Un pas
Je ne sens rien. Je ne ressens rien. Je ne me souviens de rien. Moi ? Ne pas me souvenir ! C'est un comble ! Et pourtant... que s'est-il passé ? Où suis-je ? Je suis incapable de le dire. J'ai l'impression de sortir du néant. J'essaie de rassembler mes souvenirs. Qu'est-ce que je faisais avant de sombrer ? Je réfléchis un moment. Un long moment. Mais rien à faire. Je ne me rappelle pas. Je finis par ouvrir les yeux. Peut-être qu'alors je me souviendrais. Un plafond blanc. Mais aucun souvenir ne me revient.
- Te voilà enfin réveillé.
C'est une voix que je connais. Ça fait un moment que je ne l'aie pas entendue. Ça vient du côté droit. Je suis allongé dans un lit d'hôpital sans doute. Que m'est-il arrivé ? Un accident ? Me serais-je fait agressé ? Je ne me souviens toujours pas. Pourtant je ne ressens aucune douleur, nulle part. Je suis peut-être mort. Ça pourrait expliquer pourquoi je ne me souviens de rien, pourquoi je n'ai pas mal.
Je tourne quand même la tête sur le côté. Ça, je peux le faire. Assis dans le fauteuil, Mayuzumi a relevé le nez de son livre. Il me fixe de son regard inexpressif. Vu le mobilier de la pièce, c'est confirmé, je suis dans une chambre d'hôpital.
- Que m'est-il arrivé ?
- Un accident.
Ses réponses. Elles sont toujours aussi brèves. Il n'a pas changé, il est toujours prompt à ne pas parler. Mais pourquoi est-il là ? Il a quitté le lycée depuis un moment alors pourquoi est-il ici, à mon chevet ? Et mon état nécessite-t-il vraiment un garde-malade ? Est-il si inquiet qu'il reste à me veiller ?
- Les médecins ont dû te retirer un rein, continue-t-il sans que j'ai à le lui demander. Il était trop endommagé.
Ça ne me dit pas ce qui m'est arrivé ! Mais je reste confiant.
- La convalescence va prendre du temps.
Ça va être long avant que je puisse rejouer au basket. Je suis optimiste. Un peu trop peut-être. Je sais que l'on peut très bien vivre avec un seul rein. Mais de là à pratiquer un sport de haut niveau, j'en suis moins certain. Il faudra que je me renseigne. Il faudra que j'essaie tout de même. Mais Mayuzumi se charge de me faire redescendre sur terre.
- J'en doute. Ta colonne vertébrale a été touchée. Tu ne peux plus te servir de ta jambe droite et les médecins sont pessimistes pour la gauche.
Le couperet est tombé. Je regarde toujours Mayuzumi. Son visage ne reflète aucune expression. Pourquoi est-il là ? Uniquement pour la satisfaction de m'annoncer mon infirmité, après tout ce que je lui ai fait. Pourtant, il ne semblait pas m'en tenir rancœur. Cachait-il son jeu ? Attendait-il le bon moment pour m'asséner le coup de grâce ? Comme je l'aurai fait une époque. Comme mon alter égo l'aurait fait. En tout cas, c'est réussi. Tout mon monde s'écroule. Je ne pourrai plus jamais jouer au basket. Mais est-ce vrai, ce qu'il me dit ? Ça me parait un peu gros. Il ne peut pas m'être arrivé quelque chose au point que je me retrouve infirme. Sans que je ne m'en souvienne ! Je n'imagine pas ce qu'il m'est arrivé. Mayuzumi a parlé d'un accident. J'ai peut-être reçu un mauvais coup dans le dos pendant un match? Mais quel match ? Et contre qui ? Je n'en ai aucun souvenir. Et quelle a été la violence du coup pour me rendre infirme à ce point ? Pourquoi ne me parle-t-il pas de l'accident ? Pense-t-il que je me souviens de ce qui s'est passé ? Probablement.
Je n'en veux pas à Mayuzumi. Au contraire, je lui suis reconnaissant de m'avoir dit d'emblée ce qu'il en était de mon état. Il n'a pas cherché à me préserver. Pas d'illusion. Les choses sont claires. Pas d'espoir, non plus. Je ne rejouerai jamais plus au basket. Mes jambes sont mortes. Et les médecins me l'ont dit sans détour. Enfin, pas tout à fait, Mayuzumi a été plus direct. Quel importance ! Le résultat est le même, je ne remarcherai plus jamais. Pardon, probablement plus. Mais j'ai un mince espoir de pouvoir bouger la jambe gauche. Quelle chance ! Surtout lorsque l'on sait de quoi j'étais capable !
Quand à ce qui m'est arrivé, la cause de mon infirmité. La malchance, je n'étais pas au bon endroit et ça ne l'a pas été pour beaucoup de monde. La plupart des victimes se souvient plus ou moins bien. Mais pas moi. Je ne me souviens toujours de rien. Même pas d'une malheureuse petite bride. C'est comme si je m'étais endormi le soir en parfaite santé pour me réveiller le matin, infirme. Une situation digne d'un vrai cauchemar !
- Tu as de la chance, me dit Mibuchi. Sakamae est mort et il était juste à côté de toi.
Une chance ?! Vraiment ? Mais peut-être que j'aurai préféré être à la place de Sakamae et mourir. Un première année plein d'enthousiasme, il aurait sans doute supporter de finir sa vie dans un fauteuil roulant. Il aurait peut-être préféré... Mais moi... non, je ne me vois pas passer mon temps dans un fauteuil roulant, à être dépendant des autres, ne plus pouvoir rien faire sans assistance. Et surtout, ne plus pouvoir jouer au basket. Rien que d'y penser, je sens la frustration et la colère m'envahir. Et j'ai renvoyé tout le monde. Je ne veux plus voir aucune personne qui me rappelle mon ancienne vie, ce que je pouvais faire, ma passion et surtout leur compassion. Cette maudite compassion qu'ils ont dans leurs regards et qui me dit combien ils sont désolés pour moi, mais que ça ne change rien, qu'on est toujours amis. Mais c'est le basket qui nous a rassemblé, qui nous unissait. Et maintenant, je vais faire quoi ? Étouffer ma frustration en les regardant jouer sans moi, confortablement bloqué dans mon fauteuil roulant. Jamais ! Je préfère faire table rase de tout ce qui me rappelle ma vie d'avant.
Je ne fais plus aucun effort, c'est vrai. Pourquoi en ferai-je puisque de toute façon, c'est sans espoir. Je ne remarcherai jamais. J'y ai cru au début. J'ai cru que je pourrai remarcher malgré ce que me disait les médecins. Ça ne pouvait pas être autrement, je devais remarcher. Mais aujourd'hui, je me suis rendu à la sinistre évidence : je suis infirme et je resterai toute ma vie dans un fauteuil roulant. Pire, plus jamais je ne jouerai au basket. Alors non, je ne vois pas pourquoi je m'épuiserai dans des exercices qui ne me permettront pas de retrouver mon niveau d'avant. Oui, je suis devenu un patient exécrable et je m'en moque. Je veux juste que l'on me laisse tranquille aussi bien les médecins que la génération des miracles qui persiste à venir me voir. Ils ne semblent pas comprendre que chacune de leurs visites me rappelle que j'ai été des leurs et la colère m'enserre le cœur. Ils font comme s'il ne s'était rien passé. Mais ce n'est pas le cas. J'ai eu un grave accident et ma vie ne sera plus ce qu'elle était. D'ailleurs, mon père à déjà réorganisé tout mon avenir. Mon nouvel avenir, à gérer les affaires de la famille, sans aucun moyen de faire autre chose, de me défouler physiquement dans mon sport. C'est la mort à petit feu qui m'attend et j'envie encore plus ceux qui ont perdu la vie dans cet accident.
- Laisse-moi tranquille.
- Parce que tu compte resté comme ça longtemps ?
Généralement, jusqu'à ce que quelqu'un vienne me chercher et que je ne l'envoie pas sur les roses parce que j'en ai marre de rester allongé par terre à regarder le plafond tout en ressassant mes idées noires. Et pour l'instant, ce n'est pas le cas.
Mais ça ne semble pas la désarmer et malgré mon silence et mon air renfrogné, elle s'allonge à côté de moi et elle parle. De quoi ? Je n'en ai aucune idée, je ne l'écoute pas. Pas au début en tout cas parce que, au bout d'un moment, je finis par entendre des brides de son monologue. Alors je tourne la tête pour la regarder. Elle ne fait pas partie du personnel soignant. Les yeux fixés sur le plafond, elle parle. Pour elle. Il me faut un moment pour rassemblé les pièces de puzzle tant son discours semble décousu. Elle-aussi a survécu à un accident mais pas ses amis et elle se sent terriblement coupable d'être encore en vie. Elle ne le dit pas franchement, mais c'est ce qu'il en ressort de son monologue. Le syndrome du survivant. Ça arrive parfois de ressentir de la culpabilité d'être encore en vie alors que d'autres sont morts. Est-ce que je ressens ce genre de chose ?
Je ne crois pas. Peut-être parce que je ne me souviens toujours pas de ce qui s'est passé. Alors je me sens étranger à cet accident, comme si je ne faisais pas partie des victimes, qu'il y avait eu une erreur. Tout ce que je sais, le l'ai lu dans les journaux. Je connais tous les détails. Mais aucune de ces informations n'a réveillé en moi le moindre souvenir des événements. Et je me sens frustré que d'autres puissent raconter leurs drames et pas moi. Je dois me contenter des récits des autres. Mais ça ne m'explique pas tout. Loin de là.
Je ne suis pas sûr de ressentir de la colère, non plus. Mais plutôt de ressentiment envers les autres, sans distinction, les valides comme les infirmes, qui viennent me dire que tout va bien, que le principal est que je sois en vie et que j'aille de l'avant. Le fameux « la vie continue ». Mais comment la vie pourrait-elle continuer ? Je ne peux plus rien faire sans assistance et cette dépendance me déplait au plus haut point. J'ai l'impression d'être un enfant qui ne sait rien faire, une poupée.
- Je t'envie.
Ces mots-là résonnent dans ma tête depuis qu'elle les a prononcés. Comment peut-elle m'envier ? Elle peut aller où bon lui semble, en toute liberté ! Elle n'est pas bridée, par rien. Elle peut courir, faire du sport. Mon sport. Le basket me manque. J'en rêve toutes les nuits. Les matchs que j'ai faits. Surtout le dernier. Mais pas ce qui suit, pas le retour. Et c'et là que l'accident a eu lieu. J'ai tout oublié, même le souvenir de nos conversations, même le souvenir d'avoir pris le train.
- Sais-tu quelle est la différence entre la vie et la mort ?
Elle vient toujours me rejoindre, s'allonger à côté de moi et parler, comme elle était allongée près du cadavre de son amie après l'accident. Je me suis trompé. Ce n'est pas seulement mon infirmité qu'elle envie. C'est mon oubli. Elle, elle s'en est sortie indemne de cet accident, le même qui m'a coûté mes jambes et mon rein. Ce même train dans lequel je me trouvais, est sorti de ses rails pour s'écraser sur le quai où elle se trouvait. Ce qui l'a sauvé, c'est le pas en arrière qu'elle a fait. Un pas. Un seul pas qui lui a fait franchir la ligne invisible entre la vie et la mort. Cette ligne, j'étais en plein dessus apparemment puisque mes jambes sont mortes. Et si j'avais été un pas plus loin, serais-je mort ou bien miraculeusement indemne ? En tout cas, j'étais bien sur cette ligne, cette frontière intangible qui sépare la vie et la mort, puisque Sakamae est mort alors qu'il se trouvait juste à côté de moi.
Elle me fascine. Maintenant, c'est moi qui l'envie. Elle se souvient de tout, avec une précision presqu'effrayante, même pour moi. Le moindre détail, le déroulement complet de l'accident. Tout ce qu'elle a vu est gravé à jamais dans sa mémoire. Le fracas du métal qui se déchire, les cris et les hurlements se mêlant aux lamentations. Tout. Mais elle ne dit rien. Elle refuse de parler. Je n'ai rien demandé. Je l'ai compris aux mots qu'elle prononçait dans ses monologues, il lui arrivait de lâcher quelques brides des funestes événements. Je l'ai juste écoutée attentivement pour tout remettre dans l'ordre. Mais ça ne m'apporte rien de plus. Je ressens toujours ce vide due à mon amnésie des événements. Elle n'était pas avec moi dans le train. Elle ne m'apporte rien de ce point de vue. Mais je comprends mieux pourquoi elle m'envie. Ma prison est physique et à moins de devoir me déplacer, je peux oublier mon infirmité. Mais elle, elle n'a aucun moyen d'échapper à ses souvenirs. Ils sont toujours là, prêt à lui rappeler à chaque seconde l'horreur qu'elle a vécu.
Quel entêté ce Kuroko ! Depuis que Kise parlé de l'handi-sport de basket, il n'a eu de cesse de m'y emmener. « Juste pour voir » m'avait-il dit. Tu parles ! C'est du Kuroko tout craché ! Il avait bien l'intention que j'essaie. Mais lorsque je les ai vus... Mon cœur s'est serré et j'ai envie de pleurer. Désormais, mon sport se réduirait à ça, à des types assis sur des fauteuils et lançant un ballon. Ça n'a rien à voir avec mon basket. Ce n'est pas mon basket. Je ne peux pas jouer ce basket.
J'étouffe. Il faut que je sorte. Difficilement. Je ne manie pas bien mon fauteuil. Je ne veux pas de ce fauteuil. Je veux retrouver l'usage de mes jambes. Je veux pouvoir rejouer au basket avec mes amis, avec mon équipe. Mais ce train... ce maudit accident m'a volé mes rêves et mon avenir de basketteur ! Je ne peux pas accepter ça !
Je regarde fixement les escaliers devant moi. Combien y a-t-il de marches ? Cinq ? Six peut-être. Et c'et devenu un obstacle infranchissable pour moi. Et d'un autre côté, ce n'est pas suffisant. Si je me laissait tomber, je m'en sortirai au pire avec une bosse sur la tête.
- Je vous aide à descendre ?
- Non.
Ma réponse est abrupte et cinglante. Mais ça n'empêche pas l'autre de continuer.
- Tant mieux. Je n'aurai pas été d'une grande efficacité de toute façon ! Vous êtes venu voir le match ? Il va bientôt commencer, vous savez. D'ailleurs, il ne faut pas que je traine ! C'est un honneur de vous voir ici ! Vous êtes bien Akashi Seijūrō ? Le capitaine de la génération miracle. On en a discuté, on s'attendait à vous voir. On se disait bien que ça serait plus fort que vous et que vous continueriez le basket.
Il enchaine les mots, sans me laisser le temps de répondre. De tout façon, je n'en ai pas envie. Chacune de ses paroles me blesse, me rappelle quel joueur j'étais. Je ne veux pas le regarder. J'ai peur. J'ai peur que mon regard ne trahisse ma colère. Pourtant sa voix semble être à ma hauteur. Alors je tourne la tête vers lui, pour le détailler... Lui-aussi est dans un fauteuil roulant et il semble s'en accommoder. Il a mon âge et... il me semble même reconnaitre son visage. Est-ce que je n'aurai pas déjà jouer contre lui ?
- Tu veux plonger ?
- Parfois... j'ai envie.
Je n'ai pas tourné la tête pour la regarder. Je suis qui est là, assise près de mon fauteuil roulant. Les yeux fixés sur la surface de l'eau de la piscine, j'ai parfois envie vraiment de lâcher prise, de me laisser couler.
D'abandonner.
Moi ? Akashi Seijūrō, abandonner ?
Oui, j'ai envie d'abandonner. Mais de tout abandonner. Mes rêves. Bien obligé, je ne serais jamais le basketteur que je rêvais d'être. Mes amis. Ils me rappellent tous le basket. Ma famille. Il ne me reste que mon père et il a déjà programmé toute ma vie. Ma vie. Elle-aussi, j'ai envie de l'abandonner. Je n'ai plus goût à rien. Alors à quoi bon continuer du vivre. Je pourrai peut-être me laisser tomber dans la piscine et resté coincé sous cet encombrant fauteuil roulant. Me viendrait-elle en aide ? Probablement pas. Ce n'est pas l'impression lorsque je l'entends me parler de l'accident. Elle regrette de s'en être sortie si bien alors que d'autres... Finalement, les rôles sont mal répartis. Elle aurait peut-être voulu être à ma place, infirme et ne plus se souvenir de rien. Et moi, j'envie la sienne. Me souvenir. Je voudrais tellement me souvenir. Est-ce qui moi, j'ai fait ce fameux pas dont elle parlait l'autre jour. Est-ce pour cela que je me retrouve dans cet situation ?
J'aurai dû le voir. Mais je n'ai pas vu à quel point elle était mal, à quel point ses souvenirs l'étouffaient et l'entrainaient inexorablement vers une fin tragique. J'ai réalisé après coup, après que l'on m'ait annoncé sa mort que la seule chose qu'elle voulait, c'était mourir. Plus que le syndrome du survivant, elle pensait qu'elle aurait dû mourir, que ce pas en arrière qu'elle avait fait, ne l'avait pas sauvée mais l'avait plutôt précipitée dans un enfers que seule la mort pouvait abréger. Et elle était parvenue à son seul objectif : mourir. Pourquoi m'a-t-elle raconter ce jour tragique où nos vies ont basculé ? Je ne sais pas.
En tout cas, maintenant, il ne me reste que le souvenir de ses monologues. Et qu'est-ce que je peux en faire ? Rien.
Assis par terre, adossé à un mur, je ne cesse de ressasser tout ce qu'elle m'a dit. Je le savais qu'elle n'allait pas bien. Elle me l'a dit, à demi-mot. Il fallait juste être attentif et je ne l'ai pas été. Ses blessures physiques, ce n'étaient que des égratignures. Ses blessures les plus importantes, elles étaient invisibles aux yeux de tous.
Que m'arrive-t-il depuis mon réveil ? J'ai l'impression d'être dans un cauchemar. Un interminable cauchemar dans lequel je n'ai plus envie d'être.
Plus loin, j'aperçois à peine la silhouette de mes anciens coéquipiers. Ils viennent toujours me voir. J'ai beau les envoyer balader à chaque fois, ils s'obstinent. Pourtant cette fois, je ne dis rien, je ne réagis même pas lorsque Murasakibara me prend dans ses bras. Je me laisse totalement aller, comme si j'étais une poupée de chiffons. Mais je m'en moque, je n'ai plus envie de rien. Je veux juste me réveiller et constater que ce n'était qu'un horrible cauchemar.
- À quoi tu penses ?
Je sors subitement de mes pensées pour poser mon regard sur un homme à ma hauteur. Je lui souris.
- Bien, alors tu es prêt ?
J'hoche la tête. Oui, je suis prêt. Du moins, je l'espère. Mais je ne m'attends pas à être aussi agile qu'eux et ce malgré tous mes efforts de ces dernières semaines. Et pourtant je suis allé chercher de l'aide là où je pensais qu'elle m'était utile. Je souris malgré moi en repensant la tête que faisait Takao et Izuki lorsque je leur ai demandé de s'ils pouvaient s'entrainer avec moi. Pour moi, ils étaient les mieux placés pour m'aider à appréhender mon fauteuil roulant et mon environnement. Mais ce que je n'avais pas prévu, et pourtant j'aurai dû vu les personnages, c'est que je me suis non seulement retrouvé avec la génération miracle mais aussi l'équipe de Seirin au grand complet pour me soutenir et m'aider.
- Alors ? Fin prêt !
Je subis presque toute le poids d'Aomine sur mes épaules. Je ne réponds pas tout de suite. Je laisse Satsuki faire la morale à notre amie. Et elle le réprimande déjà. Ces deux-là, ils n'ont décidément pas changé ! Je ferme les yeux un instant. Ils ont pu venir finalement. Je relève la tête, tous mes amis sont là. Aussi bien ceux de Teikō que, et c'est une surprise pour moi, ceux de Seirin. Mais aussitôt, mon regard se porte sur une fille à moitié cachée derrière Izuki. Je l'ai déjà vue, c'est elle qui m'a ouvert la porte lorsque je suis allé voir le vice-capitaine de Seirin. Je lui adresse un léger sourire.
- Qui s'est, cette fille, dis-moi ?
Je lance un bref regard sur le côté, vers Kise. Mais c'est Izuki qui répond, c'est sa jeune sœur, Mai, elle a absolument tenu à venir me soutenir pour mon premier match depuis l'accident. Je la regarde de nouveau en lui adressant un léger sourire de remerciement. Mais en fait, je me retiens parce que j'ai envie de sourire bien davantage. Elle rougit.
- Hey ! Akashi-cchi ! Pourquoi c'est toujours toi qui fait craquer les filles ?
Et c'est Kise qui ose dire ça ! Alors que toutes les filles lui tournent autour dès qu'elles le voient !
- Parce qu'il est toujours charmant ! lui répond Satsuki en visant à moitié Aomine qui ne voit pas de quoi elle parle !
Je me tourne vers mes amis, ils sont tous là. Je leur souris mais je retiens aussi mes larmes. Je suis ému qu'ils aient pu tous venir assister à mon match. Franchement, je ne pensais pas pouvoir rejouer au basket. Mais ce fameux match que mes amis m'ont obligé à suivre, j'y suis retourné finalement. J'étais trop curieux de voir comment ils se débrouillaient. En les regardant, mon cœur palpitait d'excitation. Et puis, je les aurai bien rejoint. Je sentais des picotements dans mes mains, je sentais le ballon entre mes doigts. Selon leurs actions, j'ai réagi, les mains souvent sur les roues de mon fauteuil. Et j'ai fini par réaliser que mon corps était prêt à reprendre le basket. Ce qui me bloquait, ce n'était pas seulement la perte de l'usage de mes jambes. C'était aussi de n'avoir aucun souvenir de l'accident. Bien sûr, je sais ce qui s'est passé, je l'ai lu dans les journaux, j'ai pu avoir le récit des rescapés, des conclusions des experts, ses monologues. Ses monologues ne m'ont rien apporté de plus. Mais à d'autres, oui. Des rescapés, les familles des disparus, tous ces gens me le disent sur le blog que j'ai ouvert et où je raconte tout ce qu'elle m'a dit. Mais aussi tout ce que j'ai ressenti en apprenant que je resterai handicapé, à vie. Le déni, la colère, la dépression, l'abandon, l'acceptation. J'ai voulu tout affronté seul, comme mon père m'avait appris à le faire. Ne compter sur personne. Mais ça m'était impossible, j'en ai conscience maintenant. Je m'en suis sorti parce que j'ai accepté d'être aidé, parce que l'envie de rejouer au basket, même d'une autre façon a été la plus forte. Ce gars de mon âge dans son fauteuil roulant et qui voulait m'aider, en fait ce n'était pas pour descendre ces quelques marches mais pour remonter la pente. Me rappeler qui j'étais pour le redevenir, d'une autre façon. Avancer et faire ce que j'aime, jouer au basket.
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