Gula, le Journal d'Alexis
Cher Journal - Jeudi 2 Juillet
Aujourd'hui, je suis encore resté aux côtés d'Elisabeth, celle-ci qui se faisait arrêter par toutes les mamies...Je vous jure, on dirait qu'elles n'ont jamais vu une femme élégante, du moins un brouillon de femme élégante. Elles sont de vieilles comères, se moquant de sa tenue, les lèvres enveloppées dans un châle, étouffant un relent de jalousie. Si seulement elle pouvait me remarquer, moi qui ne suis qu'un larbin, je souhaite pourtant être son élan du coeur.
Après avoir passé ce qu'on pourrait appeler l'épreuve des regards, Elisabeth se mit en route pour le parc où elle pouvait manger sa glace fraîchement achetée, parfum straciatella.Encore une fois je pris 3 boules, tout en sachant que ce n'est pas sain. Encore une fois elle me fit porter son sac,en peau de léopard. Et encore elle commença à se morfondre, après tout, elle subit des moqueries chaque jour, je pourrais presque avoir pitié d'elle. Cependant, une brise d'honneur souffla sur son visage, qui changea la pauvre fille en Impératrice à la face superbe.
Elle se reprit et décida de s'engager sur la route menant à colline des sarrasins, berceau du manoir de Madame. Lorsqu'elle disparut dans la forêt surplombant le chemin, je décidai de rentrer, car les cloches de l'église commencèrent leur valse sonore répétant les pas résonnant dans le village. Je n'ai plus vu Elisabeth depuis.
À la rue 7 septembre, je croisai Alioth qui, sans doute,donnait un "cours"à ses cousines, un vague bonsoir sortit de ma bouche tandis que je me hâtai pour ne pas me faire punir.
Plus tard, j'appris qu'Elisabeth était rentrée du manoir très tard. D'autres comères chuchotent encore qu'elle n'était pas dans son état normal, qu'elle était comme effacée, balbutiant des paroles inquiétantes. Et pourtant, elle continua de retourner au manoir chaque jour, prétendant que la comtesse était symphatique....
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Cher Journal - Dimanche 6 Juillet
Après m'être réveillé, ma mère m'annonça que les autres cousins d'Alioth et de Leonis arrivaient, et me conseilla d'aller leur dire bonjour car il se trouva qu'Adam était un de mes amis de vacances. Machinalement je mis mon veston et me servit dans le frigo, un gâteau sec, bien que ma mère me le déconseillait. Que voulez-vous ? Je suis bien trop gourmand.
Arrivé à leur maison je fus enserré par Adam que je n'avais vu depuis un an. Il avait un peu grandi, du haut de ses onze ans. Ses bras mats m'étreignaient encore, que je pus distinguer ses yeux brun-vert et ses cheveux châtains, parsemés de mèches blondes. Plus loin une femme se tenait, c'était la grande soeur de Leonis : Alice. Elle avait une posture de reine. Sa peau mate se mêlait à ses cheveux d'un brun blond. Je pensai qu'elle pourrait aller de pair avec Elisabeth concernant les vêtements. Ni une ni deux Mme D'Orfey sortit de la maison, et, d'une suffisance de noble, me proposa de rester diner, ce que je ne refusai point. Pendant le repas, je pus observer d'un autre jour la famille Avon, celle-ci qui paraissait si noble et magnifique. A présent ils se comportaient tels des gens simples, que l'eau et le pain auraient suffit pour vivre.
Bien après, durant l'après midi je me rappelai que je devais aller voir Elisabeth, dont les parents étaients absents. La pauvre, après être allée chez la comtesse maintes fois, se morfondais dans son lit vermeil, la face creusée, les yeux ailleurs. Lorsque je sonnai à la porte, aucune réponse ne sortit de la maison moderne couleur canari. Je songeai alors à pousser la porte, celle-ci s'entrouva avec un râle aigu sur la sombre maison, bouche engloutissant toute lumière de vie. Tandis que je rentrai, une odeur envahit mes narines, une odeur néfaste, une odeur de putréfaction... Les mouches avaient déjà pris la bâtisse, virevoletant dans les ténèbres du salon.Je me posai des questions, c'est alors qu'une peur me prit, telle une sorcière mauvaise, elle m'envoûtait, me rapprochant chaque seconde de son être. Dès que je m'approchai de la chambre d'Elisabeth, l'odeur putride augmentait et le nombre d'insectes avec. Se pourrait-il...?
Elle était là, dans cette chambre où les rideaux étaient tirés, où la puanteur était insupportable, où gisait sur le sol un tabouret renversé, où au plafond était suspendu une corde. Je la vis, une peur atroce me serra si fort que j'en criai , un cri déchirant le silence fatal de la maison. Elle était là ! Elle était là ! Suspendue à une corde. Elle s'était pendue. Son corps pourrissant était rempli de croûtes, où les vers s'en donnaient à coeur joie, grignotant sa chair autrefois belle. Son abdomen était troué, vomissant du sang par terre.Ces trous étaient déjà envahis de mouches grouillant de plaisir, pondant, donnant naissance dans la mort. Vraisemblablement, elle s'était pendue, ayant raté elle se serait planté plusieurs fois dans la chair, un couteau qui gisait maintenant dans une mare de sang, s'écoulant par le balcon de derrière. Lorsque je me risquai à regarder son visage, déjà traumatisé. Je ne vis qu'une face creusée de vers et de mouches, on voyait déjà son crâne par les espaces laissés des lambeaux de peau pourrie. Ses yeux, jadis gris d'orage, n'étaient plus, dévorés, on ne pouvait observer que des orbites vides, remplis de vermine grouillant. Ses cheveux autrefois ruisselants de magnificence, n'étaient maintenant que l'ombre d'eux-mêmes, éteints.
Je ne sais combien de temps je restai à observer, choqué, ce cadavre qui n'était plus l'Elisabeth, belle Mademoiselle, dont mon coeur s'était épris. En une fraction de seconde la beauté s'était fanée, laissant la terrible fatalité morbide. J'appelai la police,ils vinrent vite et me rassurèrent du mieux qu'ils pouvaient. Alors que je rentrai chez moi encore ébranlé, j'aurais juré voir à la fenêtre du manoir, la comtesse observant la scène. Sans doute mon imagination...
Je rentrai et me couchai, mais ne dormis pas, encore traumatisé.
C'était pourtant la première d'une longue lignée.
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Cher Journal - Mercredi 9 Juillet
L'enterrement d'Elisabeth avait lieu aujourd'hui, à 14h. Cela me laissait du temps pour aller voir ses parents, dont la situation me remplissait de compassion. Je n'avais le temps de tenir compagnie à Adam, dont la compassion ne se montrait pas. Lorsque je descendais la route des Palmères, je me fis aboyer par un des nombreux chiens errants du village.
Ces chiens restaient, mourraient certainement avec le village, qui de ses maisons inhabitées,dont les fenêtres ouvraient grand sur les ténèbres, perdait de plus en plus d'habitants. Après tout les gens fuyaient la chaleur et l'ennui qui étouffaient les derniers résidents. Les rues, constituées de maisons longues en grès jaune, semblaient vides, si bien qu'on s'étonnait lorsqu'une voiture passait. Les grillons chantaient tout le jour, tandis que le village agonisait et râlait manquant de sa substance vitale, je pense bien que je verrai ce village rendre son dernier souffle moi-même.
Arrivé à la maison Rosello, ancienne scène de théâtre terrible, maintenant décorée de glaïeuls, chrysanthèmes, iris et roses noires, délicatement fleuries, je me dirigeai vers la pièce où reposait Mademoiselle. Je rentrai et les regards se posèrent sur moi,des regards tristes, rageant, piteux et curieux, je me dirigeai vers M. et Mme Rosello, les deux formaient un beau couple. Mme Rosello ressemblait à ces mannequins qui n'exerçaient plus, elle devait être belle, mais endeuillée, sa peau d'albâtre s'était creusée. Ses cheveus roux se meutrissaient. Son mari était lui aussi dévasté par le départ de sa fille, ses rides s'étaient multipliées, ses cheveux bruns avaient blanchis. Je vint vers Elisabeth, qui ,enfermée dans le bois, ne se montrait pas.
C'est alors que quelqu'un débarqua en surprise, c'était deux femmes, l'une hautaine et noble, habillée d'une robe noire et d'une voilette couvrant son visage aux yeux de thé et ses cheveux marrons, l'autre adolescente mais suffisante, vêtue d'une robe blanche, contrastant avec ses cheveux de jais , liés en couettes avec des rubans immaculés, ses yeux couleur crépuscule riaient de malice. La grande s'avança et souhaita aux époux ses plus sincères condoléances et annonça que son manoir leur serait ouvert tout le temps. D'un coup elle prit la parole: " Mais quelle malaprise je fais, j'ai oublié de me présenter". Son visage sourit et elle reprit:" Je suis la comtesse Francesca Desideri Dandini Di Cesena et voici ma fille: Eléonore". Des murmures se firent entendre. Madame Rosello la remercia de son soutien.
La cérémonie commença, les pleureuses s'égosillaient devant le bois mortel qui contenait un cadavre, un cadavre pourtant connu du village, celle qu'on appelait "Mademoiselle".
Arrivés au cimetières, la plupart des dames portaient des ombrelles, pour faire face à la chaleur, qui s'intensifiait, dû à l'Anticyclone Lucifer, les porteurs emmurèrent le cercueil et une cérémonie catholique se fit entendre, béatifiant la morte et lui promettant le paradis. Beaucoup pleuraient, j'apperçus Alioth et Leonis neutres face à la mort de leur connaissance. Moi, je ne pouvais arrêter les larmes, qui perlaient sur mon visage, exprimant un amour qui ne pourra jamais être vécu. La cérémonie finie, je me dirigeai vers ma maison tandis que je voyais Alioth et Eléonore s'échangeant quelques mots, à la sortie du cimetière.
Chez moi, je m'allongeai sur mon lit, encore de noir vêtu, pensant encore à cet amour à sens unique que je vivais avec Elisabeth. Je m'endormis, ratant le repas du soir, ce que je ne faisais jamais. Je fis un cauchemar ou je voyais Elisabeth décomposée se réveiller, enfermée dans son cercueil, appelant au secours. Je me réveillai, suant à grosses gouttes. Heureusement que ce n'était qu'un rêve...
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Cher Journal - Lundi 14 Juillet
Plusieurs personnes avaient perdu la vie depuis l'enterrement d'Elisabeth, on peut bien en dénombrer six, la majorité étaient des personnes agées, il y avait aussi un jeune, Arno, il me semble. Tous étaits morts vidés de leur sang, avais-je appris par l'agent Luve, ayant aussi des marques de griffes ou de crocs, peut-être une attaque animale, mais la nouvelle qui m'attristait le plus était le suicide d'Alioth, oui, Alioth s'est tué par ingestion de somnifères,hier il s'est couché et ne s'est pas réveillé.
J'arrivai à la rue 7 septembre pour aller voir la famille Avon, dès que je passai le seuil, je vis la famille dévastée, les cousines pleuraient à chaudes larmes leur précepteur.Alice avait le regard dans le néant , Adam ne voyait que par des yeux rouges, Leonis ne portait pas beaucoup d'attention et les époux Avon semblaient vidés de leur énergie. Je m'avançai vers le lit mortel et je le vis, on aurait dit qu'il était juste endormi, bien qu'il était pâle et ne respirait plus. Ses mains étaient jointes, fines et sans vie. Il était habillé d'un costume noir. Son visage paraissait impassible, calme, presque serein. Sous ses yeux des poches violettes s'étaient formées, dues certainement à des insomnies répétées.
C'est alors que je repérai la fille de la comtesse, Éléonore, dans un coin du salon,décoré de photos. Elle observait une photo d'Alioth, petit avec un sac lors de sa première rentrée. Je l'interpellai et elle me répondit: "Ah, vous êtes Alexis, Alioth me parlait de vous, il vous appelait souvent: "Gourmandise absolue", pourtant, bien que vous ayez une mine de bon vivant, vous semblez éclairé." Je la remerciai du compliment, elle eu un rire empli de malice et me questionna, ses yeux enfantins rivés sur moi. "Aimez-vous la glace straciatella ?". Je répondis que oui et me demandai pourquoi cette question, alors que nous étions à un enterrement.
Après la cérémonie, je rentrai chez moi et je réfléchissai à cette journée et m'endormis jusqu'au soir. Ma mère et moi nous étions fachés après le repas, et je sortis pour prendre l'air. Tandis que je me baladais dans les rues sombres,éclairées d'une lueur orangée par les lampadaires des années 40, je crus apercevoir quelqu'un sur un toit,elle était là pendant une fraction de seconde, comme un rêve, pourtant j'aurais juré voir une chevelure écarlate. Étrange...
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Cher Journal - Lundi 21 Juillet
Rien ne va plus dans ce village, les morts se sont multipliées, maintenant on en dénombre 15 nouvelles, dont les deux cousins d'Alioth. Leonis s'est suicidé et Adam est mort d'une rupture à l'aorte. C'est la mort qui envahit ce village isolé, coupé du monde, tout le monde accuse Dieu, comme une punition divine, d'autres accusent la comtesse. Je ne sais quoi penser lorsque j'écris ces lignes. Mais une chose est sûre : je ne vais pas faire long, car je crois avoir découvert leur secret, des victimes aux corps mutilés, des suicides sans raison, la vision d'une morte. Si vous lisez ces lignes faites quelque chose ! Sinon le village agonisant va mourir d'un fléau inconnu, inconnu pour les autres, mais je crois le connaître, C'est... à côté du dernier mot se situent des taches de sang
Alexis Pescala a disparut ce soir-là , son journal a été placé comme pièce à conviction dans l'affaire des Suicides de Touves.
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J'espère que ce chapitre vous a plu, il a été écrit au Touves-en-Borèlle réel, car je me suis inspiré de mon village originel, malheureusement le manque de Wifi m'a pénalisé, j'espère quand même qu'il était bien.
La prochaine partie arrivera bientôt je le souhaite, ce sera les rapports de l'agent Luve sur cette affaire mystérieuse.
Au plaisir de vous revoir et merci encore
😊😊😊
En attendant je vous conseille d'aller voir les oeuvres d' Antahoshi et de Klarouille02
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