Chapitre 34
Hello,
Juste un petit mot pour vous dire que j'ai beaucoup aimé écrire ce chapitre -qui m'a replongée dans beaucoup de (bons) souvenirs de vacances- ainsi que le suivant. Ces deux chapitres marquent un léger tournant dans l'histoire qui est environ à la moitié et un des personnages sera plus présent dans cette seconde partie. Je vous laisse deviner de qui il s'agit ;-)
J'espère en tout cas que cela vous plaira et saura, peut-être vous rappeler également d'agréables souvenirs.
Bonne lecture !
Le lendemain matin, tout le monde est de bien meilleure humeur.
Zoé et Théo, endormis tôt, étaient réveillés à l'aube et leur parents se sont levés avec eux pour nous laisser dormir. Thibaut en a profité pour aller chercher du pain frais et des croissants et Capucine nous a préparé une super table de petit déjeuner. Il est neuf heures quand je m'extirpe de mon lit, j'entends que tous les autres sont déjà debouts.
Je les trouve sur la terrasse, circonspects devant le transat avec la couverture, oubliés là.
— On a accueilli un clodo ou quoi ? demande Clément.
— Mais non, banane, c'est moi.
— T'as dormi ici ? s'étonne Caro.
— Non, j'avais juste besoin de prendre encore un peu l'air. Je profite d'avoir un jardin, chez moi, je ne peux pas faire ça.
Le regard de ma meilleure amie accroche le mien. Elle sait que je suis insomniaque depuis sept ans.
✨✨✨✨✨
Les premiers jours de vacances se déroulent vraiment bien. Les enfants, que je redoutais tant, sont plutôt sympas et, étonnamment, c'est surtout Clément et Thibault qui s'en occupent. Ils les emmènent au marché, au parc, leur apprennent à jouer à la pétanque. Ils font la sieste tous les après-midi et sont couchés le soir quand nous passons à table, je ne me sens pas envahie. Je passe de super moments avec mes amies et je me demande même si je ne vais pas prolonger mes vacances. J'ai un billet de retour en train pour le lundi, mais en même temps, personne ne m'attend vraiment à Metz, Serge est en vacances, mes parents aussi, je pourrais rester quelques jours de plus, et rentrer avec les copains.
Nous passons la journée de mercredi sur une plage près de Marseille pour que petits et grands puissent profiter de la mer et la bande projette d'aller visiter Nîmes la semaine prochaine, ça me tente bien.
Le jeudi, c'est mon anniversaire. Les copains m'invitent au resto à midi et Caro a commandé un beau gâteau à la pâtisserie pour le dessert. Exceptionnellement, je suis exemptée de tâches ménagères. J'ai même droit à des cadeaux : un bon pour un massage et une carte-cadeau dans ma librairie préférée.
— Bah oui, c'est moins sympa que des vrais paquets, m'explique Capucine, mais plus simple à transporter aussi.
Charlotte me propose de sortir boire un verre, une nuit en discothèque même, à Aix-en-Provence, mais ça ne me dit rien. Je suis bien comme ça, ici, avec toute la bande. Mes robes chics et mes talons hauts ne m'auront servi à rien.
Au cours de la journée, je la trouve un peu tendue, ce qui n'est pas dans ses habitudes. Je l'interroge mais elle ne lâche pas le morceau. Je questionne Caro et sa sœur, qui sont du même avis que moi, mais elles ne savent rien. J'espère ne pas l'avoir fâchée en refusant de sortir mais je suis loin du compte. Elle attend que les enfants soient couchés et nous à table pour nous avouer ce qu'elle a derrière la tête.
— J'ai quelque chose à vous demander à tous... enfin surtout à toi, Loulou. Je voudrais inviter quelqu'un...
Incroyable ! Mais comment a-t-elle fait pour se trouver un mec alors qu'on passe tout notre temps ensemble ici ?
— Quelqu'un ? demande Capucine. Tu peux nous en dire davantage ?
— Thomas.
Mon cœur rate deux battements. Le choc d'entendre son prénom, là, et immédiatement après, j'ai peur de comprendre. Le silence se fait autour de la table. Même Clément qui ne le connaît pas se tait. Il a dû en entendre parler.
Charlotte me regarde, mal à l'aise, elle n'ose plus prononcer un mot. Moi non plus. C'est Caro qui brise le silence.
— Tu peux nous expliquer, Charlie ?
— Eh bien, je ne vous l'ai pas dit mais après le baptême, j'ai repris contact avec lui, via facebook. On discute de temps en temps, on s'envoie des nouvelles... t'es fâchée, Lou ?
— Non, réponds-je, un peu froidement. C'était ton ami aussi de toute façon.
— Oui, c'est pour ça que je l'ai fait. C'était mon ami et j'ai eu envie de renouer avec lui.
— Et donc, vous êtes ensemble ?
— Mais non ! T'es pas bien ou quoi ? s'exclame Charlotte, horrifiée, et tout de suite je respire mieux. Mais je me disais que comme il vit à Lyon, et que c'était notre ami à tous, on aurait peut-être pu lui proposer de venir passer la journée ici, samedi, ajoute-t-elle d'une toute petite voix.
Personne ne bronche, mais tous me regardent du coin de l'œil, guettant ma réaction. Je pousse un gros soupir bruyant.
— Qu'est-ce que tu veux que je te dise, Charlotte ? Que ça me fait plaisir ? Définitivement non ! Mais c'est vrai, c'était votre ami à tous, alors si vous voulez en profiter, je ne m'y oppose pas.
— Tu es certaine ? s'enquiert Caro. C'est vrai que c'est une bonne idée mais on pourrait aussi le voir un jour à Metz, quand il aura déménagé, sans toi. Ça ne va pas te gâcher tes vacances ?
— Ah bah, il a déjà gâché ma vie, alors les vacances c'est pas grave.
Mon trait d'humour noir ne fait rire personne. Je reprends moins agressivement.
— Franchement, je n'ai pas envie de le voir mais ça me ferait mal au cœur de vous savoir tous avec lui sans que je ne sois là, moi. J'ai pas envie de vous partager, surtout avec lui. Alors si vous voulez le voir, je préfère être là aussi.
— C'est oui, alors ? murmure Charlotte, pleine d'espoir.
Je lève les yeux au ciel.
— Oui.
Elle explose de joie et vient enserrer mes épaules de ses bras, planter un baiser sur ma tempe.
— T'es la meilleure, Loulou !
Étrangement, personne ne vient me voir pour en reparler au cours de la journée du lendemain.
Les deux hommes gardent gentiment les enfants pour que nous puissions passer un peu de temps à quatre. Nous en profitons pour partir à la journée et découvrir quelques jolis villages des alentours, la Bastidonne, la Tour d'Aigues et Grambois.
Dans le second, nous trouvons une charmante table d'hôtes provençale et même à ce moment, propice aux confidences, le sujet ne revient pas sur le tapis. Mes amies, toujours promptes pourtant à décortiquer mes émotions, semblent éviter le sujet comme si elles craignaient que je ne revienne sur ma décision. Mais je n'en ai pas l'intention. Même si elle ne me réjouit pas, je n'appréhende pas non plus sa venue. Puisque ça s'est bien passé au baptême, ça ira ici aussi. Il sera au centre de l'attention, et je n'aurai qu'à l'ignorer jusqu'à ce qu'il reparte. Ce n'est qu'une journée.
Le samedi matin, je lis à ma place attitrée, au bord de la piscine. Autour de moi, c'est l'effervescence. L'air moqueur, je les regarde s'agiter. On croirait qu'ils attendent le messie, ça me rappelle Solène il y a trois mois. Quand, enfin, la Clio noire avance au pas dans l'allée de gravillons, tous mes amis se précipitent à sa rencontre. Je les imagine s'embrasser avec effusion, se serrer dans les bras.
Leurs éclats de voix parviennent jusqu'à moi. J'entends le timbre haut perché de Charlotte, Caro qui présente son compagnon et Capucine ses enfants, mais je reste allongée, stoïque.
Le groupe finit par avancer en direction du jardin et donc de moi, mais je ne tourne pas la tête, fixée sur mon livre. Les copains déballent des biscuits secs, sortent olives et rosé du réfrigérateur. Du coin de l'œil, je vois Tom se diriger vers moi. Il s'agenouille à côté de mon transat et je sens son parfum boisé. Mon cœur s'emballe immédiatement. Il retire ses lunettes de soleil.
— Bonjour, Louise.
Sa voix basse, posée, m'atteint en plein cœur. Je fais mine de l'ignorer un instant mais je me sens ridicule, une vraie gamine, alors je finis par me tourner vers lui.
— Salut, Thomas.
Très délicatement, il se penche vers moi et glisse un baiser léger sur ma joue, comme une caresse. C'est la première fois qu'il m'embrasse depuis que nous nous sommes revus, et ce contact me trouble évidemment, mais je tente de ne rien laisser paraitre. Un sourire presque timide effleure ses lèvres quand il se redresse. Je me lève à mon tour et passe brusquement devant lui pour rejoindre le groupe.
Comme prévu, Thomas est le héros du jour. Au centre de toutes les attentions, il raconte ses aventures que j'ai pour la plupart déjà entendues au baptême. Pris par le virus du voyage, il n'est resté que quelques mois en France en 2010, avant de repartir pour l'Amérique du sud. Il explique qu'il a travaillé plusieurs années pour Amnesty International, comme bénévole, puis stagiaire, et enfin salarié. En Bolivie d'abord, puis en Argentine pour défendre la légalisation de l'avortement mais aussi les droits des migrants et des peuples indigènes. Muette, je l'écoute raconter sobrement, modestement, son engagement.
Je trouve ça beau d'avoir des idéaux et de se battre pour eux. C'est dur pour moi de l'entendre évoquer sa fièvre d'ailleurs qui me l'a volé, mais une part de moi ne peut s'empêcher d'être fière de lui, de l'homme qu'il est devenu.
Personne n'a le mauvais goût d'évoquer Jeanne. Je préfère, mais j'aurais quand même bien aimé savoir ce qui les a séparés.
Il a fini par avoir le mal du pays. Une dispute avec Sarah a précipité son retour, quand il a subitement pris conscience que son rôle de grand frère était d'être auprès de ses sœurs orphelines. Il est d'abord passé par Lyon où un ancien collègue lui a offert un logement provisoire et du travail, mais il espère bien trouver vite un appartement dans notre belle ville du Nord Est pour s'y installer définitivement.
— Dis, Lou, Serge aussi vient de Lyon, non ? me demande Capucine.
Thomas relève vivement la tête et me dévisage, à l'autre bout de la table.
— Euh, oui, je crois, réponds-je en buvant une gorgée de vin.
Évidemment je n'en sais rien, pas plus que Capucine, mais le but de sa manœuvre était visiblement de placer mon amant sur l'échiquier. C'est du gros sabot, du Capou tout craché, mais tant pis. Et à voir la tête de Thomas, je suis bien contente.
Il ne commente pas, et Thibault propose de passer à table, histoire de changer de sujet.
Nos dîners étant consacrés à des orgies de viande cuite au barbecue, nous déjeunons en général assez léger. Je suis embauchée pour couper du melon et le déposer sur un plat avec du jambon de Parme. Avec du pain et la salade grecque préparée par Clément et Capucine, cela fera l'affaire. Le soleil tape fort de toute façon, et avec l'apéro qui s'est éternisé, personne n'a trop d'appétit.
Il est presque quinze heures quand nous quittons la table et les enfants, dispensés de sieste pour l'occasion, demandent la permission d'aller enfiler leur maillot de bain. Ils connaissent mal leur mère qui les envoit directement se reposer un peu au frais dans la maison. « On se baigne pas après déjeuner de toute façon ! ». Ils négocient quelques épisodes de Peppa Pig sur le lecteur portable, et leurs parents, poussés par le reste de la bande, finissent par accepter, pourvu qu'on ait une heure de calme.
Nous débarrassons et buvons un café, puis tandis que la team 1 -Charlotte, Caro, Thibaut- s'occupe de la vaisselle, je reprends ma place habituelle avec mon livre. Capucine s'installe non loin de moi, à l'ombre, pour une petite sieste et Thomas reste prudemment à distance, discutant avec Clément sous l'auvent de la terrasse. Je sens parfois son regard sur moi, mais il se garde bien de m'approcher.
Rapidement, trop rapidement même, Théo et Zoé débarquent à nouveau, réclamant la piscine à corps et à cris.
— D'accord, mais ne faites pas trop de bruit, geint leur maman qui aurait bien dormi une heure de plus.
Nous nous couchons tard, elle se lève tôt pour s'occuper de ses rejetons et n'a pas ses huit heures de sommeil nécessaires.
Elle se lève péniblement et rentre avec les enfants pour les changer et les accessoiriser : brassards, crème solaire, tee-shirt anti-UV, chapeau. Je suis sûre qu'elle passe plus de temps à les préparer pour la baignade qu'eux dans l'eau.
— T'as pensé à prendre ton maillot ? Je t'ai dit qu'il y a avait une piscine, lance Charlotte à l'intention de Thomas.
— Euh, oui, mais je ne sais pas si je vais me baigner.
Il jette un bref coup d'œil vers moi, mais je fais toujours semblant d'être absorbée par ma lecture.
— Comme tu veux. Nous, on y va de toute façon.
Elle réapparait quelques instants plus tard, sculpturale dans son bikini bleu foncé. Elle est déjà bien hâlée, ses cheveux chocolat ondulés frappent son dos au rythme de ses pas, c'est une vraie bombe. Clément et Thibault ont déjà eu plusieurs jours pour se rincer l'œil, ils sont habitués au spectacle, mais Thomas n'en perd pas une miette. Les autres ont tous revêtus leur maillot de bain aussi, je suis la seule avec lui, à garder mes vêtements.
— Tu ne viens pas te baigner, Lou ?
— Non.
— Mais pourquoi ? Elle est super bonne ! Allez viens, on va faire une bataille !
C'est complètement bête. Thomas m'a vue nue des centaines de fois et depuis ce temps, mon corps a bien changé. J'ai perdu du poids, me suis musclée mais je n'ai pas envie de me déshabiller à côté de Charlie. Je n'ai jamais été jalouse d'elle mais la voir si à l'aise avec son corps me met, moi, mal à l'aise.
— Bah, vous êtes trois filles et trois garçons, je vous regarde.
Thomas cède aux cris des copains et se déshabille en riant. Il est juste devant moi, je peux tout regarder par-dessus mes lunettes, à croire qu'il le fait exprès. Je le vois quitter son tee-shirt et aperçoit à cette occasion un tatouage sur son épaule gauche. Une boussole. Et ses fossettes au creux des reins, que j'aimais tant. Il retire ses baskets en toile et son bermuda, puis se retourne pour jeter ses vêtements sur la chaise longue à côté de moi. Je déglutis. Son corps à lui a changé également. En bien aussi.
Chacun des hommes prend une des filles sur ses épaules et bien évidemment, Charlotte monte sur celles de Tom.
Je les observe quelques instants, mais, rapidement, c'en est trop pour moi, je rentre à la cuisine prendre un peu le frais et préparer de la citronnade pour que les autres ne pensent pas que je boude. Ce qui n'est pourtant pas faux. J'en veux à Charlotte d'être si naturelle, alors qu'objectivement, elle n'a rien à se reprocher. Je sais que ce n'est pas du flirt mais ça m'énerve de les voir si proches. Et j'en veux à Thomas de me prendre mes amis aujourd'hui. A cause de lui, je ne me baigne pas, je ne ris pas. J'entends les cris et les rires de l'extérieur. J'en veux aussi à mon sale caractère de ne pas être capable d'enlever ma robe pour me jeter avec les autres dans l'eau, partager leur joie et leur bonne humeur.
Quand je sors une quinzaine de minutes plus tard avec un plateau garni, Capucine, Charlotte et Clément sont sortis, il ne reste que Thibault et Tom qui jouent à projeter Théo et Zoé dans l'eau, et Caro qui paresse sur un matelas gonflable en râlant dès qu'elle est éclaboussée.
A mon arrivée, les autres sortent de l'eau aussi et je marque un temps d'arrêt en voyant Thomas s'ébrouer. J'ai envie de passer les doigts dans ses cheveux mouillés, de toucher la peau lisse de son torse, de suivre le mouvement de ses abdominaux dessinés.
— Lou, souffle Caro, qui m'aide à servir les boissons fraîches. Ferme ta bouche.
Son rappel à l'ordre me ramène sur terre. Elle a un air mi-narquois, mi-inquiet. Je me dédouane d'un sourire qui sonne faux et qui ne la convainc pas, mais elle n'ajoute rien. C'est heureusement la seule à avoir remarqué ma mine de poisson hors de l'eau.
Capucine entraine ensuite tout le monde au fond du jardin pour un tournoi de badminton et je reste seule avec ma meilleure amie. Le soleil baisse doucement mais il fait encore très chaud. Nous nous asseyons sur les chaises de jardin, à l'ombre de la maison.
— Comment ça va ? Tu n'as pas l'air de trop t'amuser...
— Ça va...
— C'est la réponse à la première ou à la deuxième question ?
— Il n'y avait qu'une question.
— Parle-moi, Lou. Je ne comprends pas ton attitude. Tu le bats froid depuis qu'il est arrivé, et là je te vois le regarder comme si t'allais le dévorer.
— Je ne sais pas, Caro. Sa présence m'insupporte et en même temps... de le voir, ça me rappelle tellement de souvenirs. Il n'y a que lui qui a vraiment compté, alors, dans ma tête, c'est comme si j'étais propriétaire de son corps. On était tellement en symbiose tous les deux... Il m'appelle, tu comprends ? Et puis, sérieux, t'as vu comme il est gaulé ?
— Tu veux dire que tu as envie de lui ?
— Non, c'est plus compliqué que cela. Je n'arrive pas à mettre de mots sur mes émotions, mais ce qui est certain c'est que je lui en veux toujours. Je suis même encore en colère contre lui. Il m'a tellement déçue, je ne lui pardonnerai jamais. Et son beau petit cul n'y change rien.
Caro sourit, mais reprend un peu tristement.
— On n'aurait pas dû lui proposer de venir.
— Mais si, Caro, regarde les jumelles, regarde Thibault comme ils sont contents. Vous n'y êtes pour rien. Mais si Thomas pouvait se prendre un volant dans l'œil ou se tordre la cheville, je t'avoue que ça me ferait bien plaisir.
— C'est le moment ou jamais de croire en Dieu et de prier ! Bon, on prépare l'apéro ?
— Déjà ? Mais on ne fait que picoler et manger ici !
— Oui, ça s'appelle les vacances.
Le groupe revient vers nous, épuisé par ses douze minutes de sport sous le cagnard et Capucine monte doucher les petits pendant que les hommes allument le barbecue. Charlotte, Caro et moi nous chargeons de la salade de riz. Pas d'équipes de corvées de soir, nous revenons à la préhistoire. Femmes à la cuisine, hommes au feu.
Capucine redescend ensuite avec sa marmaille propre et les installe à table avec des bâtonnets de concombres, de la salade de riz et un reste de chipolata de la veille, tandis que nous prenons place à côté. Thibault sort la bouteille de champagne que Thomas a apporté et je le regarde sans mot dire servir sept flûtes.
— A Thomas, à nos retrouvailles ! dit-il solennellement en levant son verre
Chacun acquiesce et l'imite, sauf moi. Je ne peux pas.
— Ben, Loulou, tu ne trinques pas ?
Je regarde Tom droit dans les yeux, croise les jambes et assène d'un ton tranquille :
— Je ne bois plus de champagne.
Il pâlit mais ne répond pas, soutenant mon regard, l'air peiné. Un silence gêné s'installe. Les filles se jettent des coups d'œil en biais, Clément se racle la gorge. Sans quitter mon ex des yeux, je me lève et vais me chercher une bière dans la cuisine. Quand je reviens, le froid se dissipe et chacun fait comme si de rien n'était.
Dès la fin du repas de Zoé et Théo, leurs parents montent les coucher.
Je les trouve merveilleux tous les quatre. Ça me casserait franchement les pieds de devoir interrompre un moment entre amis, une discussion, pour aller brosser les dents de mon gosse, mais chaque soir, sans râler, sans rechigner, sans négocier un tour de rôle, ils montent à quatre. Thibault s'occupe de l'un, Capucine de l'autre, et même ici, même au milieu de l'apéro et des copains, ils n'en restent pas moins des parents, une famille qui ne repousse pas ses responsabilités.
Thomas et Clément s'occupent de mettre la viande sur le feu et aidée de mes amies, je dresse le couvert. Nous nous asseyons à table au moment où les jeunes parents réapparaissent.
Au fur et à mesure de la soirée, et l'alcool aidant, je me détends un peu. Je n'adresse toujours pas la parole à Thomas mais au moins je m'habitue à sa présence. On dira que c'est un peu cet ami que je n'apprécie pas. Voilà. Mais on peut se voir sans s'agresser. Oui, c'est cela, on va faire comme ça.
Comme chaque jour, la soirée s'éternise et rapidement, la bouteille de limoncello remplace le rosé infâme. Il est presque une heure quand Thomas se lève.
— Merci pour cette soirée, les amis. J'étais vraiment heureux de vous revoir.
— Bah, tu vas où comme ça ? croasse Clément, passablement éméché.
J'y crois pas. Ils ne se connaissaient pas ce matin et maintenant c'est les meilleurs potes.
— Je vais rentrer, j'ai pas mal de route.
— Ce n'est pas raisonnable, Tom, fait Caro en me lançant de petits regards un peu paniqués. Il est tard et tu as un peu bu, tu devrais dormir ici.
Thomas cherche mes yeux mais je détourne la tête. Démerdez-vous.
— Non, ça va, je n'ai pas tant picolé, t'inquiète, ça va aller.
— Pas question, tu restes ! déclare Charlotte.
— Non, merci, les filles. Il vaut mieux que je rentre.
Alors qu'il s'avance pour faire le tour et embrasser tout le monde, Charlie fait un geste aux garçons. Clément lui attrape les bras dans le dos et Thibault fouille ses poches pour lui confisquer les clefs de sa voiture.
— Désolée, Loulou, me souffle Caro. Mais franchement, on ne peut pas le laisser rentrer...
Je hausse les épaules, je ne suis plus à ça près.
Malgré son discours, Tom rit, il a l'air content.
Thibault installe une chaise longue dans le bureau et Capucine y dépose une couverture et un coussin du canapé pour qu'il puisse s'y installer confortablement. Il aurait été mieux dans le salon mais il n'y a pas de volets et le jour se lève tôt, Zoé et Théo aussi d'ailleurs, il sera plus au calme dans la petite pièce.
Je laisse tout le monde se souhaiter bonne nuit et m'échappe pour aller m'enfermer la première dans la salle de bain. Je suis déjà dans ma chambre quand les autres montent.
Sur ma table de chevet, je retrouve mon téléphone avec quatre appels en absence de Serge. On s'appelle tous les soirs, et aujourd'hui j'ai complètement oublié.
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