Hier, Thomas n'avait pas vu Aliyah de la journée. Et cela l'avait particulièrement tracassé. Surtout depuis qu'il lui avait demandé de venir avec lui, de partir de l'île ensemble. Pour sûr, il avait dû lui faire peur. Thomas ne voyait pas d'autre explication à son absence.

Ce matin, il se leva et se prépara, sans même déjeuner. Ça lui arrivait rarement, mais ça se produisait chaque fois qu'il n'avait pas le moral. Il avait passé une journée horrible hier, tellement longue. Il n'avait fait que ressasser les événements, se maudissant d'avoir pu être aussi bête. Elle ne voudrait plus lui parler dorénavant.

En lui faisant cette proposition, il avait presque donné raison aux rumeurs des Pa-Hassiens et au chef Haven. C'était comme s'il avait tenté de lui retourner le cerveau. Cette demande, c'était la dernière chose à faire. Il se disait déjà qu'il ne verrait plus la fille, et qu'en la croisant, elle le dévisagerait, comme tous les autres. Cette simple idée l'effrayait lui brisait littéralement le cœur.

Alors, en ce jour ensoleillé, il s'était mis à rassembler ses affaires dans un sac. Il n'avait pas beaucoup de chose à prendre, principalement des vêtements, et quelques autres affaires personnels. Il avait laissé le strict minimum chez lui pour le moment.

Cela fait, il traversa l'île, toujours en prenant des chemins discrets, jusqu'au raccourcit des escaliers de la voute en pierre naturelle. Il descendit, et grimpa dans son bateau pour entrer dans la cale. Quand il posa son sac près des lits, il remarqua quelque chose à l'autre bout de la pièce.

Il avait un autre sac, avec à sa gauche, une sorte de cabas en tissu beige. Ils ne les avaient jamais vu auparavant, où alors n'y avait-il jamais prêté attention ? Et ils étaient pas mal gros. Mais, tandis qu'il s'apprêtait à regarder le contenu, il entendit du boucan à l'extérieur.

Son cœur s'affola rapidement. Thomas sortit sa tête pour vérifier d'où provenait ce bruit. Et il n'aperçut rien d'autre qu'un oiseau sur le pont, entrain de casser la coquille d'un escargot sur le parquet de bois. Soulagé, le garçon soupira, avant de s'extirper complètement de la cale pour faire fuir le volatile.

-        Saleté d'oiseau... maugréa-t-il.

-        BOUH !

Thomas cria, et tomba à la renverse sur le bois. Aliyah venait d'apparaitre devant lui, sur l'échelle du bateau. Et fasse à la peur du blond, elle éclata de rire. Elle avait bien réussi son coup.

-        Et après, c'est moi la peureuse ! gloussa-t-elle fortement.

-        Arrête, j'ai failli mourir ! se plaignit Thomas, une main sur le cœur.

Restant assis au sol, le garçon reprenait petit à petit son calme, remplaçant son effroi par un sourire. Car elle était là. Aliyah était revenue. Et cela le rendait terriblement heureux.

Il finit par se relever pour descendre du bateau et rejoindre la blonde sur le sable.

-        Désolé de ne pas être venue hier, mes parents avaient invité les Tumelty à la maison... s'excusa nerveusement la fille.

-        Ah bon ?

Thomas tiqua, mais ne laissa rien paraitre.

-        Cette histoire de mariage n'était pas réglé ? continua-t-il en s'adossant à la coque du navire, observant le sol.

-        Visiblement non. Mais Donal est un gentil garçon en fait !

-        Donc tu vas te marier avec ? interrogea précipitamment Thomas en levant les yeux sur elle.

-        Absolument pas ! Lui comme moi, on veut pas de ça. Alors on a joué la comédie, c'était drôle. Mes parents n'y ont vu que du feu, gloussa la fille.

Thomas sourit à son tour, rassuré. Il ne voulait pas partir de cette île en sachant qu'elle allait épouser ce garçon, il s'en mordrait les doigts. Mais Aliyah n'était pas si naïve pour accepter tout ce qu'on lui disait de faire. Le blondinet était fier d'elle, il n'avait pas besoin de la raisonner, elle le faisait toute seule.

-        Au fait, tiens, finit par dire la blonde en lui montrant son sac qu'elle avait à l'épaule. J'ai gardé du gâteau d'hier. C'est un gâteau au yaourt, avec des morceaux de pommes que mon père a fait, expliqua-t-elle en sortant un paquet de son sac.

Mais avant de lui tendre, elle l'observa un moment entre ses mains. Thomas voyait bien qu'elle s'apprêtait à dire quelque chose d'important. Et il était prêt à l'entendre. De toute façon, il l'écouterait toujours.

-        Je sais que... Que tu ne veux plus de cadeau de ma part. Mais, je ne fais pas ça pour que tu restes, Thomas... commença-t-elle, les yeux baissés. Je fais ça parce que... On est ami. Et j'aime faire plaisir à mes amis.

Aliyah posa ses yeux clairs dans le regard sombre de Thomas. Celui-ci hocha alors positivement la tête, pour lui montrer qu'il avait compris son ressenti. Il ne le montrait pas lui-même, mais il était terriblement touché. Elle avait employé le mot « ami » en parlant de lui.

-        Désolé d'avoir aussi mal parlé l'autre jour, déclara tristement le blond. C'était idiot de ma part, tu méritais pas ça, tu voulais juste être gentille. Mais... J'ai pas l'habitude de ça, tu sais...

-        J'en suis consciente, mais je ne t'en veux pas, sourit-elle en lui tendant finalement le paquet.

Il observa le présent, et un sourire naquit sur ses lèvres alors qu'il se décidait à le prendre. Enfin, ils allèrent s'assoir au bord de la mer pour déguster ensemble cette pâtisserie. Thomas avait presque oublié à quel point il avait faim. Ne pas manger le matin, ça ne lui réussissait pas.

Et alors qu'ils observaient tous deux l'horizon au travers d'un passage ouvert de la voute, Aliyah osa enfin parler de se qui lui trottait dans la tête depuis deux jours déjà.

-        Et pour... Pour ce que tu m'as dit aussi... De venir avec toi... Tu étais sérieux ? demanda-t-elle, n'ayant pas le courage de le regarder.

Thomas n'osa pas non plus tourner la tête pour poser ses yeux sur elle. C'était aussi compliqué pour lui d'en parler, mais il ne pouvait pas éviter le sujet indéfiniment.

-        Ouais, j'étais sérieux, répondit-il en acquiesçant. Mais... Je sais que tu ne pourras pas venir. Je me voile pas la face. Tu as des amis ici, ta famille, tu as tout. Alors que moi, contrairement à toi, je n'ai rien qui me retient sur cette île.

Enfin, il tourna la tête pour lui sourire, elle releva ses iris vertes vers lui.

-        C'est pas grave Ali. Je suis déjà bien chanceux, et content de pouvoir passer du temps avec toi. Je t'en ai demandé un peu trop avec ma question alors... Je comprends. Je ne te forcerai jamais, ne t'inquiète pas.

-        Je sais bien que tu ne me forceras jamais Thomas, sourit tendrement la blonde.

Ce qu'elle allait lui manquer. Pour sûr, Aliyah serait la seule personne qu'il regretterait sur cette île.

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