Hey !
Perturbée, je me secoue la tête pour m'en détacher, mais y revient toujours. Son regard est très intense. Cette couleur est incroyable. C'est au-delà d'un simple bleu ou d'un vert. Un turquoise magnifique, un doux mélange azuré que je n'ai encore jamais vu. Même si ce n'est qu'à travers un écran, je n'ai qu'une envie, c'est qu'il me fixe, moi, de la même façon. En vrai.
Oh... Une troisième fois ?
Rien qu'en me replongeant dans ces deux puits profonds, mon corps frissonne à nouveau. Je ne m'attarde pas au sujet de ce petit courant électrique identique à tout à l'heure et jette un coup d'œil sur son front. J'ai collé tout un tas d'étiquette depuis mon inscription. Je me retourne vers mon miroir, indécise, avant de réfléchir à la sienne. Justice pince les lèvres et me la montre brièvement. Je suis scotchée par ce que je lis. Je sais ce que ça veut dire et je m'attends à voir Cynique apparaitre, mais non, elle est dans son fauteuil, les doigts entrelacés, se mordant l'intérieur de la joue, songeuse. Je sais ce que ça veut dire. Le calme plat de Cynique, n'est jamais de bon augure. Les dix autres sont en temps mort et chuchotent entre elles. Amour relève de temps en temps la tête, l'air désemparé.
Je n'aime pas trop ça...
Je zieute encore son profil. Je dois en découvrir plus sur cet homme qui met mes Douze si mal à l'aise.
Pseudo : HugoM
Âge : 24
Cheveux : châtain
Yeux : bleu/vert
Taille : grand
Passion : motocross, guitare
Description : aucune
Quoi ! Pas de description ?
Je me surprends à chouiner. Les Douze sont tétanisées. D'habitude, elles braillent toutes et là, pas une qui l'ouvre. Elles me fixent avec leurs yeux de biches, fascinées.
OK, ça craint... Bon, analysons la situation...
(1) Il est grand. Bon point.
(2) Il n'a que deux ans de plus que moi. Autre bon point...
(3) Il habite plutôt loin de chez moi.
Je jette un œil à la carte et constate qu'il n'y a pas moins de quatre-vingt kilomètres d'écart.
Pas bon point du tout...
Amour et Rêveuse me rappellent, un peu nerveuses, que l'amour n'a pas de frontières.
Oui, mais bon on ne peut pas parler d'amour, là...
Je ne connais rien de lui !
Enfin...
Elles ne disent plus rien et s'enfoncent toutes les deux dans leur fauteuil. Sexy s'apprête à dire quelque chose, mais se ravise. J'aime encore moins ça. S'il y en a une des Douze qui a pour habitude de dire tout ce qu'elle pense, c'est bien elle. Et là, cette réaction termine de me gêner. Je me secoue la tête à nouveau et continue mon analyse.
(4) Il fait du motocross et je vais m'inscrire pour passer mon permis moto.
Voilà un point commun !
Mais... d'où tu sors, toi ?
Colère me l'a soufflé à l'oreille et je suis scotchée par son interrogation. Depuis quand Colère cherche à comprendre quoi que ce soit ? Je crois que mon joyeux bordel est un peu ébranlé. Mes doigts tapotent nerveusement mon bureau. Penser devient même impossible. Ma foutue Mme Bêtise a encore déconnecté tous les câbles dans ma caboche. Je me ressaisis et analyse sa deuxième passion. Je ne connais pas de guitariste, mais il faut admettre que c'est très sexy un homme qui joue de la musique.
Il nous jouera peut-être... des chansons d'amour ?
Merde ! C'est une blague !
Cynique qui veut entendre des chansons d'amour, je n'y crois pas. Elle grimace et me tourne le dos dans son fauteuil la seconde suivante. Peureuse me tire sur la manche pour que je lui écrive un message.
OK ! Là, ça craint...
Je me ressaisis pour la troisième fois et continue.
(5) Pas de description. Très... très... très... mauvais point.
Au moins sur celui-là, elles s'accordent toutes avec moi.
(6) Il faut avouer qu'il détient un regard qui ferait fondre n'importe qui ou quoi sur terre. Troublant, sombre, perçant et d'une couleur magnifique. Je m'enfonce dans mon siège de bureau et soupire, ne sachant plus quoi penser.
Qu'est-ce qu'on fait maintenant ?
Je tatillonne des yeux et propose un vote pour savoir si on doit lui écrire un message. Après tout, c'est la meilleure alternative. Je sais que j'ai besoin d'avoir une réunion avec toute les Douze. C'est donc à moitié étonnée que s'ancrent dans mon esprit les petites pancartes avec noté oui.
L'unanimité ? Eh ben...
Je crois que je peux compter sur les doigts d'une main les fois où elles ont toutes été d'accord. C'est d'ailleurs la deuxième fois. Je grimace en repensant à la première fois, mais je chasse ce mauvais souvenir d'un battement de cils.
OK... Peu importe.
On va lui écrire.
Je clique sur la petite enveloppe et réfléchis à quoi dire. Aucune ne semble volontaire pour m'aider. Elles sont toutes silencieuses.
Bon, je vais me débrouiller toute seule...
Emma12 : Coucou
Non, ça fait trop petite princesse...
Emma12 : Elle est bizarre ta photo...
Vraiment ?
Oui ! C'est vrai, qui ne sourit pas sur les photos ?
Ça va peut-être l'intriguer, mais il peut aussi penser que je ne suis pas nette de commencer une phrase par un reproche.
Mais...
NON !
Tout-va-bien.
Emma12 : Euh... je ne sais pas pourquoi je suis happée par ton regard.
Ah oui ? Pas un peu trop direct ?
Bah non...
Emma, la vérité peut faire flipper.
Je grogne contre Justice et écris une douzaine de phrases toutes plus stupides les unes que les autres. Je craque au bout d'un quart d'heure et tape juste un simple « Hey ». Je me déteste à l'instant où je clique sur « envoyer ».
C'est n'importe quoi juste « Hey » !
Il va me prendre pour une dingue....
« Hey toi ! »
« Hey, c'est moi ! »
« Hey... ça va... ? »
« Hey, hey, hey, regarde-moi, là ! »
« Hey ! Ho ! Hey, ho ! »
On rentre du boulot !
Oh ! Arrête de délirer là !
Et voilà... Bravo Emma
Fichue chanson !
Cynique a repris du poil de la bête et sur le coup, ça me rassure. J'observe les onze autres, stoïques. Il n'y a qu'Impatiente qui mâchouille son petit doigt en tapotant du pied. Je ne sais pas quoi faire pour la calmer. Au bout de dix minutes d'attente devant mon écran, je remarque ce petit bouton rouge à côté de son pseudo.
Hors-ligne.
Cynique s'en donne aussitôt à cœur joie.
Ouais, c'est bon, j'ai compris... t'es de retour.
J'ignore le numéro six sous mon icône cœur et coupe l'ordinateur. De toute façon, ma mère m'appelle pour dîner. Je la rejoins, passe une partie de la soirée avec elle devant la télé avant de me doucher et d'aller me coucher. Une fois dans mon lit, je réfléchis un peu à la réaction que j'ai eue. Je crois même que c'est la première fois que mes Douze ont une crise pareille. Bien que je sois un peu folle et que mon joyeux bordel soit étrange. Je dois avouer que je n'ai jamais été déstabilisée par autre chose que par moi-même.
Ouais, mais...
Je cogite trop avec mes Douze et nous décidons d'installer l'application du site sur mon IPhone au cas où ce Hugo nous répondrait. Après avoir vérifié, et avoir eu une pointe de déception, je repose le téléphone sur la table de chevet avant d'enfoncer ma tête dans l'oreiller.
Est-ce qu'il va me répondre ?
...
Eh merde ! J'ai vraiment écris n'importe quoi !
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro