Ne me quitte pas.
TW : langage assez cru à certains moments
La porte de l'appartement claqua.
Les genoux de Jim fléchirent d'un coup, il se retrouva contre le carrelage froid tandis que sa vision se brouillait et que les bruits de ses sanglots remplirent la pièce. Il n'arrivait plus à s'arrêter, ses mains tremblaient, ses muscles étaient mous, ses joues humides, son visage rouge, ses yeux larmoyants.
Avait-il mérité le départ de Sebastian ?
Quand ils se sont disputés pour la douzième fois de la journée – il n'était que neuf heures quarante du matin – Jim ne pensait pas que leur énième confrontation allait finir ainsi.
Quand Sebastian l'a traité "de psychopathe égocentrique amoureux du travail et de Sherlock Holmes" il ne pensait pas que son meilleur employé claquerait la porte de son appartement, l'abandonnant.
Il n'arrivait plus à bouger. Et pour couronner le tout, son cerveau passait en boucle leur dispute fatale.
"Tu ne peux pas me comprendre, j'ai enfin trouvé un moyen de le faire tomber ! A-t-il dit sous le regard désespéré de Sebastian.
- Tu penses à moi un peu ?
- Pourquoi faire ? Pourquoi je penserais à toi alors que je suis en pleine partie de jeu avec Sherlock Holmes ? C'est insensé.
- J'ai compris. De toute façon, tu n'es qu'un psychopathe égocentrique amoureux du travail et de Sherlock Holmes. Donc je suppose que je n'ai plus rien à faire ici ?"
Sebastian est allé dans leur chambre attraper un grand sac, y a fourré quelques vêtements et effet personnel, l'a balancé sur son dos, et a claqué la porte en sortant, tout ça sous le regard de Jim qui n'a pas réussi à dire une syllabe.
Quand il rouvrit les yeux, il était encore seul, dans le hall de son appartement, ses doigts tripotant nerveusement ses orteils dénudés. Ses yeux le faisaient souffrir. Sa gorge se serrait. Son estomac se nouait. Normalement, quand ils se disputaient, après une heure Sebastian revenait vers lui, le prenait dans ses bras et déposait un petit baiser sur sa tempe en lui chuchotant qu'il était désolé de s'être emporté. Mais là, il savait que personne ne viendrait le câliner.
Alors il resta recroquevillé sur le sol du hall de son appartement, en se disant que la situation était risible. Le grand criminel Jim Moriarty qui pleure à chaudes larmes après une dispute avec un simple employé, pathétique, se dit-il.
D'un revers de manche, il essuya les larmes qui coulaient sur ses joues et celles qui stagnaient au bord de ses yeux, il renifla, secoua la tête et se leva. Il avait autre chose à faire que de pleurer : perfectionner son plan pour tuer Sherlock. C'était le but principal désormais.
Il se dirigea vers son bureau, ferma la porte, et se remit à travailler sur une carte géante recouvrant le meuble en bois. Elle était bariolée de couleurs et il y avait des pions servant à jouer aux échecs dessus. Ses yeux rencontrèrent le pion qui représentait Sebastian. Il le pris entre ses doigts pour l'observer plus attentivement. Le pion était la dame noire. Tout comme son pion était le roi noir.
Il sourit, pendant quelques instants, avant de jeter le pion à travers la pièce, qui fut rapidement rejoint par la carte et les autres pions qui avaient valsé d'un point à un autre du bureau.
Jim s'assit sur la chaise, attrapa ses cheveux, serra les dents, et recommença à pleurer. Il ne pouvait pas le laisser ainsi. Il n'avait pas le droit.
Comment allait-t-il faire pour gouverner sur son Royaume sans sa Reine ? – Sebastian détestait quand il le surnommait ainsi, il préférait largement le terme "Chevalier" mais Jim n'en tenait jamais compte.
Ses yeux balayèrent la pièce tel un coup de vent. Il rangerait cela plus tard. Il devait pour le moment laisser Sherlock de côté et se concentrer sur son amant. Il devait le trouver, lui présenter des... excuses, et repartir avec lui. Il ne pouvait pas supporter d'être seul après avoir été accompagné par un homme pendant presque deux ans. Il ne le laisserait pas filer ainsi, on ne quittait pas Jim Moriarty ainsi !
Décidé, il laissa le tissu de sa veste de costume s'imbiber de ses larmes avant de se lever. Le regard noir, les sourcils froncés, la mâchoire serrée. Il quitta son bureau, attrapa sa veste qu'il enfila en se demandant où Sebastian a-t-il bien pu aller ?
Alors qu'il sortait de son appartement, dans son palais mental, il lista tous les endroits probables et ceux complètement insensés.
Il était certain que Sebastian ne se trouvait pas au QG, ça aurait été beaucoup trop facile pour lui de le retrouver et connaissant la colère de Sebastian, il ne voulait que ni lui ni n'importe quel employé ne viennent l'embêter.
Un bar ? Trop facile. Un club de streaptease en fin de journée ? Peu croyable. Dans son ancien appartement ? Impossible, avec la tonne de caméras que Jim a installé là-bas, il pouvait être sûr d'être vu.
Puis il se demanda, même s'il ne comprenait pas vraiment la psychologie de Sebastian, il était forcément à bout de nerf quand il a claqué la porte ? Non ? Alors il n'y a qu'un endroit où il pouvait être : en forêt pour chasser.
Il se maudit de ne pas avoir remarqué plus tôt que le pick-up de Sebastian n'était pas garé sur le parking à côté de leur appartement. Mais ce n'était pas le principal. Le criminel monta dans sa voiture, enfonça les clés dans le contact puis démarra. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas conduit, mais il devait retrouver Sebastian et le temps du trajet laissait à son cerveau le temps de réfléchir à « comment le reconquérir ? »
Il commençait à faire nuit. Ses mécanismes n'avaient jamais autant travaillé. Comment allait-il lui demander de revenir avec lui ? Surtout pas sous la forme d'un ordre. Prendre un air doux et lui dire que s'il revient il aura le droit à une pipe ? Non, pas de chantage et encore moins du sexe. Le menacer de se suicider ? Lors d'un plan-suicide avec Sherlock Holmes, ce n'est pas vraiment la meilleure des solutions.
Il chercha pendant de longues minutes. Puis il trouva enfin une phrase parfaite, une phrase que Moran rêvait d'entendre depuis longtemps, une phrase qui pourrait tout changer.
Quand il gara sa voiture dans la boue à l'entrée de la forêt, il n'avait jamais été aussi pressé et impatient de revoir quelqu'un. Il était comme ces enfants à l'approche de Noël – même s'il n'a jamais vraiment su ce qu'était réellement Noël.
Il marchait vite, évitait un grand nombre d'arbres, surtout que la pénombre n'arrangeait pas la situation. Soudainement, il entendit un coup de feu. Il continua d'avancer, jusqu'à se mettre à courir. Il était tout près, il le savait.
- SEBASTIAAAAAN, cria-t-il en apercevant de la lumière qui provenait sûrement du pick-up de Moran.
Il continua de courir, les larmes coulant sur son visage. Sa hanche droite rencontra le pick-up et ses yeux s'attardèrent sur la silhouette sombre de Sebastian qui s'approcha de lui.
- Jim ?
- En personne !
- Tu es venu à pieds ou quoi ? Tu es complètement essoufflé.... Oh excuse-moi ! Tu sors sûrement d'une partie de jambes en l'air avec Sherlock Holmes, oubliant qu'un simple sniper a claqué la porte de chez toi tout à l'heure.
- Tu dis n'importe quoi, si j'avais vraiment baisé avec Sherlock, pourquoi serais-je ici, à ton avis ?
- Parce que ça t'amuses ! Tu prends ton pied en me ridiculisant, tu adores quand je suis admiratif devant tes mots incompréhensifs, devant tes plans. Ça te fait bander quand je te dis que je t'admire ? T'aime ça parce que je suis bien inférieur par rapport à toi intellectuellement parlant. C'est pour ça que tu veux de nouveau de moi. Tu n'as qu'à t'acheter un chien, il sera aussi admiratif que moi. Parce que moi, tu vois, j'en ai ma claque d'être un coup infantilisé par rapport à ton génie et un coup être comme ton père parce que tu ne sais pas te gérer toi même et parce que tu es submergé par tes émotions.
Jim se tut. Il ne savait plus quoi répondre, d'un coup. Il voyait bien la colère dans les yeux de Sebastian, malgré la nuit. Il ne voulait pas qu'il pense cela de lui mais ne savait simplement pas comment lui dire.
- Donc si tu es revenu pour encore une fois m'humilier parce que Sherlock baise mieux que moi, ou parce que vous avez fait des calculs pendant votre partie de jambes en l'air, ça ne m'intéresse pas. Et n'essaie pas de me dire que tu as changé, que tu m'aimes, tu en es incapable. Maintenant tout ce qui compte à tes yeux c'est ce merdeux de Sherlock et ton plan-suicide ! J'ai compris. Je n'étais qu'un jouet auquel tu as prêté de l'attention parce que tu t'ennuyais. Maintenant que tu as réussi à trouver quelqu'un d'aussi intelligent que toi, tu n'as plus besoin du petit soldat Moran.
- Écoute Sebastian... J'ai mal agi. Et j-je n'ai pas couché avec Sherlock. Tu me pardonnes ?
Sebastian explosa de rire. C'était nerveux.
- Tu te paies ma tête ? J'ai l'air de vouloir te pardonner ? J'ai l'air de vouloir recommencer à vivre ce que tu me fais vivre au quotidien depuis que cet enfoiré d'Holmes est entré dans ta vie ? On vivait tellement bien avant... Quand chaque matins je me réveillais tu étais dans mes bras, encore endormi. J'adorais admirer ton doux visage, sans une once de méchanceté. Maintenant quand j'ouvre un œil tu n'es plus là. Tu es déjà lavé et habillé, les yeux rivés sur tes plans. Avant on allait au restaurant, on sortait, on était heureux, du moins, j'étais heureux. Maintenant qu'est-ce qu'on fait ? On se dispute du matin au soir, je passe mes soirées à regarder la télé après être rentré du travail, tu es enfermé dans ton bureau vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Je me couche seul, le cœur serré pendant que tu continues à bosser. Comment a-t-on pu en arriver là ? Dis-le moi ?
Jim ne s'était jamais senti enfantin que ce soir. Il voulait disparaître ou fondre dans les bras de Sebastian. Il ne savait pas quoi lui répondre et préférait rester immobile, des larmes ruisselant sur ses joues.
- Je suppose qu'on a fini de parler. Du moins, je n'ai plus rien à te dire. Et pour rassurer tes affaires, je ne quitte pas l'entreprise, je te quitte juste toi.
Quelque chose en Jim se brisa un petit peu plus. Cet organe dont il ne voulait pas accepter l'existence souffrait depuis un long moment, à chaque mots que Sebastian lui crachait dessus, il se fissurait un peu plus. La gorge nouée, les yeux larmoyants, le corps tremblant, il arriva à dire, d'un toute petite voix :
- Je t'aime Sebastian... Je suis désolé..
Le visage de Sebastian sembla s'adoucir. Mais il reprit son air grave.
- Non, non et non. Je ne veux pas tomber dans tes pièges une énième fois. Tu prends ton air doux et brisé mais je sais que tu n'en penses pas un mot.
- Sebastian, je t'en supplie... Pardonne-moi. J'ai mal agi. Je n'aurais jamais du te traiter ainsi. Tu ne le mérites pas. J'ai trop besoin de toi à mes côtés, ne me quitte pas...
- Comment je peux te croire ? Tu me dis la même chose à chaque fois. Tu me dis toujours que tu vas changer, que tu vas faire attention à moi, mais au final c'est toujours la même chose "Attends un peu Sebastian tu ne vois pas que je corresponds avec Sherlock", "Mais fous moi la paix, je prépare mon plan pour faire tomber Sherlock", "Non mais on ne va pas coucher ensemble ce soir alors que je suis en train de travailler sur quelque chose de super important ?" Tu veux d'autres exemples ?
- Tu es juste jaloux de Sherlock Holmes alors qu'il n'y a rien entre lui et moi.
- Mais n'importe qui à ma place serait jaloux ! Et ne me dit pas qu'il n'y a rien entre vous. D'accord vous ne baisez peut-être pas ensemble, mais il y a un fort lien entre vous deux. Tu es son parfait contraire.
- Entre nous deux aussi il y a un fort lien Sebastian. Je ne me vois pas gouverner sur Londres sans toi, tu es mon Chevalier.
- Je croyais que tu voulais que je sois ta Reine ?
- Si tu veux être mon Chevalier, alors tu seras mon Chevalier. Mais ne m'abandonne pas s'il te plait... Être seul c'est difficile.
- Je ne veux plus que tu me traites comme tu m'as traité jusqu'à maintenant. Je ne veux plus être cet animal de compagnie à qui tu montres tes expériences, tes projets, tes plans, parce que tu sais qu'il ne pourra rien dire et parce que ça te fait te sentir puissant. Je veux être considéré comme...
- Mon petit-ami.
- Exactement. Je veux que tu me vois comme ton petit ami pas comme un chien. Je veux qu'on ait la relation la plus normale que tu puisses donner, je veux que tout soit comme avant.
- C'est promis Sebastian.
Jim se jeta dans ses bras, il lui avait tant manqué en quelques heures. La tête de Jim était posée contre le torse de Sebastian tandis que sa propre tête reposait sur celle de Moriarty. Puis le plus petit leva le visage et Sebastian captura ses lèvres dans un doux baiser. Jim répondit immédiatement à ce baiser qu'il a longtemps attendu, frottant son corps contre celui de son employé qui grogna.
Quand leurs deux visages se séparèrent, ils s'admirèrent mutuellement. Trouvant de la beauté partout chez l'autre. Puis Jim chuchota "je t'aime" tout en dévorant Sebastian du regard.
Après un long moment de tendresse, les deux hommes rentrèrent dans leur appartement au centre de Londres, aussi amoureux qu'au premier jour, et ils ne se quittèrent plus jamais.
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