One night in Tokyotsune
Une nuit, dans les ruelles étroites de Tokyotsune, un jeune tanuki y marchait de manière précipitée vers son domicile, longeant prudemment les murs des maisons aussi froids que l'air qu'il respirait. Il serrait entre ses pattes les précieux médicaments dont sa famille entière avait besoin alors que la grippe hivernale faisait des ravages dans les foyers en ces temps de troubles. Celui-ci s'estima chanceux d'avoir pu acheter les derniers remèdes et cataplasmes d'une pharmacie, non sans avoir dû y sacrifier toutes ses économies qu'il destinait à ses études de haut-fonctionnaire. Mais au diable la politique, l'empereur venait de tomber sous la pression des seigneurs de guerre qui s'apprêtaient bientôt à reprendre le pouvoir dans un pays plus divisé que jamais. Quoiqu'il en soit, les petits de son espèce n'avaient plus qu'à se soucier de leur propre survie et attendre que les guerres et les conquêtes s'enchaînent entre les plus puissants en espérant un retour à la paix.
Distrait par ses pensées, il ne remarqua que trop tard la présence de trois animaux plus ou moins imposants qui lui barrèrent la route. Chacun arborait un masque de tengu ridiculement effrayant et quasi identique aux autres mais l'intention qui semblait les animer était bien plus menaçant que celui des démons qu'ils représentaient. L'un d'eux s'avança jusqu'à deux pas du gamin pour lui adresser la parole sur un ton doux mais bien trop rocailleux pour paraître gentil:
«Tu as quelque chose qui nous intéresse, petit. Tu voudrais bien nous l'échanger contre une sucrerie?»
L'animal faisait quasiment 2 mètres de haut face au tanuki dont les mains tremblèrent mais serrèrent encore plus leur précieuse charge contre sa poitrine. Les voleurs portaient des wakizashi à leurs ceintures certainement volés à de riches marchands. À voir cela, ces derniers n'étaient certainement pas à leur premier vol. Néanmoins, le jeunot ne se découragea pas et répondit en levant la tête, le torse bombé en étirant son corps au maximum pour prendre une certaine hauteur qui n'égalera jamais la leur.
«Ces médicaments sont pour ma famille souffrante. Je ne les échangerai en aucun cas. Maintenant, laissez-moi passer s'il vous plaît.»
Il lui fallut fournir un effort incommensurable pour ne pas faire trembler sa propre voix mais à présent, il ne pouvait plus reculer. Le géant face à lui ne fit rien pendant de longues secondes comme s'il s'attendait à ce que le tanuki regrette aussitôt ses dires mais ce dernier restait déterminé et droit dans ses geta. Alors, le voleur hocha la tête et souffla quelques mots dans une certaine résignation comme si l'inévitable allait se produire:
«Je comprends. Mais malheureusement, tu es tombé sur les mauvaises personnes ce soir.»
Le géant engloba la tête du tanuki d'une seule main et le souleva du sol. Son museau couvert par l'immense paume, il ne put crier un mot et ses petites jambes s'agitèrent rapidement dans le vide. Les médicaments qu'il serrait dans ses bras commençaient à le peser avec la gravité et bientôt, il voyait une deuxième grande main s'approcher pour les lui dérober. Il se plia alors en deux avant que cette main ne l'atteigne et y posa ses deux pieds pour se propulser en arrière et se libérer de son emprise. Il tomba alors lourdement sur le dos en parvenant à éviter de casser un des flacons d'un précieux remède qu'il tenait. Il tenta de se lever mais au même moment, une lame brillante et tintée de la lumière de la lune fenda l'air près de sa tête. Il sentit aussitôt l'acier froid d'un wakizashi au niveau de sa nuque d'un des complices du géant qui le tenait en joue.
«On hésitera pas à s'en servir petit. En tout cas, mon ami n'en est pas à son premier gamin tué.»
Les yeux du masque de tengu de celui qui le menaçait de sa lame le fixèrent avec une intensité sans pareille, le gamin pouvait sentir sa pulsion de meurtre.
Irradié par la peur, il esquissa d'un geste tremblant ses médicaments, s'apprêtant à en faire un don forcé. Pourtant, lorsqu'il leva les yeux, le tengu meurtrier avait le regard tourné vers le bout de la ruelle tout comme le géant et le troisième.
La lame qui l'oppressait recula alors et se dressa dans la direction que les voleurs fixaient. Le tanuki, intrigué, tourna son regard dans la même direction et vit une lueur rouge et jaune au loin, certainement la flamme d'une lanterne tenue par...
Les deux autres voleurs sortirent aussitôt leurs lames de leurs fourreaux et se positionnèrent comme s'ils allaient se battre.
«Oh, toi là! Dégage!»
Le troisième tengu jusqu'alors silencieux s'avança vers le porteur de la lanterne et continua de le menacer mais aucune réponse ne lui vint.
Soudain, la flamme de la lanterne se transforma en un éclair de feu qui passa entre les trois tengus. Ces derniers comme foudroyés, restèrent debout un instant et tombèrent quasi simultanément au sol. Pendant quelques secondes, l'air avait semblé irradier d'une intense chaleur qui s'évanouit pour laisser le froid revenir en maître dans cette ruelle. Le tanuki n'avait rien vu venir, il n'avait qu'un flash de feu en mémoire et rien de plus. Face à lui se trouvait à présent la même lanterne dont la flamme vacillante le réchauffait avec douceur entourée des corps ensanglantées de trois tengus inanimés. Comme si la lanterne à elle seule venait de purifier la ruelle de ces mauvais esprits.
Bonus: "L'éclair de feu"
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