Chapitre VII
Il faisait nuit et froid, mon père avait préparé un feu pour nous réchauffer durant la nuit mais la neige menaçait de l'éteindre à chaque instant.
Ma première journée de chasse allait commencer à l'aube, il fallait que je m'endorme vite.
J'espère que l'on attrapera rapidement du gibier ! J'aimerais tellement chasser un cerf !
Telle furent mes dernières pensées avant de sombrer au pays des rêves.
Vers 5h mon père vînt me réveiller.
On mangea chacun un bout de quignon de pain sec avant de lever notre camps de fortune, d'atteler les chiens et de reprendre la route.
Père- Ma Fille...
- Oui ?
Père- Dans une semaine c'est Noël, tâchons de ramener la plus grosse pièce de viande possible ! D'accord ?
- Oui...
Père- Pardon !?
- Oui père !
Père- Hum...
Je préfère être avec papa... Maman est tellement méchante... Elle passe son temps à me hurler dessus...
On continua notre route.
Le soleil était désormais levé et la température remontait, légèrement.
Mon père nous fit faire une halte, au loin se tenait un troupeau de d'élans.
Père- Regarde... Me murmura-t'il en s'avançant, accroupi.
Il s'éloignait lentement du traîneau et, par la même occasion, se rapprochait du troupeau.
Il semblait si concentré, ses pas semblait si lent, son regard si dur, les traits de son visage aux rides naissantes étaient tendus et rougis par le froid que l'idée de l'imiter naquit dans mon cerveau d'enfant. Ce fut ma plus grande erreur.
En m'avançant je fis craquer quelques brindilles qui jonchaient le sol gelé, bruit qui alerta l'entièreté du troupeau.
Mon père tenta de tirer sur un élan dans l'espoir de le blesser, en vain.
Il se retourna vers moi et me lança un regard qui me rappelait mère.
Père- Qu'est-ce que tu n'as pas compris dans regarde !? On aurait put en tuer un si tu n'avais pas essayé de me suivre !
- Je... Je... Suis-
Je ne pus pas terminer ma phrase, un violent coup m'avait propulsé au pied du traineau. Je releva ma tête et croisa le regard déçu de père. Je sentis également quelque chose couler le long de mon front. Du sang.
Sous cette odeur plus qu'alléchante, les chiens tentèrent de se jeter sur moi.
Mon père attrapa son fusil et frappa violemment sur le museau de l'un d'entre eux. Il m'attrapa par la suite par le col et me posa sur le traîneau. Il prit ensuite le petit sac de soins et désinfecta ma plaie à l'alcool.
- Tu es comme Mère...
Père- Oui. Je peux être comme ta Mère quand tu ne respectes pas les ordres.
- Tu vas me déshabiller ?
Père- Quoi !?
- Pour me punir tu vas faire comme Mère ?
Père- Comment ais-je bien pus aimer une telle horreur... Lorsque l'on rentrera j'en discuterai avec elle. Déjà qu'avec ça règle de "Père, Mère" elle m'agaçait... Maintenant tu m'appelleras Papa.
- Je ne veux pas que Mère se fâche.
Père- Mon dieu... Quelle enfance je t'ai donné...
Il me regarda avec tristesse, mais je vis néanmoins ses yeux s'assombrir et ses lèvres se pincer.
Je le regarda en retour avec un visage neutre.
Père- Tu écoutes les ordres...
- Oui.
Père- Je veux que peu importe la situation tu souris. Tu fasses comme si tu étais heureuse. D'accord ? Je ne veux pas d'une enfant malheureuse, je ne l'ai jamais voulu. Alors souris. C'est un ordre.
Je pencha la tête sur le côté, et me forçait à esquisser un léger sourire.
- Bien Père !
Suite à cette discussion, il enroula un bandage autour de mon crâne, puis se leva et lança les chiens.
La nuit tombait, et nous n'avions même pas réussi à tuer un simple lapin pour nous nourrir ce soir. J'étais fatiguée et j'avais faim, moi qui était habituée à toujours avoir le ventre plein, je regretta de ne pas être chez moi.
Mon ventre gronda, et père me regarda avec amusement.
Père- Demain nous attraperons bien quelque chose, mais ce soir nous dormirons le ventre vide et les chiens aussi malheureusement...
- Oui Père.
Père- Dors maintenant.
- Oui Père. Bonne nuit Père.
Il se contenta simplement en réponse d'hocher la tête, avant de se glisser dans son sac de couchage.
Le lendemain, je fus la première à me réveiller, il faisait encore nuit, et je ne voyais pas le bout de mon nez, pour cause, le feu s'était éteint dans la nuit suite au fort vent qui avait sévi.
Je me leva donc pour aller faire mes besoins dans un coin, entre deux racines d'un arbre.
En revenant, je vis mon père debout, entrain de ranger le camp.
Père- Ah ! Tu es là ! Viens m'aider !
J'ai faim...
- Oui père.
Lorsque cela fut fait, nous reprîmes la route.
Les chiens avançaient plus lentement que la veille, et étaient moins bruyants.
Moi je serrais mon manteau pour me tenir un peu plus chaud.
Père- Le temps a était clément hier... Aujourd'hui ce ne sera pas le cas...
Ce fut les deux seules phrases qu'il prononça.
Plusieurs heures s'étaient écoulées depuis mon réveil, et toujours pas la moindre trace d'un quelconque animal.
Plus le temps passé, plus la faim et la fatigue prenait de l'ampleur.
Père- Bon... Il va falloir faire une halte pour faire boire les chiens. Viens. Je vais t'expliquer comment on va procéder.
Je m'approcha de lui, et il m'enseigna que les chiens n'avaient pas besoins de bols pour boire, il leur suffisaient de lécher la neige pour se s'hydrater.
Il fit un feu pour faire chauffer de la neige, tout en laissant un couvercle au dessus de la casserole.
Père- Dans une demie heure nous pourrons boire.
- J'ai faim...
Père- Hum... Si tu n'avais pas fait de bruit hier, tu n'aurais pas faim.
- Tu m'as dit de regarder. Pas de ne pas te suivre.
Père- La ferme ! Moi aussi j'ai faim ! Et je ne m'en plein pas, moi !
- J'ai faim !
Père- Je m'en moque ! À la base je devais t'emmener chasser avec moi pour te tuer après avoir attrapé quelque chose ! Tu as tout fait foiré !
Une étrange sensation prit place au creux de mon estomac, des gouttes salées se mirent à dévaler mes pommettes rougies par le vent glacé. Des larmes, qui arrêtèrent subitement de couler. Un sourire déformé prit place sur mon visage.
- Quelle que soit la circonstance, je dois sourire.
Mon père me regarda avec frayeur.
Mais je m'en moquais, j'avais faim.
Une faim insoutenable, qui me tiraillait, me faisait souffrir le martyr.
Père- Tes... T'es yeux ! Je... Je...
Une décharge électrique traversa mon corps, terriblement douloureuse.
Un craquement retentit, accentuant encore plus la douleur, mes membres s'allongeait, s'affinaient, me faisait ressembler à une chose inhumaine, et monstrueuse.
J'étais à la fois consciente et inconsciente. Mais je pus tout de même voir le visage terrifié de mon père. Je ne comprenais pas, mais mon corps bougeait seul, obéissant à la seule chose qui me rongeait.
La faim.
Je m'en souviens maintenant...
Pour devenir un wendigo, il faut être passé par, au moins, quatre de ces étapes :
Être affamé, avoir le cœur totalement brisé, ne plus ressentir d'émotions pendant un court laps de temps, et pour finir, céder à la faim.
La faim la plus insatiable qui puisse exister.
L'envie de chaire humaine .
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