☾5☽| Fronte al fatto compiuto
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♫ 𝘵𝘩𝘦𝘴𝘦 𝘣𝘰𝘰𝘵𝘴 𝘢𝘳𝘦 𝘮𝘢𝘥𝘦 𝘧𝘰𝘳 𝘸𝘢𝘭𝘬𝘪𝘯' - 𝘕𝘢𝘯𝘤𝘺 𝘚𝘪𝘯𝘢𝘵𝘳𝘢 ♫
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FRONTE AL FATTO COMPIUTO
interview de Camille
« avec qui te sens-tu le plus proche ? »
❝ Lola Fargeau et Jeanne Dubois.
nous sommes toutes misérables,
et c'est ce qui me rassure.
Je me dis : ah, Cam, t'es pas la seule
à avoir une vie minable❞
Galeries LaFayette, l'un des nombreux centres commerciaux de luxe de la région, voyait défiler au quotidien des centaines de personnes prêtent à faire du lèche-vitrine en espérant un jour avoir l'objet de leur convoitise entre les mains. Sans compter les gens assez loufoques pour réellement investir en babioles chics qui ne les suivront jamais en Enfer. Ou au Paradis.
Paris n'avait pas changée, ses pigeons insolents se promenaient toujours avec autant de liberté que trois demoiselles charmantes venues de l'un des arrondissements chics de la ville. Camille Bourgeois, Lola Fargeau et Jeanne Dubois vivaient pour leurs quelques heures de temps libre à crevasser sur des terrasses de cafés parisiens, visiter des musées d'art moderne ou faire du shopping.
Aujourd'hui, spécialement, elles avaient décidé de faire claquer les talons de leurs bottes contre le sol carrelé du gigantesque repère des bourses blindées de cartes de crédits. Pour ainsi dire, faire du lèche-vitrine avec une expression dépitée leur faisant office de "make-up". Elles étaient de vraies bourgeoises-bohèmes quand l'excès des prix était plus qu'excessif, ma foi !
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CAMILLE
Ce dernier mois avait filé à une vitesse étonnante. Les vacances de Noël se rapprochaient à grands pas, tout comme les examens de fin de semestre, malheureusement. Mais le plus important était que je n'avais plus revu Gabriel depuis ce fameux jour. À vrai dire, j'avais cessé de me rendre à la boulangerie. J'avais cessé de le faire et pourtant, il m'arrivait toujours de penser à Gabriel.
Les jambes en compote dans nos bottes cuirassées, cela faisait une bonne heure que nous traînions des pieds dans le centre commercial. Sans rire, de vraies mollusques qui avaient revêtu leurs capes invisibles de journalistes de mode ! Lola détailla avec dédain le dernier trench-coat Saint-Laurent en gabardine à deux milles euros, les mains magnifiquement enfouies dans le sien de chez Zara.
— C'est une aberration, proféra-t-elle en ouvrant les yeux en grand devant le mannequin exposé. Si un jour l'envie d'acheter un vêtement à un prix aussi ridicule me prend, pitié, tuez-moi sur le champ.
Jeanne caressa lentement la chevelure dorée de Lola tout en acquiesçant avec vivacité, ce qui avait le don de faire gambader sa frange effilée noire de jais. Après quoi, elle déclara sur un ton amusé :
— Crois-moi, je le ferais et ensuite je me gênerais pas pour piquer tes surligneurs pastel que tu chéries tant, chouchoute.
Le sourire bridé mi-taquin mi-sérieux de Jeanne m'arracha un rictus franc, le seul de la journée si j'en crois mon rire déraillé. Lola croisa les bras contre sa poitrine avant de m'interroger du regard, et au vue de son insistance accablante, j'en déduisis qu'elle attendait mon avis sur le sujet. Je vous assure, avec elle, toutes les discussions étaient sérieuses...
— Jamais je ferai un séjour en taule pour homicide volontaire, rétorquai-je en m'intéressant de plus près à ledit manteau. Quoique, "un séjour" tout court en prison ne fait pas partie de mes projets de vie.
Tout de suite, Lola sortit un vieux mouchoir usé de l'une des poches de son trench-coat. Elle feignit ensuite d'essorer des larmes de crocodile presque aussi inexistantes que celles d'une veuve faussement éplorée. Eh ouais, c'était Lola tout crachée ! C'est-à-dire, une sacrée blondie emmerdeuse mais des plus cocasses, parfois.
— Bien sûr, je ferai tout mon possible pour t'éviter l'inculpation, Jeanne, gloussai-je en laissant tomber la manche du vêtement de luxe. Un bon avocat devrait faire l'affaire, non ? Comme Harvey Specter, ce séduisant beau gosse...
Les filles papillonnèrent des cils tout en me dévisageant ouvertement. À croire que je venais tout juste de sortir d'un vaisseau spatial en leur annonçant d'une voix monstrueuse, que la population humaine allait être vouée à l'extinction.
— Je croyais que tu détestais Harvey Specter, dit Jeanne en se remettant d'entrain en marche vers les portes de sortie du centre commercial, les claquements retentissants de nos bottes, à Lola et moi, la suivant de très près.
— Rectification, elle ne le détestait pas, mais le haïssait carrément ! intervint Lola, à deux doigts de me claquer un battant au nez. (Elle se donna de grands airs je-m'en-foutistes et poursuivit en imitant ma voix). "Alors oui, Harvey est charismatique, mais au fond c'est juste un prétentieux qui excelle dans sa profession" et blablabla...!
Je réajustai tel un robot le col de ma veste en cuir dès l'instant où mes talons frôlèrent le sol extérieur, et zippai la fermeture de celle-ci.
— "Je comprends pas pourquoi on l'adule tant, c'est un monsieur j'ai-réponse-à-tout et je-suis-le-plus-futé-des-furets !", enchaîna Jeanne en faisant des gestes théâtraux tandis que nous nous faufilions entre les touristes.
Des mèches vinrent soudainement fouetter mon visage lorsque le vent se leva durant quelques secondes, me freinant dans mon élan. Non mais je rêve, elles se moquaient ouvertement de moi !
— Je vous rappelle que je n'étais qu'à la toute première saison quand j'ai critiqué le Magnifique Harvey, me défendis-je.
Nous arrivions sur la terrasse d'un café du coin dont quelques sièges étaient occupés par d'énormes ours en peluche. Vous savez, ce genre de spots réputés pour jouer les mannequins sur les réseaux sociaux ? Eh bien, Lola et Jeanne aimaient y passer la moitié de leur temps !
— "Le Magnifique Harvey", nom d'un chien ! pouffa Jeanne tout en tirant une chaise, suivie par Lola qui fit semblant de vomir.
— Je risque de vous marcher dessus avec mes talons, attention, leur souris-je.
J'aurais bien aimé leur faire part de mes dernières trouvailles en termes de "beautés divines" — parlant art — en décrivant l'Ange Gabriel. Mais elles risqueraient tellement de me coincer au mur qu'avant même que je n'aie le temps de cligner de l'œil, tous les détails croustillants de mon aventure secrète avec Gabriel fuiteraient de mes lèvres.
Elles étaient réellement un danger pour moi. Et je ne devais en aucun cas attiser les soupçons sur ce que j'avais fait pendant la soirée ouverte de ce Luca, le fameux hôte italien. Car tout comme les conséquences de la curiosité de Pandore, la leur signera le commencement d'un voyage sur la route du déshonneur parental.
꒱࿐
Une bise glaciale de décembre s'engouffra, une nouvelle fois, à travers la fenêtre de ma chambre que j'avais expressément ouverte pour évacuer l'odeur de peinture. Et quelque temps après, deux trois feuilles de dessin ornant mon bureau virevoltèrent dans la pièce. Ces deux actions se répétèrent éternellement sans pour autant m'extraire de ma bulle.
On toqua soudainement à la porte, et trois secondes plus tard, la voix rauque de mon père perturbait déjà mon espace personnel. Il s'avança vers moi en m'annonçant qu'on allait recevoir un ami à lui ce soir. Arrivé à ma hauteur, soit devant une Camille en piteuse état, assise sur un tabouret de chambre, il marmonna : Ce tableau est déroutant.
Sa remarque me fit sourciller un instant mais pas assez pour que je daigne lui inciter à développer son ressenti, étant trop absorbée par mon travail de finitions. Ce tableau n'était supposé que représenter le mouvement d'une caresse intime en suspension, et rien d'autre; m'enfin, aux yeux du reste du monde parce que j'étais bien la seule à en connaître la symbolique.
Néanmoins, les bras croisés, et tout en touchant délicatement sa barbe poivrée d'une main, mon père poursuivit tel un critique d'art de renom international :
— C'est un peu différent de ce que tu peins habituellement. Une espèce de douceur interdite émane de cette toile... Mais si on regarde attentivement, elle ne change pas tant des précédentes. Cette scène paraît joyeuse aux premiers abords, et pourtant, elle ne dégage que des sentiments de froideur, tristesse et mélancolie... L'artiste essaye toujours de peindre un moment joyeux qu'elle a vécu mais finit par être noyée dans son état d'âme du moment.
Mes membres se paralysèrent tout à coup. Ensuite, le pinceau que je tenais jusqu'ici alla misérablement s'échouer dans le bocal d'eau situé au pied de mon chevalet en bois.
— Le choix de ne pas dévoiler le visage des personnes représentées montre à quel point ce tableau est intime au peintre. (Il se tourna vers moi). C'est qui l'heureux élu ?
— L'heureux élu...? manquai-je de m'étouffer avec ma salive.
Oh là là, je comprenais maintenant ce que Roxanne, dans Barjazet de Racine, sous-entendait lorsqu'elle avait dit que l'amour le plus discret laissait par quelque marque échapper son secret !
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fronte al fatto compiuto :
devant le fait accompli.
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