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IV - Chapitre 38 : Une raison de vivre

Bonjour à tous et à toutes et à toustes ! 

Pour celles.eux qui l'ignorent, le calendrier des postes de la fin d'O&P est disponible sur mon mur ! On va essayer de la respecter un max, hein, j'ai l'impression d'avoir trouvé de bonnes dates ... A vos agendas ! 

Semaine très chargée pour ma part avec plein de truc d'adulte pas drôle à faire (les impôts, aller au garage et apprendre qu'il faut changer les 4 pneus de ma voiture ... WELL c'était sympa ça). Et puis pour couronner le tout les potes de mon copain qui débarquent ... Bon il se peut que j'ai vu le soleil se lever au moment de songer à aller me coucher. Il y a un côté vivifiant à voir le soleil se lever comme ça je trouve. Genre moment d'apaisement après une nuit agitée. 

ET IL N'Y PLUS DE FRANCAIS A ROLAND GARROS. ça ne devrait pas me décevoir ni me surprendre, mais quand même au 3e tour ça pique, ça aura été rapide cette année. Après j'en veux à personne, c'est beaucoup de revenants (Paire, Pouille qui a fait un parcours formidable ...) ou des jeunes (Van Assche, Parry ...). La seule sur qui je grimace c'est Caroline Garcia. Je sais pas 5e mondiale, on était en droit d'espérer un petit parcours? BREF rendez-vous l'année prochaine à eux, et je vais quand même continuer de suivre Carlitos Alcaraz, Tsitsipas, Jabeur et  Iga Swiatek (Oui c'est totalement mon côté polonais qui ressort dans mon amour pour Iga, que voulez-vous on se console comme on peut) 

BREF. Et vous votre semaine? Dites-moi tooout 

ATTENTION SCENE MUSICALE DANS LE CHAPITRE. Genre de chanson qui a fini par imprégner mon imaginaire aussi, celle-ci. Checkez les commentaires sur la fin de chapitre, c'est là que ça se passe ! (Mettre la musique à 2 minutes) 

Pour la citation, une chanson encore assez triste, mais que j'aime beaucoup. Anna' et moi estimons que Simon et Julian pourraient la chanter en duo. Bonne lecture ! 

***

Je peux seulement te dire...
Je peux seulement te dire ...

Qu'il m'a fallu la peur
Pour être rassuré,
Que j'ai connu la douleur
Avant d'être consolé !

Qu'il m'a fallu les pleurs
Pour ne plus rien cacher,
Que j'ai connu la rancœur
Bien avant d'être apaisé !

- Beau Malheur,
Emmanuel Moire

***

Chapitre 38 : Une raison de vivre.

Ce furent quelques jours incroyables, hors du temps et de l'espace. Mes mondes s'étaient fracassés puis fondus les uns dans les autres pour n'en faire qu'un. Car depuis les incendies de leurs maisons respectives, ma famille n'avait plus de toit. Les Bones avaient bien proposé leurs chambres, Simon la maison d'Oxford, mais après les retrouvailles, l'idée de se quitter nos déchiraient le cœur. Alors McGonagall consentit à donner momentanément à donner un toit à mes parents quelques jours, le temps que les émotions descendent. Je finis par comprendre qu'elle voulait surtout s'assurer de garder Simon sous la main, au moment où les travaux de Poudlard entraient dans leur phase la plus délicate. Le gros des décombres avait été nettoyés, les vitres ressoudées, certains murs rebâtis ... Maintenant, il fallait s'attaquer à la structure interne du château, son ossature intime. Toute la magie qui avait protégé l'école, courut ses vieilles pierres comme un système immunitaire. Julian et Simon étaient donc mis à contribution pour préparer l'entrelacement de sortilège. Cela leur prenait tellement de temps que j'avais à peine vu Simon dans la semaine écoulée, mais ce n'était pas grave. Mon second pilier était venu prendre le relai.

-J'en reviens pas que c'est toi qu'ils aient choisi pour marraine.

-Remets-toi, Ulysse.

-Après tout ce que j'ai fait pour toi, Mel !

Octavia poussa un profond soupir face à l'indignation de son fiancé alors que Melania levait les yeux au ciel, exaspérée. Nous étions dans la réserve de l'infirmerie où Melania faisait parler ses talents de potoniste pour aider Madame Pomfresh et les nombreux blessés encore entassés dans l'école. Ste-Mangouste était encore en pleine réorganisation après les dégâts causés par l'administration Mangemort. Melania avait pu installer la petite Alice sur une couverture alors qu'elle faisait tournoyer ses chaudrons. C'était un beau bébé, dus-je admettre en observant ma filleule gazouiller devant Ulysse. De fins cheveux couvraient son crâne, ses yeux en amande d'une couleur bleue qui promettaient de ressembler à ceux d'Alexandre pétillaient constamment, et un sourire fendait toujours son visage de poupin. Et puis, d'un coup d'un seul, elle piquait une formidable crise de colère ou de chagrin qui faisait hurler ma mère de rire, heureuse qu'Alexandre ait une fille qui lui fasse subir l'enfer.

-N'empêche, marmonna Ulysse, vexé.

-Arrête de râler et peut-être que si tu es sage, j'envisagerais de te faire parrain du deuxième, rétorqua Melania, exaspérée.

-Déjà un deuxième ? s'étonna Octavia, estomaquée.

Elle se tenait à distance respectable de l'enfant que son fiancé ne lâchait plus. Aussi surprenant que ça puisse paraître, Ulysse aimait contempler et jouer avec cette petite fille de sang-mêlé qui, d'après tous les observateurs, promettait de ressembler à Alexandre. Mais dès qu'il s'agissait de donner le biberon, ou changer la couche, il appelait Melania au secours, le nez froncé par le dégoût. Comme beaucoup de gens, ils étaient venus rejoindre des proches à Poudlard, proposer leur aide. Emily aussi avait fini par pointer le bout de son nez, avec son attirail de potion et un air paniqué sur le visage – et étrangement, Miles avait retrouvé le sourire. Je devais l'admettre, si retrouver Melania ne m'avait empli que de bonheur, être face à face avec Ulysse Selwyn me mettait nettement plus mal à l'aise. Il ressemblait à Nestor, avais-je brusquement réalisée, le souffle coupé. Les cheveux châtains, le regard gris, les traits aristocratiques intacts, eux ... Melania, la ressemblance était brouillée par sa féminité, sa gentillesse naturelle, son grand sourire. Ulysse, lui, gardait la froideur et les expressions faciales qui le rapprochaient de son frère aîné.

-Oh, non on va déjà se trouver une maison, s'occuper du petit monstre qu'on a déjà, et préparer notre mariage ... Et le vôtre d'ailleurs ? Ah je suis tellement contente qu'on nous ait débarrassé de Vous-Savez-Qui pour que je revienne à temps !

-Dans moins d'un mois, toujours dans la résidence des McLairds à côté de Glasgow, confirma Ulysse en laissant Alice refermer sa main sur son doigt. Vous allez rester longtemps à Poudlard ?

-Non, mes parents font leurs valises, là, entonnai-je, le cœur serré. Les Bones ont remis leur maison sur pied, ils vont y vivre tous jusqu'à ce que mes grands-parents retrouvent la leur ...

-Je viendrai aider, promit Melania en hochant la tête. C'est vraiment la priorité, ta grand-mère a besoin de retrouver de la stabilité ... et ton grand-père ...

Nous échangeâmes un petit regard, furtif, avant de nous tourner le dos. Miro s'était exilé, avait consulté tous les médicomages des Etats-Unis mais ça ne m'avait pas empêché durant la semaine écoulée de constater que son état avait empiré. Il avait maigri. Il était pâle. Il toussait toujours. Sa mauvaise santé affectait sa puissance magique : ses sorts étaient aléatoires, imprévisibles. Et face à cette force de la nature qui ployait face aux dégâts d'un maléfice vieux d'un an, ma poitrine se plombait, se rétractait sur mon cœur pour l'étouffer.

Il allait avoir raison de Miroslav Liszka. Un jour, ou l'autre. Quelque part, j'avais la sensation qu'il n'avait tenu jusque là que pour me contempler de nouveau.

Melania répartit le contenu de son chaudron dans des fioles à destination de l'infirmerie et j'en profitai pour échapper à l'ambiance étouffante, Octavia dans mon sillage. Cela avait été la première place remise en place, l'unique endroit dans le château qui ne sentait pas la poussière et le brûlé. Madame Pomfresh, infatigable, allait de lit en lit, accompagnée de Hannah Abbot qui lui servait d'assistante. Le spectacle donnait la nausée. Le professeur Sinistra, toujours immobilisée, brisée sur ses draps, une jeune fille du nom de Lavande Brown qui avait été attaquée par Fenrir Greyback sous forme humaine qui portait à présent des bandages autour du cou, toujours pâle, et Anthony Goldestein, qui alternait entre moment d'apathie et crise de frayeur. Ce fut au bout de son lit que je m'arrêtai, choquée d'y trouver quelqu'un que je n'avais plus vu depuis plusieurs mois.

-Caroline ?

Caroline Bones tourna ses yeux rougis vers moi, interloquée. Elle tenait la main d'Anthony dans la sienne, et cela semblait avoir de l'effet car au lieu de fixer le plafond, il la fixait elle. Elle épongea discrètement sa joue de sa manche et se détourna pudiquement.

-Oh, salut Victoria, j'avais oublié que tu étais là ... Ce sont des potions de force ?

-Euh ... oui ... tiens ...

Elle m'arracha presque le flacon que je lui tendais des mains pour l'ouvrir et verser le liquide orange entre les lèvres entrouvertes d'Anthony. Alors qu'il était à moitié vide, la main du jeune homme tressaillit et il finit par saisir de lui-même le flacon. Face à cette marque de vie, l'expression sur le visage de Caroline vacilla et elle sembla sur le point de fondre en larmes.

-C'est bien mon chéri ... Continue ... On va s'en sortir, tu verras ...

-Caroline ...

-Non, me coupa-t-elle en levant une main, la voix rauque. Non, Victoria, s'il te plait, fiche-moi la paix. Je ne veux pas de pitié, je ne veux même pas en discuter, d'accord ? Retourne avec mon frère et vivez votre bonheur.

-Leur bonheur ? répéta Octavia, suffoquée. Mais enfin ...

-Tout le monde était persuadé que c'était de la folie, murmura Caroline sans nous regarder. Une histoire qui allait se casser la figure, qu'on était bancal ... Je vais leur montrer, ce que c'est la vraie folie ... je vais m'occuper de lui ... on va survivre à ça ... Vous allez voir ...

La seule réaction d'Anthony fut de ciller, plusieurs fois, avant de laisser tomber sa main. Le reste du flacon se répandit sur sa couverture, tâcha ses vêtements et Caroline nettoya cela prestement d'un coup de baguette. L'image était triste à pleurer. Et comme j'avais trop pleuré ces derniers temps, je fis volte-face, et suivis Octavia dans le fond de l'infirmerie.

La guerre était finie. Mais Caroline non plus n'avait pas gagné.

-Quelle horreur, commenta Octavia avec un frisson. Tu es sûre que tu veux encore rester ici ? Victoria ... je sais bien que tu as un côté angélique, abnégation et tout ça, et que je ne sais toujours pas si je t'admire pour ça, ou si ça me donne envie de te filer une bonne claque. Mais ... je ne sais pas, il est temps que tu souffles, non ? Grand temps même ...

-Ecoute, c'est soit je reste ici, je nettoie, je déblaie, soit je rentre à Oxford et je me roule en boule dans mon lit, répliquai-je dans un souffle. Je ... je ne sais pas, je n'ai pas envie de me poser et de devoir me mettre à réfléchir à la suite ... ça ne ferait que me rappeler que, quoiqu'il arrive, ma vie a été brisée ...

-Oh, Victoria ...

Elle abandonna les fioles sur un lit vide avant de me prendre vertement par les épaules. Je crus qu'elle allait me secouer comme un prunier, mais elle se contenta de planter son regard dans le mien.

-N'importe quoi. Ta vie a été bousculée, voilà tout, mais tout est en train de rentrer dans l'ordre. Tu as un toit maintenant, avec Simon. Tes parents sont revenus, ton frère a un bébé. (Elle prit une profonde inspiration et ajouta dans un souffle tremblant : ) Voldemort n'est plus, d'accord ? Tu vas pouvoir reprendre ta vie là où elle s'était arrêtée ... on va pouvoir reprendre notre projet, notre livre ... il est toujours d'actualité ... plus que jamais ...

Je déglutis nerveusement pour faire passer la boule chauffée à blanc qui était venue se loger dans ma gorge. Peine perdue, elle ne fit que grossir de regret et d'angoisse face au regard débordant de confiance d'Octavia. Des mots finirent par en émerger, se glisser à travers pour venir buter contre mes lèvres :

-Je suis désolée ... je ne pourrais pas ... le livre, je ne pourrais pas ...

-Pardon ? murmura Octavia, sonnée. Mais il est prêt, Victoria ! Il est prêt, il est dans les coffres de Gringrotts ! On n'a plus rien à faire ... On a juste quelques ajustements à faire pour que le ton colle avec les mois qui viennent de s'écouler ... Les gens ont besoin d'un ouvrage pareil, qui remette tout ça à plat, qui ...

-Les gens, oui. Moi pas ...

Octavia battit des paupières, visiblement prise de court. Elle finit par me lâcher et me contempler longuement, abasourdie. 

-Tu veux nettoyer, brosser, bâtir des murs, mais reprendre un projet dans lequel tu t'es donnée corps et âme pendant des mois ... ?

La contradiction me fit frémir et pourtant ne bouleversa pas d'un iota mes résolutions. Ce livre, ça avait longtemps été la meilleure manière de me battre. Je n'en pouvais plus de me battre. Je m'étais assez battue. 

-Je suis épuisée ... Alors me replonger là-dedans, essayer de rendre tout ce que j'ai vécu logique et rationnel ... Dans toutes ses réflexions, tout reconnecter à ce qui s'est passé ... à ce qui m'est arrivée ... (Je fermai les yeux pour reprendre le contrôle de mon souffle qui déraillait). Ce n'était pas logique, Octavia. Il n'y a rien de rationnel dans ce qui s'est passé ... C'était ... juste de la haine. Une machine infernale ... S'il te plait ... ne me demande pas ça.

-Rationnel ne veut pas forcément dire bien, Victoria, m'opposa Octavia avec une douceur insoupçonnée. Crois-moi j'en sais quelque chose ...

-Mais même ça je ne suis pas prête à me le dire ... Si je trouve un sens, une raison ... mon Dieu, ça veut dire que tout ce qui m'est arrivée est normal ? Tu veux vraiment que j'écrive ça ? Maintenant ?

Ce furent les larmes qui inondèrent mes yeux sans couler qui eurent raison de la stupeur et de l'incompréhension d'Octavia. Elle referma résolument la bouche avant d'acquiescer plusieurs fois. La pilule parut amère à avaler, mais elle s'efforça de le faire avant de reprendre :

-Très bien. On va dire ... que je comprends. Tu as besoin de temps, c'est trop frai ... J'imagine. (Elle marqua une pause et sa voix se fit presque timide lorsqu'elle ajouta : ) mais tu viens à mon mariage, d'accord ?

-D'accord, cédai-je avec un faible sourire. De toute manière il est nettoyé de Mangemorts, maintenant, non ?

-Et même de la mère d'Ulysse. Elle est clouée chez elle en attendant son arrestation. De toute manière même si elle pouvait bouger, elle refuserait de venir. Elle est ... brisée. Elle pleure encore ...

Nestor. Mes poumons se gonflèrent, l'air s'infiltra dans les alvéoles, les nettoya des regrets, des remords et des souvenirs avant que mon souffle ne se relâche. Encore un poignard surgit de nulle part. J'avais beau de ne pas responsable de la chute de Nestor – pas directement – et surtout être certaine que c'était le destin qu'il voulait et méritait à la fois, le simple écho de la douleur qui devait terrasser sa mère face à cette perte me faisait vaciller. J'avais craint la réaction de Melania, lorsque je lui avais présenté la baguette de son frère jumeau tombé, mais elle n'avait pas versé une larme. Sans un mot, elle avait saisi la baguette en promettant de la rendre à ses parents, puis, calmement, elle était repartie aux côtés de mon frère et de sa fille. Melania venait de laisser le poison derrière elle – sa véritable vie, celle qu'elle s'était choisie, construite, celle pour laquelle elle s'était battue, l'attendait à présent.

-Tout va bien alors, articulai-je malgré mon trouble. Dis ... tu veux finir de distribuer les fioles ? Je vais ... je vais voir mes parents avant qu'ils ne s'en aillent ...

-Euh ... d'accord ...

Ce n'était pas dans la nature profonde d'Octavia McLairds d'agir pour les autres, et pourtant elle s'exécuta de mauvaise grâce pendant que je prenais la fuite. Des larmes me brûlaient les yeux, mais je parvins à les refouler. Le sol de Poudlard avait beau être déblayé, j'avais la sensation de voir des débris partout. J'étais même l'un d'entre eux. Si ce n'était pour voir cette école que j'aimais de tout mon cœur retrouver son lustre et sa gloire d'antan, je serais retournée à Oxford m'effondrer quelque part.

Avant d'effectivement retrouver mes parents, je décidai de me débarrasser de mon émotivité latente avec une balade dans le parc qui lui, avait retrouvé sa quiétude. Les murailles qui entouraient le château avaient été les premières rebâties, tous les décombres avaient été soit dégagés et entassés plus loin, soit reconstruits et sur les morceaux de pelouse carbonisés par les sorts ou arrachées par les géants, Chourave avait semé des graines qui avaient tout recouvert en deux heures de temps. C'était comme si rien ne s'était passé ... Tellement paisible que d'autres personnes avaient décidé de profiter de la langueur de mai. Avec un petit sourire, je découvris mes grands-parents, bras dessus, bras dessous sur les berges du lac. Plus sereine, je les rejoignis, rassurée d'entendre le rire de mon grand-père lorsqu'il m'aperçut descendre vers eux. Avec un fin sourire, Jaga s'arrima à mon bras pour faire face aux galets inégaux de la berge.

-Alors, c'est mieux que Durmstrang ? m'amusai-je en voyant le regard de mon grand-père se promener sur le lac.

-Niveau confort, même votre château en ruine est mieux. Par contre, niveau parc ... Ah, Perelko, si tu voyais le parc de Durmstrang ... à perte de vue, balayé par les aurores boréales l'hiver ...

-C'est si au nord que ça ?

-Mais qu'est-ce que tu crois, Perelko, que je vais te révéler les secrets de mon école ?

L'orgueil perça la nostalgie dans son œil et en éclipsa la brume qui s'y était installée. Malgré la vigueur que semblait lui apporter la promenade, ses épaules restaient voûtées et son pas soulevait les galets qui ricochaient les uns sur les autres avant de retourner à l'eau.

-Cela dit, à mes yeux, c'est Poudlard qui gagne, trancha Jaga d'un ton sans appel. Tu vas vu ce qu'ils ont fait, Miro ? Des gamins, des professeurs, se battre contre le mal au péril de leur vie pour défendre ses murs et leur idéal ?

-Non, c'est clair, admit-t-il, plus morose. Mes camarades auraient été plus enclin à ouvrir grand la porte et livrer ce Potter ... Moi en tête, j'en ai bien peur ...

Jaga le gratifia d'une tape sèche sur le bras. Même avec la belle lumière du soleil, ses prunelles restaient sombres, froide, dure, gravées dans l'ébène.

-Cet homme est mort, martela-t-elle de façon implacable. Tu te souviens de notre promesse ? Ce que nous étions en Pologne n'est plus. Rien ne sert de raviver les blessures en évoquant ces entités brisées et malheureuses.

La description me cueillit en plein ventre comme un coup de poing, violent, inattendu. Si je n'avais pas été accrochée au bras de Jaga, je me serais immobilisée au bord du lac, saisie. Et comme j'étais incapable de matérialiser mon mal-être, je fus forcée de le verbaliser :

-C'est comme ça que tu t'en es sortie ? En te répétant que ce qui t'étais arrivée, toutes les horreurs que tu avais subies ... étaient arrivées à quelqu'un d'autre ?

Je sentis plus que je ne vis le regard de mon grand-père se baisser sur moi. Je n'eus même pas besoin de me l'imaginer : j'avais vu cette expression dans les yeux de chacun des membres de ma famille, d'Alexandre lorsque je n'avais fait que sourire à l'une de ses pitreries, à ma mère qui m'observait sans relâche depuis son retour. Même mon père, habituellement plus discret, peu intrusif, avait fini par me prendre à part. « Victoria, qu'est-ce qui s'est passé ? ». Et comme unique réponse, je n'avais pu lui servir que des larmes.

-Non, Perelko, tu me confonds avec Simon, rectifia tranquillement Jaga, visiblement peu affectée par mon timbre éraillé. Je n'ai jamais prétendu m'être fondue dans la vie de quelqu'un d'autre ... Ce n'est pas quelque chose que j'ai décrété, un mensonge que je me suis répétée pour me protéger ... C'est quelque chose que j'ai ressenti. Je suis morte en sortant de ce camp. Avec mes parents, avec mon frère, avec Rachel ... Après ça, je n'ai jamais pu vivre. Jamais. J'ai essayé. Dieu sait que j'ai essayé par tous les moyens de vivre, ressentir, de remplir la coquille creuse que j'étais devenue ... en vain. Tout me semblait ... n'avoir aucun sens, aucune saveur. J'étais un fantôme au milieu des vivants ...

La fin de sa phrase s'était fondue dans un souffle et après cela elle scella ses lèvres en une mince ligne qui ne parut être qu'une ride de plus. Et dans ce silence pesant, Miro toussa, plusieurs fois, ployé sous l'assaut, avant de se redresser comme si de rien n'était, une main posée sur celle que Jaga serrait sur son bras. Les mots résonnèrent terriblement en moi, comme tous ceux que j'avais pu entendre de la bouche de ma grand-mère. Les phrases se faisaient échos, se lisaient avec des lunettes différentes, prenaient tous leurs sens dans mon esprit. Et au milieu de ce chaos, une lueur d'espoir, celle à laquelle je m'accrochais par miroir.

-Mais papy t'a sauvé ...

-Non, Perelko.

La réponse me prit tant au dépourvu que je contemplai ma grand-mère, les yeux écarquillés. Elle m'avait pourtant assuré le contraire. Assise à sa table de cuisine, les yeux humides pour la première fois que je la connaissais. Il m'a sauvé ... Ils étaient gravés au fer rouge en moi, ces quatre mots, la raison pour laquelle j'avais ravalé ma colère et étais passée par-delà la trahison. Miro était sur le chemin de la rédemption et son premier acte, fondateur, avait été de sauver ma grand-mère, de toutes les manières qu'on pouvait sauver quelqu'un. Pourtant, le regard de Jaga était imperturbable, débordant de certitude. Remarquant ma détresse, elle finit par s'arrêter et à me faire face, pour planter ses yeux dans les miens. Peut-être un jour avait-elle été plus grande que moi, mais la vieillesse et la vie la ployait tant qu'à présent ça n'avait plus aucune importance. Je n'avais jamais compris comment une personne si frêle pouvait être au fond de son âme un si solide chêne ...

J'avais espéré hériter de ça. De cette force. De cette fureur de vivre. C'était sans doute parce que j'avais cet exemple si admirable que je me sentais si honteuse de m'être laissée coulée.

-Ecoute-moi bien, Perelko, entonna-t-elle avec toujours ce calme solennel, surnaturel. Ce que j'ai dit à Simon il y a des années de cela, je vais te le dire maintenant. Il ne faut pas attendre des autres qu'ils nous sauvent. Tu ne peux pas vivre par quelqu'un, à travers quelqu'un, le laisser te trainer jusqu'à ce que l'un de vous deux meurent d'épuisement. Ce n'est pas possible. Ce n'est pas sain.

-Mais tu as dit ...

-Ta grand-mère exagère parfois mon rôle, mais c'est là les défauts de l'amour, plaisanta Miro en plantant un regard fier sur son épouse. Je n'ai fait que l'accompagner et la soutenir sur un chemin qu'elle s'est elle-même tracée ...

-Peut-être que je n'aurais pas eu la force de m'y aventurer sans toi, avoua Jaga avec lenteur. Sans doute pas, même... Il a été l'électro-choc, celui avec qui a commencé ma seconde vie ... Mais ce qui m'a vraiment permis de l'appréhender et de réellement l'épouser ...

-C'est l'Angleterre.

J'avais fini par faire le cheminement seule. Ce n'était pas en s'arrimant à Miro que Jaga avait fini par laisser le passé derrière elle pour se donner une seconde chance avec la vie. Non, elle avait justement appliqué l'expression à la lettre en quittant la Pologne et le pays de ses malheurs. Certainement parce que c'était impossible de vivre lorsque tout, chaque pierre, chaque personne, chaque mot chez elle lui rappelait qu'elle avait tout perdu. C'était impossible de vivre en croisant tous les jours les regards de tous ceux qui n'avaient rien fait alors qu'on massacrait sa famille.

Et alors, cela me suffoqua. Contempler ma grand-mère me suffoqua. Mettre ses mots sur mes maux me suffoqua.

Un début de panique dut se lire dans mon regard, car Jaga émit quelques petits bruits, des son apaisants avant d'effleurer ma joue de sa main. Ça n'avait jamais été une grand-mère tendre. Présente, apaisante, à l'humour certain, mais coupant mais jamais tendre. Pourtant là, son pouce balaya ma joue avec une douceur jamais atteinte.

-Oh, Perelko, chut ... Calme-toi, ma chérie ... Tu penses que je ne le voies pas ? Ma chérie, je l'ai lu dans tes yeux dès que je t'ai retrouvé ... ma Perelko ...

-Victoria, tu n'es pas nous, enchérit gravement Miro. Ça a été notre route, nos besoins, nos blessures à panser. Mais chaque route est singulière ... Peut-être que toi, c'est justement l'Angleterre qui t'aide à aller de l'avant. Tu t'es battue pour elle ... Quelle horreur, Marian me tuerait si elle savait qu'on t'a mis une telle chose en tête ...

-Mais je comprends, assurai-je, la gorge compressée. Je comprends, je comprends tout. J'ai ... littéralement l'impression de me prendre des poignards dans le cœur, tous les jours, dès que je baisse ma garde. Une personne, une parole, un objet ... Que j'ai un poids insurmontable sur les épaules qui m'empêche d'avancer, qui me cloue au sol ... je ... je ne peux plus vivre, d'accord ?

-Ne te dis jamais ça, souffla Miro, catastrophé. Perelko ... Tu as vingt ans. Le plus bel âge de la vie. Ça peut paraître si futile ce que je te dis ... mais c'est si vrai. Parce que tout est encore possible ...

-Ecoute ton grand-père, Victoria. Je sais à quel point tu es éprouvée, à quel point tu souffres, à quel point tu as l'impression que rien ni personne ne t'apaisera jamais ... A quel point c'est terrible de se dire qu'on va devoir vivre dans le même monde où tout ça s'est passé. Une seule chose a réellement réussi : le temps. Tu as toujours été d'une grande patience : laisse-toi le temps de guérir. Et pour le comment, la réponse finira par te trouver. Réfléchis-y tranquillement. Avec Simon. Parce que même s'il ne doit jamais te trainer, vous devez avancer main dans la main. Tu as besoin de force, Perelko. Et fort, ce garçon l'est pour toi.

-Enfin aussi fort qu'un moustique peut l'être.

Un rire étranglé jaillit de ma gorge et je le laissai aller contre les grands-parents qui m'enveloppèrent tous deux d'une étreinte. Brève, car Jaga était ce qu'elle était, les effusions l'indisposaient, mais lorsque j'en émergeai, les larmes avaient reflué, comme la panique qui avait brusquement gonflé dans ma poitrine. Miro contemplait à présent le lac de ses grands yeux pâles, songeur. Son regard s'était rivé sur l'île au loin qui renfermait le corps d'Albus Dumbledore.

-Je pense définitivement que c'est le bon endroit, mon amour.

-Je suis entièrement d'accord avec toi.

-Le bon endroit pour quoi ? interrogeai-je, perplexe.

Un sourire énigmatique s'étira sur les lèvres de Miro et de la poche de sa veste, il tira sa baguette. Il la posa à plat en travers de ses deux paumes, la caressa d'un regard voilé par la nostalgie. Puis, alors que je n'y attendais pas, alors que le moment semblait suspendu dans le temps, il brisa la baguette sur son genou.

-Papy ! m'écriai-je, interdite.

-Pourquoi j'ai accepté de prendre cette baguette, Perelko ? entonna-t-il tranquillement, avec les deux morceaux dans chaque main. Pour vous défendre. Ta mère, ta tante, ta grand-mère ... toi. Ça a été mon unique but. L'unique raison pour laquelle j'ai failli au serment que j'ai prononcé le jour où j'ai quitté la Pologne.

Avec le plus d'élan possible pour compenser son manque de vigueur, il jeta la première partie de la baguette dans le lac. Elle décrivit un gracieux arc de cercle avant de disparaître en un « plouf » sonore.

-De plus, je refuse d'être un sorcier médiocre, dont la puissance est terrassée par la maladie, poursuivit-t-il d'un ton plus rageur, et le second morceau alla rejoindre son jumeau. J'étais le prodige de Durmstrang, nom de nom. Ma mission sur terre en tant que sorcier est fini, Perelko. Laissez-moi vivre mes derniers jours comme un grand-père comblé ...

La fin de sa phrase vint s'étouffer dans une toux qui le plia en deux, puis le mit à genoux, ployé devant le lac. Kamila se serait gaussée du spectacle. Réellement, j'entendais son rire bruisser à mes oreilles. Le prodige de Durmstrang, assassin, âme broyée, que le destin avait fini par venir chercher au détour d'un serment brisé.

***

KINGSLEY SHACKLEBOLT CONFIRME MINISTRE PAR INTERIM PAR LE MANGEMAGOT

Les élections prévues pour le début de l'automne

Le vote ne faisait que peu de doute dans un Mangenmagot largement nettoyé de ses membres les plus problématiques – celles et ceux qui avaient rédigé et soutenu les lois Thinckesse destinées à instaurer le régime de terreur de Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom. Kingsley Shacklebolt, Auror depuis près de 20 ans acclamé pour des états de services impeccables et membre notoire de l'Ordre du phénix, leader même depuis la mort d'Albus Dumbledore, a à présent la lourde tâche de reconstruire notre Communauté après des mois dans la noirceur et la terreur.

Des familles se sont déchirées, d'autres ont été décimées et partout gronde la révolte [Concernant la manifestation du 23 mai menée sur le Chemin de Traverse par les nés-moldus récemment libéré d'Azkaban, voir page 4]. Apaiser la gronde semble être la priorité de notre Ministre par intérim. « Je jure de poursuivre tous les responsables des exactions du régime Thinckesse, sans exception », fut sa première déclaration. « Ce n'est qu'en rétablissant une justice qui a été déformée, niée et bafouée que nous pourrons assainir notre communauté et rétablir la confiance ». D'après nos informations, le Mangenmagot planche actuellement sur une série de loi qui concernerait l'interdiction de faire l'apologie de l'idéologie Mangemort, le versement d'une indemnité pour les prisonniers politiques et nés-moldus arbitrairement enfermés, mais surtout sur l'encadrement des activités des familles de Mangemort, qui ont largement participé à financer et soutenir le régime Thinckesse.

-Bon, c'est déjà ça, décrétai-je, à moitié rassurée.

Je tournai la page de La voix du chaudron. Tout le dossier concernait les arrestations qui se poursuivaient, l'éclaircissement sur les pratiques du régime avec témoignages et enquêtes poussées, le récit de Pénélope Deauclaire, rescapée d'Azkaban qui avait vu certains co-détenus être embrassés par des Détraqueurs. Je réprimai un frisson et fermai le journal avant de tomber sur une nouvelle information morbide. Noah aussi m'avait poussé à raconter mon histoire à Joséphine, voire même à lui si cela pouvait me mettre plus à l'aise. Mais comme l'idée de me replonger dans mon livre pour lui donner une coloration plus personnelle, y songer me donnait la nausée. J'avais encore mes douleurs à fleur de peau. Je n'avais pas assez de recul pour analyser, raconter, tout simplement revivre ces moments. Là-dessus, j'avais le soutien entier de Simon. Il avait vertement recadré Octavia la seconde fois qu'elle avait tenté de m'inciter à reprendre mes travaux. C'était également lors de ce moment que j'avais compris les réflexions dont Jaga m'avait fait part. J'avais choisi le chemin que je souhaitais prendre – et Simon m'y suivais sans hésiter.

C'était peu, mais rien que cette décision de me maintenir à l'écart était un début de reprise en main qui m'avait permis d'accepter facilement que mes parents quittent Poudlard. Leur maison était reconstruite, Alexandre et Melania rêvaient de pouvoir enfin trouver un foyer pour la petite Alice. Et moi, j'éprouvais le besoin de réfléchir. Loin de leurs regards inquiets, loin de mon frère et de ses espoirs d'avenir radieux, loin mes parents qui n'attendaient qu'une chose : que leur petite fille rentre à la maison.

Et pour ça, la reconstruction de Poudlard était une excuse toute trouvée.

-Vic' ?

Emily venait d'apparaître à l'embrassure de la chambre du dortoir que nous occupions depuis l'issue de la Bataille. C'était un chantier sans nom, tapissé de matelas et de draps jaunes et noirs qui donnaient de l'urticaire à Miles et Lee. Mais au moins, nous y étions bien, en sécurité, et c'était sans doute pour cela que j'étais venue m'y réfugiée sitôt la journée de travail achevée, avec pour seule compagnie mon hibou Archimède qui prenait le soleil au bord de la fenêtre.

-McGonagall te demande, ils ont besoin de toi, annonça-t-elle avec un petit sourire. Me demande pas pourquoi, je l'ai juste croisée pour qu'elle me dise « trouvez-moi Bennett » !

-Si McGonagall me demande, qui suis-je pour me dérober ...

Je lâchai le journal sur le coin de matelas qui m'était réservée et suivis ma meilleure amie hors du dortoir. Immédiatement, elle passa son bras sous le mien, comme du temps de Poudlard. Pour peu, nous étions deux jeunes écolières émergeant de leur Salle Commune pour se rendre en cours. Les couloirs restaurés du premier étage donnait corps à l'illusion. L'image était belle, rassurante et m'arracha même un sourire. Au contraire de celle qui m'attendait dans le Hall ... Plantée au milieu, une jeune fille discutait avec Flitwick avec des larmes dans les yeux. Je me figeai brusquement, la main crispée sur le bras d'Emily dont les lèvres se tordirent d'une grimace.

-Hé !

-Ellie ?

La jeune fille se retourna vivement lorsque ma voix fendit la quiétude du Hall. C'était bien elle, avec ses cheveux courts qui couvraient à peine ses oreilles et cette bague attachée à une chaine qu'elle tripotait nerveusement sur son sternum. Au creux de son coude reposait un bouquet de fleur. Autour d'elle, les lignes se brouillèrent, les couleurs s'estompèrent et se fondirent dans mes souvenirs pour rematérialiser la cellule qui nous avait renfermé. Ses yeux bruns s'écarquillèrent lorsqu'elle m'aperçut.

-Oh par Merlin ...

Délaissant Flitwick, elle s'élança vers moi sans hésiter. Je ne compris pas réellement ce qui se passa pas la suite : j'eus la sensation d'émerger que lorsqu'elle referma ses bras sur moi et que sa voix tonna à mes oreilles.

-Tu es vivante ! C'est incroyable, et Pénélope aussi, je l'ai croisée à Ste-Mangouste, ils l'ont réembauché ! Oh si on m'avait dit qu'on s'en sortira toutes les trois ...

-Ouais ... on l'a échappé belle.

Ellie essuya un petit rire et se détacha immédiatement, l'air brusquement consciente que cette étreinte était étrange compte tenu de nos manques de lien. Et pourtant, les heures d'angoisses dans la cellule sombre du Ministère où notre destin avait été suspendu n'était-il pas un lien plus fort que celui qu'auraient pu forger des conversations badines à Poudlard ... ? Ellie Wilson ne serait plus jamais un visage sans nom noyé dans les souvenirs ... Un peu gênée, elle désigna les fleurs qu'elle tenait toujours du menton.

-Je suis venue déposée ça quand j'ai su ... enfin ... (Elle battit des paupières, l'air brusquement émue). Je ne connaissais plus d'élèves ici, mais je connaissais un membre de l'Ordre ... Remus Lupin, tu vois ?

-Je vois, oui ..., soufflai-je, le cœur serré.

-C'était un ami de ma tante, je l'ai rencontré quand j'étais petite, poursuivit-t-elle, les yeux embués. J'ai encore la peluche loup qu'il m'avait offert pour un anniversaire ... Je me suis dit que j'allais rendre hommage ... Ma tante l'aurait voulu ... non ?

Elle avait semblé tant sûre d'elle au fond du Ministère ... c'était étrange de la voir me contempler ainsi avec de grands yeux, en quête d'approbation, de sens. Malheureusement, je n'avais aucune réponse à lui apporter. Le sens à la mort de Remus m'échappait toujours.

-Si tu en éprouves le besoin, c'est le principal, éludai-je finalement. Au fait ... attends, j'ai quelque chose ...

J'amorçai un mouvement pour revenir sur mes pas vers le dortoir avant de changer d'avis et de faire face de nouveau à une Ellie perplexe. D'un mouvement de baguette fluide, je parvins à exécuter un sortilège d'apparition impeccable, alors même que c'était le genre d'enchantement qui avaient été mon cauchemar lors de mes études. Mais je m'étais battue pour faire valoir mon identité de sorcière : j'étais à présent déterminée à démontrer l'étendue de ma magie. La bouche d'Ellie s'entrouvrit quand une étoffe de laine rouge surgit du néant. Sa main l'attrapa avant même que la gravité ne prenne le pas sur la magie.

-Mon écharpe ! Oh la la, tu l'as gardée tout ce temps ... ?

-Je voulais te la rendre ... encore merci ... (Je portai la main à ma tête, là où Pénélope l'avait enroulé pour faire cesser le saignement). Vraiment, merci ...

Je ne parvins pas à verbaliser tout ce que cette écharpe avait signifié pour moi, lorsque les flammes avaient envahi ma cellule, ou lorsque je me recouchais brisée après les assauts de Nestor, mais Ellie parut le lire dans mon regard. Elle n'esquissa pas le moindre geste, ne prononça pas le moindre mot et se contenta d'un sobre hochement de tête, la mine solennelle. L'échange fut brisé par la voix sèche et autoritaire de Minerva McGonagall venue des portes de chêne ouverte sur le parc.

-Bennett ! On vous attend !

-J'arrive professeur ! glapis-je précipitamment.

-Ah, la peur de McGonagall, souffla Ellie avec un pauvre sourire. Toujours vivace, n'est-ce pas ?

-Jusqu'à notre dernier souffle, confirma Emily derrière nous.

Je l'avais presque oubliée, mais il fallait dire qu'elle était restée remarquablement silencieuse – et perplexe, compris-je lorsque nous nous dirigeâmes côte à côte vers le parc. C'était l'incompréhension qui l'avait réduite au silence. Mon cœur se plomba l'espace d'une seconde quand je perçus le mur, transparent, mais présent, qui s'étaient abattu entre nous. La sensation passa vite lorsque je découvris McGonagall plantée sur le seuil, accompagnée de Julian, Simon, une jeune femme que je ne connaissais pas et qu'elle me présenta comme Prudence, ancienne élève de Poudlard et amie de Julian. Flitwick nous emboita le pas et vint se poster aux côtés de McGongall. Ce fut alors que je remarquai le balai qu'elle tenait entre ses longs doigts. Je le fixai, éberluée.

-Oh ça va être drôle, lâcha Emily avec un sourire dans la voix.

-Hilarant, renchérit Noah que je découvris assis dans l'herbe derrière Julian. Un spectacle digne d'un opéra – parce qu'on entendra quelqu'un crier.

-C'est bon, vous avez fini ? grinça Simon.

-Mon cher, ce n'est que le commencement. Miss Colibri, je veux un cri qu'on entend jusqu'à Londres.

-Hein ?

Mon éloquence arracha un rare sourire à Minerva McGonagall. D'un grand geste élégant, elle me présenta le balai.

-L'escalier qui mène à la tour d'Astronomie s'est écroulé et pour enfin parachever les sortilèges structurants de l'école et réparer les derniers dégâts, nous avons besoin de quelqu'un là-haut. Devinez qui nous avons choisi ...

-Oui, devine, marmonna Simon en lorgnant méchamment Julian. Bizarrement, ça ne devait pas être toi.

-J'ai le vertige.

-Il a bon dos, le vertige.

-Attendez, les coupai-je, et un lent sourire s'étira sur mes lèvres. Vous voulez que je monte Simon sur un balai en haut de la Tour d'Astronomie ?

Et au vu de la mine renfrognée de Simon et celle réjouie de Noah, j'avais visé dans le mille. L'idée fit monter en moi une sensation familière, un élan qui m'avait toujours poussé, qui m'avait toujours obligée à me dépasser. Oui, pour mettre Simon dans une situation délicate à l'en faire hurler, j'étais encore capable de vivre.

-C'est d'accord.

Simon me considéra longuement, stoïque, avant de secouer longuement la tête de façon désabusée.

-Evidemment. C'est pas maintenant que tu as une claire occasion d'enfin me tuer que tu vas dire « mais ça fait longtemps que j'ai pas volé », « je suis plus en forme » ...

-J'ai repris de la forme, sinon je n'aurais jamais pu soutenir un duel contre Bellatrix Lestrange plus de deux secondes, rétorquai-je sans me départir de mon sourire. En scelle, Bones !

Je saisis le balai des mains de Minerva McGonagall avant que l'idée ne me vienne de faire machine arrière. C'était un des vieux modèles de l'école, reconnus-je, vaguement blasée, moi qui étais habituée à la souplesse et la vitesse du Nimbus. Mais ce n'était pas le moment de me plaindre de la qualité : je n'avais pas plus volé depuis que j'avais dû fuir en catastrophe la maison des Bones. Et ce n'était que maintenant qu'un manche épousait ma paume que je réalisai le temps qui s'était écoulé, infini, insurmontable. Je n'avais jamais passé autant de temps sur terre.

-C'est une immense machination, râla Simon lorsque j'enjambai le balai. Je proteste.

-Non, vous montez sur ce balai et vous laissez Bennett vous monter là-haut, répliqua McGonagall d'un ton sec. Et à notre signal, vous pourrez nous faire l'étalage de vos grands talents qui m'ont obligé à vous botter le derrière pour que vous vous mettiez au travail lors de vos ASPIC.

-Juré je serais prudente et je ne te désarçonnerai pas.

-C'est ça ...

Sceptique, Simon n'en fut pas moins forcé à s'installer derrière moi sur le balai. Le sortilège de coussinage était usé, ce qui rendait l'assise inconfortable et le força, avant même le décollage, de passer un bras autour de ma taille. J'entendis le gloussement compulsif de Noah – et la vérité, c'était que je l'aurais bien accompagné si je n'avais pas été certaine que Simon quitterait la place à la première trace de moquerie.

-Allez, tu me fais confiance ? soufflai-je plutôt, amusée. Tu m'as assez vu voler, tu sais que je maîtrise.

-Je t'ai surtout entendu jurer toute ta vie de me tuer.

-Hum ? Il me semblait avoir été claire, Simon Sirius Bones. On a dépassé ça. Accroche-toi !

Et sans lui laisser le temps de ruminer davantage, je donnai un grand coup de pied dans le sol et le balai s'éleva en pente douce, acceptable. Ça n'empêcha pas Simon de glapir dès que ses pieds quittèrent la terre ferme et il s'accrocha à la taille des deux bras durant toute la durée de la montée. Un éclat de rire s'échappa de mes lèvres, littéralement arraché à ma personne.

-Arrête, je ne vais même pas vite, je suis toute douce !

Pour toute réponse, Simon gémit et plaqua son front contre mon épaule. Il n'avait été à l'aise sur un balai sans craindre les hauteurs : il n'aimait juste pas être balloté par les vents, risquer de valser d'une pichenette. Ce fut pour cela que je résistai de toutes mes forces à mon instinct de voltigeuse qui me poussait à exécuter des courbes, monter à pic pour que le vent s'engouffre dans mes boucles et fouette mon visage, et qu'une fois arrivée en haut de la tour je me posai docilement au lieu de tourner l'infini autour. Le toit avait été arraché et j'atterris au cœur du niveau éventré. En effet, l'escalier qui descendait dans le château s'était écroulé et coupait totalement la plateforme à ciel ouvert du reste du château. Je repoussai les mèches que le vent avait ébouriffé et plaqué contre mon front. Le sourire n'avait pas quitté mes lèvres du vol. J'avais eu une petite appréhension en m'élevant, vite effacée lorsque j'avais constaté que mes réflexes étaient loin d'être émoussés. J'avais volé avec fluidité, sans aucun accro, et surtout sans le moindre fantôme. Mes troubles et douleurs, pesantes, trop lourdes, étaient restées clouées au sol alors que l'essence même de ma personne prenait son envol.

-Alors, c'était si horrible ? lançai-je à Simon, taquine.

Il était descendu du balai sitôt le sol à portée d'orteil, les cheveux plus en épis que jamais, et m'adressa un long regard désabusé. Sa baguette était déjà apparue dans sa main gauche et tressautait contre sa cuisse. Derrière lui, les montagnes s'étendaient à perte de vue, éclairée par la lumière déclinante du jour.

-C'est un sortilège qui doit se jeter au crépuscule, les moments clefs d'une journée accroissent souvent la puissance des enchantements, expliqua-t-il plutôt. C'est vraiment une magie d'ampleur, on doit se coordonner à plusieurs à plein d'endroits stratégiques du château pour être efficace ...

-Et c'est toi qu'ils ont choisi pour le point culminant, fort bien. McGonagall n'était pas joueuse de Quidditch en son temps ?

-Tu as vu l'âge de McGonagall ?

-Pff !

Je lui flanquai un coup de hanche pour défendre la vénérable professeure. Loin de le décontenancer, la charge lui arracha un petit sourire. Profitant des quelques minutes qui le séparaient du coucher du soleil, il se rapprocha de moi, effleura mon bras d'une tendre caresse. Lorsqu'il se pencha vers moi et que son souffle s'abattit sur mes lèvres, le temps sembla se suspendre. Et le baiser fut incroyable. Hors du temps, libéré de toutes les tensions restées au sol, flottantes comme des spectres. Perchés sur les hauteurs de Poudlard, baignés dans les dernières lueurs du jour, j'eus la sensation qu'un souffle vital se répandait depuis la chaleur des lèvres de Simon et infiltrait chaque fibre de mon corps. Pour la première fois depuis longtemps, je l'embrassai par envie, par amour, et pas simplement par soif de contact ou d'être rassurée. Non, je l'embrassai parce que l'instant était magique, que le fait d'avoir volé avec lui avait été un moment de pure félicité, le premier depuis que nous étions arrivés à Poudlard. Parce qu'à son contact, toute ma peau s'était hérissée et mon être avait frémi. Même lorsque notre baiser se rompit, je le maintins contre moi, les mains lovées de chaque côté de son cou, nourrie par sa présence. Ses lèvres se promenèrent avec douceur sur mon front avant de d'y presser. Je fermai les yeux, rassurée, sûre de moi et de nous. Les forces qui m'avaient abandonné devant le corps d'Eugenia semblaient renaître de leurs cendres.

-Dis ..., entonnai-je avec prudence, dans un souffle à peine couvert par la brise. Tu as déjà pensé à partir un jour ?

-De Poudlard ? Oui, ça me semblait évident qu'on n'allait pas rester à Poudlard ad vitam aeternam.

-Non, Simon ... D'ici. De chez nous. De l'Angleterre.

Simon se figea contre moi, pris de court. Sa crispation me contamina et mon souffle se bloqua au creux de mes poumons, brûlant. Après quelques minutes qui me parurent interminables, il s'écarta quelque peu pour pouvoir me contempler. Un sourire tordu ourlait ses lèvres.

-J'en connais une qui a parlé à sa grand-mère ?

-Et ? rétorquai-je, un sourcil dressé.

-Et je pense que c'est mon rôle de te rappeler que malgré le fait que tu portes son prénom et que tu en es très fière, tu n'es pas ta grand-mère Victoria Anne Jadwiga Bennett.

Simon ne pouvait pas deviner. Il ne pouvait pas deviner que cette affirmation me faisait saigner plus qu'autre chose. Seigneur que j'avais souhaité être ma grand-mère au fond de ma cellule ... Je ravalai la boule chauffée à blanc qui était venue m'enserrer la gorge.

-Ecoute, ce n'est vraiment pas parce que ... je veux faire comme elle, que je veux coller à son histoire ou quelque chose comme ça ... (Je pris une profonde et tremblante inspiration). C'est ce que je ressens. Je n'ai pas envie ... tous les procès, les lois, les reconstructions ...

-Ça ne durera qu'un temps ...

-Des gens vont en sortir, Simon. Des gens qui m'ont fait du mal. Certains resteront même dehors. Je vais les croiser. Je vais croiser tous les gens qui sont restés tranquillement au chaud chez eux pendant que je me faisais torturer. Et je ne sais pas c'est juste ... terrible de continuer à vivre ici avec tout ce qui s'est passé. Pas juste ce qu'il m'est arrivé, tout. Les lois qui ont été votées, approuvées, des nés-moldus tués et raflés dans l'indifférence général ... Renata, Tonks, Eugenia ... Tout me les rappelle. Tout, absolument tout. J'ai l'impression que je ne pourrais plus jamais échapper à ce que j'ai subi, qu'un jour ou l'autre ...

-Ça va remonter et te prendre la gorge, compléta Simon avec douceur.

La totale compréhension dans sa voix me donna l'aplomb nécessaire pour affronter son regard. Il ne souriait plus, même pas un rictus. Evidemment qu'il savait. Evidemment que j'étais transparente pour lui. Evidemment qu'il reconnaissait les symptômes qui m'habitaient. Et étrangement, cela me fit sourire plus qu'autre chose.

-Ecoute, je ne sais rien, repris-je à mi-voix. Je n'ai plus aucune certitude ... juste toi. Tu es l'unique chose dont je suis sûre, Simon, alors je ne ferais rien sans toi ...

-Tu parles d'une pression, ricana-t-il d'un ton pince-sans-rire.

-Non, vraiment. Je ne veux pas te déraciner, pas maintenant que tu as enfin remis ta vie à l'endroit ...

Ma voix avait déraillé, de pair avec ma crainte d'entrainer Simon dans ma chute. Jaga m'avait prévenu : l'un ne devait pas traîner l'autre ... Et face à mon émotion soudaine, Simon se fendit d'un « hé » aspiré dans un souffle et déposa un nouveau baiser sur mon front dans l'espoir de m'apaiser.

-On ne va pas se précipiter. D'accord ? On va réfléchir à ça ensemble. J'entends ce que tu dis, je comprends. C'est horrible de devoir se reconstruire là où on a souffert ... Regarde-moi ...

Un ricanement amer lui déchira la gorge et je plantai sur lui un regard peiné. La première décision que Simon avait prise pour reprendre son histoire en main, c'était de quitter la maison de son enfance. Mais cela s'était toujours limité à cela. La belle et ancienne maison de Terre-en-Landes. Il lui suffisait de changer de murs pour ouvrir un nouveau chapitre. Alors que j'avais la sensation que les frontières de l'Angleterre étaient saillies d'épines propres à me terrasser. Je caressai les mèches folles à la base de sa nuque.

-Déménager à Oxford, c'est peut-être la meilleure décision que tu aies prise pour toi, murmurai-je, sincère. C'est un magnifique endroit ... je l'adore ...

-Mais ça ne te suffit pas ? comprit Simon avec une pointe d'amertume.

-Et qu'est-ce que je vais faire ? M'y enfermer comme ces dernières semaines ... ?

Jusqu'à ce que tu me retrouves en ombres et poussières parce que j'aurais dépéri. Le reste de la phrase resta coincée au fond de ma gorge, mais le trémolo qui vint agiter ma voix trahit bien assez mon désarroi. Un léger soupir s'échappa des lèvres de Simon et se répandit dans mes boucles. Cela me crispa plus qu'autre chose. J'eus la sensation de lui arracher une sorte d'acceptation.

-Vicky, tout ne va pas disparaître parce que tu vas changer d'air ..., m'opposa Simon dans un souffle. Les blessures, on les porte ... Elles nous suivent, partout où on va.

Je méditai quelques secondes cette dérangeante vérité qui m'apparaissait presque contre-intuitive. Si c'était vrai, pourquoi me sentais-je si légère sur cette tour, loin de ce sol imprégné de sang et de cendre ? J'ai volé. Ça avait littéralement changé mon regard sur le monde.

-Je ne fuis pas, affirmai-je avec toute la conviction dont j'étais capable. Ce n'est pas une pure fuite Victorienne, je te le jure ... Je ne suis plus cette fille-là. Je pense que c'est le contraire. Je suis trop consciente de tout. Tout ce que j'ai en moi ... tout ce qu'il y a dehors ... C'est juste ... Trop. Je ne peux pas gérer les deux à la fois. Je pense que ... j'ai besoin de me ressourcer, de me reconstruire avant de tous pouvoir les affronter.

Les mots m'échappaient et se percutaient sans trouver de réelle résonnance. Seigneur que c'était difficile de verbaliser ce qui m'entravait ... Alors je plantai mon regard dans celui de Simon dans l'espoir qu'il lise tout dans mes prunelles. Il ne se déroba pas. Il me contempla, profondément tiraillé. Mais moi je lus en lui. Je la lus, cette déchirure à l'idée de quitter un pays pour lequel on s'était si férocement battu. Mais surtout, je les vis, latentes, sournoises, ces nuances d'émeraudes dans l'eau claire de ses iris et les blessures et douleurs qu'elles trahissaient. Et les jouxtant presque immédiatement des éclats de résignation et de curiosité mêlés. Et si je venais de poser le doigt sur un besoin qu'il n'avait jamais su s'avouer ... ?

-Je te le dis, on va réfléchir ensemble, répéta-t-il d'un ton qui s'efforçait d'être délibératif. Je suppose que tu as une destination en tête ... ?

-Euh ... pas vraiment ...

-Pas vraiment ?

Stupéfait, Simon s'écarta juste assez pour me considérer avec un mélange d'amusement et d'incrédulité. Son visage si assombri par la réflexion une seconde avant s'était éclairé.

-Pas vraiment ? Vraiment ? Oh je t'en prie Vicky, ce n'est pas comme si tu n'avais jamais eu de belles opportunités à l'étranger ...

-La Bulgarie ? devinai-je avec une moue sceptique aux lèvres. Avec le nombre de fois où je lui ai mis un vent, Krum doit avoir jeté sa proposition aux oubliettes ...

-Oh, je ne suis pas certain qu'il soit du genre à lâcher. Je pense même qu'au fond, son insistance est moins due à tes talents de gardienne qu'au fait qu'il a un faible pour toi ...

Je pouffai à l'allégation surréaliste et me détachai vivement avec une exclamation faussement vexée, outrée.

-C'est comme ça que tu parles de mes talents, Simon Bones ? Tu penses vraiment qu'on ne peut vouloir d'une gardienne comme moi qu'en craquant sur moi ?

Simon ouvrit la bouche pour répondre, l'œil allumé par l'espièglerie, quand soudainement, des étincelles dorées éclairèrent le ciel paré d'indigo par le crépuscule. Certainement le signal qu'attendait Simon, et son attitude changea instantanément. L'insouciance et la réflexion s'envolèrent pour ne laisser qu'un masque de sérieux. Il fit tourner sa baguette entre ses longs doigts, visiblement impatient.

-Tu sais, il y a une seconde chose dont tu peux être certaine, lança-t-il, les yeux rivés sur la pluie d'étincelle qui se déversait dans le parc. C'est ce que je suis vraiment, vraiment, vraiment doué en magie.

-J'en reviens pas que tu me sortes ça alors que je peux te pousser dans le vide.

Simon daigna m'adresser un regard, avec cet insupportable sourire de coin qui m'avait un jour donné des envies de meurtres.

-Je pensais qu'on avait dépassé ça, Vicky ?

Et sans me laisser l'occasion de répondre, il me tourna le dos et leva sa baguette droit vers le ciel obscurci. Un éclair doré en jaillit, s'éleva si haut que son origine se perdit dans les rares nuages. Il crépitait, vibrait, et bientôt de nouveau traits de lumière virent s'y arrimer, attirer comme des aimants. Quatre d'abord, formant une croix parfaite et équilibrée dans le ciel. Puis les traits se détricotèrent comme des fils, se lièrent les uns aux autres. La lumière s'évapora, se diffusa et un dôme doré fut bientôt dessiné avec comme clef de voûte l'éclair initial de Simon. Il ne tremblait pas. Il souriait.

Emerveillée, j'observai ce dôme qui palpitait, dont la magie semblait s'étendre et s'imprégner dans les pierres comme dans la chair. Oui, pour la première fois je sentais la magie. Elle vibrait dans mes veines au diapason avec ce cœur invisible. Et quand il s'évanouit, s'évapora comme le dôme au-dessus de nos têtes, la sensation vivifiante était toujours présente. Pourtant, malgré les apparences, l'enchantement était loin d'être achevé : Simon fit exécuter à sa baguette un gracieux arc de cercle, des arabesques complexes, des dessins invisibles dans l'air. Cette fois pas d'étincelles, pas de lumières, mais sous mes pieds le château trembla. Inquiète, je jetai un coup d'œil derrière moi : les escaliers détruits de la tour d'astronomie retrouvaient leur lustre, marche par marche. Des pierres venues de nulle part s'empilaient les unes sur les autres et lorsque je portais mon regard sur l'immensité des toits du château, je compris que c'était tout Poudlard qui reconstruisait brique par brique son puzzle éparpillés. Tous les débris accumulés lévitaient dans les airs, tournoyaient autour du château telle une immense ceinture d'astéroïde pour retrouver sa bonne et due place dans cette immense fresque millénaire.

-D'accord, Bones, cédai-je, fascinée. Tu es brillant, je te l'accorde ...

Un bref sourire effleura les lèvres de Simon, mais ça ne troubla en rien sa concentration. Autour des tours qui se plantaient dans le ciel, les toits arrachés par les géants et de l'imposante structure, les pierres, tuiles et divers débris continuaient de virevolter avec la légèreté d'une plume. Je resserrai mes doigts sur le balai, rêvant d'être une plume parmi les autres ... L'envie gonfla, enfla, devint brûlante dans ma poitrine jusqu'à devenir une évidence. Lentement, poussée par cet élan qui s'était épris de moi jusqu'à en chasser toute prudence, je m'approchai du vide, le nez en l'air, les mains crispés sur le balai. Le vent faisait claquer mes vêtements, emportait mes mèches avec lui en un tourbillon qui ne faisait que m'appeler.

-Euh ... Vicky ? appela Simon, perplexe.

Je souris, sereine. Le vol avec Simon avait été aussi exaltant que frustrant ... j'aimais les courbes, les changements de direction. L'action, l'adrénaline. Eviter un cognard, stopper un souafle. Jouer au Quidditch était-il aussi dangereux que de voler parmi les décombres ?

Non, décrétai-je de façon totalement arbitraire.

Alors sans attendre que Simon ne me retienne, j'enfourchai le balai et donnai un grand coup de pied qui me donna une folle impulsion. Dès ma prime ascension, une nuée de tuile se retrouva sur mon chemin et je fus forcée de faire un tonneau pour l'éviter. Loin de m'effrayer, l'incident m'arracha un rire étouffé par les rafales et m'enhardit davantage : je tirai sur mon manche pour m'élever en piquet, de plus en plus haut, de plus en plus vite. Une pierre jaillit et ma trajectoire dévia un peu pour la laisser s'incruster dans un mur qui se rebâtissait du côté du département de Sortilège. Dans le ciel peint de nuances de mauve et de rose, les débris volants se détachaient à peine. Ma vue habituée à repérer les petits objets en mouvement, même à la périphérie de ma vision, les capta pourtant sans mal. Hilare, j'évitais tout, volant, tournoyant sur moi-même, piquant, repiquant, virevoltant. Essoufflée mais euphorique, j'émergeai de la ceinture de débris pour plonger vers les eaux sombres au loin.

A présent, le soleil s'était couché à l'horizon et le lac noir était réduit à une étendue sombre, lisse, calme sur laquelle on distinguait à peine l'île de Dumbledore. Taquine, je filai sous le pont qui enjambait un bras d'eau et qui ressemblait à une ruche en pleine ébullition : les éclats et morceaux arrachés par la bataille se ruaient vers lui tels des essaims d'abeille. Mes oreilles bourdonnaient encore de l'activité lorsque je repiquai vers le lac. Frôlant sa surface du bout des orteils, je lâchai mon manche pour étendre mes bras de part et d'autre de moi, les déployer comme les ailes que j'avais toujours rêvé d'avoir. Les ailes que la magie m'avait apporté. Et alors le cri que je retenais depuis des jours, des semaines, des mois, jaillit à la surface du monde, avalé par le vent et le fracas de Poudlard qui se reconduisait pierre par pierre et effaçait jusqu'à la dernière cicatrice de la bataille. Moi et ma vieille école hurlâmes à l'unisson dans l'immensité de la montagne écossaise.

Troisième chose dont j'étais certaine. J'aimais voler.

J'avais oublié que voler était la première chose qui m'avait réellement plu dans le fait d'être une sorcière. C'était une pratique qui s'était littéralement inscrite dans ma chair, dans mon histoire, dans mes habitudes. La façon la plus saine dont j'avais toujours pu expurger le pire de moi. Et là encore, je sentis toutes mes toxines, toutes mes douleurs et tous mes troubles affleurer à même ma peau, s'exfiltrer par tous mes pores comme par mon souffle. Lorsque mes mains retrouvèrent le manche, je riais aux éclats. Je pleurais, aussi. Je riais et je pleurais. Peut-être que c'était ça, vivre. Il avait fallu que je vole pour me le rappeler. 

***

Allez on finit sur une petite note d'espoir et de bonne humeur ! ça doit vous faire du bien après tous ces chapitres sombres? Votre verdict sur celui-ci? 

La dernière scène je l'ai vraiment imaginée lorsque j'ai écouté la musique pour le coup, elle était pas prévue à la base et au final je trouve que ça fait un cadre assez sympa ! (Et puis la scène du film est vraiment très stylée) 

J'ai peut-être conscience que je prends à contre-pied tous vos désirs dans ce chapitre. Notamment pour le livre, mais je pense aussi que vous ne pouvez pas en vouloir à Victoria ... C'est impossible d'avoir du recul quand on a tant souffert. La publication serait un nouveau combat à mener et Victoria a déjà beaucoup donné de sa personne ... Il faut lui laisser le temps de se reconstruire. 

D'où les réflexions de fin de chapitre ! J'avoue que je suis très curieuse d'avoir vos réactions ... Quel scénario a votre préférence? 

On se retrouve mardi pour la suite et un chapitre qui contient une scène que j'avais prévu depuis le début, qui a été ardemment réclamée ensuite par Anna' et ... qui n'est pas du tout apparue lorsque j'ai demandé vos attentes sur la fin, à ma grande surprise. Une idée? 

A mardi <3 

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