Plusieurs mois s'étaient écoulés depuis que Chan et Hyunjin s'étaient enfin parlé et qu'ils avaient tous les deux avoué avoir des sentiments l'un pour l'autre. Après quelques jours où les retrouvailles avaient été intenses, ils s'étaient une nouvelle fois posés et avaient décidé une chose : ils voulaient vivre une vraie relation. Hyunjin était d’un soutien sans faille, toujours là pour encourager son partenaire et pour le faire se sentir en confiance. Il l'avait aidé à s'ouvrir au monde, à arrêter de se comporter comme un rustre et surtout, à accepter qui il était.

De son côté, Chan se donnait lui aussi au maximum pour Hyunjin. Il avait besoin d'une épaule pour se reposer car, avec les aléas de la vie, il était souvent épuisé. Jieun cumulait les séjours à l'hôpital et parfois, son père se retrouvait à craquer tant la pression était intense. La fillette avait une santé fragile, mais cela ne la rendait pas moins adorable et attachante. Chan l'appréciait beaucoup et elle le lui rendait bien. Cette entente parfaite, Hyunjin ne pouvait pas rêver mieux. Il s'était souvent posé des questions sur une éventuelle relation et avec tous les hommes qui l'avaient rejeté, il avait fini par ne plus y croire. Mais Chan était là et, même s'il avait parfois du mal à se faire aux marques d'affection de sa fille, il se montrait toujours tendre et disponible pour elle. Il n'hésitait pas à lui faire des câlins et à accepter ses bisous baveux et collants.

Hyunjin n'avait pas voulu quitter la petite maison dans laquelle il vivait. La vieille dame à qui il payait un loyer pour l'étage avait aussi besoin de lui et il n'avait pas pu se résoudre à l'abandonner. Elle avait toujours été très gentille et arrangeante quand il avait eu des soucis d'argent, alors qu'elle-même ne roulait pas sur l'or. Le loyer qu'il lui donnait, elle l'utilisait uniquement pour survivre et il n'avait aucune envie qu'elle soit dans la panade par sa faute. Il la considérait même comme sa famille. Elle l'avait bien aidé, et il voulait en faire autant. Mais cela ne l'empêchait pas de passer quelques nuits chez Chan en semaine, quand il n'avait pas la garde de Jieun. Si la fillette était là le week-end, alors elle était de la partie.

Aujourd'hui, c'était un week-end avec Jieun qui s'annonçait. Chan courait dans tous les sens pour récupérer les affaires qu'il avait laissées traîner çà et là. Une fois son portefeuille et ses clés de voiture retrouvés, il vérifia qu'il avait bien fermé la porte-fenêtre qui donnait sur la piscine et rejoignit le hall d'entrée. Il enfila ses chaussures et quitta la maison pour grimper dans sa voiture flambant neuve. Il venait tout juste d'en changer et il en était plutôt fier. Il avait opté pour un Range Rover blanc qui ne passait pas inaperçu. Il n'avait jamais été très attiré par les belles voitures, mais il avait eu envie de se faire plaisir. Il l'avait payé avec une partie de l'argent qu'il avait gagné pour ses tableaux.

Maintenant qu'il s'était fait une petite place dans les galeries de la capitale et que ses œuvres étaient appréciées, il se sentait fier. Il ne l'avait jamais été avant et ça lui faisait un bien fou. Très jeune, il avait cherché à marcher sur les traces de son père sans jamais y parvenir. La pression qui lui était infligée était trop imposante pour qu'il y arrive. Il avait dû se libérer de cette idée de la perfection que son père lui avait inculquée. Il avait dû revoir sa façon de faire, sa façon de penser. Son évolution, il la devait en grande partie à Hyunjin. S'il ne l'avait pas rencontré, il serait encore dans son atelier à se morfondre et à peindre de médiocres tableaux qui ne transpiraient rien d'intéressant.

Après quelques minutes de route, il se gara à proximité de chez Hyunjin. Il lui envoya un message et il arriva très vite, comme s'il était sur le qui-vive. Jieun lui tenait fermement la main et trottinait en balançant son bras libre. Chan sourit. Elle portait un petit chapeau en paille avec des oreilles de chat et une robe violette qu'il lui avait lui-même achetée. S'il avait accepté de se faire plaisir en s'offrant une belle voiture, il n'hésitait pas à être généreux envers Jieun et Hyunjin.

Quand ils arrivèrent à proximité du véhicule, Chan baissa la vitre pour les saluer. Hyunjin ouvrit une des portières arrière pour faire monter sa fille. Il l'installa sur le siège-auto et boucla sa ceinture avant de venir prendre place du côté passager.

— Papa il a pas menti !

Chan se tourna vers Jieun et pencha la tête. Elle caressait la banquette arrière d'une main maladroite.

— Comment ça ?

— T'as une trop belle caisse !

— Jieun ! Une voiture ! la reprit Hyunjin.

Sa lèvre inférieure passa sur celle du dessus et elle fronça les sourcils.

— Toi t'as dit « une caisse ».

— Oui mais… on dit une voiture, c'est plus joli.

— Tu dis quoi toi, Chan ?

Il se redressa, un peu perdu.

— Euh, une voiture ? dit-il en jetant un regard à Hyunjin.

Ce dernier hocha la tête.

— Donc tu vois, c'est le mot plus joli qu'il faut utiliser, d'accord ?

Jieun se contenta d'acquiescer avec un sourire. Discrètement, son père soupira et se cala dans le siège, la tête basculée vers l'arrière. C'était quelquefois difficile de gérer une enfant comme Jieun. Elle avait cinq ans et malgré sa petite santé, elle ne manquait pas d'énergie. Elle posait des tonnes de questions et avait tendance à utiliser tous les mots qu'elle entendait, même les moins courtois. Il fallait constamment faire attention.

— On va où alors avec ta belle voiture ?

— Oui c'est vrai ça, tu nous emmènes où ? renchérit Hyunjin.

— Au risque de paraître narcissique, je voulais vous emmener dans la nouvelle galerie où je suis exposé. Ça vous va ?

Hyunjin se tourna vers la fillette.

— Ça te dit d'aller voir les peintures de Chan ?

— Les grandes peintures comme ça pleines de couleurs ? demanda-t-elle en levant les bras vers le plafond.

— Oui, c'est ça.

— Oh bah oui ! J'aime bien les peintures de Chan, moi plus tard aussi je veux faire des peintures !

Les deux jeunes hommes laissèrent échapper un rire devant l'enthousiasme de Jieun. Quand elle venait chez Chan, elle aimait beaucoup passer du temps dans son atelier à le regarder peindre. Elle était calme et attentive, même si elle n'était jamais à court de questions. Chan avait instauré une seule règle : elle devait ne toucher à rien. Parfois, il lui donnait des feuilles et de la peinture qu'il n'utilisait pas et elle s'amusait à faire comme lui. Ça suffisait à la rendre heureuse.

Une fois qu'ils furent arrivés à la galerie, Chan paya les entrées de Hyunjin et Jieun. Ils allèrent tout de suite dans la grande salle où étaient exposés ses tableaux. C'était une explosion de couleurs et de formes psychédéliques. En contemplant ses œuvres, Chan prit une nouvelle fois conscience de tout le chemin qu'il avait parcouru. C'était comme une claque. Mais ce n'était pas violent, c'était juste revigorant, tout ce dont il avait besoin. Les tableaux sombres et sans âme semblaient bien loin derrière lui. Désormais, il était satisfait de ce qu'il produisait. C'était éblouissant et rempli d'émotions positives. Quand il observait ses peintures, il avait toujours cette même étincelle qui surgissait au fond de lui. Il en était l'auteur et il s'en émerveillait. C'était ça, sa véritable récompense : pouvoir être surpris et charmé par son propre travail.

Une main vint se caler dans la sienne, minuscule et froide, mais pleine d'amour. Il baissa les yeux et sourit quand il remarqua à quel point Jieun avait l'air enchantée par ce qu'elle voyait.

— Il est beau lui ! On dirait un lion !

— C'est peut-être parce que c'est un lion, s'amusa Chan.

— J'avais bien deviné alors, dit-elle fièrement.

— Tu veux continuer ? Il y a encore plein d'autres animaux.

Elle sautilla sur place en tira sur le bras de Chan.

— Oui ! J'espère que t'as fait des petits pingouins. Parce que moi j'adore les pingouins ils sont trop mignons avec leur petit costume !

Chan lâcha un rire et Hyunjin le suivit. Jieun était un vrai moulin à paroles, mais ça ne le dérangeait pas. Tant qu'elle était aussi dynamique, cela signifiait qu'elle allait bien. Ils voulaient profiter de ces instants où la fillette avait du répit. Ça ne durait jamais bien longtemps, mais chaque minute où elle souriait et était heureuse était bonne à prendre.

—Chan, on revient quand dormir à ta maison ? demanda-t-elle quand ils s'arrêtèrent devant un autre tableau.

— Hm, je sais pas…

— Parce que j'aime trop la chambre avec tous les jouets et aussi quand papa est content.

Hyunjin détourna le regard, les pommettes rouges. Il était toujours un peu gêné d'avoir des interactions avec Chan quand sa fille était présente. Ils essayaient de ne pas trop se montrer au risque de subir un interrogatoire. Plus d'une fois elle avait failli les surprendre en train de s'embrasser ou de se caresser les mains. Ils ignoraient si elle ne les voyait vraiment pas ou si ça lui était égal. Après tout, Jieun venait surtout pour les jouets que Chan avait achetés. Il s'était beaucoup investi pour elle, jusqu'à utiliser une des chambres de l'étage pour qu'elle ait son propre espace. Il avait même déménagé sa chambre dans une autre pièce sur le palier afin que Jieun ne soit pas seule la nuit quand elle venait.

— Peut-être que vous pourriez venir ce soir ? proposa-t-il.

— Oui, oui, oui ! Papa, dis oui s'il te plaît !

Elle attrapa son t-shirt pour tirer dessus avec insistance. Les lèvres de Hyunjin se fendirent d'un sourire.

— Si Chan est d'accord, ça me va très bien.

— Bien sûr que je suis d'accord, je le propose. Et puis vous êtes toujours les bienvenus chez moi.

Jieun sauta de nouveau sur elle-même et elle attrapa la main de son père. Ils continuèrent à marcher dans la galerie jusqu'à ce qu'ils en aient fait le tour, puis ils repartirent.

Sur le trajet du retour, la petite fille piquait du nez. L'après-midi l'avait épuisée. Elle se fatiguait très vite et dans ces cas-là, elle avait besoin de calme et de repos. Mais quand ils arrivèrent chez Chan, elle eut un regain d'énergie. Elle voulait profiter de la chambre aux multiples jouets et, même si Hyunjin avait insisté pour qu'elle se repose avant le dîner, elle n'en fit rien. Ils commandèrent de quoi manger et dégustèrent leurs pizzas devant un film d'animation. Ils ne le regardèrent pas jusqu'à la fin, Jieun s'était assoupie. Chan aida Hyunjin à la mettre au lit et, assurés qu'elle dormait profondément, ils regagnèrent la chambre. Sous les couvertures, ils se serrèrent l'un contre l'autre et s'enlacèrent. De concert, ils lâchèrent un long soupir de bien-être. Se retrouver leur faisait le plus grand bien.

— Merci de nous avoir invités ce soir, murmura Hyunjin contre le torse de son partenaire. Même si c'est un peu Jieun qui a forcé.

Chan lui caressa les cheveux avant d'y déposer un baiser.

— Ça me fait plaisir, tu sais.

— Hm, mais t'es pas obligé de faire tout ça…

— Peut-être, mais je peux et j'aime vous voir heureux.

Hyunjin se colla davantage à lui et inspira son parfum à pleins poumons. Chan renforça son étreinte sur lui et ne manqua de le couvrir de baisers. Il ne se lassait pas de passer du temps avec Hyunjin, mais aussi avec sa fille. Il avait l'impression d'avoir une famille, chose qu'il n'avait plus espérée depuis longtemps. Il s'était souvent répété qu'il ne voulait plus s'attacher à qui que ce soit, qu'il ne voulait plus être déçu et il avait même fait un trait sur des projets d'avenir, une vie de famille, des enfants… Là, c'était comme s'il avait tout ça. Et ce n'était pas du tout désagréable, bien au contraire.

— Tu crois qu'on devrait le dire à Jieun ?

— Quoi donc ? demanda Hyunjin en se reculant.

— Pour toi et moi.

— Oh… T'as envie ?

— Seulement si tu es d'accord, je veux pas que ça te mette mal à l'aise.

Les yeux de Hyunjin furent étincelants. Il se pencha pour happer les lèvres de Chan et il lui donna un tendre baiser, rempli d'amour, qu'il s'empressa de réciproquer. Ils se détachèrent en sursaut quand la porte de la chambre s'ouvrit.

— Papa… j'ai fait un cauchemar…

Hyunjin se redressa et Jieun accourut dans ses bras.

— Je vais te remettre au lit, d'accord ? Ce vilain cauchemar ne reviendra plus.

— Mais j'ai peur, pleurnicha-t-elle en faisant la moue.

— Jieun, s'il te plaît…

Chan s'assit à son tour et il posa une main sur l'épaule de Hyunjin.

— Peut-être que… si tu veux ?

— Allez, viens.

Jieun s'allongea au milieu et en moins de temps qu'il ne fallait pour le dire, elle retrouva les bras de Morphée. Chan et Hyunjin se penchèrent pour partager un bref baiser.

— Je t'aime, murmura Hyunjin. Merci encore pour tout.

— C'est moi qui dois te remercier. Sans toi, je ne serais pas le plus heureux des hommes aujourd'hui. Je t'aime.

Hyunjin gloussa et après un nouvel échange amoureux, ils s'allongèrent de part et d'autre de Jieun. Même s'ils ne pouvaient pas être l'un contre l'autre, ils s'en fichaient. Le bien-être de la fillette passait avant tout et ils savaient que ce qu'ils ressentaient l'un pour l'autre était fort.

Tous les deux, par un simple concours de circonstances, avaient trouvé une nouvelle famille. Et ça n'avait pas de prix.

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Hello ❣️
Voilà, ceci marque la fin de Paint me ! J'espère que vous aurez apprécié cette petite fic 😊 Merci de l'avoir suivie, et je vous dis à bientôt sur mes autres histoires !
Prenez soin de vous 💜