Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

III - Chapitre 46 : Juste parmi les nations

Eeeet nous y sommes. 

L'ultime chapitre de la partie III. 

Je ne vous cache pas que je suis un peu émue en vous le livrant - Mais pour le bilan, on se revoit plutôt à la fin. Là je vais vous laisser pleinement profiter de ce dernier chapitre ! Bonne lecture les ami.es <3 

Et pour cette partie 3, on finit avec une citation habituelle du graaaand Victor Hugo, obviously. 

*** 

Ils sont la même larme et sortent du même œil.
On vit, usant ses jours à se remplir d'orgueil ;
On marche, on court, on rêve, on souffre, on penche, on tombe,
On monte. Quelle est donc cette aube ? C'est la tombe.

- Ce que c'est que la mort 
Victor Hugo

***

Chapitre 46 : Juste parmi les Nations.

Le soleil était haut dans le ciel d'Ecosse. Il brillait, apportant chaleur, lumière et prospérité au monde, nous faisait grâce d'une magnifique journée d'été. Alors pourquoi à chaque frôlement de la brise, je frémissais, prise d'un frisson glacé ?

La réponse se tenait tout autour de moi, entre les larmes, les plaintes. Elle se tenait dans ce petit homme en noir dont chaque mot résonnait sinistrement. Elle se tenait dans le chant qui s'était élevé depuis le Lac Noir, étreint dans le désespoir et le deuil. Elle se tenait quelques mètres devant moi, enveloppée d'un linceul pourpre brodé d'étoile, au bout d'une allée, renfermant le corps du plus grand sorcier de l'Ere moderne.

Jusqu'au bout, j'avais hésité à assister aux funérailles d'Albus Dumbledore, portée par un déni, un besoin de me protéger après les jours difficiles que j'avais vécu. Je n'avais pas pleuré à la lecture de la lettre, contrairement à Simon. J'avais l'impression qu'elle arrivait trop tard, au moment où j'étais dans un trop-plein sensoriel, incapable d'intégrer la nouvelle. J'étais même restée dans un mutisme qui avait fini par sincèrement inquiéter Simon. Il était descendu prévenir mes parents de la nouvelle, demander à Alexandre de s'occuper de moi, mais ça n'avait rien changé. Pas une larme, pas un gémissement de désespoir, pas même la pointe aigre d'un sentiment de culpabilité. Après le départ de Simon, je m'étais juste contentée de m'emmitoufler dans ma couette, vaincue par mes pleurs et la fatigue, une nuit sans rêve.

C'était mon grand-père qui m'avait forcé la main pour les funérailles. Dumbledore était celui qui avait vaincu Grindelwald, sauvé l'Europe centrale de la tyrannie, et il le respecterait à jamais pour cela. Le duel avait prélevé son tribut sur Miro Liszka, qui se mouvait difficilement depuis et était pris de douleurs thoraciques. Il ne voulait pas risquer le transplanage.

-Il faut que tu y ailles, Perelko, avait-il insisté, une lueur fiévreuse dans le regard. Pour moi, pour tous les gens qu'il a sauvé en vainquant Grindelwald. S'il te plait, je te le demande comme une faveur ...

-« Qui sauve une vie sauve le monde entier », avait ajouté ma grand-mère d'un air solennel. Cet homme, c'était un Juste ... oui, un Juste ...

Pas vraiment, avais-je songé en me rappelant que les Justes parmi les Nations historiquement désignaient les personnes qui avaient fait preuve de bienveillance envers les populations juives. Après la seconde guerre mondiale, le sens s'était étriqué pour nommer celles et ceux qui avaient sauvés des juifs de leur sort funeste. Mais après tout, les né-moldus n'étaient-ils pas à Voldemort ce que les juifs avaient été à Hitler ?

Alors je me retrouvai là, à Poudlard, face au lac Noir et sa surface verte scintillante au soleil, à écouter le long discours du maître de cérémonie. Le monde magique dans son ensemble semblait s'être déplacé pour rendre hommage à celui qui avait fait son possible pour unir les peuples. Pas seulement des sorciers : les centaures de la Forêt Interdite s'étaient massés à la lisière, les Êtres de l'eau avait émergés du Lac et j'avais la nette impression que c'était un véritable géant assis à côté du Garde-Chasse Hagrid, orné d'un absurde chapeau identique à celui du gardien des clefs. Chez les sorciers, des officiels, bien sûr : Rufus Scrimegeour, accompagné de son prédécesseur Cornelius Fudge. J'aperçus également un membre des Bizzar'sister, des joueurs de Quidditch... Leonidas Grims et Lysandra avaient fait le déplacement, pour s'asseoir à l'opposé exacte de George et Rose Bones, placés juste derrière les membres du Ministère. Rose se retournait fréquemment, cherchant le regard de Simon, mais celui-ci parvenait à le garder river sur la scène devant lui. Ses yeux étaient parfaitement secs, constatai-je avec soulagement. Peut-être que comme moi, les derniers jours avaient complètement vidé ses canaux lacrymaux et que malheureusement, il ne restait plus une larme pour Dumbledore.

-Je n'en reviens pas qu'Ombrage se soit pointée, murmura rageusement Simon à voix basse. Déjà que je trouve ça scandaleux qu'elle soit encore employée au Ministère ...

Notre ancienne professeure de Défense contre les Forces du Mal était en effet présente, un nœud noir dans ses cheveux bouclés, la mine profondément affligée sur les premières chaises. Un impensable sourire frémit sur mes lèvres.

-Je pense que c'est le moment de lancer un Do you hear the people sing ? ...

Simon me jeta un regard oblique et j'obligeai mes lèvres à me tordre pour demeurer impassible. Il était revenu le lendemain de la nouvelle, m'attendant cette fois sur la balancelle où il discutait avec Alexandre. Lorsque j'avais demandé s'il comptait aller aux funérailles, il avait failli laisser échapper son verre de thé glacé. Encore maintenant, je le sentais extrêmement surpris que je daigne lui adresser la parole.

-Vas-y, je te regarde, répondit-t-il finalement.

Mais je me contentai de secouer la tête d'un air désabusé. Plutôt que de m'attarder sur la cérémonie en elle-même, j'embrassai la place du regard, fascinée par le mélange hétéroclite qui s'était réuni aujourd'hui, joint dans le deuil commun d'un homme exceptionnel. Tous les élèves de l'école étaient présents, en uniformes – j'avais aperçu Susan au milieu des Poufsouffle, guidés par le professeur Chourave. Mais beaucoup semblaient aussi âgé de Dumbledore lui-même et surtout, j'étais intriguée par tous ces peuples que je n'avais jamais aperçus, les centaures, les Êtres de l'eau, les géants ... Je me tordis le cou pour mieux les apercevoir à la lisière quand Simon me donna un coup de coude :

-Regarde, me chuchota-t-il.

A contrecœur, je reportai mon attention sur le bout de l'allée où l'homme en noir venait de se rassoir. La gerbe de flamme blanche qui jaillit du linceul me prit par surprise et je crispai mes doigts sur mes genoux. La main de Simon vint précipitamment recouvrir la mienne au moment où des volutes immaculées s'élevaient du brasier magique, dessinant des formes à peine discernables. J'eus le temps de distinguer un oiseau, un phénix aux plumes éclatantes avant que tout ne s'évanouisse pour laisser place à une tombe blanche, étincelante sous le soleil. J'eus à peine le temps de souffler et mon rythme cardiaque de redescendre qu'une volée de flèche tirée par les Centaures traversèrent le ciel, provoquant des cris et de l'agitation de toutes part. Fort heureusement, elles nous survolèrent pour se planter assez loin de la foule.

-C'était moins une, commenta Simon alors que les Centaures se retranchaient dans la forêt.

Les Êtres de l'eau suivirent le mouvement en s'enfonçant dans le Lac Noir. Autour de nous, le murmure des conversaient signaient la fin de la cérémonie, du dernier adieu à Albus Perceval Wulfric Brian Dumbledore. Mon regard tomba alors sur mon genou, sur la main de Simon qui avait couvert soucieusement la mienne à l'apparition des premières flammes. Nerveusement, je récupérai ma main. La mâchoire de Simon se contracta face à mon geste mais il ne fit aucun commentaire. En revanche, il se leva en même temps que les autres, emporté par l'élan de la foule – ou par volonté de ne pas rester dans cette distance gênante que je venais d'instaurer.

-Je ... je vais voir comment va Bill, je reviens.

Et sans attendre ma réponse, il s'élança dans l'allée, une main plongée dans sa poche de veste, l'autre vissée à sa tempe. Une brève vague d'embarras me submergea mais elle passa vite lorsque je posais les yeux sur le visage scarifié de Bill Weasley. Il avait été attaqué par un loup-garou, avais-je appris au détour d'une conversation. Sous sa forme humaine, qui plus était : pas de quoi le transformer, mais il avait été assez amoché pour garder toutes sa vie les gages. Tout ceux qui s'étaient trouvés au QG au moment de l'attaque s'étaient portés à Poudlard : Bill, Remus, Tonks, Kingsley ... Mais ils n'avaient pas empêché l'impensable.

Ma poitrine se comprima et je me forçai à m'ébrouer pour la libérer. Je repérai Rose Bones loin, toujours du côté des officiels du Ministère. En revanche, Susan n'était qu'à quelques mètres, au cœur de l'allée, à parler avec Hermione Granger, les mains tordues. Mes jambes m'amenèrent seules à elle et à leur conversation qui me parvenait malgré la foule :

-... tenais à dire que j'étais si désolée, Hermione ... J'ai laissé mon Gallion chez moi après les vacances de Noël, je pensais vraiment que l'A.D. ... c'était fini ... Si tu savais comme je regrette ...

-Je doute que ça aurait changé grand-chose alors arrête de culpabiliser, rétorqua Hermione, les larmes aux yeux. Même si je te comprends, moi aussi je ... (Elle plaqua une main sur son front et prit une profonde inspiration). Pour l'amour du ciel, c'était moi qui devais surveiller le bureau de Rogue, si j'avais ...

-Donc c'est vraiment Rogue qui l'a tué ?

Mon intervention prit les deux jeunes filles de court. Susan poussa un petit cri et me sauta au cou – ou plutôt m'engloutit dans une étreinte, elle était devenue tellement plus grande que moi ... Pour la première fois, une vague d'émotion menaça de me submerger et je nichai mon nez dans le cou de mon amie.

-Hey ...

-Oh la la, je suis tellement contente que tu sois là, renifla Susan en se détachant. Je me suis tellement inquiétée depuis la lettre de mon père, je te jure je me suis fait un sang d'encre ...

Elle avait tenté de se maquiller, mais son mascara avait coulé pendant la cérémonie, traçant deux sillons noirs sur son visage couvert de taches de rousseurs. Des tresses de l'enfance, aucune trace : elle avait attaché ses cheveux en une queue haute dont pas une mèche ne s'échappait et portait les anneaux d'or que sa mère lui avait offert pour Noël. Ce petit bout de jeune femme, réalisai-je en essuyant tendrement une larme. Depuis quand Susan avait-t-elle censé d'être une enfant ? A côté d'elle, Hermione était devenue livide.

-Oh mon Dieu Victoria, tu as été attaquée ?

-Mes grands-parents, rectifiai-je en tentant d'avoir l'air rassurant. Mais ça va on s'en est sorti ... Donc c'est Rogue ?

Rogue. Le professeur qui m'avait tant terrifié pendant cinq années de Potion, l'unique raison pour laquelle j'avais abandonné cette matière en ASPIC. Rogue, l'ancien Mangemort dont la marque l'avait brûlé le soir où Cédric était mort ... j'entendais encore l'échos de sa dispute avec Karkaroff, sa détermination glaçante. Que la mort vienne, avait-il lancé au directeur de Durmstrang qui le pressait de s'enfuir. Je ne suis pas un lâche, Igor ... Le souvenir me donna la nausée. Oui je l'avais trouvé malveillant, hautain, inquiétant, mais sans jamais davantage me soucier de lui. Non, mes inquiétudes étaient ailleurs ... Et même à présent la réalité me semblait lointaine, abstraite, irréelle.

Les traits d'Hermione se crispèrent en un masque de colère teinté de désespoir. Elle avait encore les yeux humides, mais son regard brillait d'une vigoureuse détermination.

-Oui ... Oui, c'est lui ... Harry l'a vu, il était là ... en haut de la tour ...

Elle papillonna des yeux et Susan prit le relai d'un ton étouffé :

-Mais il n'y avait pas que lui ... Tu te souviens de Drago Malefoy, de Serpentard ? Son père est à Azkaban depuis l'année dernière ... Enfin bref, il a fait entrer des Mangemorts, je ne sais même pas comment ...

-L'armoire à Disparaitre, ajouta Hermione d'une voix pleine de dépit. Celle qui était cassée dans le Département de Sortilège ... il l'a réparé ... et l'autre ...

Elle n'acheva pas, mais c'était inutile. Je le savais déjà. L'autre s'était trouvée chez Barjow et Beurk, dans la réserve que Podmore et George avaient tenté d'atteindre la fois où ils étaient entrés dans la boutique sous polynectar, avant d'être arrêté par les sortilèges de protection et repérés. La poignée de porte. On a été cons, Bennett ... Je fermai les yeux, brusquement vacillante. Je l'avais vu cette armoire à disparaitre. L'année dernière, quand Fred et George y avaient enfermé Graham Montague après qu'il m'avait insulté. Je l'avais vu ...

-Victoria, ça va ?

-Vic' ?

La pression que Susan exerça sur mon bras m'ancra de nouveau à la réalité et lorsque je rouvris les yeux, je fus éblouie l'espace d'un instant. L'image se recomposa lentement à travers la lumière aveuglante, la pelouse éclatante, les chaises vites, les visages d'Hermione et Susan et la tombe, la belle tombe de marbre blanc au bout de l'allée. C'était ce que je fixai en répondant :

-Ce n'est pas une journée facile ... pour personne je pense.

C'est la première personne qui meure à Poudlard depuis Cédric, réalisai-je brutalement, une boule dans la gorge. C'était ce qui avais poussé Emily à rester chez elle : ne pas réveiller le deuil de notre ami, qui avait été si long, si douloureux pour elle. Par ailleurs, peu de camarades de ma génération s'étaient déplacés. George, rongé par la culpabilité, avait préféré rester à la boutique, avec Fred pour le soutenir. Octavia était surchargée de travail pour s'autoriser le mi-temps cet été. Et les autres ... les autres n'existaient plus. Les mois écoulés les avaient éloignés, pas par pas. Tous ceux qui avaient fait mon quotidien, Mathilda, Erwin, Angelina et Alicia, et même Miles ... absorbés par la vie.

-Non c'est clair, convint Hermione du bout des lèvres. Et ce n'est pas fini maintenant que ... enfin, Dumbledore, c'était le dernier rempart. Le dernier symbole de la résistance, le seul capable de vaincre Voldemort ...

Un frisson parcourut Susan au nom prononcé, mais elle le vainquit vite pour rétorquer :

-Oui enfin quand on regarde ... il ne l'a jamais fait, non ? Il a vaincu Grindelwald mais Tu-Sais-Qui il n'a jamais su ... alors qu'il aurait vraiment pu ... ?

-Ce ne sont pas du tout les mêmes scenarios, protestai-je, un brin agacée. Quand on regarde, Grindelwald défiait ouvertement Dumbledore, l'attendait, cherchait complètement la confrontation alors que Voldemort a toujours cherché à l'éviter. Il s'est caché comme un rat ... Bon sang, Susie ...

Le frémissement qui l'avait prise était plus fort cette fois et une grimace vint tordre ses lèvres. Je me mordis l'intérieur de la joue pour ne pas la morigéner davantage. Peut-être que je devenais trop intolérante avec mon entourage sur ces questions, qu'il fallait que j'apprenne à prendre sur moi, que tout le monde n'était pas forcément prêt à se montrer aussi radical. Hermione renifla avec dépit.

-Si Voldemort est un rat, alors Dumbledore faisait office de chat. Et on sait tous ce que les rats font quand le chat est parti ...

Sa voix se brisa quelque peu sur la fin de sa phrase et elle referma son poing au creux de sa gorge. Son émotion peina à trouver un écho en moi. Je clignai des yeux, assez perplexe. Pourtant la tombe était devant moi, le désespoir semblait flotter dans l'air, aussi réel que la caresse du soleil et de la brise et pourtant j'avais l'impression d'être inatteignable. Un part de moi semblait presque s'attendre à croiser le regard malicieux du directeur, pétillant derrière ses lunettes demi-lune. Un linceul, une tombe ... ça ne suffisait pas à rendre la chose réelle pour moi.

-Mais ce n'est pas fini, se remobilisa Hermione, l'œil brillant. Si tout se finit avec un homme ... Alors on a vraiment perdu.

-Oui, c'est clair, confirma Susan en hochant la tête. Il ne faut pas laisser la résistance mourir avec Dumbledore ... On n'a pas le droit ...

-Hermione ...

Ron Weasley venait d'apparaître brusquement derrière son ami, l'air agité. Ses yeux étaient rougis et il restait des restes de larmes sur ses joues, pourtant son doigt ne trembla pas quand il pointa le bord du lac. Susan et moi suivîmes la direction : notre Ministre, Rufus Scrimegeour, marchait avec Harry Potter. Le jeune homme avait l'air nonchalant, presque détendu, chose impensable quand on savait qu'il avait assisté de ses yeux à la chute de l'illustre directeur. Comme à celle de Cédric ... Une horreur de plus ... est-ce que son corps peut encore encaisser ? Ou est-ce que sur lui aussi, ça coule ? Un feulement de chat furieux jaillit de la gorge d'Hermione :

-Non mais ... Il croit vraiment que c'est moment ? Je vous jure quelle indécence ... (Elle m'adressa un sourire crispé). Je suis heureuse de t'avoir revu, Victoria et très contente que tu ailles bien ... A la prochaine.

Et elle nous planta là, fauchant le coude de Ron pour se précipiter vers le lac à la rescousse de Harry. Susan poussa un profond soupir et passa son bras sous le mien. Un sourire effleura mes lèvres face à ce geste si familier, la douceur retrouvée de Susan. Cette année, j'avais eu tout le loisir de complètement oublier qu'elle avait été la première Bones que j'avais aimé.

-Il n'empêche, ça va être dur de se relever après ça, avoua-t-elle en se mettant en marche. J'ai entendu des rumeurs, ils parlent de fermer l'école ... Des parents sont venus chercher leurs enfants cette semaine ... Smith par exemple, il est parti. Hannah aussi, son père est venu la chercher ...

-Oh ...

-Normal, non ? se dit-t-elle avec un rire sans joie. Une légende s'effondre ... jusque là, c'était plutôt admis que Poudlard était l'endroit le plus sûr ... le seul endroit où il n'oserait jamais s'attaquer, justement parce que Dumbledore y était ... Qui aurait seulement pu s'imaginer ... ?

Moi. Moi j'aurais pu, j'aurais dû ... je l'ai vu l'armoire, j'étais là ... La poignée de porte. C'était Mondingus Fletcher qui nous avait permis de l'intercepter, mais Mondingus Fletcher était à Azkaban. Sans les informations de son réseau, nous n'avions pas été en mesure de découvrir qu'ils avaient mis la main sur une seconde ... Je chassai les larmes d'un battement de cil et fort heureusement, Susan ne devina pas mon trouble. De toute manière, elle ne semblait pas avoir le cœur à s'attarder sur cette tragédie. C'était autre chose qui la tiraillait, et je le compris quand son regard passa de ses parents, toujours regroupés avec le personnel du Ministère, à Simon qui discutait toujours avec Bill. Je rejetai la tête en arrière.

-Non, Susie, pas toi ...

-Je voulais juste savoir où est-ce que vous en étiez, se défendit-t-elle. A dire vrai je ne pensais pas vous voir arriver ensemble à l'enterrement, ça m'a soulagé ... je dois en conclure que contre toute attente ... ça va ?

Elle devait en avoir reçu des lettres, pour être si au fait de la situation. De son père, c'était certain et j'avais peut-être vu Simon lui écrire depuis la table de ma cuisine. Il dormait encore chez Emily, mais partageait sa journée avec ma maison depuis que j'acceptais de lui parler et que ma famille lui avait assuré ne pas lui en vouloir. C'était difficile à croire concernant ma mère. Elle qui avait été la première à me pousser vers lui, elle était également la plus froide. Mais Simon le supportait. Comme il supportait que la distance inconfortable que je lui imposais. Pas de contact, des mots pour la plupart creux, beaucoup de silence. Il me laissait lire, taper à la machine. A dire vrai, la plupart du temps, il me laissait seule pour discuter avec Alexandre ou même Jaga, voire mon père. Ils étaient même allés à l'église ensemble. Simon, à l'église ... Définitivement, il avait décidé de mettre les choses en ordre dans sa vie.

-C'est compliqué, soupirai-je, faute de mieux. Ça va s'arranger mais ... il faut le temps, Susie. Je suis un peu en train de saturer ... Il t'a parlé d'Oxford ?

Elle hocha la tête et jeta un regard inquiet par-dessus son épaule, en direction de sa mère.

-C'est ma mère qui m'en a parlé, précisa-t-elle avec prudence. Dans une lettre. Qu'il était venu la voir pour lui annoncer, qu'ils s'étaient disputés, qu'il fallait que je lui parle, que moi il m'écouterait ... Oh je sais, ajouta-t-elle, dépitée, lorsqu'elle remarqua que je souriais. Ça doit te faire plaisir, hein ?

-Plaisir, pas exactement, rétorquai-je, piquée au vif. Oui j'en veux à ta mère, je suis partie pour ne pas la voir un très long moment je pense. Tes parents avaient promis de nous aider, eux aussi et finalement mes grands-parents étaient à deux doigts d'y passer. Elle n'aurait jamais dû retenir Simon et je déteste la façon dont elle me prend pour l'ennemi, presque, simplement parce que je veux qu'il ouvre les yeux quand elle veut qu'ils demeurent fermés ...

-Elle n'a pas la bonne méthode, ça fait des années que je lui dis, renchérit Susan, la mine sombre. Mais le problème vient aussi de Simon, Vic' : il ne suivait que la sienne. S'en éloigner, c'était l'angoisser. Mon père, Caroline et moi on complotait parfois pour tenter de changer ... ça se fracassait contre un mur. Je comprends que tu en veuilles à ma mère, je lui en veux aussi, si tu veux savoir. D'avoir laissé la situation s'installer, d'avoir instauré un tel climat ... Tu crois que tu es la seule à en souffrir ? ça fait des années que Caroline pense qu'elle aime Simon plus que nous, qu'elle vit dans l'idée qu'il lui a volé sa mère.

L'information crue me réduisit au silence, les dents serrées. L'idée que l'influence de Rose n'avait pas que nuit à ma famille, mais aussi à la leur ne faisait qu'accroitre ma colère à son égard. Susan parlait de Caroline, mais qu'en était-il d'elle, de ses propres sensations, de sa propre perte ? Avait-elle aussi la sensation d'avoir grandi sans mère, que Simon et ses traumatismes avait vampirisé son attention ? En tout cas, elle refusa de s'en formaliser et poursuivit :

-Enfin bref, au moins ça va changer ... Pour Oxford, je lui ai répondu que je ne parlerai pas à Simon, que c'était sa décision et que je l'aiderai à faire ses cartons s'il le veut. Et toi, qu'est-ce que tu en penses ?

Mon cœur manqua un battement et malgré moi je coulai un regard vers Simon, toujours face à Bill. Il écoutait, hochait la tête, mais semblait légèrement ailleurs.

-Je pense que je n'ai rien à dire ... et surtout, qu'il en a besoin. Ça fait même un moment qu'il en a besoin ... Alors comme toi, je vais l'aider à faire ses cartons s'il veut.

Un sourire penaud retroussa les lèvres de Susan.

-En fait, je te demandais si tu allais le suivre à Oxford.

-Oh !

A dire vrai, ça ne m'avait même pas traversé l'esprit. L'idée de quitter la maison de mon enfance m'était toujours aussi désagréable qu'un an plus tôt, quand c'était Miles qui me l'avait proposé. Pourtant Simon n'était pas Miles, loin s'en faut ... Et malgré tout, je ne me sentais pas prête. Pas prête à prendre mon envol, à abandonner mes parents au moment où le danger se faisait plus présent. Et était-ce réellement le moment idéal ? Nous avions besoin de nous reconstruire. Il avait besoin de se reconstruire.

-Non, répondis-je alors, sûre de moi. Non, c'est ... c'est trop tôt. Ça ne fait que depuis février qu'on ...

Je laissai ma phrase en suspens, toujours bien incapable de la finir, mais Susan saisit l'idée. Elle me lança un regard peiné, mais aussi soulagé et je compris qu'elle avait craint de nous perdre tous les deux d'un coup. Au moins, je restais à Terre-en-Landes avec elle, ne serait-ce que pour l'été. Après un instant d'hésitation, elle me laissa pour rejoindre ses parents. Si elle laissa George l'engloutir dans une étreinte, elle resta à distance respectueuse de sa mère qui de toute manière la regardait à peine. Elle était trop occupée à lorgner Lysandra qui venait de se rapprocher de Simon au bras de Leonidas. Je pris une profonde inspiration avant de me diriger vers eux, mais une jeune femme aux cheveux roses vifs me coupa la route. Il me fallut la dévisager plusieurs secondes, les yeux écarquillés, avant de la reconnaître :

-Tonks ?!

-Je sais, ça ne fait pas très enterrement, Remus me l'a déjà fait remarquer, admit-t-elle en effleurant ses mèches roses. Mais j'avoue que j'étais tellement heureuse d'avoir retrouvé mon métamorphogisme hier que je n'ai pas pu résister !

-Tu veux dire que normalement tu as toujours les cheveux roses ?

-Pas toujours. Juste la plupart du temps.

Un sourire s'étira sur mes lèvres sans même que je le réalise. Je venais de comprendre ce que signifiait le retour de la particularité de la jeune femme. J'avais l'impression de recevoir la première bonne nouvelle depuis une éternité, et elle faisait réchauffer quelque chose dans ma poitrine, un espace resté vide et glacé depuis quelques jours :

-Alors ... le gars en question, il ... ?

-Bonjour Victoria.

Remus Lupin venait d'apparaître derrière Tonks, glissant ostensiblement la main sur son épaule. Malgré ce geste, il fallut que je voie les doigts de la jeune femme se nouer à ceux de mon ancien professeur pour comprendre. Le choc que je ressentis dût forcément se percevoir, je ne fis absolument rien pour le masquer, mais Remus choisit de passer outre :

-J'ai appris pour vos grands-parents ... ils vont bien ?

-Tu crois vraiment qu'elle a besoin de parler de ça, aujourd'hui ? rétorqua Tonks à ma place, avant de passer une main sur sa joue mal rasée. Je dois lui parler, je te rejoins tout de suite.

Il eut un instant de flottement où Remus contempla Tonks, l'air incertain. Son sourire me sembla légèrement crispé lorsqu'il se détacha d'elle pour rejoindre Kingsley un peu plus loin. Tonks le suivit du regard, un sourire étrange aux lèvres avant de tourner son attention vers ma personne médusée devant elle. Son sourire se fana et elle leva les yeux au ciel.

-Oui, je sais ! Bla-bla il est plus vieux que moi, bla-bla c'est un loup-garou ...

Un peu de tout cela et plus encore. Oui, c'était perturbant de savoir mon ancien professeur, avec ses cheveux gris et ses rides prématurées, au bras d'une Tonks qui avait juste quelques années de plus que moi. Mais face au regard buté de la jeune femme, je compris que je n'avais pas le droit de l'exprimer et choisis plutôt :

-Non ! C'est juste ... inattendu. Mais si ça te rend heureuse, je suis contente pour toi ... pour vous.

Tonks eut un sourire qui atteignit avec difficulté ses yeux brillants. Oui, elle semblait heureuse ; un bonheur mis en sourdine par le choc récent et le deuil qui s'amorçait. Son regard se perdit vaguement du côté de la tombe blanche et de nouveau, cela détruisit les miettes de joie sur son visage pour les remplacer par une mine morne, désespérée. Sa main alla se poser sur mon épaule à tâtons.

-Ecoute ... Tu n'as pas à te sentir coupable, tu le sais ?

-Pardon ?

La tête de Tonks oscilla et ses cheveux roses effleurèrent ses épaules en rythme. C'était incroyable comment, malgré le côté artificiel de la teinture, la couleur semblait naturelle pour elle. Elle s'harmonisait avec son teint, avec l'éclat de ses yeux sombres, égayaient son visage en forme de cœur. Elle se rapprocha de moi pour baisser d'un ton, le visage crispé :

-Pour ce qui s'est passé ... Victoria, on n'aurait rien pu faire. Ding n'était plus là pour nous prévenir, l'intrusion de la boutique a été un cuisant échec ... Et de toute manière, on a compris que beaucoup se faisait d'ici. On n'aurait rien trouvé dans la boutique, tout se préparait ici, depuis l'intérieur de Poudlard ... Le petit Malefoy, il était seul à gérer ça ... Vraiment, Victoria, on n'aurait pas pu deviner ... Tu m'entends ?

A dire vrai, j'étais occupée à repousser ses mots de toutes mes forces, mais ils m'atteignirent tout de même pour me compresser la gorge. C'était tout ce de quoi je me défendais depuis que j'avais appris la sinistre nouvelle : si la pensée parvenait à s'introduire en moi, elle me boufferait. Comme la mort d'Alma Thomasson me rongeait l'âme, comme si j'avais tenu la baguette, comme si je l'avais moi-même abandonnée aux flammes. Et c'était le cas, en un sens. Je n'étais pas prête à accepter une autre culpabilité, même infime, même insignifiante dans la mort de Dumbledore.

Non. Non, je n'étais pas prête, mais mes efforts se révélèrent vains et un voile de larme vint m'obstruer la vue. Comment ça j'en ai encore ? m'étonnai-je en battant désespérément des cils pour les chasser. Peine perdue : Tonks les capta et prit mon visage en coupe avec un « oh » à peine formé sur ses lèvres.

-Victoria ... Ce n'est vraiment pas ta faute. Tu ne peux pas porter le poids du monde sur tes épaules, d'accord ? Je sais que c'est ton principal défaut. Tu prends tes peines et celles des autres, tu absorbes tout. Arrête ça, d'accord ? La femme chez tes grands-parents, Dumbledore ... ce ne seront pas les premiers, tu comprends ? Il y en aura d'autre. Et il ne faut pas que tu flanches face à cela ...

Ça ressemblait tant aux conseils que Remus avait pu me donner pendant la formation de l'Ordre que je me fendis d'un rire étranglé.

-Je sais ... je sais, c'est juste ...

-Je sais, répéta Tonks, un sourire triste aux lèvres. C'est toujours plus difficile pour les grands cœurs de faire face aux horreurs du monde ... C'est tellement cruel de te demander cela, mais il faut que tu le fasses ...

Votre question prouve simplement que vous avez du cœur. Gardez-le, Victoria, c'est ce qui fait votre force. Le souffle de la voix de l'ancien Directeur m'immisça dans ma tête et trouva un écho retentissant. La dernière vision que j'avais eu de lui, appuyée de sa main noircie sur le mur, s'imprima derrière ma rétine. Il avait eu l'air si vieux, si vulnérable la dernière fois que je l'avais vu ... C'était sans doute pour cela que j'avais à peine réagi à l'annonce de sa mort, tant, malgré sa violence, elle semblait aller de soi. Sa place dans l'arbre généalogique de Simon, la comparaison à la grande maison délabrée sur la colline qui avait habitée son enfance, l'éclat las dans ses yeux bleus, et cette main, cette main noircie qui le soutenait ... Dumbledore était vieux. Dumbledore avait vécu, tant vécu, trop vécu ... Oui, Dumbledore n'avait été que l'ombre de lui-même ce jour-là dans la cuisine des Black. A un pas de retourner à la poussière.

La brise rafraichit mon visage et révéla la caresse des larmes. Je les écrasai du dos de main et me reprit d'une inspiration tremblante.

-Ma grand-mère m'a dit « qui sauve une vie sauve le monde entier ». J'ai perdu deux vies en l'espace de trois jours ... Plus que perdu. J'ai sacrifié deux vies ... Alors ...

-Alors rien du tout, me coupa fermement Tonks. Pleure-les, honore leur mémoire ... Mais ne te rends pas coupable, Victoria, tu as te rendre folle. Le seul coupable, c'est celui qui tient la baguette, d'accord ? Lui et Tu-Sais-Qui.

-Voldemort.

J'avais prononcé le nom avec une pointe de rage, à la fois exaspérée qu'une Auror courageuse comme Tonks se sentent obligée de passer par de tels artifices et animée de la même détermination presque vengeresse qui m'avait prise deux ans plus tôt, au terrain de Quidditch face à l'homme qui reposait à présent dans la tombe blanche. Mais avant de retourner à la poussière nous nous battrons, m'avait juré Dumbledore et il avait tenu promesse. Il s'était battu jusque son dernier souffle.

-Si tu veux, m'accorda Tonks de mauvaise grâce. C'est vers lui qu'il faut regarder. Lui et personne d'autre.

Je hochai la tête de façon plus vigoureuse, sans pouvoir m'empêcher de renifler pour contenir les restes de mon émotion. J'avais tenté de tout reléguer dans un coin de mon esprit pour ne pas ressentir la culpabilité, et je n'en revenais de craquer ainsi près du but. Mais Tonks venait d'animer une nouvelle vague en moi, celle que Dumbledore avait fait naître, que Simon avait nourri d'un Do you hear the people sing ? et que je tentai de suivre depuis deux ans. Et si tôt levée, la culpabilité avait été emportée.

-Merci, soufflai-je à Tonks, reconnaissante.

La jeune femme me sourit avant de me presser l'épaule. Puis elle me gratifia d'un dernier clin d'œil et s'en retourna vers Remus, ses cheveux roses bondissants sur ses épaules. Elle glissa sa main dans la sienne et je ne pus m'empêcher de remarquer le regard surpris que mon ancien professeur adressa à leurs doigts entrelacés, à la façon dont il s'interrompit, pris de court, presque gêné, avant de reprendre sa conversation avec Kingsley. Dire qu'il avait repoussé Tonks tous ces mois, songeai-je distraitement pour éloigner ma détresse. A cause de quoi ? La différence d'âge et la lycanthropie, comme elle avait pu le laisser entendre ?

J'embrassai l'espace du regard. Il commençait lentement à se vider de la foule. Le Ministre était parti, laissant Harry entre les mains de Ron et Hermione à l'ombrage d'un hêtre, plongé dans une grande discussion. Susan discutait toujours avec ses parents, cette fois avec animation : ses mains s'agitaient et les traits de son visage étaient crispés par la colère. Le choc et le dépassement de Rose m'arrachèrent un vague sourire et avant qu'elle ne le voit je fis volte-face ... pour me retrouver nez à nez avec Rita Skeeter.

-Oh non pas vous, lâchai-je par automatisme.

-Moi qui te pensais plus polie que cela, s'amusa la journaliste, un sourire carnassier aux lèvres. Je n'ai pas le droit de rendre hommage à un si grand homme ?

-Je doute que vous soyez venu pour rendre hommage. Qu'est-ce que vous voulez, encore ?

Skeeter essuya un petit rire qui dévoila ses belles dents bien blanches. Elle était plus soignée que la dernière fois que je l'avais vue : les pierres de ses lunettes étaient étincelantes et ses anglaises formées de part et d'autre de son visage carré. Elle plongea sa main aux griffes rouges dans un sac d'où dépassait sa plume à papote.

-Oh, mais rien ma chérie ... tu m'as déjà tout donné.

Et avec une horreur qui dût me rendre livide, je la vis extirper de son sac le carnet de Nicholas Bones, ce carnet là que je tenais entre les mains lorsque nous nous étions rencontrés chez les Dumbledore. Cette fois, ce fut un indécent hurlement de rire qui s'échappa de la gorge de la journaliste.

-Oh ta tête ! Ne panique pas ma grande, c'est juste une copie que j'ai faite pendant que tu mourrais de trouille face à l'épouvantard ... Il avait de bonnes intuitions ce cher Nick Bones. Je me suis empressée de suivre ses conseils ...

-Mais vous n'avez pas d'âme. Un Détraqueur vous a embrassé à la naissance ou quoi ?

Le sourire de Rita se mua en rictus et elle pointa le carnet sur moi d'un air menaçant.

-Oh ! Je gagne mon pain, ma chère. Je voulais juste te remercier, tu m'as ouvert une mine d'or ... Je te citerai peut-être dans les remerciements de mon livre, qui sait. Et dis au petit Bones que c'est mon paiement pour avoir tenu ma langue pendant quinze ans. (Elle pointa le ciel de son doigt crochu). Et oui Cassiopée, on est quitte maintenant !

Et sans me laisser le temps de m'indigner davantage, elle fit volte-face en rangeant le carnet dans son sac d'une main leste. Je restai plantée sous le soleil, bouillonnante de colère, honteuse d'avoir laissé la porte ouverte à Rita Skeeter de salir allégrement le nom des Dumbledore avant même qu'il ne soit mis en terre. Un cri de frustration au bord des lèvres, je me mis en quête de Simon, que je finis par repérer seul, assis devant le Lac Noir. La marche qu'il me fallut pour arriver à lui ne suffit pas à absorber la colère et je laissai éclater ma rage une fois arrivée :

-Je la hais, je la hais, je la hais !

-Oh pitié, ne me dis pas que tu hais Susan aussi maintenant, gémit Simon en pressant sa paume contre son front. Parce qu'aux dernières nouvelles c'est avec elle que je t'ai laissé. Non, Susan ce serait trop, Victoria.

Je ne pus m'empêcher de lui donner un vague coup de la jambe avant de me laisser aussi écraser contre la pelouse, remontée. Définitivement, la culpabilité était quelque chose de trop faible face à l'indignation et la vague de détermination qui venait de m'envahir et j'en avais assez de ne ressentir que de l'abattement et du désespoir.

-Pas Susan. Skeeter. Elle a copié les carnets de ton grand-père ...

Mon énervement s'était quelque peu estompé dans l'aveu, laissant place à une pointe de remords. George et Simon m'avaient fait confiance en me laissant manipuler les carnets ... Mais fort heureusement, celui-ci se contenta d'un haussement d'épaule.

-Pas surprenant de sa part ... On doit s'attendre à un article sous combien de temps ?

-Je crois qu'elle prépare carrément un livre ...

-Seigneur ...

Je lui jetai un vague regard amusé et le sourire qui retroussa ses lèvres m'indiqua qu'il avait parfaitement réalisé avoir imité mon parlé sans le vouloir. L'espace d'un instant notre complicité sembla là, tangible le temps de ce sourire jusqu'à ce qu'il se fane de nouveau pour demander :

-Et Susan, du coup ?

-Avec vos parents ...

Une grimace accueillit la nouvelle. Ils n'avaient revu ses parents qu'une ou deux fois depuis l'attaque, chaque fois pour des disputes avec sa mère dont il s'était sorti, mais toujours de mauvaise humeur, déprimé, voire tourmenté. D'où les cernes qui ne cessait de marquer sa peau et son air blême malgré le soleil et les taches de rousseur. Il avait rivé ses yeux sur le Lac, suivant des yeux les vaguelettes à la surface qui semblaient indiquer la présence du calamar géant sous l'eau, comme éteint. Malgré la forte luminosité ambiante, ses prunelles restaient sombres, proche de l'émeraude. Depuis que j'étais arrivée, il semblait s'être quelque peu replié sur lui-même, comme pour éviter de me frôler par inadvertance et me revoir m'éloigner. La constatation me serra affreusement le cœur. D'un geste distrait, je caressai la breloque au petit soleil sur mon poignet, mais ça ne fut que me nouer la gorge. Simon jouait sans cesse avec lui aussi.

-Dis ... tu penses que c'est perdu ?

-Quoi ?

-La guerre. Avec ... enfin ... (Incapable de nommer la chose, je désignai la tombe blanche plus loin). Tu penses que c'est perdu ... ?

Simon papillonna des yeux, l'air surpris du sujet de conversation. Il était vrai que je l'évitai depuis plusieurs jours, mais la conversation avec Tonks m'avait sereinement remis les idées en place. Il se mit à tracer des cercles sur son genou, les lèvres pincées.

-Non. Mais je ne pensais pas que c'était gagné avant de toute façon ... Soyons honnête, ce n'est pas Dumbledore qui risquait de faire la différence. Il n'a pas réussi à le faire pendant la première guerre. Non, c'est un bébé qui l'a faite ...

Je cherchai brièvement Harry du regard, pour le trouver toujours à l'ombre de l'hêtre, entouré de Ron et de Hermione. Il me semblait l'avoir aperçu également en grande conversation avec Ginny Weasley, également, juste après la fin de la cérémonie. Nerveuse, je pris un galet et le fis tourner entre mes doigts.

-Je n'en sais rien. C'était lui qui maintenait l'espoir, tu vois ? Le phénix. C'était lui, pas Harry ... Alors s'il n'est plus là ... Si l'espoir s'envole avec le phénix ... alors quoi, on abandonne ?

L'idée révulsait toute mon être. Je revoyais les tatouages sur le bras de ma grand-mère, j'entendais encore parfois le cri de mon frère quand Nestor l'avait torturé sur le toit de Bristol, la rage de mon grand-père quand on avait attaqué sa famille ... Non, pour eux je n'avais pas le droit d'abandonner, de baisser les bras, mais à quoi bon lutter seule ? Simon garda le silence quelques secondes, suivant du regard les mouvements que faisait mon galet entre mes doigts.

-Tu sais ce qui s'est passé ? entonna-t-il finalement. Avec le QG ?

Je hochai la tête. Oui, Fred m'avait prévenu. Rogue faisait parti de l'Ordre du Phénix. Je ne l'avais jamais su et cela avait ajouté à mon désarroi – quelqu'un de si proche, un ancien Mangemort ... pourquoi ? Toujours était-il qu'avec la mort de Dumbledore, le sortilège de Fidelitas avait été transféré à tous les détendeurs du secret. Nous étions tous devenus les Gardiens du Secret du 12, Square Grimmaurd.

Et comme Rogue en faisait désormais parti et avait certainement transmis l'information aux Mangemorts, nous avions interdiction stricte d'y remettre les pieds.

Plus de QG. Avec Dumbledore, c'était notre autre facteur d'unité. Et même si la vieille, sinistre et décrépie maison des Black n'allait pas me manquer, j'admettais que c'était un coup dur. Mais cela fit sourire Simon. Un improbable sourire qui me laissa pantoise.

-Alors voilà comment je vois les choses. Quand il ... nous a transmis le secret, il nous a transmis aussi sa mission. Continuer de faire vivre l'espoir, s'embraser le phénix. Sa cause n'est pas morte avec lui, Vicky. Il ne faut pas. On n'a pas le droit. Moi je n'ai pas le droit, en tout cas. J'ai déjà trop perdu à cause de ça, je refuse ... je refuse de céder plus.

Un tic nerveux agita ses lèvres et je sus que les images de la semaine dernière lui revenaient en tête, qu'une vague de culpabilité le submergeait parce qu'il avait justement failli me céder. Mais il fit l'effort de se remobiliser, à se constituer un masque volontaire. Je sais que tu ne me crois pas maintenant ... mais je ferai tout pour te le prouver. Je clignai des yeux pour en chasser l'humidité. Il serait venu, me répétai-je pour la millième fois depuis une semaine. Sans Rose, il serait venu. Il est même allé dans les flammes, c'est juste que j'ai refusé de le voir. Trop tard, mais il est venu. Il a sauvé la mémoire ...

-Je n'ai pas le droit non plus, conclus-je finalement, avant d'ajouter dans un filet de voix étranglé : Il m'a demandé de publier mon livre ...

Simon tourna brusquement le visage vers moi, sans pour autant me regarder : ses yeux s'accrochèrent au galet que je faisais tourner de plus en plus frénétiquement dans mes mains. La sienne avait tressailli avant de se crisper sur son genou.

-Alors tu sais ce qui te reste à faire, lâcha-t-il avec l'ébauche d'un sourire.

J'acquiesçai silencieusement, la gorgée nouée. Oui, c'était ce que j'avais de mieux à faire dans l'immédiat. Pour moi, pour lui, pour mettre fin à cette absurdité qui me bouffait la vie depuis deux ans. Gagner la guerre des mots. Je relevai le regard sur Simon. Lui fixait toujours le galet, comme hypnotisé, mais je devinai que c'était surtout pour s'épargner ma vue. Ne pas être tenté de m'effleurer de nouveau. Mais j'étais la seule chose qui le torturait dans l'immédiat, constatai-je, saisie. Le reste, il parvenait parfaitement à le gérer, à l'intégrer. Un élan brûlant monta dans ma poitrine et je m'entendis murmurer :

-Je suis fière de toi.

Le regard de Simon passa du galet à moi, abasourdi.

-Pardon ?

-Tu as su gérer tout ça. L'attaque de mes grands-parents, la crise de panique, toutes tes décisions ... la ... (je pris une profonde inspiration pour me mobiliser et lâcher dans un souffle : ) mort de Dumbledore. Et tout ça tu l'as géré sans moi ... Tout seul.

Contrairement à la mort de Cédric où il s'était replié sur moi – et inversement. Contrairement à la fuite de Jugson où j'avais été forcée de le repêcher au fond du gouffre. Contrairement à toutes les crises qu'il avait pu avoir petit et qui avaient été apaisées par sa mère. Non, cette fois Simon s'était sortie de l'abîme seul. Et c'était dire tout le chemin qu'il avait parcouru depuis cette année ...

Il ne paraissait pas complètement en être conscient, à dire vrai. Il semblait sincèrement stupéfait de ma constatation et se contenta de passer une main perplexe dans ses cheveux. Même pour Dumbledore, il n'avait pas pris la peine de se coiffer.

-Euh ... Emily m'a un peu aidé.

-Emily n'est pas moi.

-Non, c'est vrai, admit-t-il en détournant le regard. Mais quand même. Par exemple ... c'est elle qui m'a dit de ne pas aller te voir avant de trouver des solutions ...

Un air penaud se peignit sur ses traits et il laissa échapper un petit souffle suivi d'un claquement de langue embarrassé, sans doute gêné de choisir cet exemple parmi d'autres. Je me mordis l'intérieur de la joue. C'était presque plus attendrissant qu'autre chose. Presque touchant les efforts qu'il faisait pour ne pas m'embarrasser, pour cesser de peser de tout son poids sur moi. Pour me prouver qu'il serait là, qu'il supporterait ma colère en silence.

-Hé ...

Il eut simplement le temps de tourner la tête : je m'étais déjà inclinée et mes lèvres effleurèrent les siennes d'un tendre baiser. Ce n'était pas grand-chose, juste un effleurement, sans autre point de jonction que nos lèvres. Il eut même à peine le temps de réagir. Mais c'était une preuve que je voulais lui donner que le pardon était là, à portée de main et que je faisais tous les efforts possibles pour y parvenir. Parce que malgré tout, je ne pouvais pas me défaire de lui, jamais. Je ne m'écartai pas complètement après le baiser et pressai mon front contre le sien, savourai son souffle chaud qui me hérissait la peau. Simon laissa échapper un petit rire incrédule, les yeux clos.

-Dis, tu te souviens quand tu m'as dit que tu avais été vexé parce que j'avais lâché ta main ? A la fête de Slughorn ? Enfin non, tu me l'as dit dans ton cellier ...

-C'est la fois où j'ai failli t'exploser une bouteille de jus de pomme sur la tête ? murmurai-je, un sourire dans la voix.

-Cette fois-là, parfaitement. Je n'avais pas bien compris sur le coup, pourquoi ça t'avait tant affecté ... et ... disons que maintenant, je vois. Je suis désolé.

-Moi aussi ...

L'émotion contenue dans ma voix parut donner la confiance nécessaire à Simon pour pencher la tête, un tout petit peu, un simple test que je vins récompenser en posant de nouveau mes lèvres sur les siennes. Cette fois, je l'accompagnai d'une main sur la nuque pour me stabiliser et Simon s'écarta avec un sursaut, l'air surpris.

-C'est quoi ça ?

Je récupérai ma main et me rendis compte que je tenais encore le galet. C'était sans doute son contact qui avait dû surprendre Simon. Je fixai la pierre grise d'un air absent, assez frappé par son aspect lissé par le temps, sa douce chaleur qui se diffusait d'elle après des heures à chauffer sous le soleil, sa texture agréable et presque vivante sous les doigts. Je le ramenai à moi, fascinée, pendant que Simon lâchait un petit rire cynique.

-Bien tenté, Bennett. C'était pour me l'exploser sur le crâne, celui-là ?

-Oh la ferme. Attends ... je reviens.

Je l'embrassai brièvement sur la joue – un nouveau baiser qui parut définitivement le détendre et l'apaiser – avant de me lever. Je trouvai deux autres galets sur la rive et les réunis dans ma paume, le cœur battant. C'était un Juste, avait soufflé ma grand-mère. Qui sauve une vie sauve le monde entier ... ça venait de la Torah, j'en étais persuadée. Jaga, née Stern, n'avait jamais été croyante, avait rarement posé un orteil dans une synagogue, mais avait gardé sa culture du judaïsme. Le symbole le plus prégnant était là, contre mon sternum, cette étoile de David que sa propre grand-mère lui avait offerte.

Mes jambes me portèrent jusque la tombe blanche, à présent uniquement entourée de chaises vides et des professeurs de Poudlard, regroupés non loin autour de McGonagall. Les galets pressés contre ma poitrine, je m'avançai vers Chourave, incroyablement soignée pour l'occasion – ongle propres, chapeau presque neuf, robe noire à peine rapiécée.

-Professeur !

-Bennett ? s'étonna-t-elle, les sourcils haussés. Oh Victoria, vous êtes venue ... Albus aurait été touché.

Le regard brun de mon ancienne directrice de Maison s'embua légèrement et elle joignit ses mains sur sa poitrine. Tous les professeurs avaient l'air profondément affligé : McGonagall tenait un mouchoir à carreau dans son poing, Flitwick donna de vague tape dans le dos d'une femme qui me semblait enseigné la divination, et le professeur Slughorn contemplait le vide, les mains croisés sur son imposante bedaine. Sur sa chaise à côté du géant, Hagrid sanglotait toujours éperdument. Mon cœur fit un soubresaut lorsque je croisai le regard bleu de Charity Burbage, mon ancienne professeure d'Etude des moldus. Elle me fixait, intriguée par mon intervention mais je ne pus soutenir plus longtemps son regard de peur de voir apparaître le spectre de Matthew Bones. Je me tournai résolument vers Chourave, le souffle court.

-Est-ce que ... est-ce que je peux juste rendre hommage ... à ma façon ? S'il vous plait ...

Chourave dressa les sourcils plus haut quand je montrai les galets dans mes doigts. Les autres professeurs échangèrent des regards grandement perplexes et McGonagall – la directrice McGonagall, réalisai-je, et cela me creva le cœur – finit par cingler d'une voix étouffée :

-Mais enfin, Bennett, qu'est-ce que signifie ... ?

-Minerva, s'il vous plait, intervint Burbage en posant une main sur son bras. Je vous expliquerai ... laissez-la faire.

McGonagall parut hésiter tout de même, jusqu'à ce que Chourave la supplie également silencieusement. Elle finit par donner son consentement dans un soupir et me laissa passer avec un large geste vers la tombe de marbre blanc. Je les remerciai rapidement et m'avançai vers la sépulture avec révérence. Plus elle devenait nette, plus il m'était difficile de croire qu'Albus Dumbledore reposait là-dessous. Néanmoins, j'avais la sensation d'approcher une sorte de monument mystique : l'aura autour de moi s'épaissit, se chargea d'une solennité qui bloqua les larmes contre ma cornée. Avec des gestes révérencieux, j'empilai les galets au-dessus du large couvercle de marbre qui recouvrait la tombe.

Un hommage, une mémoire, dans la pure tradition juive.

Je reculai ensuite d'un pas, une boule d'émotion dans la gorge, les mains jointes devant moi en signe de recueillement. Le regard des professeurs derrière moi me brûlait la nuque, mais je les ignorai pour ne garder dans mon univers que ce tombeau blanc et l'illustre homme qu'elle renfermait. Un homme qui allait manquer au monde ... un homme qui l'avait transmis une mission, qui l'avait fait naître la flamme en moi.

-Ma grand-mère a raison, vous étiez un Juste, professeur, soufflai-je face à la tombe blanche, les yeux rivés sur mes galets gris. Je vous le promets, avant de retourner à la poussière je me battrai. Je suivrai l'ardeur qui m'emporte et dans l'assaut je crierai : Dieu pour Cédric, Angleterre ... et Albus Dumbledore.

FIN DE LA PARTIE III

***

ET VOILA C'EST FINI 

J'espère que ce chapitre clôt parfaitement cette partie et vous aura plu ! 

Deux ans plus tard, j'admets que je n'étais pas mécontente de poser le point final. Plus un sentiment ambivalent parce qu'il ne reste qu'une seule à écrire ... Une seule et j'aurais fini ce travail titanesque qui me prend depuis quatre ans PFIOUH. 

Alors personnellement j'ai aussi un sentiment ambivalent par rapport à cette partie. J'ai écris parmi mes meilleurs moments de cette histoire (toutes les parties sur le Simoria ahah) mais ça a été moins fluide, moins facile que les deux premières où j'étais capable d'écrire dix chapitres d'un seul tenant et hyper vite. Là c'était plus par à-coup. Avec pas mal de blocages (les fiançailles d'Octaviaaaa quelle horreur) 

J'ai plein de regret. Je me suis trop éparpillée. Est-ce que je n'aurais pas dû faire de Victoria simplement une historienne au lieu de l'envoyer dans le Quidditch? ça m'aurait libéré du temps ... Je ne suis pas sûre d'avoir parfaitement géré l'Ordre aussi, c'est une intrigue que j'ai eu beaucoup de mal à mettre en place. 

Mais aussi plein de satisfaction ! Je pense que j'ai plutôt bien géré le Simoria et le traumatisme de Simon par exemple et avoir fait quelques belles scènes. 

Donc voilà ! Je ne vais pas faire de bilan, on se réserve ça pour la fin de la partie 4 ! Mais n'hésitez pas à me dire ce que vous avez pensé de cette partie, vos moments préférés, vos évolutions de personnages préférées, les thèmes abordés ... Tout ce que vous avez envie de dire ! 

La partie 4 est écrite à hauteur de 5 chapitres. Vous attendez quoi? 

Justement parlons-en. VOus l'avez vu, je ne suis pas à mes 10 chapitres de conforts. Encore 5 et je pourrais poster ... Donc une petite pause s'annonce. ça m'embête vraiment je me suis jamais arrêtée ... Mais bon quand je vous l'ai annoncé vous avez tous.tes été super compréhensifs donc merci <3 

Je vous laisserai pas en plan ! Pendant cette pause, il y a aura un bonus, les aesthetic, les mèmes de Lina, le chapitre de transition  (et un épisode des "récits de Perri" parce que ça fait longtemps !) Donc ça fait quand même pas mal de chose ! Et dès que j'atteins les 10 chapitres, vous serez prévenu.es ! 

Merci à vous de continuer de suivre cette histoire ! Merci à Anna pour le brainstorming, les relectures et le soutiens, merci à tout le monde, je vous aime et à bientôt <3



Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro