« Je ne crois pas en la théorie de l'évolution. »

Ah.

Son crush lui avait adressé la parole, bonne nouvelle pour elle puisque ça signifiait qu'elle existait à ses yeux ; mais qu'est-ce qu'elle était censée répondre si elle ne voulait passer ni pour une idiote, ni pour une fille qui s'en fout ?

Son cerveau se mit vite en marche, mais n'eut pas le temps de pondre quelque chose de propre que son crush reprenait :

« Tu veux savoir pourquoi ? »

Nouvelle démarche interne pour trouver quelque chose de classe à répondre.

« Euh, ouais ? »

Ah bah bravo, ça c'est la classe.

« La théorie de l'évolution... en fait c'est même pas avec ça que je suis pas d'accord. C'est avec la théorie de la création du monde, réfléchit-il devant elle, qui se retenait de le regarder comme on fixerait un chaton pendant vingt-cinq minutes.

— Le big-bang et tout ça ?

— Ouais. »

Un temps de silence passa, où la jeune fille se demandait ce qu'il pouvait bien trouver à y redire.

« ...Qu'est-ce qui te gêne ? Finit-elle par demander pour relancer la conversation.

— Tout, répondit-il directement. Comment la vie est apparue, comment fortuitement ça nous a fait exister dans un environnement fortuitement parfait et comment on est fortuitement beaucoup plus développés et intelligents que toutes les autres espèces sur Terre.

— On ne te demande pas d'y croire, c'est comme ca, c'est tout. »

Vu le regard qu'il lui lança, ce n'était pas la bonne réponse.

« Parce que tu trouves ça cohérent toi ?

— Je... je sais pas, bafouilla-t-elle, intimidée. J'y ai jamais réellement réfléchi... »

Son regard sa radoucit.

« Ah, bah moi j'y pense et plus j'y pense plus je trouve ça stupide. On dirait le début d'un film bidon, sérieusement. Une planète sans caractéristiques vivables qui devient habitable en quelques millions d'années, ça c'est probant... »

Elle lui jeta un regard interloqué. Qu'est-ce qui le dérangeait, alors ?

« ... mais la naissance de la planète en elle-même, ça c'est nul. Où est l'inspi ? Genre deux supernovas se heurtent, ça fait une énorme explosion, pouf une planète, pouf la vie, pouf l'intelligence. C'est n'importe quoi. »

Elle ne saisissait pas du tout l'intérêt de son discours, il s'égarait beaucoup trop.

« Et donc ? Qu'est-ce qui ne va pas ? »

Retour du regard blasé.

Alors, tu ne me regardes pas comme ça alors que c'est toi qui des trucs n'imp, déjà.

« Je vais aller droit au but. Pourquoi, si nous, les animaux, les arbres, tout ce qui vit, si tout ça c'est né d'une collision entre deux étoiles de merde, pourquoi on est les seuls à avoir des sentiments et un mental aussi développés, alors que les putains de phasmes n'ont rien à dire depuis je sais pas combien de million d'années ? »

Elle fronça les sourcils. Il s'agaçait tout seul.

« C'est un concours de circonstances, c'est tout, dit-elle sèchement en sentant sa précédente admiration pour lui lentement s'évaporer.

— Tu sais ce que j'en fais de ton concours de circonstances ? Non, attends, il faut que je me calme. »

Il repira doucement plusieurs secondes. Et elle, elle avait toujours du mal à saisir ce qu'il n'aimait pas dans la théorie du big-bang.

« Tout simplement, écoute bien parce que je sens que je te perds depuis tout à l'heure, mais c'est de ma faute parce que je ne sais juste pas m'exprimer correctement, chuchota-t-il près d'elle, redevenu comme elle l'appréciait. Je ne crois pas aux théories scientifiques sur notre apparition et évolutions, parce que ce qui nous rend humains, nos sentiments et nos pensées, ça on est les seuls à l'avoir et que jamais au grand jamais, des molécules qui se croisent et se mélangent ne pourront recréer nos sentiments nos émotions, qui ne sont, n'ont jamais été et ne seront jamais une science chiffrée. »

Réaction de la première lecture :

Ce que tu penses avoir compris :