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III - Chapitre 6 : Fais un voeu

BONJOUR TOUT LE MONDE ! 

Déjà, avec un peu de retard, un très joyeux noël à tous et toutes ! J'espère que vous avez bien fêté cela, que la récolte a été bonne et que vous avez bien pu profiter de vos familles ! 

Pour rester dans cette ambiance de fête, je vous offre ce chapitre ! Bon, on est en plein été, mais on va fêter un anniversaire, ça compte non? Bonne lecture et passez un bon Nouvel An <3 

*** 

Devenir adulte, c'est admettre que la fuite est impossible, que les histoires sont courtes, sans importances mais qu'elles laissent des traces, pour des raisons qui nous échappent. Devenir adulte, c'est admettre qu'il n'existe pas d'ailleurs.

- Sacha Sperling

***  


Chapitre 6 : Fais un vœu.

Arnold ne m'avait pas fait de bosse, ni cette fois ni dans les jours suivants, mais à chaque entrainement je rentrais chez moi broyée, cassée, les muscles si endoloris que je me mouvais difficilement. J'avais à peine le temps de me remettre qu'un autre entrainement me heurtait de nouveau. Dalia m'avait laissé trois séances sous les feux des quatre poursuiveurs de l'équipe de réserve avant de déclarer qu'elle en avait assez vu. Généralement, je prolongeai chaque entrainement avec Eden, le seul espoir que j'étais certaine d'apprécier. Nous avions compris que c'était dans notre intérêt de s'entrainer ensemble en tant que Poursuiveur et Gardienne et nous étions parfois rejoint par Swan ou Arnold. En définitive, je m'entendais mieux avec les plus anciens qu'avec ceux de mon âge : Joana ne décrochait pas un mot, Cameron était arrogant et Eddie solitaire. Elle ne le disait pas, mais j'avais fini par comprendre que cette entente plaisait à Dalia : cela prouvait que j'étais déterminée à progresser, même si cela signifiait travailler plus que les autres – et souffrir plus que les autres.

Si mon état avait beaucoup amusé Simon dans un premier temps, il commençait, comme moi, à s'inquiéter de l'énergie qu'il me resterait après tout cela. Car si pendant deux semaines, je n'avais eu le Quidditch à songer, mon autre vie s'était de nouveau réveillée sous la forme d'une lettre de Fred Weasley m'invitant à déjeuner un dimanche dans sa boutique. L'annonce de cette première séance de cours par Remus Lupin m'avait fait pousser un long gémissement tant mes muscles souffraient encore du traitement infligé par Dalia.

-C'est parce que c'est le début. Il faut que tu prennes le rythme, après ça ira mieux non ?

Simon paraissait vouloir se convaincre lui-même et j'eus un vague sourire. Nous remontions Charing Cross Road en direction du Chaudron Baveur pour nous rendre chez les Weasley.

-Tu t'inquiètes pour moi Simon ?

-Avec tout ce qui t'arrive, ça t'étonne ? maugréa-t-il en haussant les épaules. Si ça continue comme ça, on va t'envoyer en mission de nuit et tu vas t'endormir ...

Il ouvrit la porte du pub sorcier et me la tint le temps que je m'y engouffre. Le barman nous lança un regard plein d'espoir mais je baissai les yeux, gênée et traversai la salle en claironnant un hypocrite « bonjour ». Simon ne paraissait pas en mener large non plus face à l'espace désertique et se dépêcha de tapoter les pierres stratégiques pour ouvrir le passage.

-Bon sang, quand je pense que le Chaudron Baveur était toujours bondé, avant ... c'est déprimant ... Enfin, (il renifla avec dépit) pas autant que ça.

L'arche venait de s'ouvrir sur le Chemin de Traverse. C'était pire que la fois où je l'avais visité avec George, deux semaines plus tôt. En plus de la glacerie de Fortarôme, c'était la boutique d'Ollivander qui était déserte, barrée par des planches. D'autres affiches avaient fait leur apparition, bloquant l'accès aux vitrines colorées qui égayaient d'ordinaire la rue commerçante. Et pire que tout, des vendeurs ambulants fleurissaient le long de la route pavée, écartant des pans de leurs capes pour vendre diverses amulettes et potions à la provenance douteuse. Certains avaient dressé derrière eux des étales éphémères et gardaient la baguette en main, prêt à faire disparaître leurs marchandises. Je gardai les yeux rivés sur le pavé et accélérai le pas. Dire que je les craignais plus qu'une potentielle attaque de Mangemort ...

-C'est sinistre au possible, marmonnai-je alors que la boutique des Weasley, véritable phare dans la ruelle désolée, était enfin en vue.

-Et ça ne va pas aller en s'arrangeant ... Avec l'enlèvement d'Ollivander ...

-Ça m'étonne que ta mère t'ait laissé sortir, d'ailleurs ... Le jour de ton anniversaire, en plus ...

Simon me lança un regard de coin et je vis ses joues rosir. Ce matin même, je m'étais arrangée pour entrer la première dans sa chambre, le réveiller à l'aide d'une casserole et une cuillère de bois et lui offrir Douze moyens infaillibles de séduire une sorcière. Les joues écarlates de Simon à la vue de l'ouvrage avaient été pour moi le plus plaisant des spectacles. Une juste vengeance au pull affreux qu'il m'avait offert pour mes dix-huit ans.

-On va faire un repas ce soir, en famille et puis tu as bien réussi à vendre ça. « On va fêter ça entre ami... ». Bon sang, ça va être merveilleux avec les Weasley ...

-On n'a pas dix-huit ans tous les jours, chantonnai-je joyeusement. Tu vas passer ton permis voiture du coup ?

Simon se frotta l'arrête du nez. Une légère rougeur persistait sur ses joues.

-Je ne sais pas, ça dépendra mon temps ... Et je ne suis pas sûr d'être aussi bon en voiture qu'en transplanage.

-Ça c'est une certitude ... Tu es peut-être un excellent sorcier, Bones, mais tu ne sais rien faire avec tes mains.

Simon leva les yeux au ciel et accéléra le pas. La boutique des Weasley était un véritable phare dans l'océan de désolation qu'était devenu le Chemin de Traverse : brillante, bruyante et dépourvue d'affiche ministérielles, elle était devenue le cœur qui pompait la vie dans l'avenue commerçante, et ce même dans la fermeture dominicale. Nous fîmes le tour pour entrer dans la petite cour intérieure où un escalier menait à l'appartement des jumeaux. L'un d'entre eux étant devant la porte, assis sur une chaise bancale installée sur le palier. Sa baguette dans la bouche et une sorte de tourne-vice dans la main, il manipulait un petit objet qui gigotait entre ses doigts. En nous sentant approcher, il leva les yeux sur nous et délaissa le tourne-vice pour sa baguette. Simon eut un vague sourire amusé.

-Tu sais que si on était des Mangemorts, tu serais déjà hors de course, Weasley ?

-C'est faux, je vous avais entendu. Joyeux anniversaire, Bones.

Il lui jeta l'objet qu'il venait de réparer et qui m'évoquait vaguement un robot. Le jumeau devant nous se leva et s'étira paresseusement. Il avait troqué son uniforme magenta pour une tenue de moldu avec un jean simple et une veste en peau de dragon de qualité vertes criardes qu'il s'était acheté cet été.

-Un leurre explosif, expliqua-t-il devant la mine perplexe de Simon. On vient de les mettre au point, avec Fred : quand tu les enclenches, il provoque une explosion quelques mètres plus loin. Parfait pour une diversion.

-Waho, commenta Simon, assez impressionné. Merci, c'est gentil.

-Comment vous pouvez n'avoir eu que trois BUSE chacun et faire des choses pareilles ? m'émerveillai-je en suivant George dans son appartement.

-Tu sais, Bennett, contrairement à toi on n'a jamais été intéressé par les études. Les révoltes de Gobelins ... Transformer un bureau en cochon ... On a sélectionné ce qui pourrait nous être utile et concentrer tous nos efforts sur ce qui importait.

-Et vu comment ça se passe, vous avez bien fait ...

L'appartement était vide, mais George nous mena au dernier étage, bas de plafond mais qui semblait lui couvrir l'ensemble de leur appartement et de la boutique, ce qui donnait un espace plus large. Lupin était déjà présent, les manches retroussées sur ses coudes et un sourire avenant alors qu'il parlait à Renata :

-... acceptée à l'observatoire britannique ? C'est d'accord, j'en parlerais à Fol Œil, peut-être que les missions nocturnes ne seront pas adaptées pour toi.

-Je me débrouillerais, affirma Renata d'un ton buté. Confiez-moi les missions que vous aurez besoins ...

Le sourire de Lupin se teinta de nostalgie et d'un certain dépit.

-Nous verrons en temps opportuns ... Ah ! (Son regard venait de nous effleurer et étincela). Vous voilà ! On va pouvoir commencer ... Où est Fred ?

Fred s'était visiblement perdu dans les stocks de la boutique et arriva dix minutes en retard. Mais Lupin semblait avoir gardé la bienveillance qui l'avait caractérisé en tant que professeur – bienveillance pour laquelle il était devenu l'un de mes professeurs préférés. Il sortit sa baguette magique de sa poche et nous observa, aligné devant lui et nous invita à nous asseoir à même le sol. Nous formâmes un cercle au sein duquel il s'inséra pour planter sur nous son regard ambré. Je me trémoussai, embarrassé. Il avait raison, d'une certaine manière c'était comme revenir à Poudlard.

-Fol Œil m'a demandé de vous former sommairement, nous rappela-t-il de sa voix douce. Comme vous le savez, j'ai certaine compétence comme professeur et en Défense Contre les Forces du Mal, mais aussi une certaine expérience au sein de l'Ordre puisque j'y suis entré, comme vous, à la sortie de Poudlard.

Son visage prématurément ridé s'assombrit davantage et son regard se perdit au loin.

-Je suppose que vous savez à quoi vous vous exposez. Je ne suis pas là pour refaire le grand discours qu'a pu vous faire Dumbledore ou Fol Œil. Sachez simplement que si un jour, vous sentez votre force décliner, votre détermination fléchir et que vous avez besoin d'une oreille attentive, je serais ravie d'être celle-là. Vous allez également devoir compter les uns sur les autres. Vous avez le même âge et vous allez subir la même brutale transition. N'hésitez pas à communiquer, à faire part de vos impressions, même si c'est dur, même si elles sont mauvaises. Ne vous isolez pas. Ne pensez pas que vous êtes seuls.

Mon regard glissa ostensiblement vers la chaussure de Simon que j'observai sur le plancher. Me concernant – et c'était bien l'unique certitude que j'avais en ce moment – j'étais certaine de pas être seule, d'avoir quelqu'un sur qui m'appuyer pour ce que Lupin appelait « la brutale transition ». La chaussure battit nerveusement et Lupin poursuivit :

-Vous ne serez pas envoyé en mission tout de suite. Je sais que Maugrey a eu des entretiens avec nous pour cerner vos forces et vos faiblesses – bref, voir comment vous pouvez être utilisé. C'est comme ça que Victoria a pu appréhender ses nouvelles missions à Cracovie, mais Victoria était une exception. Avant d'être envoyé, il faut qu'on s'assure que vous êtes capables de tenir un duel et que vous êtes assez forts pour soutenir l'Ordre.

-C'est-à-dire ? s'enquit Renata, perplexe.

-Psychologiquement parlant. C'est un engagement et je suis sûr que vous ne l'avez pas pris à la légère, mais on veut être sûr que vous avez les épaules pour ce qui vous attend. Que vous ne vous défilerez pas au premier danger ou que ... vous ne foncerez pas tête baissée, ce qui est tout aussi dangereux.

-Enfin Remus, s'insurgea Fred en l'appelant à ma plus grande surprise par son prénom. Tu nous as eu élève, tu as presque vécu avec nous l'année dernière ...

-Et si j'en crois mes observations de professeur, Victoria avait un manque cruel de confiance en elle, Renata avait une tendance à l'isolement et au secret, Simon un brin trop de confiance en son agilité et vous êtes des têtes brûlées tous les deux.

-C'était il y a trois ans ! rappela Simon, indigné. Vous n'allez pas nous juger sur notre comportement d'il y a trois ans ?

-Bien sûr que non, Simon. Je sais parfaitement que vous avez tous évolué et vous l'avez tous prouvé. Mais il reste des traces de ce que j'ai énoncé et si j'étais honnête, là tout de suite je ne donnerais le feu vert qu'à l'un d'entre vous et vous seriez surpris du nom.

Simon se fendit d'un reniflement dubitatif et les jumeaux échangèrent un regard intrigué. Renata resta elle impassible alors que Lupin frappait énergiquement dans ses mains.

-Mais nous sommes là pour vous entrainer, alors allons-y ! Vous avez tous eu de bonnes notes en Défense contre les Forces du Mal et pour certains vous avez même un patronus corporel. Comme votre principal danger commun sera un duel contre des Mangemorts, c'est à ça qu'on va concentrer nos premières leçons. Je vais faire des équipes et voir ce que vous valez. Fred, tu vas te battre contre Renata, et George contre Victoria. Je me réserve Simon. Bien évidemment, nous tournerons ... Les garçons, vous avez préparé la trousse médicale ?

Fred désigna un coffre de bois derrière lui et Lupin eut un hochement de tête satisfait. Simon n'était pas particulièrement serein à l'idée d'affronter notre ancien professeur, qui devait certainement être un combattant aguerri, mais je ne pus voir ce qu'il valait parce que George n'attendit pas que je sois prête pour attaquer. Je parais in extremis son sortilège de désarmement.

-Hé !

-Il fallait te tenir prête, Bennett. Fais attention, j'ai eu un bon prof l'année dernière. Stupéfix !

Mais là encore je parais et répondis silencieusement d'un sortilège de désarmement qui fit sauter sa baguette de ses mains. Elle atterrit sur la tête de son frère jumeau qui, surpris, ne put s'écarter du sortilège de saucisson de Renata. Il tomba sur le dos avec un bruit sourd et j'échangeai un regard avec la jeune fille. Elle haussa les épaules et annula le sortilège. Mes autres duels avec George furent similaires au premier : il éprouvait visiblement des grandes difficultés à ne pas prononcer ses formules et j'étais plus agile que lui. Les sorts que je n'évitais pas magiquement, je le faisais physiquement malgré mes douleurs musculaires et George, dans son impatience, me laissait toujours une ouverture pour le désarmer.

-Bon sang, même sans poêle à frire elle est coriace, celle-là, râla-t-il alors que je venais de rattraper une nouvelle fois sa baguette.

-Je pense que ce serait mieux si tu ne prononçais pas tes formules ... Hé !

Ma baguette venait de me sauter des mains et je me tournai vivement pour voir Fred me lorgner avec un sourire. Derrière lui, Renata se relevait en se massant les côtes.

-A deux contre un elle fait moins la maline ... Aïe !

Je venais de me jeter sur lui et lui arrachai vivement ma baguette des mains. Déséquilibré, il laissa échapper la sienne et Renata l'attira à elle d'un sort avant de se fendre d'un sourire. Les jumeaux, sonnés et éberlué, nous fixèrent sans comprendre.

-L'arrogance des sorciers ... Croire que le combat ne se résume que magiquement ...

-Vous avez été Batteurs, je suis sûre que vous avez une sacrée droite, poursuivis-je en leur jetant leurs baguettes. N'oublie pas de vous servir de vos poings quand la magie montre ses limites.

-Tu parles d'expérience, Bennett, s'amusa George, qui ne semblait pas nous en vouloir. Le coup de poêle, c'était magistrale, la tête de Fred en sonne toujours.

-Maintenant, en garde, mesdemoiselles ! nous prévint Fred en se fendant.

Je parai le sort et Renata attaqua d'un éclair de stupéfixion. S'affronter à deux contre deux était tout aussi formateur : c'était deux duels à géométrie variable. Les jumeaux se connaissaient par cœur et n'avaient pas besoin de parler pour communiquer quand Renata et moi nous marchions parfois sur les pattes. Lorsque je la sentais en difficulté, je me détournai de George pour jeter un sort à Fred, souplesse qui nous forçait à être attentif à notre environnement et pas seulement concentré sur notre adversaire direct. Le combat fut plus ardu et il se solda par notre défaite : la cohésion et l'entente des jumeaux était trop forte.

-Excellent !

Lupin frappa dans ses mains, un immense sourire aux lèvres. Avec amusement, je remarquai que Simon se massait les côtes derrière lui en grimaçant. Bien qu'excellent sorcier, il n'avait pas la vivacité et la souplesse demandée pour la magie martiale.

-Vous avez eu raison, c'était un très bon exercice ce que vous venez de faire, nous approuva Lupin. Parfois vous serez seul, mais parfois vous serez plusieurs face à des Mangemorts et il faut apprendre à ne pas combattre que pour soi ... (Il consulta sa montre) Bien, je pense qu'on a encore le temps pour une nouvelle série ... Essayez de faire des un contre trois pour déséquilibrer les forces, analysez la situation pour savoir quel sortilège utilisé à quel moment ... Ne combattez pas dans le vide, quand on est en infériorité numérique il faut être méthodique. Pour ça il faut jauger vos adversaires ... Et Victoria et Renata ont raison, évidemment qu'un combat ne se résume pas à la magie – sinon monsieur Bones serait meilleur que cela ...

Simon grimaça à la pique et je réprimai un méchant sourire. Ça ne pouvait que lui faire un peu de bien que de se faire un peu battre par Lupin ...

La séance dura encore une bonne heure, une bonne heure durant laquelle Fred, George, Renata et moi tournions entre différents types de duel jusqu'à être exténué et observé le dernier entre Simon et Lupin.

C'était un combat étrange à voir. Lupin était étrangement souple et dynamique pour un professeur qui semblait passé la majorité de son temps dans les livres. La concentration vidait son visage prématurément ridé de toute expression. Et la concentration devait être de mise parce que malgré ton immobilité, Simon était coriace : chaque sortilège qu'il lançait était assez puissant pour que Lupin en soit ébranlé, voire peine à les parer. Il le faisait souvent d'un bond ou in extremis et en était parfois réduit à parer chaque attaque de Simon. Puis celui-ci retombait dans ses travers et ne parvenait pas à s'écarter assez tôt pour éviter un sortilège de désarmement qui rendait souvent Lupin vainqueur.

-C'est dommage, murmura notre ancien professeur avant de dire à voix haute et intelligible : Allez, la torture s'arrête. Allons boire un verre. C'est votre anniversaire Simon non ?

Le visage de Simon, déjà marqué, se rembrunit encore et hocha la tête. Malgré la mine peu engageante, le sourire de Lupin s'agrandit et il se tourna vers les jumeaux.

-Les garçons, vous avez un whisky Pur-Feu ? Ou une bonne bouteille d'hydromel ?

La pause dans le salon des jumeaux fit le plus grand bien : je vidais au moins deux grands verres d'eau avant de m'affaler dans le canapé, meurtrie et prête à m'endormir alors que Lupin portait un toast aux dix-huit ans de Simon. Une main me secoua l'épaule.

-Ça va Victoria ?

J'ouvris péniblement un œil pour voir Renata, deux verres de whisky Pur-Feu à la main. Je me redressai pour prendre le mien avec un sourire que j'espérais rassurant.

-Oui, ça va. Je sors de deux semaines intensives d'entrainement de Quidditch, je suis un peu cassée ...

-Un peu cassée et tu arrives à bondir partout comme ça ? Qu'est-ce que ce sera quand tu seras en forme ...

-Je pense qu'il faut que j'apprenne à économiser mon énergie, plutôt ...

Mon regard vagabonda sur Simon et les jumeaux qui écoutaient religieusement Lupin parler de ses premières missions pour l'Ordre. Renata s'assit à côté de moi, les genoux resserrés et les mains crispés sur son verre. Elle n'avait jamais été à l'aise en société. Son silence me mit mal à l'aise et en un éclair, je revis la photo de Cédric tomber de sa poche, comme un cruel aveu du destin. Plutôt que de m'attarder sur ce fait que je ne m'expliquais toujours pas, je préférai demander :

-Mathilda va bien ?

Visiblement, ce n'était pas la question à poser car les lèvres de Renata se pincèrent encore plus. Elle plongea son regard dans le liquide ambré.

-Elle avait trouvé une place d'apothicaire dans une boutique du Chemin de Traverse mais avec ce qui se passe le propriétaire a pris peur et pense à fermer boutique ... Alors elle cherche dans tous les villages sorciers ... (Elle se redressa et me fixa à travers ses lunettes rondes). Tu n'habites pas dans un village sorcier, toi ? Comme il y a les Bones ...

-En fait, il n'y a que les Bones et moi, ça fait longtemps qu'on a plus de boutique sorcière à Terre-en-Landes ... Et Pré-au-Lard ?

Renata redressa ses lunettes et un sourire de dépit déforma ses lèvres.

-En Ecosse ? Non, elle ne veut pas être trop loin d'Erwin. Ils comptent prendre un appartement ensemble, tu comprends ?

-Ah ...

Comme Roger et Emily, qui avaient passé l'été à déménager. Comme Miles me l'avait proposé ... Miles, Seigneur. Il y avait une éternité que je n'avais pas songé à mon ex-petit-ami, que j'avais vu pour la dernière fois aux diligences qui nous amenaient au Poudlard Express. Je ne savais rien de la suite – avait-il trouvé une place au Ministère ? Avait-il pris son indépendance lui aussi, quittant une famille bancale dans laquelle il ne s'épanouissait pas ? Et – mon cœur manqua un battement à l'idée – avait-il retrouvé une petite-amie, une fille qui l'aimerait mieux que je ne l'avais fait ? J'ignorais que penser à l'idée, aussi préférai-je prendre une gorgée de whisky Pur-Feu et m'intéresser à ce que Lupin disait :

-... Et je vous jure, cette mission avec James Potter, j'ai cru qu'on allait tous y passer, je n'ose imaginer ce qui se serait passé si Maugrey en personne n'était pas intervenu ... Mais j'étais souvent cantonné à des choses plus administratives, j'ai beaucoup travaillé avec Edgar Bones, à un moment ...

Il leva son verre à l'adresse de Simon, dont le léger sourire s'était figé à l'évocation de son père. Lupin embraya rapidement d'un ton badin, l'air de rien, pourtant j'avais l'intuition que l'allusion n'était pas innocente. J'attendis qu'il vide son verre et qu'il s'éloigne pour le remplir pour le suivre discrètement, loin des oreilles de Simon.

-Vous aussi vous savez ?

Lupin m'adressa un regard surpris tout en remplissant son verre.

-Je sais quoi, Victoria ?

Vaguement, je désignai Simon du menton. Lupin eut la décence de ne pas tourner le regard vers lui et un triste sourire s'étendit sur ses lèvres. Il fit tourner son whisky dans son verre, l'air vaguement mélancolique.

-Ah. Oui, je sais. Je l'ai dit, j'ai travaillé avec Edgar pendant quelques semaines ... Il était très secret sur sa vie de famille et on le comprend avec le risque qu'il courrait. Mais le hasard a fait que j'étais là lorsque sa secrétaire a débarqué dans son bureau pour lui annoncer que sa femme accouchait à Ste Mangouste. Je venais juste de sortir de Poudlard et l'un des membres les plus influent de l'Ordre et du Ministère se trouvait trop stressé pour transplaner et me demandait de le transporter près de sa femme ! Alors crois-moi, j'ai retenu le nom du bébé quand il me l'a dit ...

-Je vois ...

J'ignorais si j'étais attendrie ou vexée. J'en avais assez de découvrir après les autres l'identité de Simon, de lui arracher cette partie de lui qu'il m'avait toujours caché et qu'il gardait toujours pudiquement en lui. Lupin dut sentir mon malaise car son sourire se fit plus doux.

-Dumbledore m'a prévenu lorsque je suis devenu professeur qu'il ne fallait surtout pas évoquer Edgar devant Simon, qu'il avait été grandement traumatisé et que ses tuteurs souhaitaient qu'on le laisse tranquille. Mais il m'a aussi dit cet été qu'à présent je pouvais tenter ... des petites évocations, disons. Que quelqu'un avait réussi à lui faire accepter qui il était et ... qu'il fallait aider cette personne pour qu'elle n'ait pas à porter le poids du monde sur ses épaules.

J'eus un pauvre sourire en comprenant qu'il parlait de moi. Lupin posa une main sur mon épaule et je sursautai. J'avais encore en lui l'image du professeur et c'était difficile de me dire que cette barrière physique qui existait entre élève et enseignant était à présent abolie.

-Elle sera là ta difficulté, Victoria. Tu ne peux pas porter le poids du monde sur tes épaules. Il faut que tu acceptes que parfois, tu ne peux rien faire, garder ton énergie pour les choses qui comptent et qui le méritent. C'est ce qui s'est passé dans les duels, j'ai essayé de regarder un peu : en voulant être partout, tu as laissé trop d'énergie et perdu en lucidité. Ça vaut aussi pour tous les aspects de ta vie et particulièrement pour l'Ordre. Tu comprends ?

-Oui ... Oui, je vois. Je vais essayer.

La main de Lupin serra mon épaule.

-Je suis content de te retrouver ici, Victoria. Tu as bien changé depuis ta cinquième année ... Oh, vous avez tous changé, bien sûr, mais chez toi, je trouve que c'est plus flagrant.

Je ne savais pas que répondre à cela. A dire vrai, je n'arrivais à y voir un compliment quand je considérais les épreuves que j'avais dû traverser pour en arriver là. Lupin devait aussi y songer parce que son sourire s'était fait incertain. J'avais l'impression de lire le nom de Cédric dans ses prunelles ambrées. Alors qu'un silence lourd s'installait entre nous, il me tapota l'épaule avec douceur et retourna discuter avec les jumeaux, me laissant troublée près du buffet.

***

Le dîner d'anniversaire de Simon fut sans doute le premier moment de réelle joie dans la famille Bones depuis la mort d'Amelia un mois plus tôt. Rose était enfin souriante et détendue et s'était mis en quatre pour fêter les dix-huit ans de celui qui était devenu son fils, George avait abandonné l'espace d'une soirée son combat contre la loi sur la sécurité et Caroline s'était jointe à nous pour la première fois de l'été.

-J'ai eu une promotion, m'annonça-t-elle fièrement alors que vous faisions la vaisselle. Je suis au cabinet d'une membre du Magenmagot, Myriam Goldstein. C'est une femme brillante, j'apprends tellement auprès d'elle ...

-C'est cool, commentai-je distraitement, les mains dans l'eau. Tu me passes les assiettes ?

-C'est fou ce que t'intéresse ce que je dis ... Mais je ne t'en veux pas, c'est vrai que mon travail doit te paraître loin et abstrait ... Comment ça se passe chez les Tornades, toi ? Peut-être que je viendrais voir ton premier match !

Elle rejeta ses cheveux bruns derrière son épaule et s'assit avec dignité sur la table de la cuisine. Elle était sans doute la beauté de la famille, le portrait craché de sa mère avec ses formes généreuse, son visage en forme de cœur et ses yeux bleus et rieurs. Un si joli minois, ça devait en attirer des prétendants au Ministère, songeai-je alors qu'elle me gratifiait d'un sourire éclatant.

-Tu as bronzé en Pologne ? Dommage, c'est gâché par les cheveux ! Le violet, sans doute une idée de Simon ? Je vous jure, vous deux ... En tout cas tu as bonne mine, je trouve ! Contrairement à l'autre rabat-joie dans la salle à manger ... (Elle poussa un soupir). Quand je pense à l'énergie que ma mère a dépensée pour lui offrir cette fête ...

Je ne pouvais rien lui rétorquer : Simon était d'humeur exécrable depuis le début de la journée. J'avais cru dans un premier temps qu'il était agacé contre moi et mon cadeau. Puis en rentrant, je l'avais pensé blesser dans son orgueil suites aux duels perdus avec Lupin. Mais ça me semblait léger face à son air maussade qui persistait. Il avait à peine décroché un mot depuis le début du dîner. Rose entra justement dans la cuisine et promena son regard sur les meubles.

-Caroline, tu n'étais pas censée sortir le gâteau ?

-Oups !

La jeune femme sauta souplement de la table et s'en fut vers le cellier, me laissant seule avec sa mère. Rose leva sa baguette et les bougies qui étaient sur une boite dans le buffet s'envolèrent, s'embrasèrent et flottèrent dans les airs, prêtes à se planter dans le gâteau. Elle les compta à voix basse avant de les contempler avec mélancolie. Je les considérai aussi et l'image d'autres bougies dans un autre endroit vint se superposer dans mon esprit.

-Ça ressemble à Poudlard, fis-je remarquer avec un petit sourire. Les bougies qui flottent toutes seules ...

-Quoi ? Oh, oui ... Oui, tu as raison, ça donne un air de Poudlard ... Espérons que ça plaira à Simon ...

Son beau visage, pourtant détendu et souriant depuis le début du dîner, s'assombrit quelque peu. Visiblement, la mauvaise humeur de son fils la contrariait et je ne sus que penser du regard qu'elle coula sur moi. Cependant, le sourire bienveillant qu'elle me servit éclipsa le reste.

-Ça fait un moment qu'on ne s'est pas vue, toi et moi ... Je suis désolée, en ce moment je suis tellement distraite ...

-Je comprends, ne vous en faites pas. Ce n'est pas une période facile ...

-Mais elle ne l'est pour personne ... Comment vas-tu ?

La sincère inquiétude de Rose me toucha, comme toujours. Chaque fois qu'elle prenait ces airs maternels avec moi, je me souvenais de la lettre qu'elle avait rédigé pour mes dix-sept ans où elle s'était posée en marraine pour moi. Mon regard effleura la montre qu'ils m'avaient offert pour l'occasion et que j'avais posé sur un coin de l'évier pendant ma tâche.

-Je ne sais pas. Je veux dire, tout est un peu chamboulé, j'ai du mal à prendre mon rythme et puis avec ce qui se passe ... J'évite de lire les journaux pour ne pas trop désespérer ...

Mais ça ne suffisait pas : je savais qu'une nouvelle famille de moldu venait de se faire assassinée au sud du pays, Renata et Lupin en avaient parlé en fin de séance. Les lèvres de Rose esquissèrent une moue et elle posa une main douce sur mon épaule.

-Je comprends que ça t'inquiète Victoria ... Tu es l'une des premières concernées et avec ce qui est arrivée à Amelia ...

Sa voix fléchit et elle prit une tremblante inspiration avant de poursuivre, résolue :

-Je n'aurais jamais pensé ... Bon sang, c'était une sorcière inébranlable ... Et si tôt dans la guerre ... Il avait fallu des années à Tu-Sais-Qui pour approcher les hauts-fonctionnaire lors de la précédente ... Ce qui s'est passé, c'est un choc pour tout le monde et un avertissement.

Et vu son ton et sa gravité, Rose avait pris l'avertissement très au sérieux. Elle s'éloigna de quelques pas pour contempler les bougies, l'air pensif.

-Cet après-midi avec vos amis... Il s'est bien passé ?

La question me prise de court et je faillis en lâcher l'assiette que je nettoyais. Je tentai de répondre d'un ton détaché :

-Oui, très bien. Bien sûr les jumeaux Weasley sont toujours un peu pénibles ...

-C'est étrange, j'ignorais que Simon était devenu proche d'eux.

Je gardais mon regard rivé sur l'assiette, un nœud dans l'estomac. J'ignorais même pourquoi je faisais la vaisselle à la main. Sans doute une question d'habitude. Toujours était-il que ça me permettait de ne pas avoir à affronter le regard de Rose ...

-On s'est rapproché au cours de l'année ... A dire vrai, tout ceux qui détestaient foncièrement Ombrage se sont regroupés.

-Dans l'organisation dont faisait partie Susan, c'est cela ? On avait reçu une lettre d'avertissement de la part de Dolores en avril dernier, sur ses activités ... « illicites ».

Je jetai un regard à la dérobée à Rose. Elle avait les bras croisés sur sa poitrine et les yeux rivés sur la fenêtre qui nous reflétaient toutes les deux. Je compris qu'elle observait discrètement mes réactions par ce biais et mon cœur s'emballa, d'autant qu'elle embraya :

-Mais vous n'en faisiez pas partie, Simon et toi ...

-Non ... Susan avait peur des conséquences que ça aurait sur lui et elle n'avait pas tort.

-En effet, souffla-t-elle, les sourcils froncés. Susan est intelligente et a parfaitement analysé la situation, même si je n'approuve pas ce qu'elle a fait. Simon n'est pas assez mûr, il n'a pas la tête assez froide pour entrer dans ce genre de groupe. L'armée de Dumbledore ...

Elle secoua la tête, faisait virevolter ces magnifiques cheveux bruns sur lesquels les bougies jetaient des éclats dorés.

-C'était une bêtise d'adolescent, vraiment ... Oh, bien sûr je comprends l'idée de base mais je ne comprends pas comment Susan a pu ... Elle était si sage et j'ai l'impression que ça l'a changé, elle est devenue plus vindicative. Enfin, heureusement qu'elle n'a pas mêlé Simon à cela. Lui dans ce genre d'organisation ? Mon Dieu, il serait capable de se détruire ...

Je ne répondis rien dans l'espoir que la conversation cesse et que Rose arrête d'observer mon reflet dans la vitre, comme si elle s'attendait à ce que je réagisse. Ce fut Caroline qui me sauva en revenant triomphalement, le gâteau flottant gracieusement derrière elle. Après cela, Rose fut trop occupé à planter des bougies, son sourire de nouveau accroché aux lèvres. Le gâteau était copieux et à plusieurs étages et Caroline observa sa mère l'emmener dans l'autre pièce en entonnant avec gaieté un « Joyeux anniversaire ! ». La jeune femme secoua la tête et pivota vivement vers moi.

-D'un point de vue extérieur, tu ne crois pas qu'elle en fait trop ?

-Euh ...

-Ce n'est pas grave, me coupa-t-elle devant mon manque d'inspiration évident. Je devrais y être habituée ...

Sans m'attendre, elle suivit sa mère dans la salle à manger, entonnant le chant avec nettement moins de conviction. J'essuyais mes mains et observai la famille, appuyée dans l'encadrement de la porte. Caroline et Simon n'avait vraiment rien en commun, observai-je alors que les deux sœurs s'installaient de part et d'autre de leur frère pour que Rose les prenne en photo. Susan avait au moins les yeux verts des Bones ... Elle avait enlacé Simon, la tête sur son épaule alors que Caroline s'était contentée de poser sans se fendre du moindre contact. Simon dût le remarquer, car il lui jeta un regard qui me parut blessé et le faible sourire qu'il avait réussi à produire s'estompa. Je n'eus le temps de m'attarder davantage : Rose me fourra l'appareil photo entre les mains et m'enjoignit de prendre toute la petite famille. Je m'exécutai de bonne grâce et pris même celle où Simon souffla ses bougies. Il dut s'y reprendre à plusieurs fois, ce qui me fit dire d'un ton moqueur :

-Ça manque de souffle, tout ça. La prochaine fois, viens en vélo avec Chloé et moi, ça te ferait un peu de sport. Je suis sûre que ça te fera le plus grand bien ...

Simon leva les yeux au ciel et ne daigna pas sourire à ma pique. Il avait appuyé sa joue contre son poing et regardai son père découper le gâteau, mais son esprit ne semblait plus être avec nous. J'agitai la main devant ses yeux.

-Allô Simon prénom-ridicule Bones ? On écoute, c'est Victoria à l'appareil.

Mais Simon ne semblait pas non plus d'humeur à supporter mes pitreries et repoussa ma main avec agacement.

-Pourquoi tu viens m'embêter encore ce soir ? Ce matin ça ne t'a pas suffi ?

-Parce que Susan m'a proposé de venir. C'est vraiment l'ange de la famille.

La mention de Susan me rappela la conversation que je venais d'avoir avec Rose. Elle me nouait douloureusement l'estomac et maintenant qu'elle n'était plus là à observer mes réactions, je réussis à percevoir le véritable sens de ses paroles. Caroline déposa deux assiettes de gâteau devant nous avant de s'assoir. Je m'attaquai immédiatement à la mienne ; Simon ne fit pas mine de prendre sa cuillère. Cela parut agacer Caroline.

-Arrête de faire cette tête, persiffla-t-elle à voix basse pour que ses parents ne l'entendent pas. Maman s'est cassé le cul à te préparer cette fête alors qu'elle avait autre chose à penser. Par Merlin, Simon, pour une fois qu'elle est contente, arrête de lui gâcher son plaisir !

Simon passa une main gênée dans ses cheveux, visiblement penaud.

-Je sais. Je suis désolé, c'est juste ...

-Je m'en fiche. J'ai une tonne de dossier et papa s'est mis la moitié du Mangenmagot à dos : on a tous des problèmes, mais on ne les fait pas subir aux autres. Contente-toi de sourire et de remercier maman, d'accord ?

Je lui fis les gros yeux devant la violence de son intervention, mais cela parut secouer Simon. Après avoir longuement contempler sa sœur, il hocha la tête et prit une bouchée de gâteau, sans doute dans l'espoir d'apaiser le regard ardent que Caroline braquait toujours sur lui. Il fit l'effort de sourire à sa mère, de rire avec Susan, de s'intéresser aux anecdotes de bureau de Caroline, mais dès que quelqu'un avait le regard tourné son regard s'éteignait. Je battais impatiemment du pied, interloquée mais George m'empêcha de l'observer davantage. Il s'assit à côté de moi, un grand sourire aux lèvres.

-Je pensais que tu aimerais le savoir : on a réussi à trouver une place à Esmera Fortarôme. Bon, ce n'est pas grand-chose et complétement en dessous de ses qualifications mais Ste Mangoust avait besoin d'une standardiste ...

-C'est déjà très généreux de votre part de lui avoir trouvé ce poste ...

Le dîner prenait fin : Susan et sa mère étaient parties ranger la cuisine, d'où des éclats de voix nous parvenait. George soupira en le constatant.

-Bon sang, ça ne finira jamais ...

-Susan a eu des mauvaises fréquentations l'année dernière papa, fit tranquillement valoir Caroline. Elle n'aurait pas été comme ça si elle n'avait pas intégré cette association d'élève, ça lui a fait pousser des ailes ...

-Je trouve plutôt que ça lui a donné de l'assurance, protestai-je pour défendre mon amie. Elle est sortie de sa coquille ...

-Et elle n'arrête pas de répondre depuis ! Si j'étais sa mère ...

-Mais tu ne l'es pas, la coupa George d'un ton ferme. Alors ...

Je me désintéressai de la dispute entre le père et sa fille, ayant perçu un mouvement du coin de l'œil. Je vis l'ombre d'une chaussure disparaître dans la cage d'escalier. Simon avait profité que personne ne s'intéresse à lui pour monter. Je jetai un coup d'œil à George et Caroline, toujours plongé dans leur discussion sur Susan, et je me dépêchai d'atteindre l'escalier et de monter les marches jusqu'au deuxième étage. La porte était entrebâillée et je toquai deux grands coups pour prévenir mon entrée.

-Tu es décent Bones ? Normalement oui, je doute que tu aies eu le temps de tomber la chemise.

-Très drôle.

Il était allongé dans son lit, les bras en croix, le regard rivé sur le plafond et la chemise toujours boutonnée. Je m'installai d'un bon sur un coin du matelas, assez soulagée d'être sorties de la pièce. L'ambiance avait été étrange, entre joie et tension. Comme si malgré la volonté de fuite de la famille, la réalité de la situation ne les avait jamais réellement quittés et pire que tout, j'avais senti l'ombre d'Amelia durant toute la durée du repas.

-Ta mère se doute de quelque chose. Pour l'Ordre.

Simon soupira profondément et se passa la tempe, les yeux clos.

-Evidemment. Pourquoi crois-tu qu'elle surveille mes allées-venues comme ça ? Elle n'est pas idiote. Elle connait l'Ordre grâce à Edgar ...

-Simon.

-Mon père, pardon. Enfin bref ...

Il porta une seconde main à son autre tempe et se les massa, le visage crispé. Je songeai à son comportement depuis ce matin, l'explication – sans doute factice – qu'il avait tenté de donner à Caroline et qui n'avait pas voulu être entendue, son regard hanté durant le repas ... Des signes qui rappelaient bien trop de mauvais souvenirs.

-Bon, qu'est-ce qu'il y a ?

-Quoi ? Non, rien ...

Sans pouvoir m'en empêcher, je donnai un violent coup de poing dans le matelas qui fit sursauter Simon : il ouvrit brutalement les yeux sur moi, hébété. Et cette surprise ne fit qu'attiser les restes de colère qui demeurait en moi, braises déjà réchauffées par ma conversation avec Lupin.

-Alors non ! Ne recommence pas, ne refais pas ça, arrête tout de suite ! Tu as entendu Lupin ? On ne tiendra jamais si on ne communique pas ! Regarde comment tu as fini l'année dernière, Simon ! Alors ne commence pas à te renfermer, à me dire que tout va bien quand c'est évident que non. Et c'est évident, tu as fait la tête depuis ce matin jusqu'à ce soir. Caroline a raison, ce n'était pas cool. Alors ne me dit pas que tout va bien. Pas à moi, Simon. Balance.

A ma grande satisfaction, Simon parut quelque peu honteux face à ma tirade. Il se redressa, un coude sur un genou, et une main se frottant vigoureusement le visage, comme s'il tentait de rassembler ses pensées. Au bout de quelques secondes qui me parurent interminable, il laissa tomber sa main et finit par lâcher du bout des lèvres :

-J'ai l'âge que Matthew avait quand il est mort.

Il leva le visage au ciel et je compris avec un gros pincement au cœur que la confidence avait fait monter les larmes. Je retins le petit soupir qui me montait aux lèvres : c'était exactement quelque chose du genre que j'avais craint. Je me glissai à côté de lui pour couvrir sa main de la mienne. Dans un geste mécanique, Simon serra mes doigts à m'en les briser.

-Je n'y avais pensé, soufflai-je, désolée.

Simon essuya un rire tremblant et baissa le visage. Ses yeux brillaient toujours mais il semblait avoir réussi à refouler le gros des larmes.

-Moi je ne pense qu'à ça depuis quelques jours. Comme je pense que dans une semaine, ça fera quinze ans qu'ils sont morts. Quinze ans que je me voile la face, que je les renie, que je bafoue leur mémoire exactement comme Emily le faisait avec celle de Cédric ...

-Simon ...

-Je n'y pensais pas, avant. Je veux dire, j'avais un passage à vide au moment du 13 août, j'étais peut-être un peu plus irritable ... Mais en réalité, je n'y pensais pas.

Sa main libre tapota nerveusement la table, ses doigts jouant sur le pardessus du lit comme ils le feraient sur les cordes de sa guitare. Malgré sa détresse apparente, un sourire attendri s'étira sur mes lèvres.

-Quel morceau tu joues ?

Simon cligna les yeux, pris de court par la question. J'avais remarqué que ce tic le prenait chaque fois qu'il était bouleversé ou énervé, comme s'il se jouait intérieurement une musique pour garder son calme. Un pauvre sourire retroussa ses lèvres et ses doigts se détendirent sur les miens.

-Tu ne connais pas, c'est une chanson sorcière. Une vieille berceuse, je ne connais même pas les paroles. Juste l'air.

-Tu me le joueras ?

Le rire qui secoua Simon fut plus franc. Progressivement, ses yeux s'asséchèrent, ne laissant de son trouble qu'un étrange éclat spectral dans ses yeux verts et nos doigts noués sur la couverture. Il caressa le dos de ma main du pouce et effleura le petit soleil d'or qui pendait à mon poignet.

-On verra ça plus tard. Là, je suis claqué. Bon sang, j'avais oublié combien c'était du sport la magie martiale ...

-Raison de plus pour venir faire du vélo avec Chloé et moi. Demain, neuf heures. Je viendrais te réveiller. (Je lâchai sa main avant d'ébouriffer ses cheveux avec un sourire). Bonne nuit ma crevette.

-Crevette toi-même.

Le ton était laconique, la réplique mécanique mais sans âme. Alors que je partais vers la sortie, son regard s'était rivé vers la fenêtre, fixant plus loin que la nuit d'été et les étoiles qui parsemaient le ciel. J'hésitai sur le bas de la porte en comprenant que Simon n'avait aucunement l'intention de dormir, de peur que les fantômes profitent de la fragilité que donnait le sommeil pour le hanter de nouveau. C'était sans doute ce qui se passait depuis plusieurs jours – et ça expliquait sa mine pâle et sa mauvaise humeur.

-Tu veux que je reste ?

Les mots s'envolèrent de ma bouche sans que je ne prenne la décision et j'en fus presque aussi surprise que Simon, qui porta sur moi un regard étonné.

-Pardon ?

-Pas longtemps, précisai-je alors en reprenant le cours de mes pensées. Juste le temps de m'assurer que tu ne vas pas faire nuit blanche ou ruminer ce que tu ne dois pas ruminer ...

-Vicky ...

-Simon, il est hors de question qu'on recommence comme l'année dernière. Tu vas mal, laisse-moi t'aider. Et si t'aider consiste simplement à lire une pièce de théâtre sur ton lit tout en me goinfrant du gâteau qui reste, je serais ravie de le faire.

Un sourire incertain s'étira sur les lèvres de Simon, entre gêne et attendrissement. Un sourire qu'il n'aurait pas en temps ordinaire, que seul la détresse pouvait lui arracher et qui pourtant chassa les ombres qui hantaient son regard. Finalement, il hocha la tête et je refermai la porte avant de m'avancer vers sa bibliothèque pour sélectionner quelques livres. Mes joues s'empourprèrent. Je serais naïve de songer que je n'en aurais pas pour la nuit ... comme à chaque fois.

Je revins dans le lit avec Songe d'une nuit d'été et m'affalai sur le matelas, forçant Simon à replier ses jambes pour me faire de la place. Il essuya un rire en lisant la couverture quand je déployai le livre au-dessus de mon visage.

-Tu l'as lu cent fois. Tu ne préfères pas lire Hamlet ?

Je lui jetai un regard torve.

-Tu veux me voir rougir quand j'arriverais à « Doute que les étoiles ne soient que flammes » ?

Cette fois, ce fut un véritable éclat de rire qui franchit ses lèvres et détendit enfin les traits de son visage. Il porta ses mains jointe au niveau de son cœur.

-Allez, pour mon anniversaire !

-T'as déjà eu un livre.

-Nul, le livre.

-Comme le pull que tu m'as offert à mon anniversaire ! Maintenant, va me chercher du gâteau et laisse-moi lire.

-Tu ne dois pas éviter de grossir maintenant que tu es joueuse professionnelle ?

Je lâchai le livre qui alla s'écraser contre mon visage et étouffer mon gémissement de désespoir. Et c'était bien parce que Simon s'esclaffa par la suite que j'acceptai de faire cette comédie. Ça allait être long. Mais alors que le rire de Simon se prolongeait, un sourire caché s'étala sur mes lèvres et je me fis distraitement la réflexion que malgré les piques et les moqueries ... ça en valait la peine. 



Voilà, petit chapitre tranquille pour Noël ! A dans deux semaines ! 

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