Laval me regarde, tout penaud. A mourir de rire. Il me surprend, je ne m'attendais pas à ce qu'il fasse ça dans l'idée de filer le pognon pour la petite.
Là-dessus, je vais le soutenir. Il a fait une putain de connerie c'est clair, mais quelque part il n'a pas tort.

Dans cette histoire, c'est la gamine qui mérite ce fric.

Nous entrons dans la maison. Tom est en train de vider le lave- vaisselle, Matt épluche des patates.
Celui-ci nous regarde tous les trois.

- C'est à ce moment que je m'en vais ! dit-il en se levant.

- Non, Matt ! J'aimerais que tu restes, cela te concerne aussi, le stoppé-je.

Il s'appuie au plan de travail, croise les bras, et attend comme au spectacle. ( Il va s'éclater ! )
Tom, lui n'est pas forcément dans le même état d'esprit. Ça va chauffer : Laval va en prendre plein la gueule et moi aussi.

- Je ne sais pas par où commencer, dit Laval.

- Par le commencement, Laval, ça sera bien, commente sarcastiquement Matt.

- Matt, tais-toi ! rétorque Tom. Vas-y, Laval, on t'écoute.

Et celui-ci leur explique.

- Mais tu crois quoi, Laval ? Que je vais prendre ce fric ? hurle Tom. Putain ! Tu veux nous envoyer tous en taule ? Et toi, Peter ? Tu es notre chef, bordel ! Pourquoi tu ne lui as pas dit de se tirer ? Je suis en rage !

- Personne ne s'en est rendu compte, bébé ! ricane Matt.

- Matt, TA GUEULE !

- Non ! Je n'ai pas envie de la fermer, Tom ! Laval a joué au con, on est tous d'accord ! Mais personne ne le félicite, il me semble, réplique-t-il. L'argent, j'en ai pas grand chose à faire mais s'il a trouvé les films, il mérite des félicitations.

- Il a raison, et tu le sais, Tom, ajouté-je. On va aller là- bas, Laval et moi.
Nous allons jouer un rôle et crois-moi on va les trouver ces films. Qui est de service aujourd'hui Laval ?

- Mariani.

- Génial ! On a toutes nos chances alors !

- Je peux venir ? réclame Matt, comme le sale gosse qu'il est.

- Ta gueule, Matt !

- Vous les flics, qu'est- ce que vous êtes grossiers ! ricane cet idiot, mort de rire.

- Je sais vraiment pas comment tu le supportes, Tom, conclué-je désespéré.

Dans la voiture, je briefe Laval.
Il ne doit pas jouer au con. On va trouver les films, on sait où ils sont, mais il va falloir être vigilant. Mariani n'est pas très malin, mais il n'est pas con non plus. S'il découvre la vérité, il n'hésitera pas un instant : livrer Tom, Matt et moi en pâture à la presse serait un kiff total pour lui.

- On doit se débrouiller pour que ce soit Mariani qui trouve la cachette, dis-je.

***

(Tom)

Cela fait cinq bonnes minutes que Peter est parti avec Laval, et aucun de nous n'a dit un mot. Je sens le regard de Matt sur moi : c'est la première fois que je lui crie dessus et en plus devant du monde.

- Excuse-moi, soufflé-je. J'étais hors de moi ! Et...

- J'en ai rajouté une couche ! complète-t-il. Être là à t'entendre gueuler après Peter et Laval ! C'est la première fois que je te voyais dans cet état. C'est plutôt mon truc, non ? Et après cette rage, tu dis "je suis en colère" ma bouche a parlé avant mon cerveau !

- Je n'aurais pas dû te dire ça quand même, surtout devant eux ! m'excusé-je.

- Pas grave, je l'ai bien cherché, bébé, précise-t-il en s'approchant de moi. Cela m'a excité de te voir comme ça ! Regarde !

- En effet, dis-je en fixant son pantalon. Puisque c'est de ma faute, il faut que je me fasse pardonner ! Viens.

Et je l'entraîne vers la chambre.

***

(Matt)

Je me redresse sur les bras, Tom dort à côté de moi. Il a été une véritable furie, il a pris les commandes et j'ai adoré cela. Il va falloir que je le fasse sortir de ses gonds de temps en temps me dis-je à moi -même.

Il bouge, et se colle contre moi et me décoche un large sourire.

- Bonjour ! Tu es réveillé depuis longtemps ?

- Non. Je me disais que j'allais te mettre en rage plus souvent. J'aime quand tu prends les commandes! C'était waouh !

- Waouh ! A ce point ? Et ça m'a plu aussi de diriger, dis-toi bien ! Ce n'est pas souvent que tu me laisses le faire !

- Je note, je note. J'ai adoré être sous ton contrôle, chuchoté-je en l'enlaçant.

- Allez, on se bouge ! Si on veut accueillir la puce, il faut vider la pièce du fond et la meubler.

- On ira acheter un lit mais, en attendant, j'ai un lit de camp au garage. J'aimerais repeindre la pièce, elle est trop sombre pour une petite gamine.

- Lit de camp validé ! Debout ! dis-je déjà hors du lit.

- Tu as réfléchi pour le fric ?

- Oui. Je n'en veux pas. Pour moi, il est l'image de tout le mal que ces femmes ont subi. Je n'ai pas envie de lui faire plaisir avec cet argent. C'est malsain, tu comprends ?

- Bien sûr. On le met dans un coin et on verra plus tard, voilà ce qu'on va faire !!

***

( Peter)

L' équipe de surveillance nous laisse passer. Mariani, déjà sur place discute avec deux autres flics en civil que je n'ai jamais vu, sûrement une équipe de renfort.
Je vais vers eux, suivi par Laval.

- Brassac, officier responsable de l'enquête, bonjour.

- Valmi et Cremon, nous sommes envoyés en renfort des mœurs . Mariani nous faisait un rapide résumé !

- J'aime bien que les équipes qui arrivent prennent le temps de lire le rapport. Un œil nouveau déclenche souvent des questions. Mariani, je compte sur toi pour envoyer le rapport sur leurs mobiles au plus vite ! Bon, on en est où ?

- On patauge. Le bâtiment a été fouillé de fond en comble. Rien. Le chenil. A part la niche y a rien. Il reste la maison, explique Mariani.

- Elle n'est pas grande, deux pièces. Fouille complète, avec photo, c'est une scène de crime. Je veux être sûr que si y a du fric ou des films, on aura tout fait pour les trouver, d'accord ?
Laval, tu essayes de me contacter une entreprise pour essayer de faire des recherches. Les femmes qui ont disparu, elles doivent bien être quelque part. Mariani, tu t'occupes de la maison, je veux du boulot sérieux. Laval t'aidera dès qu'il a fini.

Mariani est tout content que je lui laisse fouiller la maison. Il ne va rien trouver, Laval a déjà fouillé et je sais qu'il n'a rien laissé passer.
Pourquoi ? Car c'est un bon flic tout simplement. Mariani n'est pas mauvais, il y a juste qu'il se fout de tout.

***

(Tom)

La pièce est vidée rapidement et en effet, elle mérite un rafraîchissement . En attendant, le lit de camp que Matt a récupéré au garage, une table de nuit, une lampe et une armoire et c'est déjà mieux.

- J'aime bien. Tu sais, elle vivait dans une niche alors ça sera un palace pour elle.

- Il faudrait aller faire deux trois courses. Ça mange quoi une petite de cinq ans au petit déjeuner ? Des céréales ?

Le téléphone sonne. Tom décroche.

- C'est la femme dont Peter parlait, chuchote-t-il en masquant le combiné.

- Mets le haut-parleur.

- Oui. Bonjour. Peter Brassac nous a dit que vous alliez appeler. Elle va avoir cinq ans. Plutôt menue. Sa pointure ? Aucune idée. Non c'est compliqué.

Matt me prend le téléphone des mains.

- Oui, bonjour Madame. En fait, cette petite ne peut être prise en charge par personne. Nous allons l'accueillir chez nous. Nous aurons des infos plus complètes dans la journée. Pourrions-nous vous rappeler à ce moment-là ? Ou si vous préférez que Peter vous appelle, lui ? Je vous remercie. Oui le numéro est affiché. Au revoir.

Et il raccroche.

- Depuis quand es-tu aimable ? Et à l'aise avec une inconnue ? lui fais-je remarquer.

- Ah ah! Très drôle ! Peut-être depuis que tu cries , et que tu te jettes sur moi comme une bête ?

- Bien joué.

- On mange et on va à l'hosto ? Ou on bouffe kebab en allant à l'hosto ?

- Alléluia ! Revoilà le Matt que je connais ! On mange et on va à l'hôpital.

- J'aurai essayé, grimace-t-il en haussant les épaules. J'appelle l'hosto pendant que tu mets la table ?

- Ben voyons...

- Bonjour ! Je suis Matt Farges. Je voulais prendre des nouvelles de la patiente chambre 12 en pédiatrie. Oui, c'est moi qui était avec le docteur... Quoi ? Pourquoi ne m'a- t-on pas appelé ? J'arrive d'ici une demi-heure. Laissez-la seule. Elle n'est pas méchante, elle a peur, s'énerve -t-il !