× Le Glitch de Paris ×
Comme chaque matin, il allait au lycée, en mode normal, et comme chaque matin il passait devant cette image holographique perdue sur les champs Élysées, flottant dans l'air ou assise dans le vide comme si elle utilisait une chaise invisible.
Personne ne savait qui était cette fille, et personne ne savait non plus comment elle était apparue.
Ce n'était pas une fille normale, vous comprenez ; c'était un fantôme, un corps intouchable qui se baladait sur les champs et les deux-trois pâtés de maisons alentours, en traversant les gens, parlant sans son, et vivant là, comme si son monde avait décidé de traverser celui-là.
Les premiers temps après cette apparition incongrue, les journalistes s'étaient interrogés, la suivaient tous les jours pour repérer les endroits où elle s'arrêtait, voulaient comprendre comment la matière se comportait pour être opaque mais se laisser traverser de la sorte, quelle que soit la météo, quelle que soit l'heure. Parce que même la nuit, elle brillait comme en plein jour.
Lui, jeune parisien dont les principales activités consistaient à aller en cours et jouer à des jeux-vidéos sur son PC, s'était brusquement plu à la suivre pendant ses heures de libres, à étudier ses trajets, toujours les mêmes, à apprendre son emploi du temps par cœur, à l'apprécier malgré son silence et sa présence silencieuse.
Il faisait ça depuis des mois ; sa mère n'était pas mécontente de le voir sortir de sa chambre, et pensait qu'il allait voir une fille. Et quelle fille ! Il en rêvait la nuit, imaginait sa voix, trouvait à quoi elle pensait quand elle avait ses petites moues, quand elle était concentrée, quand elle regardait dans le vide pendant plusieurs minutes.
Cet imbécile en était tombé amoureux.
Un beau jour, elle semblait nerveuse ; elle guettait ce qu'il se passait autour d'elle, était stressée par des choses que lui ne pouvait pas voir. Son stress le stressait.
Tout à coup, elle qui marchait selon son trajet habituel, passa par une artère qu'elle n'avait jamais empruntée, sortant de sa zone de vie habituelle. Il la suivit, inquiet, et la vit commencer à courir en clignotant à moitié. Son sang se glaça dans ses veines. Si elle disparaissait, il ne savait pas ce qu'il ferait.
Il lui courut après, le cerveau anesthésié et le cœur tétanisé dans son torse, rendant sa respiration difficile pendant sa course. De ruelle en ruelle, il se demanda si elle n'allait pas plus vite que lui, puisqu'il la voyait de moins en moins ; il accéléra, et c'est en le faisant qu'il se rendit compte qu'il ne connaissait pas bien ce coin de Paris.
Ils sortirent des ruelles désertes et arrivèrent à toute allure sur une avenue fréquentée. Comme le fantôme ne venait jamais par ici, car ordinairement enfermé dans une zone précise, les passants la regardèrent un peu bizarrement, la pensant réelle, s'effaçant sur son passage pour ne pas avoir de collision avec ce boulet de canon.
La respiration du jeune homme se faisait courte, il sentait qu'il ne pourrait pas courir beaucoup plus longtemps. Elle, aussi infatigable qu'inaccessible, filait à travers les gens, qui pour beaucoup ne réalisaient même pas sa présence jusqu'à voir son visage dépasser du-leur.
Ils arrivaient près d'une route sans limitation de vitesse en plein centre-ville. Elle ne voyait pas les voitures bien sûr, elle n'était pas de leur monde, seulement lui l'oublia, les yeux rivés sur ses cheveux virevoltants dans son dos, et quand elle traversa la chaussée comme une dératée, lui se jeta derrière elle pour la pousser loin d'une mort précoce.
Et franchement, ce glitch de Paris n'avait jamais autant fait parler de lui qu'après le passage de ce jeune homme aux informations du soir.
Réaction de la première lecture :
Ce que tu penses avoir compris :
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