(Je l'avais déjà mentionné quelque part, mais il est possible que je mette cette histoire en mature... Cela dépendra de la tournure que prend les évènement. Dans tous les cas, le chapitre actuel peut potentiellement choquer les plus sensibles. Ne lisez pas si vous l'êtes! Je vous souhaite une bonne lecture à tous).

Elle en avait les larmes aux yeux. Devant elle, enfin, se trouvait la décharge. Ce n'était pas encore sa maison, mais elle était certaine de pouvoir rentrer chez elle à partir de là. Elle n'avait qu'à suivre le chemin qu'elle prenait d'habitude avec son frère, et tout irait bien.

Elle oubliait sciemment de se dire que, vu qu'elle s'était perdue à l'aller, il allait lui être difficile de le faire en sens inverse.

Mais, à présent, elle allait pouvoir demander leur aide aux personnes qu'elle allait croiser. Elle allait s'en sortir, elle le sentait.

Dévalant la petite colline descendant jusqu'à la décharge, la fillette fut alors saisie par l'odeur horrible qui s'échappait de cette dernière. Sans doute était-ce parce qu'elle était exténuée, mais elle avait l'impression que les ordures sentaient beaucoup plus fort qu'en temps ordinaire.

Avec un air d'espoir sur ses jolis traits entravés de saleté, Sol s'aventura alors au milieu des détritus, à l'affût. Ace l'avait toujours défendue de rester seule dans cet endroit, mais elle n'avait jamais vraiment compris pourquoi.

Elle n'avait jamais eu de problème, et n'avait jamais rencontré quelqu'un de méchant. Certes, des gens bizarres y avaient élu domicile, mais il existait une grande différente entre "bizarre" et "méchant".

Et puis, elle n'allait pas rester trop longtemps. Elle demandait juste son chemin et elle déguerpissait vite fait bien fait, ayant plus que hâte de retrouver sa petite maison et sa petite famille. Enfin.

Contrairement à d'habitude, le silence régnait sur la décharge. Pas de cris, pas de conversations, pas de crépitement causé par un feu de camp.

La petite fille était seule, semblait-il. Elle se risqua alors un peu plus profondément dans le champ de détritus, se concentrant afin d'entendre quelque chose qui attesterait d'une présence humaine.

Quelques secondes plus tard, elle réussi finalement à capter quelque chose d'intéressant. En courant, la fillette rejoignit le son, qui se révéla être plus lointain que prévu. Le cœur battant et malgré la fatigue, Sol poussa un soupir lorsqu'une odeur de bois brûlé parvint à ses narines.

Cela signifiait qu'il restait quelques âmes éveillées dans cet endroit sordide et insalubre. Et qui disait quelqu'un disait forcément de l'aide.

Effectivement, quatre personnes se trouvaient autour d'un feu de camp, mais aucun de semblait avoir remarqué sa présence pour l'instant. Quatre hommes, qui s'exclamaient d'une voix basse mais colérique, avec de grands gestes, ayant presque l'air de se battre entre eux.

Ce qui n'enchanta pas vraiment la petite rousse. Si ses sauveurs se battaient, ce n'était pas rassurant pour elle. Allaient-ils malgré tout l'écouter et l'aider?

Tout en s'approchant davantage, Sol pu en effet sentir l'odeur de bois brûlé, puis quelque chose qui lui donna soudainement envie de vomir. L'odeur sentait tellement forte qu'elle se demanda comment elle avait fait pour ne pas la sentir auparavant.

Ou peut-être l'avait-elle fait, mais qu'elle n'y avait pas vraiment prêté attention sur l'instant, trop pressée de pouvoir trouver quelqu'un pour la guider?

Sûrement. Toujours est-il que la fillette se figea, la main couvrant son nez et sa bouche, dans l'espoir vain d'atténuer l'odeur de plus en plus atroce et âcre. Elle ne savait même pas comment ces hommes faisaient pour ne pas tourner de l'œil eux aussi, alors qu'elle l'était presque de son côté.

Quelques mètres, c'est ce qui la séparait à présent des hommes. Sans qu'elle ne sache pourquoi, malgré ses yeux larmoyants et son estomac retourné, elle pu malgré tout apercevoir quelque chose, qui lui avait échappé jusqu'à présent.

Par terre, juste aux pieds des quatre hommes et à côté du feu aux braises rougeoyantes, un visage l'observait fixement, avec une expression effrayante. Comme si cette personne l'avait aperçue et que sa présence l'avait dérangée.

La petite fille mit un long moment avant de se rendre compte de l'horreur de la situation.

Le visage qui la regardait, celui d'une femme aux cheveux bruns sales ainsi qu'aux yeux noirs écarquillés, n'avait pas de corps.

Seule sa tête était posée là, à même le sol, avec du sang partout autour. En relevant les yeux, la fillette observa que les quatre hommes étaient eux aussi couverts de sang, toujours occupés à se disputer à voix basse.

Le feu crépitant, qui laissait une épaisse fumée à l'odeur nauséabonde s'échapper, semblait être oublié des quatre personnes, pourtant situé non loin d'eux. Sol, terrifiée, savait que ceci n'était pas normal, qu'elle devait courir.

Le regard de pure terreur figé sur le visage de la dame sans corps semblait aller dans ce sens lui aussi. Seulement, elle n'arrivait pas à faire un seul geste. Elle restait là, les yeux grands ouverts oscillant entre la tête et les quatre hommes, en passant par le feu aux flammes fournies.

Par-dessus l'odeur horrible de la fumée, elle sentait à présent celle métallique du sang, comme lorsqu'elle s'écorchait en grimpant aux arbres. Et tout ceci, rassemblé en une seule et unique odeur, manqua de la faire régurgiter le maigre repas qu'elle avait avalé.

Elle ne s'en rendit pas vraiment compte, mais les larmes avaient recommencé à couler le long de ses joues, créant des sillons dans l'épaisse couche de saleté qui se trouvait déjà là.

Sans qu'elle ne puisse faire autrement, elle sentit ses jambes se dérober sous elle, ses yeux fixant ceux horrifié de la femme sans corps.

Le son de ses fesses entrant en contact avec la terre battue eu le mérite d'attirer l'attention de l'un des hommes, enfin. Mais elle aurait préféré que cela ne se produise jamais, malgré le fait qu'elle soit perdue et désespérément à la recherche de sa maison.

-Bordel de merde!! s'exclama l'homme en pointant du doigt la petite fille, faisant se retourner ses autres acolytes.

-Putain... Elle a tout vu, merde! On fait quoi? répondit l'un d'eux après quelques secondes de silence.

Les mains fermement pressées contre sa bouche, dans l'espoir peut-être de stopper ses hoquets de terreur, la pauvre petite rousse ne pouvait faire autrement que de regarder l'un des hommes s'approcher doucement d'elle, les trois autres regardant attentivement la scène, prêts à agir si cela était nécessaire.

Elle regrettait amèrement de s'être éclipsée alors qu'Ace était tombé endormi. Un tel évènement insignifiant ne justifiait pas une réaction aussi excessive, déplorait-elle à présent. Sans son petit caractère de petite fille pourrie gâtée, jamais elle ne se serait perdue. Jamais elle n'aurait eu à passer une nuit en pleine forêt, perdre son doudou, déchirer sa robe, manger un fruit infect et tomber sur...

Ce spectacle macabre.

Elle voulait juste rentrer chez elle... Elle ne demandait rien de plus.

Retrouver son grand frère qui allait la réconforter, lui assurer que tout ceci n'était un horrible cauchemar. Et pourtant.

C'était bel et bien la réalité.