☾3☽| Camille, dans la ligne de fuite
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♫ 𝘪𝘯𝘵𝘰 𝘺𝘰𝘶 (𝘮𝘢𝘭𝘦 𝘷𝘦𝘳𝘴𝘪𝘰𝘯) - 𝘈𝘳𝘪𝘢𝘯𝘢 𝘎𝘳𝘢𝘯𝘥𝘦 ♫
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CAMILLE, DANS LA LIGNE DE FUITE
interview de Gabriel
« si je te dis "Camille", que répondrais-tu ? »
❝ elle est aussi souriante,
et parfois surprenante,
qu'énigmatique ❞
La peur, ce sentiment qui tourmentait des milliards d'êtres humains. On avait peur de tant de choses, parfois futiles pour vivre passionnément : l'échec, la solitude, l'abandon, et même la mort. Gabriel Richard, lui, du haut de ses vingt ans, avait toujours été effrayé à l'idée d'être délaissé. C'était bien connu chez les Richard, les femmes finissaient toujours par s'en aller, à l'instar de sa mère. C'était la raison pour laquelle, Gabriel préférait disparaître avant de s'enticher d'une quelconque demoiselle à un point où, le départ soudain de celle-ci pourrait l'affecter énormément.
Néanmoins, il avait échoué sur ce coup-ci. Après leur nuit torride dans sa Cabriolet, notre chère Camille Bourgeois avait pris ses jambes à son cou, sans rien laisser derrière elle. Rien, exceptés son odeur fleurie dont le siège arrière de la voiture de notre Ange s'était imprégnée, et son soutien-gorge assorti à sa culotte en soie signée Etam...
Deux mois plus tard, la fuite de Camille troublait encore les sommeils du séduisant Gabriel Richard qui était de retour en France, car ayant été forcé par son père de mettre un terme à son année sabbatique en Italie.
Camille était partie sans lui avoir laissé ses coordonnées, et lui, il avait quitté la Ville ancienne. Mais, même après que son véhicule eut parcouru plus de 1400 km, Camille Bourgeois était partout et nulle part dans son quotidien. Les effluves de son shampoing aux pommes, les billes cristallines de la jeune femme à travers lesquelles se reflétaient ses moindres pensées, sa peau douce et luisante de désir, et même le parfum de son entrejambe...
Gabriel Richard se souvenait absolument de tout ce qui constituait l'être entier de notre Camille. Il revoyait chaque détail si nettement que c'en était devenu un agréable cauchemar.
Chères demoiselles de la bourgeoisie française, parfois l'amour se présentait sous sa forme la plus ignoble : un cœur brisé, avant même d'avoir entamé quoi que ce soit de romantique. Un conseil donc, n'oubliez pas votre chainse en toile fine dans le véhicule d'un amant si vous n'avez pas l'intention de le revoir ! Et surtout, détruisez toute preuve de votre escapade au septième ciel.
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GABRIEL
« Camille...?
— C'était une grosse erreur, Gabriel... »
Des bruits lointains me parvinrent, mais je n'arrivais pas à m'extraire de mon sommeil. Un courant d'air me frappa soudainement l'espace d'une seconde, puis une porte claqua. Cette nuit-là, je n'avais pas rêvé. Camille était bel et bien en train de décamper alors que Morphée me berçait encore. Elle était partie en m'abandonnant à moitié nu dans ma voiture. Ce fut une chance que je me sois réveillé avant l'aube ce jour-là, parce que je l'aurais haï pour l'éternité. Elle aurait dû chercher à tenir une conversation avec moi.
— Je ne t'ai pas rappelé à Paris pour que tu passes tes journées au lit, fiston. Si quelque chose te tracasse tu peux te confier à moi, tu sais ? Je me sens mal de te voir dormir à longueur de journées.
J'entrouvris mes paupières à contre cœur, puis accordai du temps à mes yeux pour qu'ils s'habituent à la lumière du jour. Après cela, je relâchai un énorme soupir d'exaspération sans aucune raison apparente. Rome me manquait énormément, elle et toutes les personnes que j'avais côtoyées. Le Giorgio, la pizzeria d'en bas mon immeuble en Italie vendaient les meilleures pizzas au monde qu'il m'est été donné de manger. J'avais l'habitude d'y acheter mon déjeuner, et de le déguster à côté de la Fontaine de Trevi en admirant les touristes formuler des vœux. À présent, ces moments de simple bonheur étaient loins derrière moi.
— Je sais..., maugréai-je en m'étirant. Te fais pas de soucis, c'était juste le temps de reprendre mes marques dans cette ville. Le décalage horaire spirituel, tu vois de quoi je parle ?
Mon père, toujours postée devant la fenêtre de ma chambre qu'il venait d'ouvrir en grand me dévisage, un air ahuri plaqué sur le visage.
— Le décalage horaire, comme tu dis, n'aura pas au moins affecté tes fâcheuses habitudes, soupira mon père en pointant du doigt mon pantalon qui était posé sur le dossier de la chaise de mon bureau.
Je pris un instant pour parcourir ma chambre du regard, plus par coutume que nécessité, avant de déserter mon lit. Les choses se déroulaient dans cette ordre lorsque mon père me reprochait d'être désordonné : feindre une soudaine prise de conscience, promettre de changer dans un avenir proche, puis ranger deux trois broutilles en sa présence pour qu'il croît à mon mensonge.
— T'es sûr que tu veux pas aller chez le coiffeur ? questionna-t-il pour la énième fois depuis que j'étais rentré. Le crâne rasé t'irait à merveille, blagua-t-il.
Il serait surpris du nombre de filles qui aimaient agripper mes cheveux. Lorsqu'elles traçaient ma mâchoire carrée avec leur doigt, tiraient violemment ma chevelure à chaque fois que je leur procurait du plaisir, léchaient suavement les deux boucles qui ornaient mon oreille droite, j'avais l'impression d'être. Et puisque j'étais, j'existais plus qu'aucune autre personne sur cette Terre. Alors, je me sentais convoité, et par-dessus tout, aimé, sur ce moment fatidique où je ne formais qu'un seul être avec elles.
Même si certaines mèches, trop longues, s'accrochaient parfois à mes boucles, raser mes cheveux revenait donc à réduire mon essence, mon sex appeal, lors de mes activités nocturnes. Pour rien au monde, je ne prendrais cette décision. Car l'unique femme qui m'ait jamais témoigné une once d'amour alors que j'étais en train de jouir en elle, quelques heures après avoir fait connaissance, n'était que Camille.
Les yeux de Camille étaient si transparents cette nuit-là que j'avais réussi à lire en elle avec une facilité déconcertante. En m'essoufflant à ses côtés, et en sombrant dans un sommeil profond, j'avais osé croire que ce qui venait de se produire entre nous n'était pas anodin. Mais, elle m'avait délaissé en qualifiant ces heures intimes que je pensais signifiants, de grosse erreur.
꒱࿐
Boutique de desserts, située dans le 17ème arrondissement de Paris, mais transformée en boulangerie dans le roman.
Mon père m'avait annoncé ce matin qu'une de ses connaissances recherchait un employé à temps partiel pour aider une employée à tenir sa boulangerie. Et sans réfléchir une seconde de plus, j'avais sauté sur l'occasion pour accomplir un de mes rêves d'enfant.
Au coin d'un croisement entre la Rue de la Terrasse et de la Rue de Tocqueville dans le 17ème arrondissement de Paris, se trouvait une magnifique boulangerie. Sa façade était d'un noir éclatant, et on pouvait lire dessus « Aux Merveilleux de Fred », écrit dans une typographie manuscrite dorée. L'intérieur était d'autant plus classe que l'extérieur : la vitrine réfrigérée, dont le bas se constituait d'un bois de chêne noir cirée, s'étendait sur les trois longueurs des murs. Le propriétaire, fervent conservateur selon les dires de mon père, avait souhaité reproduire presque à l'exactitude la décoration des boulangeries du XIXe siècle. Ainsi, les murs en briques de bois étaient l'élément phare qui symbolisait l'unicité de cet espace. Ceci justifiait bien le titre de Meilleure Boulangerie Parisienne qu'elle avait acquis, un an seulement après son ouverture.
Une brise du mois de novembre vint rafraîchir un peu l'habitacle en même temps qu'une petite vieille femme, arborant un chapeau de paille, poussa la porte d'entrée. Elle commanda une baguette tranchée ainsi que des croissants, et je m'y attelai avec entrain à couper ce pain croustillant. Bon, d'accord, il n'avait pas de quoi fournir de gros efforts, mais l'excitation pulsait à max mes poumons. J'idolâtrais presque le tablier bordeaux qui était suspendu à mon cou par-dessus ma chemise noire italienne. L'une des stupides décisions que j'avais prises au cours de ma vie : porter une chemise de qualité pour m'amuser derrière une vitrine de pâtisseries.
Je rendis à la dame âgée sa monnaie et celle-ci s'enfonça de nouveau dans le Paris frisquet de la saison automnale après m'avoir remercié. Un sourire béat naquit sur mes lèvres puis ouvrant la porte de la cuisine, je levai joyeusement mon pouce à l'intention de Cécile, l'autre employée. Cécile et moi avions presque le même âge, alors j'avais très vite pris mes aises avec elle. Sa chevelure blonde concordait parfaitement avec la couleur des viennoiseries qui ornaient la vitrine réfrigérée.
En réalité, Cécile effectuait actuellement un stage compris dans sa formation de Brevet Technique des Métiers Pâtisserie, après s'être réorientée l'année dernière. Elle avait eu le courage de laisser tomber ses trois années d'études du droit pour son projet, ce qui était profondément admirable. Est-ce que je serais capable de me reconvertir en chef cuistot, moi, après la fin de ma licence Marketing ? Pas vraiment, non. C'est une idée qui ne me traverserait jamais l'esprit.
— Et une commande de plus ! m'exclamai-je, l'épaule appuyée contre l'embrasement de la porte. C'est toujours aussi mignon, les mamies qui viennent acheter du pain ? ris-je.
Cécile gloussa tout en continuant de pétrir la pâte qui allait servir pour la fournée de demain.
— Elles sont pas toujours polies, crois-moi ! Il y a des vieux grincheux et des gentils, c'est bien connu, ça.
— En vrai, je crois qu'elle a succombé à mon charme, lui avouai-je, un brin sérieux, en passant une main dans ma crinière.
Elle roula des yeux, puis m'invita gentiment à déguerpir, sans oublier de refermer derrière moi, quand la cloche signalant l'entrée d'un nouveau client s'enclencha. Beaucoup de gens raffolaient de farine en cette fin d'après-midi, dites donc !
— Bienvenue. Vous désirez...?
N'avez-vous jamais cru au destin ? Ce doux phénomène divin qui s'accomplissait devant vos yeux au moment où vous vous attendiez le moins. Ou devrais-je dire dans mon cas, où vous avez perdu tout espoir de revoir un jour, la femme avec qui vous avez pris votre meilleur pied au lit. Moi, j'avais maintenant l'intention d'avoir foi en ma destinée.
Elle ne dégageait plus cette aura pailletée et joyeuse, mais c'était bien elle. Cette fine chevelure noir de jais parfaitement tirée en un chignon haut, ces pupilles noisettes, l'ovale de sa face, et nom d'un chien, ces jambes élancées sur lesquelles ma langue avait dansé...! Nul doute que la femme qui bataillait avec son sac sous mes yeux était Camille, tout emmitouflée dans son trench-coat beige, et le nez fourrez dans sa grosse écharpe en laine. Un foulard si chaud en novembre ? Était-elle une frileuse en plus d'être une sacrée crapule ? Ça m'en avait l'air.
Elle remit son sac bandoulière en place après s'être emparée de son portefeuille. Puis, détournant enfin son attention de celui-ci, Camille rencontra mon regard. L'objet rectangulaire qu'elle serrait alors dans sa main s'échoua subitement au sol en même temps que ses joues s'empourprèrent d'un seul coup. Et lorsque sa surprise donna libre cours à une expression faciale endurcie la seconde suivante, je notifiai alors un changement désarçonnant en elle.
À présent, Camille n'était que l'allégorie même de l'hiver. Aussi froid que le pôle Nord, et rude que le climat qu'on y trouvait. Et même sans aucun flocon de neige aux alentours de moi durant cet échange glacial, j'aurais pu affirmer avec conviction que Madame Pôle Nord me dévisageait en cet instant.
Purée. Je ne reconnaissais plus la femme dont même le parfum de son entrejambe me hantait depuis deux mois.
»» ———— ★ ———— ««
note d'auteure
coucou, vous allez bien ?
OMG. je suis si stressée quant
au fait que ce chapitre soit
très long pour vous T-T.
vous savez, y a d'abord
la petite intro du chapitre
qui prend trois centaines
de mots alors...
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