OS - Binchan [Partie 2] IDOL
Deux mois passèrent depuis mon rendez-vous à la JYPE. Ma relation avec Sujin n'était pas encore revenue totalement à la normale mais c'était déjà bien moins tendu, j'avais fait une petite pause sur ma thèse, décidant que j'avais besoin de me changer les idées. En réalité, même après deux mois, j'avais encore du mal à ne pas repenser à ce qu'il s'était passé dans ce bureau et parfois je relisais le mail que j'avais reçu simplement pour m'assurer que je ne l'avais pas halluciné.
Je n'en avais parlé à personne, pas même à mes amis que je devais justement revoir pour une petite soirée en petit comité dans un bar que nous avions l'habitude de fréquenter, au début de notre cursus à la fac.
Asa continuait de se lamenter sur son mari qui ne foutait plus rien depuis qu'ils s'étaient mariés l'année précédente, elle se saoulait la gueule pour le plus grand déplaisir de Daeho qui devait la supporter et la ramener ensuite. Après quelques bières, je me déridais moi-même, même si je restais toujours plus silencieux que les autres et sentant finalement la main de Yuki sur le haut de ma cuisse, je me figeais une seconde devant l'air mutin du japonais.
Je connaissais Yukihara depuis la première année de fac, son extravagance ne passait pas inaperçu et son style japan street attirait beaucoup les regards, homme ou femme, bien qu'il était ouvertement homosexuel. Son physique me faisait un peu penser à celui de Hyunjin en plus décontracté. Voilà que je pensais au groupe qui rythmait mon quotidien depuis plusieurs semaines, incroyable. C'était risible et l'alcool aidant, je pouffais doucement ce qui attira le regard du japonais sur mes lèvres.
Même avec sa popularité qui lui aurait permis d'avoir qui il voulait, il avait toujours montré que je l'intéressais. J'avais quelques fois cédé à l'impulsion du moment, mais il était trop frivole pour que j'accepte une relation sérieuse. Il était un des rares à savoir que j'étais bisexuel, en plus de Wooyoung qui regardait actuellement la piste de danse d'un air renfrogné, observant son propre mec de se faire frotter par deux filles en chaleur.
« Qu'est-ce que t'en dis ? » Me demande alors Yuki en se penchant vers mon oreille.
Ses grands yeux en amendes, son corps longiligne se pressait un peu plus contre le mien. Ses cheveux longs attachés en un petit chignon duquel s'était enfuit quelques mèches, découvraient le tatouage qu'il s'était fait sur le cou il y a deux ans. Des chrysanthèmes. J'ai toujours été fasciné par les tatouages et celui-ci lui allait divinement bien, faisant ressortir les veines de son cou dont je m'approchais, tenté par le parfum qui s'en dégageait. Il sentait bon mais cette fragrance me rappelait soudainement quelqu'un d'autre. Un parfum que j'avais senti dans les bureaux de la JYPE et qui faisait ressurgir le sourire d'un garçon que j'avais essayé d'oublier depuis deux mois.
Je me détournais alors, déçu par ma propre réaction mais je n'avais pas la tête à m'amuser avec lui ce soir. Je m'excusais, me levant de ma chaise et récupérant ma veste avant de donner une tape sur l'épaule de Wooyoung, l'interrompant dans sa prise de tête imaginaire tandis que San revenait vers lui pour quémander un baiser.
« Bonne soirée les gars, je vais rentrer.
- T'es sûr ? Il est encore tôt ! On peut se faire un after en boîte, me dit Wooyoung en essayant de repousser son petit ami roucoulant.
- Non, je suis un peu fatigué, je vais me rentrer. Amusez vous bien.
- Ok ! A – mais putain arrête un peu – a plus ! »
Je riais du couple avant de sortir du bar bondé et retrouvant l'extérieur, soulagé. Je regardais les fumeurs qui s'étaient regroupés devant l'entrée, avant de prendre la route, les mains dans les poches et remontant mon casque qui pendait autour de mon cou.
Je me frottais les cheveux légèrement ondulés par l'air humide, et soufflant ma buée, je me concentrais sur la voix qui chantait dans mes oreilles.
Et si. Et si j'avais fait une terrible erreur.
J'arrivais chez moi bien rapidement, ne me souvenant même plus du chemin parcouru et devant mon immeuble je me retrouvais incapable de franchir la porte d'entrée. Je regardais autour de moi, il y avait quelques passants, malgré l'heure tardive. Je décidais finalement de rejoindre le petit parc derrière, ne me sentant plus de rester seul dans ma chambre. A cet instant, elle avait tout d'une prison et je n'avais pas envie d'y rester enfermer avec mes pensées. Je préférais les rues désertes, le son d'un piano dans les oreilles alors que je vins m'asseoir sur la balançoire, observant mes baskets se balancer doucement, d'avant arrière. Je devais avoir l'air d'un crétin, tout seul au milieu d'un parc, ou bien d'un dépressif mais la vérité, c'était que je me sentais perdu.
Je ne regrettais pas d'avoir refusé l'offre de JYPE, je le sentais au fond que c'était la bonne décision mais je ne pouvais m'empêcher de demander et si...Et si j'avais accepté ?
En vérité il y avait bien un regret qui persistait et je ne comprenais même pas pourquoi j'avais ce sentiment. Ce n'était pas logique, on s'était à peine adresser la parole mais j'avais cette conviction profonde, que je connaissais déjà tout de lui.
Mon alter ego. Et qu'en refusant, c'était lui que j'avais rejeté.
« Merde Changbin tu perds la boule...On dirait une de ces folles qui se tape des films. Réveille-toi ! »
Je soufflais bruyamment, me balançant en arrière et tirant sur les cordes avant de jeter mes jambes en avant. Je restais ainsi encore de longues minutes avant de sentir mon téléphone vibrer. Je souriais en voyant qu'il s'agissait du fil de conversation de mes amis, Wooyoung m'avait envoyé une photo de San, la tête endormie sur son épaule et une moustache dessiner sur son visage. Il s'était vengé le bougre.
Après plusieurs messages, je remarquais que j'avais eu un message privé d'un internaute inconnu. Un pseudo qui ne me disait rien et je pensais aussi tôt à une escroquerie quand je vis les phrases familières.
« Mais c'est... »
Je me levais soudainement de la balançoire, reconnaissant les paroles d'une de mes chansons. Comment c'était possible ? Personne n'y avait accès, personne sauf...
KrissCB97
Salut Changbin, je ne suis pas sûr que ça soit le bon moyen de prendre contact avec toi mais je ne savais pas trop comment le faire...
C'est Chan. Bang Chan. Je pense pas que tu connaisses beaucoup de Chan...
Bref.
Pour que tu sois sûr que je ne mente pas, je t'ai envoyé les paroles d'une de tes chansons. Ma préférée je dois dire. Mais promis je ne compte pas l'utiliser ou quoi que ce soit ! Je t'assure, je respecte ton travail. En fait tu es parti et tu n'as pas récupéré ta clé et je voulais te la rendre, pour te rassurer. Je sais comme ça peut être angoissant à l'idée qu'on puisse utiliser ton travail alors, j'aimerai vraiment te la remettre. En personne. Te confirmer que jamais on ne gardera de copie...
Voilà. Si tu es tenté. Fais moi signe.
CB.
PS : pitié, ne refile ce compte à personne, c'est mon profile privé et j'ai vraiment pas envie d'en changer, c'est trop chiant. Merci à toi.
Je n'arrivais pas à le croire. Je relisais inlassablement son message et je sentais en même temps mon cœur battre à vive allure dans ma poitrine. Je devais me calmer, mais c'était tellement étrange, tellement inattendu que je ne pus un retenir un rire de m'échapper. Plaquant ma main sur ma bouche j'avais l'air d'un fou.
« Incroyable. »
SpearB
Salut. Comment tu as trouvé mon compte ?
« Merde Bin, c'est tout ce qui t'inquiète, on s'en fiche de savoir comment ! » je me sermonnai moi-même.
Je sortais du parc, ne m'attendant pas à une réponse immédiate malgré mon impatience mais à ma grande surprise, une minute plus tard je vis la notification et le pseudo s'affiché. A nouveau je sentis mes mains trembler, me cachant presque à l'ombre d'un rebord de toiture, comme si j'avais peur qu'on lise au-dessus de mon épaule alors que j'étais totalement seul.
KrissCB97
Tu as signé ces chansons avec ce pseudo et j'ai cherché un peu. Avec ta photo de profile et ta bio, j'en déduis que c'était toi et j'ai tenté ma chance.
SpearB
C'est un peu risqué, si ça n'avait pas été moi, t'aurais provoqué un vrai scandale.
KrissCB97
J'ai dit quelque chose de scandaleux ? 😱
SpearB
On aurait cherché à savoir qui était Changbin en tout cas...J'aurai pu te coller un procès.
KrissCB97
Et tu aurais été célèbre grâce à moi.
SpearB
Magnifique...Merci.
KrissCB97
Plus sérieusement. Je veux vraiment te rendre ta clé USB. Je sais qu'on ne se connait pas, que tu n'as pas de raison de me faire confiance mais je me dis que si tu me vois prendre le risque de te la rendre, alors ça pourra peut-être te rassurer.
Je me mordais la langue, hésitant sur ce je voulais répondre mais finalement, j'acceptais de faire taire mes envies irrationnelles pour une réponse sage. Prudente.
SpearB
Tu n'es pas obligé. Tu peux laisser la clé dans une enveloppe à l'accueil de la JYPE, je passerai la prendre. Je pense pas que ça soit très autorisé que tu viennes me voir pour me rendre une clé.
KrissCB97
Tu penses que je suis en prison ou quoi ? Je bouge si j'ai envie de bouger.
Bon. En fait non c'est pas tout à fait vrai.
Mais j'ai vraiment envie de te la donner moi-même.
Tu vas croire que j'exagère, mais tu habites à Séoul ?
SpearB
Oui. Pourquoi ?
KrissCB97
Je pourrais venir.
Genre
Maintenant
J'avais peur de mal comprendre et je regardais encore une fois autour de moi, comme si je m'attendais à le voir au bout de la rue. Je déglutis, me sentant soudainement hésitant, presque excité ? J'avais beau essayer de me raisonner, de réfléchir avec logique, j'avais envie de le voir. J'en mourrais d'envie. Je savais que c'était risqué, même à cette heure-ci.
Adieu les réponses prudentes.
SpearB
D'accord.
Je n'arrivais pas à croire que j'avais répondu positivement à sa demande insensée. J'avais la sensation que je faisais le pas de trop, je rebroussais le chemin que j'avais quitté il y a deux mois, revenant à la frontière de son monde et du mien.
KrissCB97
Envoie moi ton adresse.
SpearB
Je suis dans un parc. Derrière chez moi. Je t'envoie la position.
Et je l'avais fait, sentant mon cœur cogné comme un fou, mon souffle se faire plus court alors que je revenais m'asseoir sur la balançoire, serrant mon téléphone dans ma main si fortement que je voyais mes articulations blanchir. Je devais me calmer. J'approchais mes mains de ma bouche, juste après avoir ranger mon téléphone dans ma poche et je soufflais dessus, fermant les yeux pour essayer de retrouver un semblant de naturel. J'étais au centre et je ne savais pas exactement où ils pouvaient vivre mais je me doutais que ça ne devait pas être loin. Tout au plus, il allait mettre vingt minutes.
Je pris une nouvelle inspiration, fermant les yeux alors que le temps défilait. Les secondes, les minutes. Mon cœur reprenait un rythme normal, oubliant presque qui je m'apprêtait à revoir et dans quelle condition. En réalité, je me faisais des films pour rien, il allait simplement me remettre la clé et terminé. Je ne le reverrais plus.
Oui, plus du tout.
« Pourquoi ça me rend triste..., je marmonnais pour moi-même en regardant le ciel noir.
- Qu'est-ce qui te rends triste ? »
Je manquais de peu de tomber de la balançoire, me redressant maladroitement tout en m'enroulant dans les cordes, j'essayais de m'en défaire dans de grands gestes jusqu'à ce qu'il vienne à mon secours, riant du ridicule de la situation. Une fois libéré, je me retrouvais alors si près que je me heurtais presque à son nez. Ses mèches brunes s'échappaient de son bonnet et il avait baissé son masque découvrant encore une fois son délicieux sourire et ses fossettes creusées dans le coin de ses joues. Ses mains étaient sur mes poignets et me brûlaient la peau, renvoyant des pulsations dans tout mon corps.
Le temps s'était arrêté. En tout cas pour moi. Jusqu'à oublier tout ce que j'avais décidé et tout ce qui m'avait conduit ici, à ce moment précis. En me relâchant, je lui en aurai voulu jusqu'à la fin des temps. Il recula d'un pas raisonnable, me donnant un frisson que je ne pouvais réprimer.
« Salut, il me dit alors d'une voix plus basse. Je suis content que tu aies accepté.
- Euh oui. Je suis gêné que tu sois venu ici, en personne. Si quelqu'un te voyait...
- Personne ne va me voir. »
Il fouilla dans sa poche et en tira la clé avant de me la tendre. Je la récupérai lentement, faisant attention de ne pas toucher ses doigts. J'avais peur que le contact ne me fasse encore plus de mal. Je regardais l'objet, une pointe d'inconfort alors que je la fourrai dans ma propre poche. Je le relevais enfin les yeux sur lui et nous restâmes ainsi, à simplement s'observer sans savoir quoi dire. Il rompit en premier le contact, riant en se frottant l'arrière de la nuque. La situation était spéciale, il fallait l'avouer mais je le trouvais à cet instant terriblement beau.
« Je dois te le redire, je suis désolé si tu me trouves lourd mais...J'ai eu un coup de foudre.
- Hein ?
Le choc à l'état pur. J'ouvrais la bouche comme un idiot, battant des cils comme si ça pouvait me faire comprendre plus facilement. Il avait vraiment dit ça ?
- Oui je suis tombé amoureux de ton talent Changbin ! Tes chansons, elles sont tellement...Merde j'ai pas les mots ! Elles me restent encore dans la tête et j'ai pas arrêté d'y penser depuis deux mois ! Je dois t'avouer que j'avais presque un peu perdu l'inspiration mais en écoutant ce que tu avais composé, écrit...Je me suis mis à nouveau à travailler jusqu'à refaire des nuits blanches ! »
Il était exalté, incapable de s'arrêter et je ne pouvais m'empêcher de me sentir embarrassé. A la fois parce qu'il reconnaissait mes œuvres et en même temps, parce que l'espace d'une fraction seconde, j'ai vraiment cru qu'il avait parlé d'une autre forme de coup de foudre.
Reprends toi Changbin, tu prends tes désirs pour des réalités.
Hein ?
Mes désirs ? C'est ce que je veux ?
Putain je dois ressembler à une tomate, je n'écoutais plus rien de ce qu'il disait. Mon combat intérieur devait commencer à se voir car il s'arrêta brusquement.
« Mince, je suis désolé, tu dois me trouver bizarre, il rit nerveux. Je ne te mets pas la pression ou quoi que ce soit ! Je comprends ta vision de la musique et je trouve ça bien, que tu sois en paix avec ton choix. J'avoue que je t'envie un peu. Parfois j'aimerai juste retrouver cette passion primaire, le plaisir juste de composer. Sans qu'on n'attende rien de moi... »
Son regard était devenu un peu plus terne, empreint de nostalgie sans qu'il soit forcément peiné mais sans que je ne dise rien, il secoua les mains dans ma direction et cachant presque son visage derrière son bonnet.
« Ne te méprends pas ! J'adore ce que je fais ! J'ai travaillé dur pour en arriver là et vraiment j'ai du plaisir à faire mes concerts, à produire et travailler avec les gars mais c'est juste que je voulais juste te dire que je te comprends. Et je t'admire. Pour ça. Je sais pas pourquoi je te dis tout ça..., dit il en se calmant presque instantanément. Je sais pas pourquoi, j'ai la sensation que je peux te parler si facilement. Surement à cause de ta vision de la musique, t'es un peu comme...
- Un alter ego ? » Je finissais sa phrase.
Et l'expression joyeuse qui éclair son visage me donna encore plus envie d'y répondre. Je me sentais bien plus à l'aise, en symbiose et l'air était devenu plus doux, la tension presque chaleureuse. Il n'y avait ni peur, ni réelle a priori. C'était parfaitement indescriptible et si facile.
Chan riait doucement, secouant la tête une fois encore alors qu'il m'observait, voyant finalement mes mains rouges, il les prit dans les siennes pour les frotter.
« Mince, ça fait combien de temps que tu attends dehors ? »
Je le laissais faire, bouche bée alors qu'il soufflait dessus, espérant les réchauffer et moi c'était mon visage qui prenait littéralement feu. Comment pouvait-il être aussi tactile avec un inconnu ? Il allait m'achever.
« Pas longtemps. J'étais dans un bar avec des amis et je suis venu ici, j'avais pas envie de rentrer, je réussis à répondre en le regardant faire.
- Tu as les mains gelées. Il faut que tu retourne au chaud. Moi aussi je vais devoir rentrer. »
Il soufflait une dernière fois sur mes doigts avant de me relâcher. Si seulement Sujin pouvait imaginer une seconde qui m'avait réchauffé les mains au milieu de la nuit, elle n'en reviendrait pas.
« Merci en tout cas de m'avoir permis de les écouter, je sais qu'il y a peu de chance que tu changes d'avis mais si jamais...Tu sais où me trouver.
- Où ?
Oh oui Changbin, ça c'est brillant. Je voulus me frapper sous ses yeux mais je me contentais de serrer les dents, fermant les yeux alors qu'il se moquait gentiment de moi.
- Envoie un message sur mon compte privé. Je te fais confiance pour bien le garder pour toi.
- Promis. »
Chan resta encore quelques secondes, dans le silence de nos regards respectifs avant de commencer à faire demi-tour, jetant de temps un autre un petit coup d'œil dans ma direction, un sourire sur les lèvres et de nombreuses salutations de la main puis s'engouffrait dans une rue adjacente tout en remontant le masque sur sa bouche.
« C'est pas possible, c'est pas vraiment arrivé... », je murmurais en regardant mes mains rougies.
Pourtant je pouvais encore sortir son souffle chaud sur elles.
***
KrissCB97
Tu as écouté le nouvel album de Kendrick ?
Putain il envoie du lourd.
SpearB
M'en parle pas
C'est mon idol
Un jour je porterai son enfant.
KrissCB97
How dare you ?!
Me briser le coeur comme ça !
SpearB
Sorry but not sorry
Je regardais nos derniers messages, un petit sourire sur les lèvres ce qui faisait tiquer ma sœur depuis le début du petit déjeuner. Elle avalait la bouchée qu'elle machait depuis de longues secondes, septique.
Il faut dire que le changement d'ambiance avait été radicale. Après ma rencontre nocturne avec le leader du groupe de Kpop, on avait commencé à discuter en message privé. Il avait fait le premier pas en m'envoyer une vidéo d'une impro de rap qu'il avait découvert sur internet, trouvant que mon style leur ressemblait et c'était assez vrai. On s'était échangé des banalités et on avait fini par sympathiser au-delà de la simple discussion autour de notre passion commune. Il me posait des questions sur ma thèse, ma famille et mes amis qu'il découvrait par mon compte en ligne et les photos qui étaient partagé. Il aimait bien me charrier sur les différences qui existaient entre moi et ma sœur jumelle, il disait qu'il la trouvait mignonne et le message d'après, je le menaçais de l'étrangler s'il essayait de s'en approcher.
J'ai aussi appris à connaître l'homme derrière le musicien. Il le montrait peu, mais il était en réalité peu confiant, angoissé et assez colérique. Il avait besoin parfois de décharger et s'il ne pouvait se rendre à sa salle de sport, il composait jusqu'à tomber de fatigue.
Un jour, au beau milieu de la nuit, il m'avait appelé. J'étais surpris de voir son pseudo apparaître sur la demande de communication visio. Je venais à peine de m'endormir alors j'avais vraiment une tête à faire peur mais je ne pouvais pas me résoudre à simplement l'ignorer. J'ai récupéré mes lunettes sur la table de chevet et décroché. Son visage était apparu dans la pénombre, éclairé à peine par la lumière de son écran. Ses yeux étaient rouges, injecté de sang et je l'entendais renifler.
Il était en pleine crise de nerf. Il ne parlait même pas et je ne posais pas de questions, me contentant d'être là. Finalement, je ne prononçai que trois petits mots.
« Viens au parc. »
Dix minutes plus tard, je le voyais arrivé au bout de l'allée, j'étais emmitouflé dans ma grosse doudoune que Sujin détestait, une écharpe autour du cou alors que Chan pressait le pas, lui-même recouvert d'une capuche de son hoodie qui ressortait de sa veste. Il ne s'arrêta pas une seconde jusqu'à se retrouver à ma hauteur et sans réfléchir, je le pris dans mes bras.
Cette nuit-là, j'avais senti mon cœur se briser de le voir aussi mal et de ne pouvoir rien y faire. Encore aujourd'hui je ne savais pas exactement ce qu'il s'était passé et je n'ai pas ressenti l'envie de m'immiscer davantage dans sa vie privée. S'il avait voulu m'en parler, il l'aurait fait, mais ce ne fut pas le cas. Il avait simplement besoin d'une épaule, de décharger et de reprendre sa vie, comme si rien ne s'était passé.
« T'es vraiment chelou..., marmonnait Sujin. Il y a pas deux semaines, tu sortais à peine de ta chambre et tu prenais ta douche tous les trois jours, là, tu souris bêtement à longueur de journée en écrivant je sais quoi à je ne sais qui...T'as trouvé quelqu'un ?
- Mêle toi de tes affaires.
- Ah !
Elle jeta sa cuillère dans ma direction faisant sauter des grains de riz jusqu'à ma paupière.
« Je savais ! T'as pécho ! C'est sérieux ? Je veux tout savoir !
- J'ai rien pécho du tout, laisse-moi tranquille Sujin. »
Je me débarrassais du riz et je me levais de table en posant mes couverts dans l'évier. Elle se dépêchait de terminer, la bouche pleine et me suivait ensuite jusqu'à ma chambre voyant que j'allais m'y enfermer à nouveau.
« Aller ! Tu me racontais tout avant !
- Parce que t'es une vraie sangsue qui lâche jamais l'affaire !
- Alors puisque t'en a conscience, autant gagner du temps et tout me dire tout de suite, parce que tu sais que je vais pas te lâcher. »
Je me retournais brutalement et elle manqua de se heurter à moi. Ses petites mains dépassaient de son pull oversize, son chignon tenait à peine et avec un petit sourire enchanteur, elle essayait encore une fois de me faire céder. Je levais les yeux au ciel, soupirant en repoussant mes mèches de mon front.
« Je discute juste avec un copain que je viens de rencontrer.
- Hiiii ! Qui c'est ? Comment il s'appelle ?
- C'est un étranger.
- Son nom ?
- Chris.
- Chris ? Il est américain ?
- Pas vraiment.
- Changbin ! Donne moi des indices.
- On s'en fiche de sa nationalité, c'est juste un pote, arrête de t'enflammer.
- Pas à moi ! Je vois à ton visage. »
Elle me pointait de son index, ravi de m'avoir percé à jour.
« T'es tout rouge rien que de parler de lui, tu craques pour ce mec, pas vrai ?
- Shh ! »
Je plaquais ma main sur sa bouche, regardant autour de nous en espérant ne pas voir les parents dans les parages. Je n'avais pas honte de ma bisexualité, mais je n'en avais pas encore parlé à mes parents. Non pas que je pensais qu'ils m'aimeraient moins ou me rejetterai, mais je n'avais tout simplement pas envie de passer par cette étape. Cette espèce de révélation qui risquait de les chambouler, de les mettre devant un choix qui n'existait pas. Et surtout, je ne voulais pas être déçu par rapport à leur réaction. Alors je préférais pour l'instant le garder pour moi. Il sera toujours temps de leur avouer quand j'aurai une relation sérieuse et assez longue pour qu'elle mérite que j'en discute.
« Il est beau ? Montre moi une photo ! Elle chuchotait presque comme si elle voulait le crier.
- Il a rien du tout je te dis. Arrête de m'emmerder avec ça. De toute façon j'ai pas de photo. »
Ce qui était vrai sur le principe. Bang Chan ne m'envoyait aucune photo et je ne voulais surtout pas aller en chercher sur internet, ça me semblait bizarre. Comme si ça le réduisait encore à cet être irréel que je ne connaissais pas.
« Bon, alors comment vous vous êtes rencontré ?
- Par hasard. Il avait récupéré un objet qui m'appartenait via une connaissance et il voulait me le rendre.
Comme je mentais bien, sans mentir, c'était beau. J'avais envie de me féliciter moi-même.
- Oooh...Quel coquin, c'est l'excuse la plus bidon que je connaisse !
- Ne dis pas n'importe quoi, je réfutai immédiatement. Il est juste sympa.
- Bien sûr. Tu contacte souvent des inconnus pour leur rendre un bidule en personne ? Ca n'a pas de sens. Pourquoi il est pas passé par votre pote commun ? »
Parce qu'il est célèbre ? En plus de ne pas vraiment de te connaître ? Je ne pouvais décemment pas lui dire ça, mais ça me brûlait les lèvres. Qu'elle cherche des significations dans le néant ne me plaisait pas. Je ne voulais pas me monter la tête plus que je ne l'avais déjà fait.
« Ils sont pas si proche. Bref. C'était un concours de circonstances et on s'entend bien, ça s'arrête là.
Sujin me donna une pichenette.
- Arrête d'être si naïf tu m'énerves ! Tu te rends pas compte de ton potentiel, à quel point les gens sont attirés par toi. Quand tu te donnes la peine, on se retourne sur ton passage et même si tu ne le fais, une fois qu'ils ont commencé à un peu à te parler, ils craquent pour toi. Je le sais bien ! J'ai assez pesté sur mes copines qui venaient à la maison juste pour espérer te voir sortir en serviette de la salle de bains ! - faut vraiment qu'elles arrêtent de regarder des dramas ces meufs...
- T'es gentille Sujin mais ça n'a rien à voir. C'est...Impossible.
- Pourquoi ? Parce que c'est un homme ?
- Entre autres. »
Sujin fit la moue. Je défaisais son chignon, profitant de son inattention pour m'échapper. Je refermais la porte de ma chambre, me trouvant bien plus chambouler par ses mots que je ne le voudrais.
Au même moment, je senti mon téléphone vibrer une nouvelle fois dans ma poche.
KrissCB97
On prévu une petite soirée à l'appart' samedi, avec les gars. Juste le groupe et quelques amis.
Rien de fou.
Ca te dirait de venir ?
SpearB
Quand tu dis groupe ? Tu parles des autres membres ?
Et quand tu dis amis, tu parles encore d'autres chanteurs d'autres groupes ?
KrissCB97
Oui. Pk ?
Ca te stress ?
Ils sont comme tout le monde tu sais, un peu bruyant et parfois stupides, mais ils sont gentils.
SpearB
Samedi hum...
Je sais pas trop
KrissCB97
En tout cas sache que ca me ferait plaisir
Je ferai venir une voiture chez toi
C'est sans risque on l'a fait plein de fois
SpearB
Plein de fois ?
KrissCB97
Oui
Enfin
Va pas t'imaginer que je fais venir des filles ou je sais quoi !
On est pas comme ça
Sauf peut-être certains...
Non j'ai rien dit
Ne le répète pas aux gars
Argh je dis toujours n'imp' avec toi !
Tu me saoule
J'avais envie de rire, lisant ses messages arrivés en trombe et je l'imaginais parfaitement paniqué tout en continuant de taper alors qu'il lui suffirait de ne rien faire.
SpearB
Ca va.
Je te crois
(pas du tout)
Je viendrai
Tu me diras à quelle heure je dois être prêt et où je dois retrouver mon chauffeur
KrissCB97
C'est vrai ?
Je suis content !
J'ai hâte !
Je te ferai écouter des compo' si ça t'intéresse
J'aimerai ton avis
SpearB
C'est une soirée ou un débrief' boulot ?
KrissCB97
Mais non ! Une soirée !
Sans prise de tête
SpearB
Tu veux dire que je peux venir avec un gros pull et mes grosses TN !
KrissCB97
Viens même à poil si tu veux !
Je me mis aussi tôt à rire tout seul dans ma chambre. Sujin de l'autre côté du mur devait se mordre les doigts de ne pouvoir savoir pourquoi je me bidonnais comme une baleine.
Mais c'était mieux que de déprimer non ?
J'avais quand même du mal à croire que j'allais passer une soirée avec des artistes célèbres. Les mecs remplissaient d'immense salles de concerts ! Faisaient le chou gras des articles à scandale de Dispatch pour un pet de travers. Ils étaient égéries de plusieurs grandes marques et moi, j'attendais avec ma tenue décontractée (mais pas trop), me gelant les miches dans ma veste en cuir, à côté d'un parc pour enfant. J'avais au moins mis un bonnet et mon éternelle écharpe grise.
En dessous je portais un pull plutôt près du corps noir et un pantalon cargo de la même couleur. Fallait que j'arrête de mettre que du noir, même si Sujin trouvait que ça m'allait bien, je commençais à douter de mon apparence, ce qui n'arrivait jamais. Il avait dit sans prise de tête, mais la tête, il y avait que ça qui carburait. J'essayais de me regarder par le biais d'une vitrine éteinte, en m'aidant du reflet du lampadaire pour me redonner une tête moins pouilleuse. Avec mes lunettes à grosse monture et mes cheveux bouclés, je ressemblais à un geek un peu trop musclé.
« Monsieur Seo ? »
Je me retournais soudainement, un chauffeur avait baissé sa vitre dans un SUV sombre. J'acquiesçais silencieusement et ce dernier me tendis la carte de la JYPE.
« J'ai été envoyé pour vous conduire chez Monsieur Bang, il sortit en même temps qu'il ouvrait la porte arrière. S'il vous plaît. »
C'était vraiment bizarre, je n'avais pas l'habitude. Je m'inclinais pour le remercier et montait à l'arrière du véhicule. Il aurait pu tout aussi bien être un tueur en série, je le suivais bien sagement comme une vache sacrée. J'envoyais rapidement un message à Chan sur cette pensée et il m'en renvoya aussi tôt un GIF animé d'un personnage de dessin animé qui se moquait de moi.
L'odeur du cuir du véhicule et la petite musique en fond me mettait à l'aise. Nous nous engouffrions dans les routes de la ville de la Séoul jusqu'à atteindre un immeuble dans un quartier huppé. Un quartier résidentiel bien plus aisé que celui où je vivais, même si je n'avais pas à me plaindre. Le véhicule entrait dans le parking souterrain et le chauffeur sortit pour m'ouvrir à nouveau la porte et me montrer l'ascenseur du doigts.
« Septième étage. Deuxième porte sur la droite.
- Je vous remercie. »
Il repartait après une dernière salutation. Le parking était silencieux, totalement vide et encore une fois, l'idée de me faire trucider me traversa l'esprit. J'avais l'imagination débordante dis donc, sans doute à cause du dernier film d'espionnage que j'avais regardé il y a quelque temps mais je ne pensais pas être à ce point inquiété qu'on m'égorge alors que j'étais dans un bâtiment sécurisé, qui grouillait sans doute de personnes célèbres et que j'allais en rencontrer davantage.
Aussi tôt, je me sentais hyperventilé dans la cabine d'ascenseur. Je retirai mon bonnet et me regardait dans la glace, le rouge aux joues par le froid mais aussi par la nervosité qui me faisait mourir brusquement de chaud. Je desserrais mon écharpe, soufflant et quand les portes s'ouvrirent à nouveau, je me figeais comme si je craignais qu'on me voie.
Je penchai la tête dans le couloir, personne à l'horizon. Le sol tapissé d'un rouge bordeaux, les murs peint en gris galet et les portes en bois sombres.
Je m'avançai vers la deuxième sur la droite et je vis alors le sigle de la JYPE sur l'écriteau. Ca devait être ici. Je prenais mon courage à deux mains, oubliant que je n'étais personne et que de l'autre côté devait se trouver des hommes et des femmes que je voyais habituellement derrière des écrans. Trois coups sur la porte. Secs. Assez pour qu'ils puissent m'entendre mais personne ne venait. Je me mordis les lèvres. J'hésitai à sonner, parce que je n'avais pas envie de me faire remarquer plus que ça n'allait être déjà le cas. J'angoissais maintenant, je me demandai si j'avais bien fait, si je n'allais pas me ridiculiser puis finalement la porte s'ouvrit brusquement, manquant de me faire reculer sous la surprise.
« Je savais bien que j'avais entendu quelque chose ! Salut ! Tu dois être Changbin, ça fait plaisir de te voir enfin. Moi c'est Felix, entre. »
Felix s'écartait pour me laisser le passage, ses mèches blondes attachées en une demi-queue et dans un grand pull en laine blanc qui descendait mi-cuisse, sur un jean bleu clair. Il m'ouvrait grand les bras et je voyais l'intérieur de l'appartement, entrant, hésitant alors que les lumières éclairaient la pièce d'une douce chaleur, le parquet clair et ce qui semblait être le salon était bondé. Trois canapés beiges en U devant une fausse cheminée, les éclats de voix et les verres qui triquaient, la table basse en était pleine, avec quelques petites assiettes contenant des petites bouchées de nourriture.
La pièce était grande, sans être extravagante. C'était un bel appartement et surement couteux pour sa superficie et son emplacement, mais étonnement, il n'y avait rien de surnaturel. Une fête comme une autre, avec des jeunes adultes comme les autres.
« Bienvenue, me sourit Felix en revenant vers moi. Chan ! Changbin est là ! » Il criait de l'autre côté de la pièce.
J'avais rapidement remarqué que le leader n'était pas présent mais toutes les autres paires d'yeux me regardaient maintenant, intrigué pour la plupart, certains souriant et d'autre plus discret. Je me sentais encore un peu nerveux, retirant complètement mon écharpe et quelqu'un vint immédiatement à mon secours.
« Donne je vais aller le poser dans la chambre, moi c'est Han Jisung. Tu vas vite comprendre qu'on connait déjà tous ton nom. »
Il me fit un petit clin d'œil tout en me donnant une petite tape encourageante avant de partir avec mes affaires. Je m'approchais alors à nouveau de quelques pas au milieu de la pièce et aussi tôt, deux personnes se déplacèrent sur le canapé pour me faire de place.
« Viens, assis toi ! Moi c'est Hyunjin », me sourit celui que j'avais déjà vu un million de fois sur des vidéos.
Il me semblait encore un peu irréel, même si plus fin et bien moins lisse que sur les images. Felix s'était assis tout prêt, sur l'accoudoir du canapé à la gauche de Hyunjin. Il avait un sourire avenant. Il semblait presque plus angélique que ne laissait déjà penser ses apparitions publiques.
« Je te fais le tour, de l'autre côté tu as Seungmin, Minho et Jeongin. Puis sur l'autre canapé il y a Yeonjun, Jake et Yeji. Puis tu as Sana et Nayeon.
- Salut, ils me lancèrent chacun leur tour.
- Salut, je répondais », un peu intimidé.
Je ne connaissais pas les derniers, mais je devinais qu'ils étaient du même milieu. Jisung revint en premier et se jeta presque sur le canapé à côté de Minho avant de reprendre ce qui ressemblait à un nem.
« CHAN ! » Il cria la bouche pleine.
Minho lui donna aussi tôt un coup dans les côtes qui le fit se tordre et les autres se moquèrent de lui, l'ambiance repartait à nouveau et je me sentais un peu moins épié tandis que j'entendais des pas provenir de l'autre côté de la pièce.
« Désolé désolé, c'était le boss, j'étais obligé de répondre. »
Je le regardais s'avancer et je perdais aussi tôt toute notion du temps. Ce sale traître m'avait dit sans prise de tête alors pourquoi il avait l'air aussi apprêté ? Il portait une chemise blanche, ouverte sur le haut du torse, sorti d'un pantalon bleu nuit, serré qui faisait ressortir ses cuisses, et je ne l'avais pas encore vu de dos. Il avait encore les cheveux humides ou bien c'était du gel ? Mais le côté coiffé négligé lui donnait un air un peu plus mature, un peu plus inaccessible et ça me perturbait complètement.
Il s'assit nonchalamment à côté de moi et je remarquai alors qu'on avait presque fait exprès de lui laisser le champ libre. Il me sourit. Et ce sourire ne ressemblait en rien à ceux que j'avais déjà vu, il n'était pas enfantin ou euphorique. C'était un sourire charmeur, séducteur tout en percevant une certaine audace. Est-ce qu'il jouait ? Est-ce qu'il flirtait avec moi ? Ouvertement ?
« Je suis content que tu sois là, vraiment », il me dit alors simplement.
Les autres avaient tout le loisir de regarder l'échange, et leurs regards me rendaient nerveux. J'étais déstabilisé. Ce n'était pas désagréable, c'était juste, pas prévu.
« Depuis le temps qu'on entend parler de toi, on avait hâte, lançait alors Seungmin de l'autre côté.
- C'est vrai, parait-il que t'es un génie de la musique, me dit alors Minho.
Chan le fusilla du regard.
- Non. Pas un génie. J'aime juste en faire pour le plaisir.
- T'es trop modeste, moi j'ai écouté et franchement t'es bon, dit alors Han en continuant de manger. Pas autant que moi, mais t'es bon.
- Regarde le, le vantard, c'est pas l'humilité qui t'étouffe, le regardait Hyunjin d'un air presque outré.
- Nan mais la bouffe, peut-être, le taquinait Jeongin.
- Je te rassure, il y a que Han qui a écouté la première fois, j'en ai pas dévoilé plus, essayait de me rassurer Chan.
- En attendant, il jure que par ton avis, il se demande toujours si ça pourrait te plaire, me dit finalement une des filles.
J'ai cru comprendre qu'elle s'appelait Sana et son accoudoir touchant celui de Chan, elle tapotait son bras d'un regard attendri que le brun lui rendait. Je baissais alors aussi tôt la tête, détestant cette nouvelle sensation qui me picotait la poitrine. Je me tortillais sur le canapé avant de voir Felix se lever.
« Je te sers un truc ? Il me demanda. Tu fais comme chez toi.
- Mais t'habites même pas là toi, lança Han.
- Arrête de manger la bouche pleine c'est pas possible ! Le rabrouait à nouveau Minho. Tu vas te mordre la langue !
- Je veux bien une bière », je dis alors en voyant les bouteilles.
Felix me sourit et décapsula la bouteille avant de ma la tendre. Les autres en profitaient pour lui demander de faire le service. Les discussions repartaient naturellement et heureusement, je n'en étais plus le sujet. A vrai dire, j'avais la tête vide. Je bus une bonne gorgée, et expirant après coup, je sentis le regard de Chan sur moi. Je le regardais à mon tour et aucun mot ne franchissait mes lèvres ou les siennes. Les nombreux de silence qui persistaient dans ces instants ne m'avaient jamais paru désagréables. Mais celui-ci était teinté d'une nouvelle tension, quelque chose je ne pensais pas vivre réellement et que je n'avais fait qu'imaginer.
C'était comme si on essayait de se poser des questions sans les formuler, se heurtant à l'incertitude de la réponse. A ce qu'elle pourrait engendrer. En bien ou en mal.
Puis quand Chan se mit à sourire, je compris qu'il n'y avait rien à craindre. C'était un jeu. Le genre qui fait pétiller le cœur et qui donne des papillons dans le ventre.
***
Je discutais un peu près avec tout le monde, répondant principalement à des questions, et bizarrement beaucoup moins avec celui que j'aurai aimé. Néanmoins, Bang Chan restait toujours assis à mes côtés, comme s'il voulait que je sente sa présence et qu'il voulait sentir la mienne.
Par moment je sentais sa jambe s'appuyer contre la mienne. Son genou frotter le mien et j'essayais de ne pas réagir mais c'était plus fort que moi. Dès que ça arrivait, je sortais automatiquement de la discussion, peu importe qui me parlait, j'avais loupé le début ou la fin de la phrase.
Puis ce fut sa main. Il se frottait le haut de la cuisse, un geste anodin, mais il glissait parfois sur le côté, et ses doigts se perdaient alors entre nos deux muscles, faisant mine de se gratter et revenaient l'air de rien.
Je me sentais chauffer sous la sensation. J'avais besoin de prendre l'air et bégayant au milieu de l'histoire de Hyunjin, m'excusant, je demandai à Felix où se trouvait la salle de bains avant de me lever. J'enjambais les jambes croisées de Chan, faisant bien attention de ne pas le regarder.
Je m'engouffrais dans un couloir plutôt étroit avant d'ouvrir enfin la porte de la salle de bains. Je refermais derrière moi et je pus alors lâcher la pression. Le dos contre la porte, la tête en arrière et les bras le long du corps je me sentais tout d'un coup fébrile. Je devais reprendre mes esprits. J'avais l'impression d'avoir été en apnée trop longtemps et tout semblait flou, comme si j'avais trop bu même si je savais que c'était faux. Je me penchais au-dessus de l'évier, m'éclaboussant plusieurs fois le visage avant de m'essuyer avec la serviette et regarder mon reflet dans le miroir.
« Tu délires, il se passe rien. C'est dans ta tête. » Je me disais à moi-même.
Je devais me ressaisir. J'oubliais la réalité. Malgré cette incursion, je n'avais rien à faire ici à l'origine. Tout ceci était la conséquence d'un effet papillon que j'avais pas du tout contrôler. C'était éphémère, je le savais. Bien sûr que ses gestes étaient intentionnels ou au pire, ce n'était que purement amicale.
Oui ça devait être ça. Je n'étais personne après tout.
Je remettais mes lunettes, puis replaçant quelques mèches de cheveux en place par réflexe, j'ouvrais à nouveau la porte et me retrouvait alors nez à nez avec Bang Chan.
« Pardon, je soufflais par instinct.
- Non c'est moi. Il dit aussi tôt. Tout va bien ? »
Il semblait réellement inquiet. Je retrouvais l'espace d'une seconde le garçon avec qui j'avais parlé tout ce temps et ça me rassurait. Je souris alors, bien moins gêné qu'il y a encore quelques minutes.
« Oui, ça va. C'est peut-être la bière, je dis pas très crédible mais mon petit rire le détendit à son tour.
- Ok. Ca te dit que je te fasse écouter vite fait une compo' avant de revenir avec les autres ?
- Ah euh oui ! Si tu veux. »
Il afficha à nouveau un grand sourire puis me fit signe de le suivre. On s'enfonçait alors dans le couloir puis il ouvrit la porte de chambre. Des néons colorés brillaient encore sur le mur et son écran d'ordinateur était ouvert. Il y avait peu de choses mais la pièce était grande. Un lit, son bureau avec son ordinateur, un sampler et un piano électrique. Des disques dans une armoire et des livres.
« Installe toi », il me présenta sa chaise.
Je m'assieds, les mains sur les accoudoirs et il resta une seconde à me regarder avant de se détourner, puis de se pencher sur son ordinateur, il pianota une seconde, récupéra son casque audio qu'il me présentait.
« Je peux ? » Il demanda.
J'acquiesçai et le laissait faire.
Il prenait son temps, glissant les deux écouteurs de chaque côté et caressant par la même occasion l'arrête de mes oreilles pour bien les positionner. Son parfum, la vue sur son visage. J'étais totalement hypnotisé.
Il fallait que je me rende à l'évidence, que je l'avoue, même si ce n'était que pour moi-même. Bang Chan me plaisait. Sujin avait raison. J'avais craqué pour lui et je ne savais même pas depuis combien de temps. Depuis le début sans doute. Depuis que je l'avais entendu dans ses chansons, jusqu'à le rencontrer en chair et en os.
Il me plaisait tellement que je pouvais complètement oublier de cligner des yeux, de répondre à ses questions alors que je voyais ses lèvres bouger, son regard chocolat plongé dans le mien.
« Changbin ?
Sa voix était étouffée par le casque mais je revins brusquement à moi. Je secouais la tête.
- Oui ?
- T'as bu combien de bière au juste ? Il me dit en se moquant gentiment de ma tête d'ahuri.
- Pas beaucoup.
C'était vrai.
- T'as aucune tolérance alors. »
Sa voix était devenue plus basse, bourdonnante. A nouveau cette tension qui rampait sur ma peau et me faisait battre le palpitant. Il glissait son regard une seconde sur mes lèvres, j'en étais persuadé parce que je faisais la même chose.
« C'est juste une ébauche, dit il soudainement en se redressant, sélectionnant la piste sur son ordinateur. Dis moi ce que t'en penses. Un avis honnête, ok ?
- Bien sûr. »
Je me reprenais mon souffle, me concentrant sur l'écran et les lignes de la piste qui défilait. Les percussions, les basses, il n'y avait encore aucun texte, c'était un début d'instrumental mais c'était prometteur. Je reconnaissais son style. A la fois moderne et particulier. C'était du bon, comme toujours, et je ne pouvais pas m'empêcher de sourire.
C'était entrainant mais je devinais assez bien où il voulait mettre les parties chantées, les parties de rap, en fait j'avais la sensation d'entendre leurs voix se coordonner, je pourrai presque en écrire le texte.
« Il y a rien à dire, c'est toujours aussi spécial. Je lui dis alors en retirant le casque. T'es vraiment doué, même quand j'ai la sensation que tu fais comme tout le monde, je me rends compte que c'est complètement différent et que j'adore ça. T'as un style unique Chan. »
Il avait les bras croisés, les lèvres pincées et il secouait la tête en avant, puis jubilant, il sourit une nouvelle fois, heureux. C'était incroyable. Comment pouvait il être aussi ravi d'entendre mon avis ? Je n'avais aucune légitimité et pourtant, j'avais la sensation de lui avoir fait le plus beau des cadeaux. Et par la même occasion, c'était à moi qu'il fit un cadeau. Je penchais la tête sur le côté, et l'observant rire avec un plaisir non feint, se mordre le pouce, il s'arrêta brusquement. Il se tourna alors vers moi et en une seconde, il réduisit la distance, m'emprisonnant sur la chaise en venant se tenir aux accoudoirs. Il glissa sa main sur ma joue et déposa un baiser sur mes lèvres.
Mon corps se tétanisa et ma tête sembla éclater en même temps que toutes mes pensées cohérentes. Je n'entendais plus rien, voyait trouble et quand il recula, je me demandais si c'était vraiment arrivé. Ses yeux s'ouvraient doucement, sondait mon expression, effrayé. Il avait agi par instinct, je le savais parce que j'en avais eu envie, autant que lui mais je n'aurai jamais pris le risque. Je n'aurai jamais franchi la frontière et lui venait de me tirer de forcer.
« Changbin, il murmurait la voix légèrement tremblante. Je...Je suis...
- Non. Ne le dis pas. »
Je me redressai soudainement, glissant ma main sur sa nuque et l'embrassais avec plus de ferveur, emprisonnant ses lèvres entre les miennes, en savourait le goût, la texture. Sa chaleur. Je retombai en arrière sur la chaise, le gardant contre moi et il se glissait à son tour entre mes jambes, se retrouvant à genoux sur le sol alors que mes bras entouraient ses épaules, son cou.
J'entendais le bruit des succions, de légers gémissements étouffés et je me perdais complètement. J'était en ébullition et chacune de ses caresses me faisait trembler.
« Changbin, il susurrait d'un ton suppliant.
- Tais-toi. »
***
Nous sommes ressorties de sa chambre légèrement chamboulés et passablement excités. Il fallait dire qu'on avait eu du mal à s'arrêter mais le bruit d'un verre brisé suivi d'applaudissement nous avait rappelé à l'ordre. On était pas seul et loin de pouvoir l'être. On était resté de longues secondes à se regarder, essoufflé, les cheveux ébouriffés et les lèvres totalement rougies. Puis un hoquet franchi ses lèvres. Il riait et le mien suivi rapidement. Sa langue passa brièvement sur sa lèvre inférieure tandis que son pouce caressait l'angle de ma mâchoire.
« On devrait y retourner. »
J'acquiesçais. Bang Chan remis un peu d'ordre dans ma coiffure et je faisais de même avec la sienne. Une fois dans le couloir, on pouffait à nouveau, ils allaient tellement vite nous cramer. J'avais presque honte de revenir parce que je savais qu'encore une fois tous les regards seraient braqués sur nous et qu'ils sauraient.
Bang Chan se raclait la gorge et emboîta le pas le premier, il revint dans le salon où la discussion allait de bon train, je le suivis, passant rapidement mes doigts sur ma bouche avant de retrouver mes esprits.
Aucun doute cette fois, c'était bien arrivé.
Finalement, ils avaient plus correct que je ne l'avais imaginé. Si je sentais par moment un petit coup d'œil interrogateur, ils n'avaient fait aucune remarque. Chan discutait à nouveau l'air de rien, mangeant et buvant. Je restais à côté de lui, participant non sans me ressasser notre baiser enflammer dont la sensation s'estompait au fil des heures.
« Tu dois vraiment partir ? » Il me demanda sur seuil de l'entrée.
Je remettais mes chaussures, puis ma veste alors que Chan laissait tomber sa tête sur le mur, les mains dans les poches. Il me regardait, un petit sourire en coin et faisant mine d'être déçu. Je me mordis les lèvres, puis regardant rapidement derrière lui pour voir le peu qui restait, occupé à ranger le salon, je tendis la main remarquant alors qu'elle tremblait légèrement avant de saisir sa chemise et le tirer doucement vers moi. Il me regardait faire et s'approchait. Son souffle s'était accéléré, c'était subtile mais je l'ai senti et je n'ai pas pu m'empêcher de sourire. J'étais heureux de lui faire de l'effet, c'était une petite emprise qui me rendait fier, me donnait assez confiance en moi pour me hisser contre lui et lui donner un petit baiser. Rapide mais assez délicat pour laisser sa trace.
« Merci pour la soirée, je lui dis alors en reculant. Et le reste.
- Merci à toi. »
***
A suivre
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