteau dans la plaie... Ça va bientôt sonner, on devrait y retourner. »

Le soir venu, étalé disgracieusement sur son lit, Jungkook alternait entre divers réseaux sociaux dans sa nouvelle chambre. 

Celle-ci renfermait des meubles immaculés et flambant neufs. Son bureau, en bois d'acacia, supportait quelques cahiers tandis que sur sa table de chevet, une colonne d'annabacs se dressait majestueusement. Son armoire aux allures simplistes faisait face au lit ; chaque porte coulissante supportait un grand miroir en surface. De plus, moultes posters de films cultes recouvraient les murs de sa pièce, qui, d'ailleurs, faisait davantage étudiante que lycéenne. 

Quant à la maison, elle abritait deux étages en plus du rez-de-chaussée. Les pièces, bien fournies en matière mobilière, étaient pour la plupart dallées de carrelage. Ses parents n'avaient pas fait les choses à moitié, y ayant mis le paquet pour la simple et bonne raison qu'ils prévoyaient d'y vivre pour le restant de leurs jours. Le prêt bancaire sera rapidement remboursé, aucun risque pour que leur fils soit tenu d'assurer son recouvrement à l'avenir. 

Sa pause était à présent finie. Stimulé par une adrénaline nocturne, Jungkook s'attela sans plus attendre à son bureau. Et lorsqu'il ouvrit son cahier de mathématiques, quelque chose glissa furtivement d'entre les pages pour venir s'échouer sur la surface plane. 

Un simple carré de papier, à l'angle duquel une fleur blanche était collée. Mais son attention se porta sur l'écriture distinguée qui en comblait le centre.

« de quelqu'un qui t'aime et qui croit en toi »