Sujet de l'heure : inventer un mot en disant chacun une syllabe dans un groupe de trois personnes, lui donner une définition et l'illustrer dans une histoire.

•

Ce matin-là, le lutin magique de la forêt magique d'un pays magique se promenait sur son territoire, soit toute une parcelle de la forêt magique du pays magique. Ce lutin s'appelait Pipistrelle, un nom peu commun pour un lutin. Ses camarades lutins de l'école magique de la forêt magique l'avaient longtemps affublé du sobriquet 'pipi de sauterelle', mais Pipistrelle en avait un jour eu assez de se faire rabaisser.

Alors voilà qu'il avait décidé de changer : même s'il n'était pas de grande taille, il tiendrait son dos droit et son nez pointu bien haut ; ses pas seraient grands et fermes, son regard intelligent et scrutateur, son rire impitoyable, et surtout, gare au malandrin qui se moquerait de son prénom : il irait faire un tour au fond du grand lac sans fond !

En un mot, Pipistrelle était un lutin qui n'avait pas beaucoup d'amis, et qui n'avait pas non plus envie d'en gagner : il voulait impressionner. C'était d'ailleurs ainsi qu'il avait dérobé sa parcelle de forêt magique à son ancien propriétaire : un tour de sac, et il jouissait de ses nouvelles terres.

Mais ne pensez pas que ce lutin a fait ce petit chapardage pour le seul plaisir de se promener parmi les arbres magiques de la forêt magique ; c'est un vrai lutin, pas une fée de bas-étage ! Sur ces terres se trouvais l'arc-en-ciel au chaudron que tous les leprechaun d'Irlande leur enviaient tant ! Et ce que cet arc-en-ciel avait de spécial, autrement qu'il ait un pied, car vous aurez beau chercher, aucun autre arc-en-ciel ne trouve sa source quelque part en ce has-monde, c'est qu'il délivrait chaque jour une merveille magique capable de rendre son propriétaire très riche !

Ce qui intéressait bien notre lutin.

Alors quand il vit au loin le chaudron se profiler, Pipistrelle accéléra, se jeta dedans et saisit son contenu, soit... un stylo.

« Quoi ? Se plaignit le lutin. Un stylo ? Mais... je ne sais pas écrire... Bah, tant pis ! Il doit être unique, comme moi ! Il s'appellera Flamishko ! Et moi, le grand Pipistrelle, je déclare être l'inventeur de Flamishko ! »

Un tour du poignet, et sa déclaration résonnait dans toute la forêt magique.

Mais Pipustrelle réfléchit. Comment savoir ce que Flamishko avait de spécial, s'il ne pouvait pas l'essayer ?

« Tu sais ce que tu es de spécial, toi ? Lui demanda-t-il en l'observant sous toutes les coutures. »

Flamishko réagit aussitôt, et lui sauta sur la main pour y tracer des lettres en encre.

« AAaAaaaAH ! FLAMISHKO M'ATTAQUE ! Beugla le lutin avant de jeter Flamishko sur le chaudron magique. »

Flamishko ne sembla pas souffrir de ce changement de surface, et poursuivit sa course sur le métal du chaudron. C'est là que Pipistrelle réalisa que Flamishko ne l'attaquait pas, mais écrivait quelque chose. Manque de chance, Pipistrelle ne savait pas lire non plus.

D'un geste du poignet, un blaireau apparut, et sursauta de peur en voyant qui l'avait appelé.

« Tu sais lire ? Lui demanda Pipustrelle, le dos bien droit, le nez haut, dans sa digne posture de roi du chaudron magique de la forêt magique — il l'inventait à l'instant, mais il devait dire que ça sonnait plutôt bien.

— Oui Pipistrelle, bredouilla le blaireau.

— Tu es sûr ?

— Oui Pipistrelle.

— Alors montre-le-moi, grinça Pipistrelle en se penchant sur le blaireau. »

Le blaireau paniqua, et repéra les écritures de Flamishko sur le chaudron.

« Là ! S'exclama-t-il en montrant le chaudron de sa patte griffue. Il y a écrit : 'que tu as de spécial, toi ?' !

— Ça ne veut rien dire, contesta Pipistrelle en se demandant à quoi ce stylo pouvait bien servir. Essaie d'écrire avec ça, tiens, ajouta-t-il en lui fourrant Flamishko dans la patte.

— Que voulez-vous que j'écrive ? Lui demanda le blaireau, avant de glapir parce que le stylo venait de sauter de ses griffes pour écrire des choses sur le chaudron. Oh, c'est incroyable ! Il écrit ce que je dis ! »

Pipistrelle réagit :

« Ah, c'était donc ça. »

Et il fit disparaître le blaireau d'un nouveau tour du poignet.

Un stylo qui écrivait tout seul, alors ? Voilà qui devait être bien pratique, sauf que lire et écrire étaient des arts qui ne servaient à rien, chez les lutins. C'était bien un truc d'humain.

Alors Pipistrelle prit Flamishko, le remit dans le chaudron, et l'y laissa. Il serait bien utile a quelqu'un d'autre.

•

J'avais dans l'idée de faire une suite à cette histoire, puisque ce n'est que le début d'un petit conte de fée qui mettrait ce stylo en scène pour qu'un prince délivre une princesse, ou l'inverse, ça pourrait être drôle. Malheureusement je n'avais plus de temps, et au final j'ai perdu l'inspi entre plusieurs semaines. Mais c'était vraiment un truc stylé.

En plus, la prof a laissé une appréciation 'Bien' dans la marge. Hé hé.