Chapitre 31
Louis regardait tout autour de lui, à la recherche d'une personne en particulier. Ils n'étaient pas nombreux, mais l'espace restreint lui donnait l'impression d'être dans une pièce surpeuplée et il avait du mal à mettre un pied devant l'autre.
C'était d'ailleurs très étrange qu'il réussisse à perdre de vue une personne alors qu'elle n'avait pas beaucoup d'endroits où aller. Certes, Juliette était petite, mais ce n'était pas ce qui la rendait invisible pour autant. Non, elle devait se cacher quelque part.
Il ne l'avait pas beaucoup vue ce soir-là. Il avait tout juste eu le temps de lui demander comment s'était passé son rendez-vous chez la psychologue avant qu'elle ne disparaisse. Il aurait aimé en savoir plus, elle avait à peine effleuré le sujet, mais elle était tellement distante avec lui ces derniers temps.
Il avait bien essayé de lui parler, mais elle restait souvent silencieuse et se contentait de réponse courte. La fatigue jouait beaucoup, ils n'avaient pas arrêté une seconde depuis le début de la saison, voilà pourquoi il espérait que les vacances leur feraient du bien à tous les deux.
En attendant, il avait envie de passer du temps avec elle. Ils n'allaient pas se voir pendant deux semaines, c'était la première fois depuis quelques années qu'elle passait les fêtes de fin d'année loin de lui et il voulait profiter avant qu'elle ne parte.
Malheureusement, il ne la trouvait nulle part.
Elle n'était pas avec Anastasiya, Anton et Baptiste qui s'étaient lancés dans un concours de celui qui ferait la blague la plus nulle, ni vers Alya et Thibaut qui étaient littéralement l'un sur l'autre. Elena avait dû s'éloigner pour répondre à un appel et Eléonore revenait de la cuisine et allait rejoindre les autres.
Louis l'interpella avant qu'elle ne puisse aller plus loin. « Est-ce que tu n'aurais pas vu Juliette ? Je la cherche depuis tout à l'heure. »
La jeune fille haussa un sourcil, ne délaissant pas l'attitude froide qu'elle avait avec lui depuis plusieurs semaines. « Pourquoi ? Tu veux remuer le couteau dans la plaie ? » Elle se tapa le front, feignant la réalisation. « Mince, au temps pour moi, tu viens juste de te rappeler qu'elle existait. »
Le garçon se renfrogna, blessé par son insinuation. « Tu m'expliques ce que je t'ai fait pour que tu me traites comme ça ? »
Elle croisa les bras sur sa poitrine et le fusilla du regard. Elle n'était pas impressionnante par sa taille, mais par sa force de volonté. « J'avoue ne pas être trop fan quand on se moque de mon amie, surtout quand celle-ci est la personne la plus douce qui existe. »
« Je ne me moque de personne. » Répliqua-t-il, n'aimant pas du tout la tournure que prenait la conversation. Il voulait juste trouver Juliette.
« Tu es vraiment le mec le plus naïf que j'ai eu l'occasion de rencontrer et ce n'est vraiment pas un compliment. » Elle secoua la tête et le contourna pour rejoindre leurs amis. « Ça en devient inquiétant. »
La frustration commençait à se répandre en Louis comme un ruisseau se déversant dans un lac. Il ne se moquait pas de Juliette, ça faisait des années qu'elle représentait tout pour lui et jamais il ne la blesserait volontairement. Il n'était pas bête, il avait très bien compris ce que lui reprochait Eléonore, mais ça ne la regardait pas.
Un mouvement à sa droite attira son attention. Sortant à son tour de la cuisine, Valeriy apparut dans le salon avec un paquet de chips à la main. Le garçon avait mis un point d'honneur à l'ignorer toute la soirée, ne lui adressant même pas la parole, mais Louis n'était pas d'humeur à rentrer dans son jeu. Il fallait qu'il trouve sa meilleure amie.
« Val', est-ce que tu sais où est Juliette ? »
Pendant quelques secondes, il le toisa des pieds à la tête, jugeant s'il était bon de lui répondre ou non. Finalement, il céda avec un soupire. « Elle est rentrée chez elle. »
Louis écarquilla les yeux, la panique commençant à s'emparer de lui. « Tu l'as laissée rentrer toute seule à cette heure-ci ?! »
Précipitamment, il se dirigea vers la porte et commença à enfiler ses chaussures, les pires scénarios lui traversant l'esprit. Ils ne vivaient pas dans une ville où le taux de criminalité était important, mais il n'était jamais sûr de rentrer à pied en pleine nuit, surtout pour une fille. En tout cas, Louis ne pourrait jamais dormir tranquille s'il n'était sûr que Juliette était en sécurité chez elle.
Un rire l'interrompit dans son mouvement. Valeriy l'observait avec un mélange de dégoût et de pitié. « Qu'est-ce que tu peux être hypocrite. »
Louis fronça les sourcils, sans comprendre. « Qu'est-ce que tu veux dire ? »
« Elle a essayé de te demander je ne sais combien de fois de la raccompagner. » Il leva les yeux au ciel. « Tu peux te détendre, je ne l'ai pas laissée partir seule, j'y suis allé avec elle. »
Le garçon soupira de soulagement, les battements de son cœur ralentissant pour reprendre un rythme normal. Tout allait bien, Juliette était chez elle avec son chat et non dans une ruelle sombre entourée de rats assoiffés de sang. Elle était en sécurité.
Le soulagement laissa sa place à la réalisation de ce que venait de lui dire son ami. « Elle n'est jamais venue me demander de la raccompagner. »
« Normal, t'étais bien trop occupé à roucouler dans ton coin pour faire attention à elle. »
Louis l'observa, son amertume grandissante. Alors oui, ça faisait déjà plusieurs semaines qu'il y avait un froid entre eux, mais l'animosité dont il faisait preuve à chaque fois qu'il s'adressait à lui était injuste. Il n'avait rien fait pour mériter d'être traité de la sorte.
« Donc le problème est encore là ? » Lui demanda-t-il, sans pouvoir cacher son agacement. « Elena. »
Valeriy se tourna pleinement vers lui, abaissant son paquet de chips et prêt à lui dire ce qu'il se retenait de dire depuis tout ce temps. « Sérieusement mec, pourquoi est-ce que tu t'es lancé dans cette histoire ? »
Louis secoua la tête avec mauvaise foi. « Ça ne te regarde pas. »
« Bien sûr que ça me regarde quand mon ami fait une erreur et qu'il ne s'en rend même pas compte. T'as pensé à Juliette ? Elle- »
« Elle n'a rien à voir avec cette histoire ! » S'exclama-t-il en lui coupant la parole. Il prit une grande inspiration pour essayer de se calmer. « Je ne suis pas une sorte d'âme en peine qu'il faut à tout prix sauver. Si j'ai décidé de sortir avec Elena c'est parce que je le voulais, pas pour combler un vide ou je ne sais quoi. »
Le brun fronça les sourcils et le regarda avec incompréhension. « Donc, même après toutes ces années, tu as décidé de tirer un trait sur Juliette comme ça, sur un coup de tête ? »
« Qu'est-ce que tu voulais que je fasse ? Que j'attende bêtement ? » Louis déglutit difficilement, il n'avait vraiment pas envie de revenir sur le sujet. « C'est elle qui n'a pas voulu de moi. »
« Tu ne lui as même pas laissée le temps de réfléchir, comment veux-tu qu'elle ait pris une décision ? »
« Faire comme si notre discussion n'avait jamais existé, pour moi c'est une réponse suffisante en elle-même. » Répondit-il en soufflant. « Tu n'étais pas là, tu n'as pas idée de l'enfer que ça a créé entre nous. Alors oui, excuse-moi de vouloir préserver notre couple et de vouloir me préserver moi par la même occasion et de passer à autre chose. »
Valeriy leva les yeux au ciel, excédé. « Ce n'est pas ce que j'appelle passer à autre chose. Tu ne te rends même pas compte de l'incidence que ça a sur elle. »
« Si vraiment Juliette avait un problème avec, elle me l'aurait dit. »
« Vraiment ? Elle te l'aurait dit, tu en es sûr ? » Il haussa un sourcil, une lueur de défi dans le regard. « Elle ne se renfermerait pas plutôt sur elle-même en se distançant, pensant que c'est ce que tu veux ? »
« C'est ce que je veux Val' ! » Louis se pressa les mains sur les yeux. Il était fatigué, fatigué de devoir constamment justifier ses décisions alors que ça ne regardait que lui. « Pourquoi est-ce que vous venez tous me prendre la tête ? Ce sont mes histoires, pas les vôtres ! »
« Parce que tu fais n'importe quoi et tu ne t'en rends pas compte ! Parce que tu n'es pas le seul concerné et que ça blesse Juliette plus que ce que tu veux bien admettre ! Parce que- »
Valeriy fut interrompu par un raclement de gorge qui venait de derrière lui. Il se retourna précipitamment, révélant la silhouette d'Elena qui les observait avec incertitude, son téléphone à la main. Le cœur de Louis se serra lorsqu'il vit son expression peinée.
« Euh, je ne voulais pas vous déranger, mais, » commença-t-elle d'une petite voix, son regard naviguant entre les deux garçons, « mes parents aimeraient que je ne tarde pas trop pour rentrer. Donc... »
Elle ne termina pas sa phrase, se contentant d'observer Louis avec un mélange de malaise et de timidité. Il ne lui en fut pas plus pour qu'il se dirige vers le porte manteaux et qu'il récupère les leur, ses baskets déjà aux pieds.
« Pas de soucis, je pense qu'il était temps de partir de toute manière. » Il jeta un regard appuyé à son ami tout en tendant son manteau à sa copine. Il n'avait plus aucune envie de faire la fête.
Ouvrant la porte d'entrée, il attendit qu'Elena passe devant lui. Celle-ci se retourna une dernière fois vers Valeriy avec un petit sourire. « Merci pour l'invitation, c'était une très belle soirée. »
Le garçon lui répondit par un signe de tête et le couple sortit dans la rue. Elena habitait encore moins loin que Juliette, le trajet fut donc très rapide et se fit dans le silence. Ce n'est qu'arrivés devant chez elle que la jeune fille se tourna vers lui.
« Ecoute Louis, je n'ai pas envie d'être un problème entre toi et tes amis. »
Ce dernier fronça les sourcils. Il ne savait pas exactement ce qu'elle avait entendu de sa conversation avec Valeriy, mais il savait déjà qu'il aurait voulu qu'elle n'en entende pas un seul mot. « Tu n'es pas un problème. »
Elle baissa les yeux, ayant perdu toute la joie dont elle avait pu faire preuve durant la soirée. « Je vois bien comment ils te traitent depuis que tu as commencé à rester avec moi, surtout Valeriy. »
« Valeriy est un abruti. » Rétorqua-t-il en se retenant de lever les yeux au ciel. « Il se mêle de ce qui ne le regarde pas et croit être dans ma tête pour savoir ce je ressens mieux que moi. Crois-moi, j'en n'ai absolument rien à faire de ce qu'il pense. »
« Même si c'est à propos de Juliette ? » Lui demanda-t-elle après une hésitation.
Louis eut du mal à reprendre sa respiration. Ils en revenaient toujours au même. Juliette. Il ne pouvait pas faire l'étonné, de ce qu'il avait compris ses sentiments n'avaient été un secret pour aucun de ses amis, mais il ne voulait pas que ça vienne entacher sa relation avec Elena.
« Juliette est ma meilleure amie. » Répondit-il simplement. « Je la connais depuis tellement longtemps que je ne sais même plus ce que ça fait de vivre sans elle. C'est ma partenaire sportive et ça ne changera jamais. » Il fit une pause, essayant de trouver les bons mots pour décrire sa pensée. « Mais c'est tout. Ma vie, mon comportement, ce que je pense, rien n'a changé. La seule différence est que tu fais aussi partie de mes proches maintenant. Si ça ne plait pas à certains, qu'ils aillent voir ailleurs. D'accord ? »
Elena l'observait avec espoir, elle voulait croire à ce qu'il lui disait et Louis aussi voulait qu'elle y croie. Il voulait qu'elle y croie parce que ce qu'il disait était vrai, il en était convaincu. Ce n'étaient pas ses amis qui allaient lui dicter quoi ressentir.
Il essaya d'appuyer ses paroles en lui serrant et un sourire se dessina lentement sur ses lèvres. Elle finit par hocher la tête et se hissa sur la pointe des pieds pour l'embrasser sur la joue. « A demain. »
Le garçon la regarda s'éloigner et disparaitre chez elle, la tête se remplissant de pensées qui s'entrechoquaient à lui en donner mal au crâne. La soirée avait si bien commencé, pourquoi avait-il fallu que ça parte en sucette à la fin ?
Il n'aimait pas qu'Eléonore le regarde comme s'il était stupide, il n'aimait pas être en froid avec Valeriy et il aimait encore moins ne pas avoir pu passer du temps avec Juliette. Ni qu'elle soit partie sans lui dire au revoir par la même occasion.
Louis était prêt à laisser ressortir toute sa frustration lorsqu'il reprit la route de chez lui. Il marchait d'un pas trainant et agacé, ayant de plus en plus de mal à ressentir l'esprit de Noël qui courait les rues.
De quel droit est-ce que ses amis se permettaient de juger ses décisions ? Il avait décidé de passer à autre chose, et alors ? Ça ne faisait pas de lui une mauvaise personne, ce n'est pas comme s'il avait abandonné Juliette du tout au tout.
Puis, ce n'était pas comme si ça l'affectait vraiment. Certes, elle était particulièrement fatiguée ces derniers temps, mais ça n'avait rien à voir avec sa décision. Elle était contente pour lui, elle le lui l'avait dit.
Si ses sentiments n'étaient pas réciproques, il ne pouvait pas l'en blâmer. Evidemment, il aurait aimé que ça se passe autrement, il aurait vraiment voulu que la situation évolue différemment, mais ça n'avait pas été le cas. Même si une partie de lui était toujours blessée, il ne pouvait pas continuer à s'apitoyer sur son sort.
Il aimait beaucoup Elena, il ne se servait pas d'elle pour oublier ses sentiments pour Juliette. Non, elles étaient toutes les deux placés dans des cases bien différentes dans sa tête et ce qu'il ressentait pour elles n'avait aucun lien direct.
Et il ne laisserait personne dire le contraire, surtout lorsque les sentiments d'une partie pouvaient être affectés.
Elena avait beau dire qu'elle se moquait du regard des autres, avec tous les efforts qu'elle avait fait pour s'intégrer, Louis avait bien vu qu'elle commençait à prendre du plaisir à la compagnie de ses amis. Alors il était évident qu'elle était déçue qu'ils puissent avoir une telle image d'elle et qu'elle ne voulait pas perdre les amitiés qu'elle était en train de créer.
En tout cas, Louis ne voulait pas en être responsable et elle ne le méritait pas.
Le garçon soupira en tournant dans une rue adjacente, donnant un coup de pied dans une pierre qui trainait. Tout était tellement compliqué. Tout ce qu'il voulait, c'était profiter de la vie qu'il se formait, pas se poser des questions à chaque doute qui n'étaient même pas les siens.
Les paroles de Valeriy se firent un chemin à l'avant de ses pensées et les mêmes questions lui revinrent à l'esprit.
Juliette ne pouvait pas lui en vouloir de sortir avec Elena, si ? Non, elle lui avait dit qu'elle était contente pour lui et si ce n'était pas le cas, il s'en serait rendu compte. Non seulement il tournait en rond, mais il se laissait influencer par les autres.
Il se connaissait, il connaissait Juliette mieux que personne, il était parfaitement capable d'analyser son comportement sans se tromper. Bon, c'était une situation à laquelle ils n'avaient jamais été confrontés, mais il n'avait pas besoin de ça pour savoir qu'elle ne voulait que le meilleur pour tous les deux.
Si elle était distante, c'était à cause de la fatigue. Juste de la fatigue.
Louis releva la tête et jeta un coup d'œil autour de lui, Super, il avait tellement été distrait qu'il ne savait même plus où il était. Soufflant de frustration, il sortit son téléphone et mit le GPS. Il déchanta rapidement en se rendant compte qu'il s'était facilement rajouté dix minutes de marche.
La mort dans l'âme, il fit demi-tour et reprit la bonne route. Son esprit divagua à nouveau lorsqu'il rejoignit une rue qu'il connaissait et que ses jambes le trainèrent machinalement jusqu'à chez lui. A ce stade, la fatigue et la frustration ne faisait plus qu'une.
Arrivé devant la porte de chez lui, il batailla à la déverrouiller, manqua de peu de trébucher sur les chaussures que sa sœur avait laissée sur le seuil et loupa trois marches en montant les escaliers qui menaient à sa chambre, bien trop occupé à maudire celle qui dormait dans la pièce à côté.
Honnêtement, c'était un miracle s'il n'avait réveillé personne.
Louis prit tout juste le temps de se laver les dents et de se déshabiller avant de s'effondrer sur son lit. Il regarda l'heure d'un mauvais œil, se demandant déjà comment il allait faire pour se réveiller pour leur entrainement.
Même si le sommeil l'appelait fortement, il tenta tout de même d'appeler Juliette. Il ne voulait pas la réveiller, mais le fait de ne l'avoir quasiment pas vu de la soirée lui pesait sur la conscience. Il n'avait même pas pu lui donner son cadeau de Noël. Il était déjà triste de ne pas pouvoir passer les fêtes de fin d'année avec elle, mais il allait en plus devoir être obligé de lui donner durant un moment tout à fait anodin.
Il n'aimait pas ça.
Comme il s'y attendait, la jeune fille ne lui répondit pas. Il abandonna au bout de cinq sonneries et posa son téléphone sur sa table de nuit.
A sa grande surprise, il ne tarda pas à s'endormir. Seulement, sa nuit ne fut pas de tout repos et il eut énormément de mal à se lever le lendemain matin.
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