CHAPITRE LXXI
Christopher déposa une assiette fumante sous le nez d'Alexandra, en attendant qu'elle y goûte, mais elle fronça son petit nez en s'éloignant le visage du repas.
- Tu n'as pas confiance en mes aptitudes culinaire ?
- Si, mais je n'ai plus envie de manger ce plat.
- Pourquoi ? Goûte au moins avant de dire que tu n'en veux pas.
- Je sais ce que je veux ! Et si je te dis que je n'ai pas envie d'en manger, c'est que je n'ai pas envie d'en manger Angel. Donc arrête d'essayer de m'y contraindre. S'énerva une fois de plus Alexandra en se mettant à pleurer abondamment. Elle repoussa violement le plat, puis se mit debout avec difficulté.
Christopher n'était pas surpris par sa nouvelle agressivité. Elle avait les nerfs à vifs depuis quelques semaines, et pleurait ou s'énervait très facilement pour un rien, encore plus qu'au début de sa grossesse. Ce qui en revanche lui comprimait la poitrine, c'était de voir qu'il était responsable de cette situation et qu'il n'était même pas capable de faire quelque chose pour l'aider, si ce n'est tenter de se plier à ses besoins qui devenait de plus en plus pointus.
- Essaie de te reprendre Alexandra. Ce n'est pas bon de t'énerver dans ton état. Tu vas faire grimper ta tension et ça pourrait être dangereux pour vous. Dis-moi tout simplement ce que tu veux et je tâcherai de te le trouver. Intervînt doucement Christopher pour l'apaiser.
Il s'approcha d'elle comme pour ne pas l'effrayer, et essuya ses larmes. Elle hoqueta en allant de lover autant que possible dans les bras de Christopher malgré le barrage que faisait son énorme ventre.
- Dis-moi ce dont tu as envie Alexandra. Lui dit-il d’un ton apaisant.
- J'ai envie de manger ce plat sucré qu'on avait dégustés dans le restaurant jamaïcain il y'a trois semaines en rentrant de notre consultation avec le docteur Bull.
- La banane plantain ? Demanda Christopher après un court temps de réflexion.
Comme une enfant, elle acquiesça de la tête avec un regard plein de supplique.
- Très bien, je vais t'en chercher. Approuva alors Christopher en posant ses lèvres sur les siennes dans un baisé chaste.
Il aurait été plus simple pour lui d'envoyer quelqu'un chez le cuisinier pour régler ce problème, mais il préférait y aller lui-même. C'était le minimum qu'il pouvait faire pour elle.
- Allonges toi, et dès que je suis de retour je vais te réveiller. Proposa Christopher en l'aidant à s'asseoir sur le lit.
- Tu me le promets ?
- Oui, je te le promets mon ange. Tu mangeras ton plat ce soir, ou plutôt ce matin, si on se fie à l'heure qu'il fait.
Christopher rabattit la porte de la chambre et parti en direction de l'ascenseur. Son téléphone en main.
- Bonjour Isaac, c'est Christopher.
- Christopher ? Tout va bien ? Demanda Isaac d'une voix fatiguée.
- Oui, mais j'aurais besoin que tu me fasses une faveur.
- Tout ce que tu veux.
- Mon épouse est enceinte, et elle a certaines envies dont une concerne les frites de bananes plantain que tu sais si bien faire. Je voudrais donc que tu m'en fasses frire, le temps que je vienne les récupérer. Je paierai dix fois le prix s'il le faut.
- Je te comprends, je suis passé par là moi aussi. La mienne voulais manger indien à des heures improbables. Et combien de fois dois-je te dire que tu n'as pas besoin de payer pour quoi que ce soit ? Je n'ai pas oublié que sans ton aide je n'aurai jamais eu de restaurant. En plus ça me fait plaisir de savoir que je peux t'aider pour quelque chose.
Elle les veut croustillant ?
- Non, mais vu que ses gouts changent très vite, fais-en des croustillants, et des moelleuses.
- J'y vais de ce pas alors.
- Merci. Je serai là dans vingt-cinq minutes.
Ce n'était pas la porte à côté, mais vu l'heure, il y'aurait très peu de monde sur la route, et à grande vitesse, il y serait en vingt-cinq minutes.
Quand Christopher entra dans la chambre moins d'une heure après, il trouva Alexandra assoupie sur son côté à lui du lit, avec son oreiller en main. Elle était tellement belle avec ses belles joues rondes, et ses sublimes lèvres roses pulpeuses. Il la regarda pendant quelques minutes, en hésitant à la réveiller. Mais s'il ne le faisait pas elle risquait de piquer une de ses grosses colères à son réveil. Et ça ce n’était ni bon pour elle, ni pour les enfants.
- Alexandra, réveille-toi. Je suis là. Lui murmura Christopher en prenant place près d'elle.
Après quelques doux appels, elle finit par ouvrir les yeux, puis avec son aide, elle se redressa tout sourire quand elle le vit.
- Tiens, lui dit-il en déposant deux thermos entre ses jambes ouvertes. Je ne savais pas si tu les voulais croustillants ou pas alors j'ai pris les moelleux en plus.
- Merci.
Elle sourit comme le ferait un enfant devant un sapin de Noël couvert de cadeaux, et ouvrit l'une des thermos. Elle inspira l'odeur sucrée de la friture en savourant d'avance son goût à la fois sucrée et salée. Exactement comme elle aimait maintenant tous ces repas. Elle prit une frite, la porta à sa bouche et se mis soudainement à pleurer comme sur commande.
- Qu'est-ce qu'il y'a, tu t'ais brûlée ? Demanda Christopher avec une mine inquiète.
Elle agita négativement de la tête en continuant néanmoins de pleurer.
- Tu n'aimes pas ? Si c'est le cas on peut trouver autre chose.
- Si j'aime, répliqua Alexandra dans un sanglot.
Christopher comprenait de moins en moins la situation.
- Alors où est le problème ?
- C'est moi le problème Angel. Je suis devenue insupportable, je suis toujours en train de soit te crier dessus, de soit pleurer comme une fontaine. Alors que ce n'est pas ce que je veux. Même actuellement je n'ai pas envie de pleurer, mais je ne peux pas m'en empêcher. Mon ventre doit faire au moins un mètre de circonférence, je ne vois plus mes pieds depuis que j'ai atteint mon quatrième mois de grossesse. J'ai mal au dos, j'ai les pieds enflés, mes seins ont doublés de volume, et sont douloureusement lourdes. Je suis affreuse. Finit-elle en larmes.
- Alexandra, mon ange regarde-moi. La jeune femme releva ses yeux humides vers lui. - Est-ce que je me suis un jour plains de la personne que tu es devenue ? lui demanda-t-il alors.
Alexandra agita négativement de la tête.
- C'est parce que pour moi tu es toujours magnifique. J'aime toutes tes nouvelles rondeurs. En plus ton ventre ne fait pas à un mètre de circonférence, il est tout juste à quatre-vingt-dix-sept centimètres.
Toujours en larmoyant abondamment, Alexandra pouffa de rire face à sa précision, en lui administrant un petit coup sur l'épaule. Christopher fit mine d'être blessé avant de reprendre une voix sérieuse.
- C'est plutôt à moi de te présenter mes excuses. Je suis en grande partie responsable de ton état, et je ne peux rien faire pour te soulager.
- Tu fais déjà beaucoup pour m'aider. C'est moi qui suis ingrate. Je n'arrête pas de passer mes nerfs sur toi. Je ne contrôle plus mes envies et besoins. Mon corps m'est devenu étranger. Et pour clore le tout, deux des bébés souffrent d'un problème de poids. Je suis tellement brisée que mon propre corps n'est capable de nourrir correctement mes propres enfants.
- Alexandra, l’appela-t-il pour attirer son attention. - Je ne t'en veux pas. Quant aux poids des jumeaux, c'est uniquement dû au fait que tu as été souvent malade ces temps-ci, et que tu n'as pas pu te nourrir aisément. En plus le médecin a dit que ce n'était pas critique. Si on suit à la lettre ses recommandations, et que tu continues à t'alimenter normalement tout ira bien.
- Mais si...
- Alexandra, regarde-moi. L'interrompis une fois encore Christopher en lui prenant la main. Tout ira bien. Dans quelques mois tu tiendras contre toi quatre bébés aux cheveux de feux comme le sont ceux de leur mère. Lui dit-il d'une voix sereine et rassurante.
Elle acquiesça en posant son front sur l'épaule de Christopher. Il lui caressa les cheveux, en lui murmurant quelques mots réconfortants.
Le médecin l'avait prévenu que des moments comme ceux-là seront de plus en plus fréquents, et qu'il faudrait toujours trouver le moyen de la rassurer. Alexandra devait rester calme autant que possible, sa tension n'était pas bonne, mais rien d'alarmant pour l'instant. Les bébés allaient bien pour la majorité, il n'y avait pas de cas de siamois, ce qui était déjà en soi une bonne nouvelle. Leurs organes étaient normalement constitués, et s’il n'y avait pas le problème de poids dont souffrait les jumeaux, et la petite hausse de tension d'Alexandra, on pourrait dire que tout allait bien. Cependant le docteur Bull l'avait également dit que ces derniers mois seraient très importants, il était évident qu’Alexandra n’allait pas atteindre le terme, mais il fallait tout faire pour garder les bébés à l'intérieur aussi longtemps que possible. Toutes ces choses mises ensemble inquiétaient Christopher bien plus qu'il ne le laissait voir.
Mais ce qu'il appréhendait présentement, c'est que dans moins d'une semaine se sera l'anniversaire d'Alexandra, et donc, le jour où elle avait assisté à l'effondrement de sa vie, et il ne savait pas comment elle réagirait. Il balaya toutes ces pensées aux coin de sa tête, et c'est avec une expression soulagée, qu'il regarda Alexandra finir la première thermos puis attaquer la deuxième avec entrain.
- C'est bon ? S’enquit-il quand elle eût avalé le dernier morceau.
- Oui, mais j'ai encore une petite place pour le poulet que tu m'as préparé.
- Tu sais que tu ne dois pas te sentir obligé d'en manger ?
- Je sais, mais les enfants ont envie de goûter le plat que leur père les a concoctés, et leur mère également.
Christopher récupéra les deux thermos, les déposa dans la cuisine, et sorti l'assiette du frigidaire pour le passer au micro-ondes. Quand il remonta dans la chambre, il vit qu'elle avait troquée sa robe de nuit contre un bustier qui lui comprimait la poitrine à tel point qu'on aurait dit que ses seins voulaient s'en échapper. Son énorme ventre tendu, était strié de vergetures par endroits. Et il ne l'avait pas menti tout à l'heure, car il la trouvait toujours aussi belle.
Christopher lui remit l'assiette, et prit un de ses pieds pour les masser délicatement. Il ne pu empêcher ses yeux de se poser sur sa nouvelle poitrine ronde et ferme, aux nouvelles grandes dimensions. Ça fait plus d'un mois qu'il ne l'avait pas touché. Il les imaginait entre ses mains, pour estimer quelle taille ils feraient désormais s'il les prenait au creux de sa paume.
- Ne me regarde pas ainsi si tu n'as pas pour objectif d'aller plus loin. Lui dit Alexandra à voix basse en léchant le jus de poulet qui lui recouvrait l'index.
- Et comment je te regarde ? Demanda-t-il d'une voix espiègle.
- Comme si tu allais bientôt me sauter dessus, mais nous savons tous les deux que tu ne le feras pas. Donc arrête de m'allumer, vu que tu ne veux pas jouer au pompier avec moi.
- Tu es certaine que tu ne veux pas qu'on aménage dans la chambre du bas ? Il y'a un nouveau lit spécialement conçu sur mesure pour ton état. Ça réglera tes problèmes de dos. Fit-t-il en éludant la réponse d’Alexandra. Et si on va au rez de chaussée, tu seras plus proche de la cuisine. Ajouta t'il quand il la vit agiter négativement de la tête.
- Non, je suis bien ici, cet ce lit est parfait pour moi.
- Alexandra, c'est pour ta sécurité. Déclara Christopher pour lui faire comprendre qu'il ne discuterait pas.
- Joker !
Christopher fronça des sourcils en ne comprenant pas où elle voulait en venir.
- Non, Alexandra. Refusa-t-il quand il comprit enfin.
- Si. Tu m'avais promis que dès que je dirais ce mot tu m'accorderais ce que je te demanderais.
- J'avais dit qu'on en discuterait, et là c'est pour votre sécurité. Et le sujet de votre sécurité n'est pas ouvert au débat Alexandra.
- Angel, ne m'oblige pas à partir. Supplia-t-elle d'une voix basse. Je me sens en sécurité ici. Si tu veux je peux te promettre de ne plus jamais quitter ce lit, encore plus que je ne le fais maintenant. Mais ne m'oblige pas à partir. C'est dans cette chambre que se trouve tous mes souvenirs, il y'a ton odeur partout. Mon premier baisé avec toi à eut lieu là, ou milieu de cette chambre. La première fois où j'ai dormi sur ce lit c'est quand j'ai accepté d'être ta petite amie. C'est ici que j'ai dit mes premiers mots après neuf ans de silence. C'est encore ici que tu m'as fait l'amour pour la première fois. Alors non, je ne compte pas partir pour une chambre que je ne reconnais pas, et encore moins changer de lit.
Christopher se souvenait parfaitement de tous les instants qu'elle venait de citer. Ce premier baiser à bien faillit le faire sauter les neurones. La fois où elle l'a parler était l'un des plus beaux jours de sa vie. Et celle où il a couché avec elle, était tout simplement l'apothéose. Il écrasa ses lèvres contre celles d'Alexandra, et l'entraîna pour un baiser fougueux et intense. Quand il s'écarta d'elle pour reprendre son souffle, il vit la belle couleur rouge se diffuser sur ses belles joues rondes, et ses lèvres roses gonflées. Les yeux d'Alexandra brillèrent de désir, il fit mine de ne pas le voir, et récupéra l’assiette vide avant de l’obliger à s’allonger.
- Pourquoi est-ce que tu étais si doux, si parfait et si attentionné avec moi ? Demanda Alexandra en se remettant à pleurer comme elle le faisait régulièrement.
- Parce que je t’aime. Lui dit-il alors en posant ses lèvres sur son front dans un baiser protecteur, et bienveillant.
Les joues toutes rose, Alexandra changea de position afin de se coucher sur son torse. La main de Christopher reposait sur son ventre qu'il gratifiait de légère caresse circulaires.
- Tu vas les réveiller Angel. Murmura Alexandra d'une voix soudainement fatiguée.
Les faibles rayons du soleil apparaissaient, annonçant ainsi l’aurore. Alexandra se mit à somnoler quand les bébés commencèrent leur gymnastique.
- Je te l'avais dit. Tu sais bien que c’est ce qui se passe à chaque fois que tu me touches le ventre. Le gronda-t-elle doucement en souriant.
Mais il ne l’écoutait que d’une seule oreille, plutôt émerveillé en regardant le ventre d'Alexandra s'étirer quand les petites épaules, ou les petits pieds des bébés poussaient dessus. Il ne se laissait jamais de voir ce spectacle. Il continua de les toucher à travers la peau d'Alexandra. Son cœur se gonflait d'une joie pure. C’étaient ses enfants, et ils étaient tous vivant. Un sourire naquit sur son visage, et sans qu'il ne s'en rende compte, dans un léger murmure, il leur parla pour la toute première fois.
- Bonjour vous.
Comme attirés par la voix de leur père, tous les bébés se mirent à s'agiter à tour de rôle, et lorsqu’au bout d’un certain temps, il releva les yeux du ventre de sa femme, il vit que cette dernière le regardait tendrement les larmes aux yeux.
« Je t’aime » lut-il sur les lèvres de la jeune femme. Il l’embrassa avant de remettre les yeux sur le ventre proéminant d’Alexandra.
- Tu as mal ?
- Seulement quand celui qui se trouve sur mon flanc droit s'y met. Exactement comme ce qu'il est en train de faire présentement. Ajouta Alexandra en prenant la main de Christopher pour la poser à l'endroit où l'enfant tapait du pied. D'ailleurs je soupçonne ce dernier d'être un garçon.
Christopher ne releva pas la phrase d'Alexandra. Il ne se sentait pas prêt à parler de ça. Mettre un sexe sur l'image qu'il avait des enfants était une manière de les rendre encore plus réels. Il se contenta donc de caresser mère et enfants jusqu'à ce qu'ils s'endorment tous, avant de lui-même les rejoindre pour quelques heures de sommeil.
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