6_ Le bruit incessant des machines
Trafalgar l'avait beaucoup observée.
Cette panthère était bien trop docile à son gout pour être réellement sauvage. Puis il nota également qu'elle n'ingérait pas de viande crue, cuite par contre, ils avaient essayé et elle mordait dedans sans retenue.
Il aurait bien conclu qu'elle était vraiment difficile mais en soit, hormis les animaux crus, elle mangeait de tout. Mais vraiment de tout ! Fruits, légumes, biscuits, viandes, poissons... Vraiment de tout.
Surprenant venant d'un animal tel qu'elle.
D'où pouvait-elle venir ? Est ce qu'elle avait était élevée par l'homme avant de se retrouver dans cette cage avec tous ces esclaves ?
Il n'en savait rien. Ca l'agaçait un peu à vrai dire. De ne pas savoir ce qu'il avait accueillit sous son toit même pour si peu de temps.
Cela faisait quatre jours qu'elle était à bord, depuis la veille, elle avait reprit des forces toujours enfermée.
Cela dit, le chirurgien sentait bien que son navigateur s'attachait de plus en plus à elle et appréciait de moins en moins de la voir enfermée. Et il n'était pas le seul, tout l'équipage commençait à s'attacher. Pour autant, personne n'osait plus s'en plaindre depuis les remontrances faites à Bepo l'autre jours.
Voilà une demi-heure que Trafalgar restait prostré dans son bureau à essayer d'étudier une nouvelle encyclopédie de médecine en vain. Cette foutue panthère hantait toutes ses pensées comme la peste !
Agacé, il finit par claquer son bouquin contre son bureau.
Il sentait arriver le jour insupportable qu'allait être le moment des séparations avec cette sale bestiole et ses hommes. Il les connaissait maintenant, il savait qu'ils allaient tout faire pour le convaincre de la garder, et déjà, ça l'épuisait. Il n'y avait qu'à voir Shachi glisser une ou deux phrases emplies de sous entendu comme quoi, depuis qu'elle était là, l'ambiance à bord du Polar n'avait jamais était aussi joyeuse, ce qui, soit dit en passant était faux. Ou encore, son cuisinier, entrain de se vanter de son nouveau plat inventé exprès pour la nouvelle locataire. Ça aussi c'était faux, elle n'était que de passage. De. Passage.
...
Pourquoi même lorsqu'il se le répétait ça sonnait faux...
Exaspérant.
Ce qui était encore plus exaspérant fut, qu'il ne su comment, il s'était retrouvé en pleine nuit au dernier niveau de son navire devant la prison occupée.
Mais qu'est ce qu'il fouttait là...
Un grognement attira son attention dans la pénombre.
Il se trouvait seulement à quelques mètres de la cellule à peine éclairée par les lumières des quelques machines en marche. Le brouhaha masquait ses pas, il s'arrêta, bras croisés à fixer le pelage tacheté de l'animal allongé.
Chose étonnante, la blanche semblait se boucher les oreilles de ses deux pattes avants. Le bruit et bourdonnement incessant devait probablement l'empêcher de trouver le sommeil, ce qu'il comprenait.
Puis il la vit se lever, s'étirer puis tourner en rond dans sa cage.
C'est vrai que pour un animal censé vivre en liberté, elle était privée de gambader à l'air libre, elle devait commencer à s'agacer de sa captivité.
Songeur, le noiraud resta immobile à la fixer sans rien dire.
Jusqu'à ce qu'elle ne le surprenne.
Il manqua étonnamment de sursauter, prit en flagrant délit. Pourquoi semblait-il être embarrassé tout à coup ?
Faut admettre qu'il devait avoir l'air un peu flippant à l'observer dans la semi obscurité. Enfin, qui s'en soucierait ? Pas une panthère en tous cas.
L'animal finit par s'assoir au milieu de sa prison, fixant le capitaine d'un drôle d'œil.
La méfiance fut de garde lorsqu'elle le vit s'approcher des barreaux pour se retrouver juste devant, la dévisageant de haut, mains dans les poches de son long manteau noir.
Elle avait l'impression d'être jugée...
Qu'attendait-il au juste ?
Qu'elle l'attaque ? Il était évident qu'elle le détestait depuis la seringue.
Qu'elle approche ? Comme si. Elle devait le craindre, elle l'avait toujours craint.
Franchement... Qu'attendait-il ? Que faisait-il ici ?
Des réponses.
C'est ce dont il avait besoin. Cet animal le perturbait plus qu'il ne désirait l'admettre. Et il ne comprenait pas pourquoi.
Mais que pensait-il obtenir en se pointant devant elle au juste ? Comme si elle allait soudainement se mettre à parler et lui répondre.
Tss. Pitoyable.
Mais lorsqu'il la vit s'approcher timidement, le regard planté sur lui, il eut un moment d'arrêt.
Sans rien attendre de lui, elle venait de s'assoir juste devant, nullement agressive, juste... présente, devant lui.
À cet instant il ne su pas vraiment ce qu'il lui passa par la tête.
Mais il agit machinalement, comme hypnotisé par ses jolis yeux bleus.
Il déverrouilla la grille, puis se stoppa.
- Je te préviens, le moindre écart et je te ramène ici de force.
Le cœur de la panthère s'emballa brusquement, prit de court. Allait-il... la laisser sortir ?
Semblant comprendre ses inquiétudes il ajouta en ouvrant la porte :
- C'est juste histoire de te dégourdir les pattes et prendre l'air.
Dubitative, elle parut hésitante.
Mais après quelques secondes à faire face à l'expression neutre du chirurgien et réaliser que pour une fois, il ne lui avait pas parlé de manière hautaine ou froide, elle décida de sortir calmement de sa prison. Et ce, sans le quitter des yeux.
Il avait quelque chose d'étrange, de différent en lui. Il avait l'air... Plus doux.
Ce contraste était pour le moins perturbant. Toutefois elle se résigna à continuer son avancée, non sans lui lancer de brefs coups d'œil dans le but de s'assurer qu'il ne changerait pas d'avis.
Arrivant dans les escaliers où elle avait été arrêtée il y a peu, elle sembla hésitante.
Avait-elle le droit d'aller plus loin ?
- Aller grimpe. l'incita-t-il en passant devant.
Elle obéit. Lui emboîta le pas.
C'est fou ce qu'elle avait l'air d'un animal domestique. Enfin ce n'était pas plus mal.
Il la guida à travers un long couloir dont les lumières s'allumèrent automatiquement à leur passage, puis ouvrit une grosse porte d'où un vent froid s'en échappa.
Nul doute, de l'autre côté de cette porte, se trouvait les montagnes enneigées et les forêts, paysages familiers pour la féline.
La liberté.
Trafalgar lui lança un dernier coup d'œil avant de passer le pas de la porte le premier, réajustant son couvre chef.
D'un bond habile elle le rejoint sur le pont tandis qu'il refermait la porte sans détourner son attention.
Il l'observa avancer timidement sur le pont à peine éclairé par une demi lune. Heureusement que la neige, aussi blanche soit-elle, n'avait guère besoin de beaucoup d'éclairage pour être visible.
Tout était blanc.
Et calme surtout. Un silence des plus agréables et apaisant pour celle qui n'avait cessée de subir le bruit mécanique des monstres en ferraille.
La tête levée vers le ciel couvert, la blanche ferma ses yeux, profitant de l'instant de répit qu'on lui accordait.
Remplir ses poumons de cet air frais, humide et pur éveillait tous ses sens. La galvanisait.
Elle se sentait bien la, libre.
Les bruits de pas étouffés par l'épaisseur de neige couvrant les planches du Polar Tang attira son attention.
L'homme au bonnet tacheté et bouffant venait de s'éloigner pour gagner l'une des rambardes, mains dans les poches.
L'animal entreprit de le rejoindre. S'assoir à ses côtés.
Après un court silence, il baissa ses iris argentés vers elle :
- Qu'est-ce que tu fais encore là ?
Elle releva sa tête dans sa direction avec incompréhension.
Il soupira.
- T'étais censé de dégourdir les pattes tu te souviens ? File.
À ces mots il détourna son attention vers l'horizon.
De ce fait, il ne fut pas en mesure de voir la lueur reconnaissante qui brillait dans les prunelles de sa captive.
Sans plus attendre, elle bondit du submersible et gagna la terre ferme.
Trafalgar la suivait du regard.
Allait-elle en profiter pour lui filer entre les doigts ?
Quelque part il l'espérait.
Ça lui ferait bien moins d'ennuis à gérer.
Mais dans le fond... Une part de lui, aussi infime soit-elle, espérait qu'elle revienne.
Puis si elle partait comme ça, il devrait s'expliquer avec son équipage au risque d'affronter le regard déçu et triste de son ami à la fourrure blanche. Et ça franchement... Il aimait moyen.
Le fauve gambadait de partout, sautait à droite et à gauche, tantôt sur un rocher, tantôt dans la neige à se rouler. Elle fusait à vive allure, pleine d'énergie, ignorant la blessure sur son ventre couvert de bandages qui parfois la tirait quelque peu.
Une bonne poignée de minutes s'écoula. La température chutait graduellement.
Trafalgar commençait à se les geler, il dévia son attention deux secondes pour réchauffer ses mains.
Cela suffit pour perdre de vue l'animal à la fourrure tacheté.
Merde.
Une vague de frissons désagréable s'empara de lui tandis qu'il se mit à ratisser la zone du regard.
Où avait-elle bien pu passer !?
Un petit rugissement se fit entendre sur sa droite.
Quoi !? Comment avait-elle fait pour arriver aussi vite !?
Il n'avait rien vu ni entendu.
Ils se regardèrent dans le blanc des yeux un instant avant qu'il ne grogne d'un air renfrogné :
- T'as finis ? Bien. Alors on rentre.
Il ne fut même plus étonné de la sentir le suivre docilement.
Enfin au chaud, la panthère des neiges, se secoua vivement, envoyant des flocons ainsi que de nombreuses gouttes d'eau froides un peu partout, notamment sur le chirurgien qui pesta avant de la fusiller du regard.
Oups ?
Elle se recula d'un pas tandis qu'il se mit à fixer le bandage totalement défait. Il n'avait pas supporté le voyage, pas étonnant avec cette petite furie qui sautait dans tous les sens...
Il soupira profondément :
- Viens.
Elle s'exécuta.
Cependant lorsqu'elle reconnue la salle d'opération elle se stoppa net, tétanisée.
Trafalgar s'arrêta à son tour la fixant intensément.
- Calme toi, je vais juste inspecter ta plaie et changer ton bandage.
Mais l'animal ne bougeait plus, aux aguets et clairement pas décidé à le suivre.
- Aller fais pas ta chieuse ramène toi ou c'est moi qui viens te chercher. râla-t-il.
Elle tressaillit.
Voyant qu'elle n'en faisait rien il se massa l'arrête du nez, fatigué.
- Tu l'auras voulu.
À peine eut-il fait un pas vers elle, qu'elle s'élançait dans le couloir, prise de panique.
- Bordel de- Non ! Sale petite-
S'en suivit un flot d'insultes tandis qu'il s'était mit à la courser dans le couloir.
Elle quitta bien vite son champ de vision pour le plus grand damne de Law.
Toutefois, usant de son fluide perceptif, il la dénicha bien assez tôt recroquevillée dans... Sa cage.
Ben ça. Elle perdait pas le nord.
C'était pas plus mal qu'elle soit retournée d'elle même ici.
Il se posta devant la cellule, agacé avant de l'ouvrir en grand et s'approcher.
Elle recula, se mit à grogner, tremblante de peur.
Alors il s'arrêta, comme refroidit.
- Ça va je te ramène pas au bloc, t'as gagné ! grommela-t-il en détournant le regard.
Une lueur d'espoir brilla dans les pupilles aigue marine de la féline.
- Mais laisse moi regarder. insista-t-il plus calmement.
Était-ce... De l'inquiétude dans sa voix à l'instant ?
La blanche peinait à le croire pourtant... Il semblait sincère. Cet homme ne possédait pas ce regard avide et malsain du savant fou de tenter de nouvelles expériences non. Ce n'était pas ça. Lui était sérieux, transparent et honnête. Motivé par l'unique intention de la soigner.
Elle finit par se détendre. Et s'avancer timidement, le regard fuyant.
Satisfait, un sourire carnassier étira les lèvres du chirurgien.
Elle commençait enfin à lui faire confiance. Ce n'était pas déplaisant.
Trafalgar s'agenouilla auprès d'elle, qui se tenait debout sur ses quatre pattes devant lui, il défit les bandes trempées d'un geste adroit et expérimenté.
La plaie cicatrisait lentement mais elle avait besoin d'être nettoyée... Et l'humidité de la neige n'avait pas vraiment aidé.
Il soupira sans le vouloir.
- Room.
Il la sentit paniquer tout à coup et caressa son poil humide pour la rassurer.
- Ça va, je récupère juste du matériel pour désinfecter...
- ...
- Non pas de piqûre j'ai capté. Du moment que tu te tiens tranquille.
Il avait suffit d'un seul regard pour qu'il comprenne.
Le lien entre eux qui commençait à s'établir, il ne le réalisa pas de suite, trop préoccupé par ce qu'il faisait. Mais il était indéniable qu'il commençait à s'attacher.
On en parle du fait qu'il causait à un animal ? Ce n'était pourtant pas son genre mais, il le faisait, sans même s'en rendre compte.
- Shambles.
Une trousse de secours à portée de main, la panthère se laissa faire, suivant chacun de ses gestes du regard.
Appliqué, c'était presque agréable de le regarder opérer.
Une fois son travail terminé il s'empara d'une serviette qu'il avait au préalable téléporté et entreprit même d'essuyer la jeune panthère.
Des gestes fluides, attentionné et précautionneux lorsqu'il s'approchait de trop près des bandes neuves.
La panthère ne rechignait pas, le laissait faire.
À présent face à face, il frotta nonchalamment sa tête et ses deux joues tandis qu'elle s'asseyait calmement, le détaillant de ses pupilles bleutées.
Trafalgar s'en rendit vite compte et ralentit ses gestes, prit de court. C'était la première fois qu'il la voyait d'aussi près. Et effectivement, elle avait une belle gueule pour un animal.
Plongeant dans son regard, il fut saisit d'un étrange sentiment.
La voilà entrain de renifler silencieusement l'air, son parfum, trahis par le bout de son museau entrain de remuer.
Son cœur commençait à s'emballer à mesure qu'il se perdait dans ses yeux bleus.
Qu'est-ce qu'il... Était entrain de se passer ?
Est-ce qu'il était vraiment entrain de se prendre d'affection pour cette bestiole !?
Ça n'avait pas de sens. Pourtant il était clairement entrain de s'occuper d'elle depuis plusieurs heures déjà.
Qu'est-ce qui n'allait pas chez lui ?
Lorsqu'il sentit le bout de son museau caresser timidement sa joue, il sortit brusquement de ses pensées, sursautant, prit de court.
D'un mouvement de recul il s'éloigna, repoussant d'une main la frimousse de l'animal qui fut contraint de fermer ses yeux en grognant.
- Recule tu veux.
Trafalgar se redressa, la lâchant avant de la jauger de haut. Il l'analysait en silence alors qu'elle secouait brièvement sa tête avant de souffler du museau.
- ...
Calmement elle s'assit, lui faisant face.
Puis, sans prévenir il fronça ses sourcils, récupérant la trousse :
- Je fais pas ça pour toi qu'est-ce que tu crois ? râla-t-il, établissant une certaine distance. Dans quelques jours tu seras libre et j'aurais plus à me coltiner ta sale tronche.
À ces mots, il fit volte-face, incapable de voir les yeux ronds de l'animal qui lui emboîta le pas, une lueur de désespoir dans le regard.
Mais le chirurgien de la mort, froid et distant était de retour, il claqua la grille devant elle, la verrouillant de nouveau tandis qu'elle sursautait.
Sans se décourager pourtant, avec le peu d'espoir qu'il lui restait, elle posa une patte sur un barreau, comme pour l'inciter à rester.
Indifférent, il prononça avec dédain :
- Profite bien des quelques jours restants.
Ces mots lui firent l'effet d'une douche froide, blessée elle le regarda avec toute la tristesse du monde l'espace d'un instant avant de se résigner et reculer.
Tremblante, et légèrement secouée, elle baissa la tête tristement avant de faire volte face et lui tourner le dos, s'allongeant dans son coin sans un bruit.
- ...
Le noiraud tressaillit. Mais s'en alla sans se retourner.
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