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Mathis, une patinoire et un peut-être

« Dimanche 15 janvier »

L'AIR ÉTAIT CHAUD, pluvieux et emmitouflé ; un ciel duveté où flânaient nuages paresseux et pigeons ennuyés, un soleil timide soulignait élégamment les joncs piqués, embrasant les sapins titanesques et enflammant un lac verdâtre où fleurissait non loin un champ de colza. Saint-Charles était particulièrement calme, figé en ce dimanche apathique. Les insectes vibrionnaient, les oiseaux fredonnaient et les élèves discutaient, hilares ou malheureux, joyeux ou fatigués, couchés sur une pelouse très verte, brouhaha discordant et rassurant.

Ariel quitta la cabine téléphonique en soupirant, ses yeux s'attardant sur le «peut-être» joliment griffonné sur la paroi en plexiglas, une main frôlant l'arête de son nez en un geste las. Mathis, recroquevillé sur le parpaing cale-porte, grisâtre et fêlé, intercepta son regard interrogatif, un sourire malicieux jouant sur ses lèvres charnues.

— C'est moi, déclara t-il fièrement, et Ariel se laissa choir à ses côtés, un sourcil haussé.

Aujourd'hui, le métissé arborait un blazer bleu marine – son éternelle cravate ornée de hérissons brisant la monotonie de son accoutrement, un short en jean baggy et les baskets de son meilleur ami, Camille. Sa chevelure hirsute tanguait au sommet de son crâne, la placidité de son corps dégingandé contrastait avec la mobilité de ses prunelles d'onyx et son index grattait machinalement le bitume.

— Le peut-être, dans la cabine, précisa t-il. C'est moi qui l'ai écrit, lors de ma première année à Saint-Charles, après une longue, très longue discussion avec Camille.

Mathis esquissa une vague grimace bouleversée, son regard d'agate soudain lointain. Il reprit difficilement contenance et continua:

— Qu'est-ce que représente un peut-être, selon toi, Leira ?

Perplexe et décontenancé, Ariel consentit néanmoins à répondre à son ami :

— Une éventualité ? Hasarda t-il.

Mathis secoua la tête et un grand sourire se dessina sur son visage auréolé de boucles chocolatées. Le garçon embaumait l'été, le café et l'enthousiasme. Ses iris galvanisés importunaient le soleil tant ils resplendissaient.

— Je te demande pas de me ressortir une définition balancée par Camille un jour de pluie, Leira, rétorqua t-il. Les mots ne correspondent pas toujours à la définition qu'on leur attribue, tu comprends ?

Non, Ariel ne comprenait pas réellement, alors il préféra se taire, patient:

— Un peut-être, c'est lunatique. Un peut-être, c'est bien plus qu'une éventualité sulfureuse. Ces mots représentent un doute, une probabilité, une hésitation, une appréhension, une globalité indiscernable. Un peut-être, c'est un virage en montagne, une bifurcation en forêt, un ralentissement inéluctable. Deux mots qui peuvent changer une opinion, un sentiment, une vie, un choix. Il ne faut jamais négliger un peut-être, tal vez, vielleicht, perhaps, Ariel. Perhaps... En anglais, c'est joli.

Son interlocuteur hocha la tête, les yeux plissés. Mathis avait toujours eu ce côté énigmatique et inexpugnable, malgré ses sourires affables et amusés, ses œillades graveleuses ou exaltées, ses bavardages passionnés et ses gestes pressés. Néanmoins, ces mots – peut-être – avaient une signification pour lui qui échappait complètement à Ariel, malgré ses efforts pour comprendre cette explication, confuse à ses yeux ( Tu comprendras plus tard, promit Mathis, confiant.)

Il aimait beaucoup ce garçon au teint basané. Son nez en flèche se plissait lorsqu'il riait, ses cheveux dansaient lorsqu'il marchait, sa cravate bringuebalait lorsqu'il s'énervait, ses lèvres frémissaient lorsqu'il réprimait une blague ; Ariel l'aimait pour ces détails insolites. Soudain, Mathis gémit, sa main massant douloureusement sa nuque, les yeux mi-clos.

— Est-ce que ça va ? L'interrogea Ariel.

— Des migraines, répondit-il, le teint blafard. J'en ai depuis les vacances de Noël.

Du revers de la main, il essuya la sueur sur son front.

— Je suis probablement encore un peu malade, ça va passer.

Un clin d'oeil railleur, un sourire resplendissant, son haleine caféinée caressant les joues d'Ariel, Mathis s'esclaffa mollement et ajouta:

— Peut-être.

« Jeudi 19 janvier »

Un hurlement déchirant lacéra la nuit, un sanglot bruyant sur les talons ; une respiration haletante, un gémissement contrit et Ariel se réveilla en sursaut, groggy, les yeux gonflés et la bouche pâteuse. S'il vous plaît, faites que ce ne soit pas une terreur nocturne, supplia t-il intérieurement, éreinté. Camille en avait fait une seule, en août. Il s'était mis à s'époumoner, ses pommettes luisantes et larmoyantes, gesticulant violemment et distribuant quelques coups de pieds impétueux au matelas, incontrôlable. Ariel s'en souvenait parfaitement ; ses doigts enfoncés dans les épaules du blond, une main plaquée sur ses lèvres irisées et l'intimant au calme, en vain. Le lendemain, Camille ne se souvenait plus de rien.

À pas feutrés, il rejoignit le blond et se laissa choir sur son matelas agréablement molletonné. Camille étouffa un sanglot et se pelotonna en chien de fusil, sa respiration bondissant sur son édredon aux effluves entêtants. Un cauchemar, souffla Ariel, légèrement embarrassé.

— Je suis tellement désolée, Ariel, sanglota son ami.

La gorge serré et l'estomac noué, Camille tâta son lit et immédiatement, ses doigts vinrent s'entremêler à ceux du brun. Camille se crispa, une appréhension grandissante torturant son esprit où trônait une confusion angoissée, une incompréhension désespérée, un enchevêtrement hanté et chaotique où se mêlait amour, colère et incertitude

— Tout est de ma faute, murmura Camille, terrassé par la culpabilité. J'avais douze ans, elle en avait neuf, ma scolarité s'écroulait, elle brillait, je me battais, elle argumentait. 

Un rire amer taquina sa gorge enrouée. 

— J'étais ignoré, elle était encouragée, j'étais un idiot, elle était raisonnée, j'aimais les garçons et elle aussi. C'était un vingt décembre, à la patinoire Niflheim. Je me souviens de leur slogan, Axelle le scandait tout le temps. "Survivrez-vous au monde de la brume ?". C'était une patinoire à thème, avec des gens costumés, des décorations, tu vois ? Axelle voulait y aller depuis des semaines. Elle en crevait d'envie, Mermaid.

Camille renifla, inspira profondément et continua:

— Alors, ce vingt décembre, alors que j'avais douze ans et elle, neuf ans, mes parents ont cédé. On est allés à cette patinoire. Je râlais car j'étais privé de jeux vidéo: une sale note, bêtement. Axelle rayonnait, elle a enfilé ses patins, confiante et elle a glissé sur la glace avec élégance. Je tombais, je hurlais, je m'ennuyais. Cet endroit, je le détestais. Je ne sais même plus pourquoi.

Camille secoua la tête, deux sillons humides dévalant abruptement ses joues brillantes, glissant maladroitement sur ses lèvres arquées en un sourire mauvais, dévasté.

— Je l'ai insulté, je crois, reprit-il. J'étais jaloux, terriblement jaloux, et en colère. Finalement, je l'ai poussé.

Un nouveau sanglot étreignit sa gorge, insoutenable. Ariel pleurait, car la suite, il l'avait deviné. 

— Je l'ai poussé, Ariel, et elle a percuté la barrière de sécurité. Elle est tombée, hébétée, puis elle a hurlé. Axelle était hystérique, elle affirmait ne plus sentir ses jambes, et je me moquais en pensant qu'elle me faisait marcher. À l'hôpital, le diagnostic a été sans appel. La moelle épinière a été touchée, paraplégie. Plus aucune sensation en dessous du nombril.

Ariel pleurait faiblement, la douleur de Camille lui transperçait littéralement le coeur: ces cauchemars, cette douche gelée, cette tension au réveillon ; il savait dorénavant, il comprenait enfin complètement ce blond aux zygomatiques torturés par un sourire énorme et perpétuel. Lentement, Ariel enlaça Camille et ils restèrent là, couchés sur ce matelas bombé et confortable, leurs jambes enchevêtrés dans la couverture et Ariel, son nez collé contre la nuque de Camille: Une Lune terne et éraflée, ténébreuse et éblouissante, son satellite tournoyant amoureusement à ses côtés.


« Samedi 28 janvier »


Une moue railleuse, une risette insolente, une fossette creusant sa joue bombée, deux tuyaux maladroitement enfoncés dans ses narines, Juan était là ; deux pétales mauves alourdissaient son regard fatigué, son teint blême et son menton saillant illustraient tristement son épuisement, il avait calée sa bouteille d'oxygène contre une chaise en plastique verte, à l'ombre du Petit Rocher – où le pénis âprement gribouillé resplendissait encore et toujours par son obscénité.

Le garçon avait pris trois bus différents avant de débarquer, la veille, à Saint-Charles, les jambes flageolantes et le visage exsangue: il était épuisé malgré l'excitation faisant luire ses iris caramélisés. ( «Le poète, tu m'as manqué ! Camille, Luca sans S n'a pas pu venir ? Je l'aime bien, ce type. Quoi ? Il veut se venger pour l'incident Maison Hantée ? J'ai hâte de voir ça et, aïe ! T'es fou ? » ) ; Alexis, une paille coincée entre ses lèvres gourmandes, sirotait un verre de vin, un livre « apprendre le grec pour les nuls » ouvert sur ses genoux. Désormais, sa chevelure platinée était très courte, une robe à fleurs vintage drapait son corps élancée, soulignant ses jambes fuselées, ses pieds enfoncés dans une paire de Doc Martens jaune, aux semelles endommagées par les années. Mathis avalait un SPASFON en grimaçant, torturé par une énième migraine.

— Je dois vous avouer quelque chose, confessa Juan en se grignotant les cuticules, fébrile.

Mathis délaissa la vieille radio négociée par Ariel chez Cerbère quelques mois auparavant - le boitier où s'entassait les piles usagées étant cassé, il essayait de le réparer avec du gros scotch ; Camille cessa son débat sur le jus de papaye avec Ariel ( « si tu verses ce truc extrêmement sucré et écœurant dans mon whisky, je t'étouffe avec ton propre bras, Mermaid ! » ) et Juan baissa les yeux, visiblement penaud.

— Non ! C'est impossible, je rêve ! S'exclama Ariel en posant une main sur l'épaule du plus jeune, tout sourire. Juan Torres serait-il... Gêné ? Le type qui a dansé sur du Wham à trois heures du matin, la nuit du réveillon, sur une route boueuse dans une ville paumée est gêné

Très théâtral, Ariel se laissa choir sur le sol, les bras levés au ciel. Camille explosa de rire, ce rire très bruyant, contagieux et exalté, ignorant — pour une fois — les jurons proférés à voix basse par le jeune garçon. Mathis se massa les globes oculaires, ses lèvres frémissantes trahissant son amusement, et Alexis lança une poignée de feuilles à Ariel, espiègle.

— J'ai pas le droit d'être ici, cingla Juan, et les gloussements moururent en un étranglement surpris. Ma condition ne me le permet pas. Alors si un géant débarque à Saint-Charles en braillant n'importe quoi en espagnol, pas de panique: c'est mon père. Un homme charmant. Une chose ! Il ne sait pas menacer les gens, alors ne riez pas. C'est une question d'habitude.

En effet, un colosse aux muscles noueux, au cou épais, aux narines palpitantes, à la peau hâlé, au nez proéminent et à la chevelure crépue et échevelée avait débarqué en fin de soirée non sans avoir préalablement incendié son fils au téléphone ( «si tu ne me dis pas immédiatement où tu es, je... Je mange ton chat, Juan ! » ; « J'ai un chat ? Depuis quand j'ai un chat ? » ) et s'était éclipsé en embarquant un Juan stoïque. À cette journée complètement dingue, Mathis avait commenté, hilare :

— Saint-Charles, les gars. Saint-Charles



«Samedi 11 février.»


Ils étaient là ; Ariel, Camille, Alexis et Mathis, dans la cours du lycée, non loin de l'édifice en forme de U. Des valises énormes, légères, vétustes, orangées, saphirs, brunes, besaces, cartables sacoches, une véritables palette colorée et bigarrée égayait Saint-Charles. Les élèves ricanaient, hurlaient, riaient, s'époumonaient ou s'étreignaient, affectueux et affectés en ce premier jour de vacances. Des chevelures rousses, brunes, ténébreuses, singulières, ondulées ou indomptables fouettaient l'air froid, surexcitées, leur diversité enivrant le soleil.

Avachie sur son énorme sac en toile rouge, une paire de lunettes rondes glissant sur l'arête de son nez, Alexis comptait les élèves en grec : ένα, δυο, τρία, τέσσερα... Elle passait les vacances chez son frère, à Toulon, radieuse. Sa tête roulant sur les jambes de cette dernière, Ariel somnolait légèrement, écoutant d'une oreille distraite les plaisanteries de Mathis. Le métissé passait les vacances dans les Pyrénées, en famille. Ariel et Camille restaient à Saint-Charles. Cette perspective réjouissait secrètement les deux adolescents.

— Mon père est là ! Annonça Mathis en saluant un homme, un peu plus loin.

Il était très grand, frêle et élancé, un sourire affable dansait sur ses lèvres charnues et un éclat ensoleillé faisait luire sa peau d'ébène.

— Amusez-vous bien à Saint-Charles, les péquenauds. Alexis...

— SI TU FREDONNES CETTE CHANSON, JE T'ÉMASCULE, menaça t-elle, provoquant les rires des élèves alentours.

— Je sais que je vais te manquer, ricana Camille en enlaçant brièvement son ami. Saint-Charles aussi. Ce lycée ne nous lâche jamais vraiment. Il est probablement maudit. Il faudrait enquêter là dessus à ton retour, mec.

Ariel soupira, son dos craqua légèrement et il salua Mathis en un geste indolent, fatigué. Alexis lui ébouriffa affectueusement les cheveux et il grogna :

— Tu reviens vite, hein Sihtam ?

Son ami eut un rire mutin, une moue enthousiaste, puis il lui adressa un sourire désarmant, éblouissant. Ses cheveux tanguaient lestement, sa cravate hérissons effleurait son buste en un mouvement fainéant, ses iris d'agate, étrangement placides, sondaient intensément Ariel.

— Perhaps, murmura Mathis en lui adressant une œillade complice.

Et il tourna les talons, tirant derrière lui son imposante valise noire, étonnamment sobre ; les roues crissaient et rebondissaient énergiquement sur l'asphalte érodé, murmure grésillant s'étiolant au fil de ses longues et maladroites enjambées. Bientôt, son pull pelucheux, gris et informe, ses boucles chocolatées, son pantalon bouffant et ses chaussettes dépareillées s'estompèrent nonchalamment. Ariel souriait en songeant aux paroles du métissé. «Il ne faut jamais négliger un peut-être, Ariel.»



corrigé —18/03/2017.

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