Lutteo : Correspondant (point de vue Luna)
Je n'avais pas eu de symptômes tout de suite, ça avait pris beaucoup de temps pour que les médecins s'en rendent compte. Quand j'étais petite, je tombais souvent malade et dès que je me faisais mal, les bleus et les cicatrices persistaient. Mais personne ne faisait vraiment attention à ça. J'avais toujours caché mes problèmes de santé à mon entourage, excepté ma mère. Je vivais avec et j'attendais patiemment qu'on me dise ce que j'avais.
Un jour ça s'était vraiment empiré. J'avais commencé à faire des malaises réguliers, à perdre l'appétit, à saigner du nez et à cracher du sang. Je n'arrivais plus à dormir, j'avais des maux de tête infernaux. C'était invivable alors j'ai arrêté d'aller en cours. Les médecins avaient commencé à faire des examens beaucoup plus approfondis en voyant mon état et m'avaient diagnostiqué la leucémie. C'était un cancer du sang. Depuis, j'avais tous un tas de médicaments à prendre, des opérations à subir et une mort imminente qui m'attendait. Les médecins étaient hypocrites. Ils avaient dit que je survivrai si je prenais bien mon traitement.
Que des conneries.
30% des personnes atteintes de ma leucémie meurt à cause du traitement ou de la maladie. Oui, 70% ne le font pas mais vu mon état, je n'en faisais clairement pas parti. Ma vie était terminée alors qu'elle n'avait même pas commencé.
En plus, j'allais laisser ma mère toute seule. C'était la pire chose qui pouvait arriver.
Maman et moi vivons seules toutes les deux depuis le départ de l'homme qui était censé être mon père. Il nous a quitté pour une autre femme. Jusqu'à maintenant, il n'est jamais revenu. Quand je l'ai vu partir, je m'étais promis de ne jamais laisser ma mère toute seule mais j'ai échoué.
Quand je mourrai, elle sera seule et je savais que ça allait la détruire. Et j'ai réalisé que toutes les personnes qui me côtoyaient, comme mes amis et ma famille, allaient aussi souffrir de ce cancer.
J'avais vu des films à la télévision, les familles se déchiraient, les amis partaient en vrille après la mort d'un proche. Je ne pouvais imaginer que tous les gens que j'aimais souffrent à cause de moi.
Alors j'avais décidé de les laisser tomber et de les ignorer. S'ils me détestaient, ils ne souffriraient pas de ma mort et ils pourraient vivre normalement.
Au lycée c'était facile, mes amis avaient vite perçu mon changement et s'étaient éloignés de moi. Le seul qui restait c'était Simon. Il ne me lâchait pas. Et même si ça me faisait mal d'avoir perdu mes amis, je savais que je le faisais pour la bonne cause. Je ne voulais pas qu'ils souffrent après.
Le plus dur c'était ma mère. Elle a tout de suite su ce que je faisais. J'avais tellement essayé de m'éloigner d'elle mais je n'y arrivais pas. Je n'arrivais pas à me séparer d'elle alors j'attendais qu'elle me vire de la maison. Je savais que c'était égoïste, qu'elle souffrait déjà bien assez mais si elle arrêtait de m'aimer, elle souffrirait beaucoup moins de ma mort.
La vérité c'est que j'étais fatiguée de tout ça. Il y avait des jours où j'aurais aimé que tous mes symptômes, les médicaments, les opérations s'arrêtent mais ça signifierait mourir ou guérir. Et au vu de mon état qui s'empirait, mon temps sur terre avait un compte à rebours qui arrivait bientôt à sa fin.
Ma mère était désespérée par mon comportement. Elle me regardait souffrir et elle se sentait impuissante. Je la comprenais. Je me sentirais pareille à sa place. Elle voulait tout faire pour que je retrouve ma joie de vivre et mon sourire alors quand elle avait vu que mon université cherchait une famille pour accueillir un étudiant européen, elle avait sauté sur l'occasion dans l'espoir que je me fasse un nouvel ami.
Ce qu'elle ne savait pas c'était que mon projet était tout autre. Je voulais que cet étudiant européen me remplace aux yeux de ma mère et qu'il soulage sa douleur lorsque je mourrai.
Mon plan était clair. Tout faire pour qu'il ne découvre pas ma maladie, qu'il me déteste et le pousser à soutenir ma mère.
Je pensais que ce serait facile mais j'avais tort. Matteo était un garçon adorable et pour la première fois depuis longtemps, son regard dégoûté et énervé qu'il me dirigeait me mettait mal à l'aise. Quelque chose en moi voulait qu'il me regarde avec d'autres yeux. Mais c'était impossible.
Alors j'avais continué d'être insupportable avec lui et avec ma mère. Peut-être que lui réussirait à convaincre ma mère de me virer. Mais elle ne se laissait pas faire. Elle me connaissait par cœur. Elle savait ce que je faisais et c'était pour ça qu'elle prenait toujours ma défense lorsque Matteo me critiquait. Je l'entendais se plaindre de moi à ses amis à la fac, à sa meilleure amie et à ses parents au téléphone. Ma mère bouillait d'envie de lui dire ce qu'il se passait mais elle respectait mon silence.
Pendant ce temps, mon état s'était détérioré. J'avais dû rater plusieurs semaines de cours à cause de mes rendez-vous médicaux. Parfois j'ai dû rester à l'hôpital la nuit. Ma mère pleurait tous les soirs, je l'entendais. J'avais essayé de m'enfuir, pour lui épargner tout ça mais elle me retrouvait toujours et elle me ramenait.
- Ça ne sert à rien que tu partes comme ça. Tu as besoin de tous tes traitements. - me dît-elle avec les larmes aux yeux, une fois rentrée à la maison.
- Je vais mourir de toute manière.
- Tu n'en sais rien. Il faut que tu continues tes traitements.
- Combien de temps ? Pourquoi continuer si l'inévitable va arriver. Et tu vas devoir t'y faire. - lui disais-je fermement.
- Non. Je n'abandonnerai pas tant que tu es là.
- Tu n'auras bientôt plus de fille. - lui disais-je sans aucune émotion. Elle se mit à sangloter et voulut me prendre dans ses bras mais je refusais. - Tu devrais t'y habituer maintenant. Je sais que t'as amené Matteo pour moi mais je crois qu'il te serait plus utile.
- Personne ne prendra jamais ta place, Luna. Tu le sais. - me dît-elle.
Je le savais mais il le fallait.
Je montais les marches des escaliers pour monter dans ma chambre mais j'aperçus Matteo dans le cadre de la porte d'entrée.
J'espérais qu'il n'avait rien entendu concernant le traitement. Il ne fallait pas qu'il sache. Il fallait qu'il continue à me détester ou tout mon plan pour que ma mère m'oublie tomberait à l'eau.
Je sortis mon meilleur regard noir et intercepta le correspondant italien qui vivait chez moi depuis trois semaines.
- Qu'est-ce que t'as entendu ?
Il m'observait attentivement, comme il avait l'habitude de faire. Son regard m'intimidait toujours car j'avais l'impression qu'il essayait de lire en moi et j'avais peur qu'il y arrive. Je détestai l'effet que ce garçon avait sur moi. Son regard accélérait les battements de mon cœur. Cependant, je gardai ma façade froide sans émotions.
- J'ai eu le temps de voir comment tu as fait pleurer ta mère. Tu n'as donc pas honte ? Elle t'aime tellement et toi tu la traites comme ça.
Sa phrase me brisa le cœur mais je ne laissais rien paraître. Je partis m'enfermer dans ma chambre après avoir roulé les yeux en l'air et m'allongeai sur mon lit, ma tête dans l'oreiller pour étouffer mes sanglots.
Je la faisais peut-être pleurer en lui disant tout ça mais c'est comme ça que je lui épargnerai ses pleurs à ma mort.
Mais il n'y avait rien de pire que de devoir m'éloigner de ma mère.
Mon chagrin dû s'interrompre lorsque mon téléphone me rappela que je devais prendre mes médicaments. Quatre cachets de différentes couleurs puis je raccrochai un tube à mes narines pour m'aider à respirer la nuit.
J'entendis ma mère entrer dans ma chambre comme elle le faisait chaque soir. Elle vérifiait mon pouls puis m'embrassa sur le front avant d'aller dans sa chambre pour se coucher.
Quelques jours plus tard, j'eus une crise de toux toute la journée. J'ai dû cracher du sang une dizaine de fois dans le lavabo de ma salle de bain. J'avais l'impression que j'allais m'évanouir toute la journée. Ce n'était que le soir que j'avais commencé à voir les taches noirs qui s'accumulaient dans ma vision. Et même si j'entendais ma mère au loin m'appeler pour venir dîner, tout ce qui sortait de ma bouche était un énième crachat de sang avant de perdre conscience.
***
Lorsque j'ouvris les yeux, je me retrouvais encore dans une chambre d'hôpital. C'était une habitude. Il y avait un médecin à ma droite qui prenait des notes dans son carnet, ma mère à gauche qui me prenait la main. C'était la routine que je menais. Sauf que celle-ci fut différente car en face de moi, assis sur une chaise, des yeux couleur noisette m'observaient avec inquiétude.
Son regard reflétait le regret, la tristesse et peut-être que mon imagination me jouait des tours mais je perçus une pointe douceur également.
Le médecin s'en alla après m'avoir prescrit des médicaments un peu plus fort et une prochaine séance de chimiothérapie.
Ma mère me prit dans ses bras et cette fois, je n'eus pas la force de la rejeter. Je me sentais tellement faible.
- Ce n'est pas passé loin cette fois. - me chuchota-t-elle avec la voix tremblante.
- Je suis désolée.
- Ne t'excuses pas, ma chérie. Ne t'excuses pas.
Je la vis pleurer et je me détestais car je savais que c'était de ma faute si elle était dans cet état. Si seulement je n'étais pas née, je lui aurais épargné tellement de souffrance.
- J'ai dû expliquer à Matteo ce qu'il se passe car il a vu et entendu des choses quand les secours sont venus. - me dît-elle dans mon oreille. - Je crois qu'il aimerait bien te parler maintenant.
Elle me sourît doucement en séchant ses larmes puis sortit de la chambre après avoir doucement tapoté l'épaule du correspondant qui était toujours assis sur sa chaise. Il lui adressa un sourire triste avant de se lever vers moi. Il avait l'air extrêmement gêné alors je baissai la tête. On resta quelques secondes en silence mais j'avais l'impression que ça durait une éternité. Devais-je dire quelque chose ? Allait-il parler ? Après tout, ma mère avait dit qu'il aimerait bien le faire. Donc j'attendis patiemment qu'il rassemble toutes ses pensées. Souvent, les gens avaient peur de dire quelque chose de mal à des personnes comme moi par peur de nous blesser.
- Alors, c'était ça ton secret. - finit-il par dire après s'être raclé la gorge, sur un ton quelque peu amusé et triste à la fois.
Il voulait apaiser les tensions.
- Je suis désolé de t'avoir juger sans te connaître.
- En fait, mon objectif c'était que tu me détestes... - chuchotais-je me sentant trop faible pour parler plus fort.
- Oui, ta mère m'a expliqué pourquoi tu te comportais comme ça. Je comprends. - Il soupira et sourit. - Mais maintenant que je sais, ton plan est tombé à l'eau. Toi et moi on est amis désormais.
- Je ne veux pas de ton amitié. - répondais-je en soupirant. - Tu perds ton temps.
- C'est mon problème.
- Tu vas souffrir si tu t'attaches à moi et que je meurs après...
- Et toi alors ? Tu ne souffres pas en restant toute seule comme ça ? - me coupa-t-il. - Tu ne veux pas profiter de la vie ? Profiter de ta maman, de tes amis, de tes études tant que tu peux. Et qui sait ? Tu combattras peut-être ton cancer. Beaucoup de leucémie se guérissent.
- Mais ce n'est pas le cas pour beaucoup d'entre elles aussi et tu as beaucoup trop d'espoir. - roulais-je les yeux. - Je sais que tu ne me détesteras plus mais ça ne veut pas dire qu'on doit construire une amitié ou quoi que ce soit.
<<Je ne veux pas que tu te rapproches de moi, je ne veux que tu parles à personne de ce que tu sais. Et la seule chose que je pourrais te demander maintenant que tu sais tout, aide ma mère. Aide-la à accepter le fait que je vais mourir et aide-la à soulager sa douleur. Si tu fais ça, c'est super sinon je ne veux rien de toi.
Mes paroles et mon expression restaient aussi froides qu'avant. Ce qui changeait maintenant c'était sa réaction. Au lieu de me lancer un regard énervé et dégoûté, il me souriait avec douceur.
- Je la soutiendrai dans cette épreuve qui doit être aussi difficile pour elle. Mais pour le reste ne compte pas sur moi. Je vais être là pour toi maintenant et je serai ton ami. Et tu ne pourras rien y faire. - m'assura-t-il. - Je vais te laisser te reposer, tu dois être épuisée.
Il se dirigea vers la porte d'entrée mais avant de sortir complètement, il rajouta :
- La seule chose que je respecte c'est ton silence. Je ne dirai rien aux autres si tu ne veux pas.
Puis il partît et me laissa seule.
Je détestai le sentiment qui commençait à se créer à l'intérieur de moi. Mon cœur réagissait et je voulais tout faire pour qu'il se taise.
Non, tomber amoureuse était la dernière chose dont j'avais besoin.
Je soupirai en sentant la fatigue revenir. Un infirmier entra pour me donner des médicaments et m'autorisa à dormir jusqu'à ce que je me sente mieux. Il dît qu'à mon réveil, je pourrais retourner chez moi.
Mais je savais que je reviendrais dans cette chambre bientôt.
***
Les choses à la maison avaient changé. Matteo ne m'adressait plus de regards froids ou noirs même si moi je lui en faisait. Matin et soir, il passait devant ma chambre pour me souhaiter une bonne journée et une bonne nuit pour vérifier comment j'allais.
À la fac, il restait près de moi et déjeunait même en ma compagnie quelques fois. Les autres nous regardaient sans comprendre, surtout ses amis Gaston et Ramiro qui étaient habitués à entendre Matteo se plaindre de moi toute la journée.
Le plus étonné c'était Simon qui était maintenant convaincu que mon correspondant savait ce qu'il m'arrivait et que c'était la preuve que j'éloignais exprès tout le monde de moi.
Simon était mon meilleur ami depuis toute petite. Je le considère comme mon grand frère. Il me connaissait par cœur. C'était très dur de lui cacher des choses, il savait toujours quand quelque chose n'allait pas.
Matteo essayait de me convaincre de lui dire au moins à lui.
- C'est le seul depuis trois ans qui est convaincu que ton attitude est dû à quelque chose. Il continue de te suivre même si tu le traites super mal. Il mérite de savoir, non ?
- Ça fait dix fois que je te dis non ! Tu ne veux pas te mêler de ta vie pour une fois ! - lui criais-je agacée en entrant la clef dans la serrure de la porte d'entrée pour qu'on rentre chez nous.
- Mais il est si triste.
- Il sera encore plus triste quand il saura. C'est mieux comme ça.
- Mais ça me rend tellement malheureux que tu puisses penser que tu as besoin de t'éloigner des autres à cause de ton cancer. Ils seront tristes quoi qu'il arrive. Ils apprendront ce qui t'est arrivée à ta mort et tu ne crois pas qu'ils seront aussi tristes voire plus que si tu leur avais dit parce qu'ils n'auraient pas pu passé des moments avec toi ?
<<Imagine que c'était quelqu'un d'autre qui avait un cancer. Comme Simon ou ta mère. Tu aimerais le savoir, non ? Et peut-être passer du temps avec eux, les soutenir et tout faire pour qu'ils guérissent. Et en plus, je suis sûr que ça te ferait du bien de partager des souvenirs avec ta famille et tes amis. C'est important d'être entourée et de vivre des bons moments.
<<On est tous condamnés à mourir de toute façon. Demain je peux mourir à cause d'un accident de la route ou d'une crise cardiaque. Personne ne sait quand la vie va s'arrêter. C'est pour ça qu'il faut profiter un maximum. Tu comprends ?
Pourquoi est-ce qu'il trouvait toujours une façon de me faire douter de ma décision ? Pourquoi devait-il être si intelligent et beau ?
Évidemment que si la situation était inversée, j'aimerais qu'on me dise ce qu'il se passe. Mais la vérité est que j'étais terrifiée. J'avais peur de tout perdre, que tout s'arrête soudainement. J'avais très peu de sommeil car j'avais peur de ne pas réussir à me réveiller le lendemain. J'avais très peu d'appétit car j'avais peur que rien ne tienne dans mon estomac. J'étais épuisée mentalement et physiquement. J'étais perdue face à tout ça. Jusque là je préférais m'isoler car j'avais horreur de devoir infliger ma souffrance aux autres alors qu'ils n'avaient rien demandé. Je voulais toujours prétendre que tout allait bien mais je ne me sentais pas bien. Je voulais courir dans ma chambre pour m'y enfermer et pleurer dans mon oreiller comme j'avais l'habitude de le faire mais Matteo m'en empêcha en attrapant ma main. Il avait vu les larmes s'accumulaient dans mes yeux et passa ses bras autour de ma taille pour me coller contre lui et me serrer dans ses bras.
- Ça va aller. Laisse tout sortir. Ça va aller, ma belle.
Je sanglotai dans ses bras et le laissa faire. Pour la première fois depuis longtemps, je m'autorisai à perdre le contrôle devant quelqu'un et à laisser sortir toutes mes émotions. Matteo ne dît aucun mot, il se contenta simplement de caresser mon dos avec tendresse et m'embrassa quelques fois sur la tête pour me calmer petit a petit. Je sentais des doigts passer doucement sur mes bras ce qui m'apporta un grand réconfort. Ça faisait du bien.
Il me faisait du bien.
Peut-être devrais-je me laisser un peu aller et profiter de la vie ?
Après tout, peut-être que ça irait et que je devrais arrêter de n'écouter que mes angoisses. Celles-ci m'empêchaient toujours de vivre.
- Je veux bien qu'on sois amis. - dis-je une fois que mes pleurs s'étaient arrêtés.
Il se détacha légèrement de moi pour me regarder dans les yeux avant d'acquiescer avec un sourire.
- Rien ne me ferait plus plaisir.
•
Voilà la vie de Luna. Maintenant qu'on sait ce qu'il s'est passé des deux côtés et qu'elle a accepté d'être amie avec Matteo, on va pouvoir se concentrer sur leur histoire d'amour 🥰
Donc, la prochaine partie aura un point de vue extérieur. ❤️
Je fais plusieurs parties parce que je n'ai pas le temps d'écrire toute l'histoire donc au moins je publie au fur et à mesure et il y a moins de lapsus de temps entre différents chapitres 😅
J'espère que ça vous a plu ☺️
🥀 Bisous 🥀
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