III - Chapitre 40 : Déterminer les limites
BONJOUR TOUT LE MONDE
Sachez que vous avez failli avoir le chapitre hier. Aujourd'hui je devais être en formation à deux heures de chez moi (et ça me foutait une flemme folle) et du coup je devais poster le chapitre hier parce que je n'aurais clairement pas eu le temps. MAIS IL SE TROUVE que ma formation a été repoussée ! (et qu'une danse de la joie ait été exécutée). Bref, je suis ravie parce que je suis déjà rentrée dans le Nord Mercredi pour aller voir le huitième de final de Ligue des Champions (ambiance foooooolle) et je re-rentre ce WE pour l'anniversaire de mon papy CA AURAIT FAIT BEAUCOUP DE ROUTE
Il se peut que pour fêter ça j'ai souhaité vous donner le chapitre quand même. Mais Wattpad m'a tout mis en italique, et j'étais au travail donc clairement pas la foi de tout corriger. Est-ce que je suis en train de prier pour que ça n'arrive pas? Parfaitement !
BREF on s'en fout de ma vie (Y'a un WE de sport absolument exceptionnel qui m'attends, dernières courses de biathlon, premier GP de F1 ... ET LE CRUNCH GO MANGER DU ROSBEEF).
La Partie 3 est achevée d'écrire, j'ai récupéré sept chapitres d'avance, ce qui est bien plus confortable et respirable ! La Partie 4 n'est pas encore commencée mais la trame est réglée comme du papier à musique, j'ai rarement eu ça. Je suis presque capable de vous prédire le nombre de chapitre.
En tout cas je vous l'annonce de suite : je ne poste pas la Partie 4 tant que je n'ai pas 10 chapitres d'avance. ça me stresse trop sinon, j'ai pas été bien toute la fin de partie à cause de ça. Donc ça me donne 14 semaines pour écrire 10 chapitre *craque ses doigts au dessus du clavier*
J'ai de très bons pronos pour le chapitre de transition (chuuuuut) !
ALLEZ PLACE AU CHAPITRE. Alors un peu bizarre. C'est une scène que j'avais en tête depuis le début donc je ne voulais pas y renoncer. Mais ça tombe assez à contre sens si on veut. Enfin bref, j'explique à la fin ! Bonne lecture <3
(Perri c'est quoi cette intro de 3km de long?)
OH LA CITATION. J'adore la mécanique du cœur. Film, livre et chansons. Voilà. Allez écouter les chansons.
Putain d'italique. Wattpad je te hais.
***
J'étudie la mécanique du cœur avec passion, je tente d'en ouvrir les serrures bloquées, avec des clés douces. Mais certains endroits semblent fermés à tout jamais.
- La Mécanique du cœur
Matthias Malzieu
***
Chapitre 40 : Déterminer les limites
-Sirius ...
-Tu vas t'en remettre ?
Extatique, je secouai la tête vigoureusement et Simon poussa un profond soupir. Penché sur son bureau, il était occupé à rédiger un protocole complexe de sortilège, avec une monotonie et un entrain des plus mesurés – il préférait toujours pratiquer que s'attaquer à la paperasse. La plume écrivait très lentement, sa main retenait sa tête comme si celle-ci devenait trop lourde pour sa nuque et je n'avouai n'absolument pas aider en sa concentration. J'étais arrivée avec une succincte séance sportive de Quidditch qui ne servait à rien d'autre qu'à maintenir un niveau en attendant que la Petite Ligue reprenne. Officiellement, j'étais venue continuer la rédaction de mon projet ; officieusement, je tournai depuis une demi-heure dans sa chambre, bien trop excitée pour simplement me poser sur ma machine à écrire.
-Non, annonçai-je en écartant triomphalement les bras. Pas tout de suite. Il faut que je m'habitue, que je l'intègre, que je me fasse à l'idée que ça fait parti de toi. Que c'est toi. Simon Sirius Bones.
-Et du coup j'en suis quitte à ce que tu m'appelles comme ça combien de temps comme ça ? demanda-t-il avec le ton de l'ennui suprême.
-Jusqu'à ce que j'aie rattrapé tous les « Victoria Anne Jadwiga Bennett » que tu m'as mis dans la tête.
Simon se retourna à peine pour me jeter un petit regard, un sourcil dressé.
-Hum ... Longtemps donc ?
Mon grand sourire lui donna sa réponse et il secoua la tête d'un air désabusé avant de s'en retourner à son parchemin. Toujours pleine d'énergie nerveuse, je me jetai sur son lit, les bras en croix et me laissai rebondir comme une enfant. Le temps de mai était clair, sans nuage et j'en étais presque frustrée de rester à l'intérieur. Par ce temps-là à Poudlard, nous nous serions baladés dans le parc avec Emily, à réviser nos examens dans la pelouse pendant que Simon faisait la sieste à l'ombre d'un frêne.
-On va travailler sur la terrasse ? proposai-je, emportée par la nostalgie.
-Je travaille, rectifia Simon. Toi tu ... je ne sais même pas ce que tu fais.
-Je savoure. Simon Sirius ...
Je me tortillai de façon à ce que ma tête bascule dans le vide et que je puisse avoir un visuel sur Simon, de dos, toujours nonchalamment penché sur son parchemin, l'air déterminé à m'ignorer.
-Et pourquoi ?
-Comment ça, pourquoi ?
-Pourquoi tu t'appelles comme ça ? Tes frères c'est par tradition mais ça ne correspondait à rien, si on veut. Toi ce n'est pas neutre. Tu ne portes pas simplement le nom d'une étoile, tu portes le nom de quelqu'un.
Et il avait été longuement là, le nœud du problème. Je l'avais saisi dès alors que j'étais encore avec Melania. « Je pense que chaque étoile a son importance, avait-t-elle commencé avec son petit sourire triste. Mais dans la constellation celle qui brille le plus, c'est Sirius ». Sirius, Sirius comme Sirius Black, celui qui avait longuement été considéré comme l'un des pires criminels enfermés à Azkaban, lieutenant et bras-droit de Voldemort, voire même son héritier. Ce n'était pas étonnant que Simon ait répugné à révéler un pareil prénom. Ce n'était pas que du déni, le rappel de sa mère, cette femme qu'il avait perdue et dont il avait longtemps refusé de se souvenir. C'était de la honte, de l'embarras, celui de pour toujours porter d'opprobre d'un criminel. Je n'arrivai pas à comprendre comment Cassiopée avait pu donner ce prénom à son dernier-né.
Après un instant de flottement, Simon lâcha sa plume et se redressa pour me faire face. Un sourire frémit sur ses lèvres quand il me vit allonger, la tête à l'envers et mon regard planté sur lui.
-Est-ce que tu serais fière de moi si je te disais que j'ai posé cette exacte question à Lysandra à Noël ? Après que tu aies odieusement tenté de lui soutirer ...
-Très fière, affirmai-je avec un certain détachement. Et de ce fait ?
La bouche de Simon se tordit et il se tourna plus franchement vers moi, un bras appuyé sur le dos de son fauteuil.
-Je suis né quasiment au moment où il sortait de Poudlard, expliqua-t-il d'un ton résolument neutre. Apparemment, ma mère y a vu un signe. Elle ne lui a jamais beaucoup parlé – ils ont pas mal d'écart et sont assez loin dans l'arbre généalogique. Mais elle l'aimait bien. Tu sais, on a commencé à le considérer comme un criminel après la mort des Potter donc j'avais déjà trois ans. Avant, c'était tout le contraire. C'était justement l'héritier Black qui avait claqué la porte du 12 Square Grimmaurd parce qu'il refusait de se plier aux exigences sang-pures. Je pense qu'elle le respectait pour ça.
Son regard se perdit à travers la fenêtre de laquelle s'échappait une petite brise qui faisait trembler les fines mèches sur son front. Avec le soleil qui revenait, ses cheveux s'éclaircissaient de nouveau et ses tâches de rousseurs commençaient à ressortir pour consteller ses joues.
-En plus, Lupin m'a dit qu'il venait de s'engager dans l'Ordre du Phénix. Quand je suis né. Je suppose que ça a dû compter aussi ... Mais ça Lysandra ne doit pas le savoir.
-Certainement, admis-je avant de froncer les sourcils. Tu as interrogé Lupin aussi ?
-Un peu, il n'est pas très disponible depuis Noël ... (Il se pinça l'arrête d'un nez entre le pouce et l'index, brusquement contrarié). J'ai l'impression qu'il y a quelque chose qui s'emballe là-bas. Tu as des nouvelles ?
Je secouai la tête en signe de négation et me redressai. La conversation nerveuse s'était chargée de me ravir toute mon énergie et la fatigue commençait à s'installer dans mes muscles après la séance de sport matinale. J'étendis mes jambes pour les étirer et allai attraper mon talon de ma main.
-Non, ils ne m'appellent quasiment plus. Je pense que l'histoire de la poignée porte doit être assez sérieuse, ils ont préféré reprendre le dossier ... en petit comité. Genre Tonks, Podmore. Maugrey, sûrem ...
Je m'interrompis quand Simon posa précipitamment un doigt sur ses lèvres. Le geste dura moins d'une seconde mais fut explicité quand il pointa brièvement la porte ensuite avant de refermer son poing sous son menton. Je fronçai les sourcils mais une seconde plus tard, la porte s'ouvrit à la volée. Rose apparut alors, la main sur la poignée. Elle nous observa tous les deux d'un drôle d'air avant de sourire.
-Vous pouvez garder la porte ouverte ?
-Pourquoi ? répondit Simon, sur la réserve.
-Je préfère. Sécurité. Tu as du linge ?
Le mot « sécurité » avait échauffé mes joues et plutôt que de m'attarder sur Rose, ou la réaction de Simon, je me concentrai sur mes étirements jusqu'à presque me retrouver allongée sur ma jambe. Mon élasticité était l'une de mes forces au Quidditch, ce qui me distinguait par rapports aux Gardiens massifs mais peu agiles et dans les faits, une partie de mon entrainement s'apparentait à celui d'une gymnaste.
-Non, j'ai tout descendu hier ..., disait Simon à sa mère, toujours d'une voix prudente. Mais laisse, je ferais ce soir après avoir fini ça ...
-Vu ta concentration tu y seras encore ce soir ...
La voix de Rose était empreinte d'un certain reproche sur lequel j'eus tout le temps de méditer puisqu'un petit silence s'ensuivit. Les pas de Rose finirent par s'éloigner sur le parquet grinçant et couinant jusqu'à ce qu'elle atteigne l'escalier. Là, Simon quitta sa chaise pour me rejoindre sur le lit au moment où me redressait.
-Allez stop la ballerine. On sort.
Je haussai les sourcils.
-On va travailler sur la terrasse ?
-Non, on sort, insista Simon, sérieux. Je commence à en avoir assez de ma mère. Allez, dépêche-toi !
Il tira sur ma cheville avant de bondir en dehors du lit pour mettre ses baskets. Un peu perplexe – et ravie de pouvoir changer d'air – je m'exécutai, remis mes chaussures et récupérai mon gilet derrière sa chaise. Ce faisant, mon regard tomba sur les affaires amassées à côté du bureau de Simon. Tout ce qu'il avait descendu du grenier. Si certains objets avaient trouvé une place – la boite de musique de sa mère sur sa table de nuit, les partitions non loin de sa guitare – certaines restaient entassées là, dans l'attente de trouver une place, une signification. Parmi elles, les carnets manuscrits de Nicholas Bones. Mue d'une soudaine impulsion, je les attrapai avant de suivre Simon qui m'attendait sur le seuil de sa porte, le visage fermé. Il m'adressa à peine un regard mais glissa sa main dans la mienne alors qu'on descendait les escaliers. Au milieu du second, il cria à la volée « A toute maman ! » avant de presque courir jusque la porte, m'entrainant complètement dans son sillage. Il fallut que la maison soit loin derrière nous pour qu'il daigne ralentir le pas et resserrer sa prise sur ma main.
-D'accord, lançai-je, un brin essoufflée. C'est quoi le problème ?
Je glissai ma main dans mon gilet pour en tirer une paire de lunette de soleil ronde que je me félicitai d'avoir pris. Un des bonheurs de voir le soleil reprendre sa place naturelle dans le ciel d'Angleterre : ressortir ces accessoires essentiels. Simon poussa un profond soupir et ses doigts s'agitèrent compulsivement contre les miens.
-Rien. C'est juste. Elle est pas mal ... suspicieuse en ce moment.
-Par rapport à moi ?
Tu sais dans quoi tu t'engages avec les Bones ? demanda insidieusement Lysandra en écho, mais je repoussai la remarque dans un coin de mon esprit. George restait adorable avec moi et Rose ... La vérité était que j'avais assez peu affaire à elle et c'était pourquoi que j'étais relativement surprise de la réaction de Simon. Je coulai un regard sur lui, où son visage m'apparut déformé par la teinture rosée de mes verres. Ses traits étaient toujours crispés mais ses joues semblaient s'être autrement plus coloré la simple teinte de mes lunettes.
-Est-ce ... qu'on peut attendre d'être posé pour parler de ça ? s'enquit-t-il à voix plus basse.
-A ce point ...
-Vicky ... Attends, tu as pris quoi ?
Il désigna la main qu'il ne tenait pas du menton et je baissai les yeux sur ma prise impulsive. Je la levai avec un sourire penaud.
-Les carnets de ton grand-père. Je me suis dit que quitte à faire une promenade, autant vérifier si la Maison Hantée est bien celle des Dumbledore, non ? ça te dit une exploration ?
Simon hésita un instant avant d'un petit sourire ne s'imprime sur ses lèvres. Avec un hochement de tête, il se laissa faire et me laissa le mener jusqu'aux hauteurs de Terre-en-Landes et la partie la plus ancienne du village. Il nous fallut pour cela traverser un Market Square blindé en ce samedi après-midi. Simon ne dénoua pas un seul instant ses doigts des miens et cela fit naître un sourire absurde sur mes lèvres. Chloé l'avait su, et par la suite Simon avait abandonné l'idée du moindre secret : elle avait tant vociféré sur nous que bientôt certains voisins avaient passé leur tête par la fenêtre pour comprendre d'où venaient les cris. J'avais l'impression que depuis, la moitié du village avait compris que la fille du révérend sortait avec le fils du révérend de la grande maison dans les bassesses de la commune. Pendant notre traversée, je captai quelques regards sur nous qui glissaient jusque nos doigts entrelacés et je nous obligeai à emprunter les ruelles plus calmes avant qu'ils ne pèsent à Simon. Mais il semblait si profondément ancré dans ses pensées qu'il était coupé du monde extérieur. Il me suivait mécaniquement, sans faire attention aux chemins empruntés, jusqu'à ce que la rue à la gloire déchue se dessine de part et d'autre de la route.
De grandes et belles maisons, certaines entretenues avec soin et d'autre rongées et recouvertes de lierre. Elle se situait au sommet de la colline, à l'endroit le plus haut de la ville – et jadis s'y trouvait une place où les présumées sorcière étaient brûlées, avais-je lu un jour. Certains des habitants les plus fortunés y habitaient encore, comme l'Ancien qui refusait de quitter sa bigote pourtant en presque ruine. Finalement au bout de la rue, nous atteignîmes la Maison Hantée, de loin la bâtisse la plus délabrée de la rue. En un sens, elle m'évoquait Jaga : décharnée, abîmée, tenant debout par la force de la volonté. Les haies avaient poussé de façon diffuses et étaient si conséquentes que ça devenait difficile de se frayer un passage. Toutes les fenêtres du premier étage étaient brisées depuis longtemps, ses murs recouverts de tags – et je reconnus sur l'un d'entre eux la signature d'Ethan, mon ami d'enfance parti en Asie pour l'année.
-La dernière fois qu'on est venu ici, tu m'as giflé rappela Simon une fois passé les haies.
Elles avaient griffé ses bras et il leur jetait un regard inquiet. Vaguement amusée par le souvenir, je me gardai de répondre et sortis la vieille photo que j'avais trouvée dans le carnet, dans le grenier, pour la tenir en face de la façade et faire le comparatif. Sur le cliché, les haies étaient plus soignées, les fenêtres encore intactes, mais impossible de ne pas reconnaître la maison.
-C'est bien cela, confirmai-je en rangeant la photo entre les pages jaunies du carnet. On y rentre ?
Simon dressa un sourcil et cessa de s'examiner pour me jeter un regard moqueur.
-Attends, on est vraiment venus explorer ? Pas juste ... s'isoler ?
J'étais si surprise de l'allusion que j'abaissai le carnet pour le gratifier d'un regard écarquillé. Simon resta étrangement serein face à ma marque de choc, malgré une légère rougeur aux pommettes qui pouvait parfaitement s'expliquer par la montée qui venait de nous amener dans la rue. Il passa nonchalamment devant moi avec un haussement d'épaule et un insupportable petit sourire aux lèvres.
-Je disais juste ça comme ça ...
-Non mais ... (Faute de trouver les mots, je lui flanquai un maigre coup de pied qui l'atteint à la hanche). Dis donc Simon Sirius Bones ! Je vais finir par croire que ta mère a raison de se méfier ...
Cette fois, les joues de Simon s'empourprent nettement mais il tenta de le cacher en poursuivant sa route et gravit les marches qui nous séparait du perron de la maison. Il tente, compris-je, à la fois amusée et attendrie. Il tenait d'avoir de l'assurance, de paraître plus à l'aise, mais cette aisance était loin d'être intuitive et se fracassait dès que j'élevais le niveau. Mais l'intention était louable, assez louable pour que je me dépêche de le rejoindre à l'intérieur de la maison. La poussière me prit à la gorge ainsi que l'odeur prégnante d'humidité mais j'ignorai tous ces facteurs pour passer ma main sur la taille de Simon et me hisser sur la pointe des pieds. Même avec lui, j'étais trop petite et ne parvins qu'à atteindre la commissure de ses lèvres, mais son visage s'inclina rapidement pour me laisser y goûter pleinement. Le baiser fut bref, à peine enivrant mais j'éprouvai toute de même des difficultés à le rompre.
-On peut faire les deux, chuchotai-je avec un sourire mutin. Maintenant tu m'expliques pourquoi tu veux fuir ta mère pendant que je fouille un peu les carnets ?
Simon soupira et s'écarta d'un pas, une main sur la hanche. Ses traits s'étaient brusquement tendus mais à la façon dont il lorgna la porte d'entrée, je compris que c'était moins ma question que ce qu'il m'apprêtait à expliquer. Il sembla chercher ses mots pendant que je le libérai de mon regard pour tourner les pages du carnet de Nicholas Bones.
-Suspicieuse, donc ?
-Hum..., entonna Simon en se frottant la tempe. Disons ... tu vois que je te disais que ... j'ai une peur un peu irrationnelle de ... ce qui pouvait se passer dans un lit ?
Je ramenai le carnet devant mon visage pour dissimuler à ses yeux car un petit sourire venait d'ourler mes lèvres. Non, je n'étais pas prête d'oublier cette confidence qui lui avait échappé dans ma chambre, cette sincérité presque enfantine avec laquelle il l'avait lâchée. Elle avait mis en lumière une partie des limites de Simon, celle que je peinais depuis quelques semaines à déterminer. La faible surface qu'elle me proposait aurait pu être frustrante, voire vexante, mais pour Simon j'étais prête à ne rien brusquer, à suivre son rythme plutôt que le mien. Tout doucement. Sur ce point, c'est un oiseau effrayé. Qu'il en parle, c'est déjà beaucoup.
-Oui ?
-Et bien ... j'ai l'impression qu'elle a les mêmes, avoua-t-il dans un filet de voix. Déjà qu'elle ...
Ça, c'est de l'écarlate, remarquai-je en constatant la couleur qu'avait pris les joues de Simon. Il se mit de plus à ouvertement fuir mon regard et s'installa à même le sol, contre un très vieux sofa au velours vert usé et troué d'où sortait des ressorts et les rares restes de rembourrage. Il repoussa un mouton de poussière qui était venu s'agripper sur son jean. Son mutisme se prolongea et la couleur s'accentua de seconde en seconde sur ses joues, assez pour que je cesse de tourner les pages pour darder sur lui un regard interrogateur. J'eus du mal à ne pas laisser s'épanouir le sourire amusé qui ne cessait d'effleurer mes lèvres, mais s'il y avait un domaine où je devais être bienveillante, c'était lui.
-Quoi ?
-On est obligé de parler de ça ? gémit Simon, mortifié. Non, sérieusement ...
-C'est important ... ?
Ça l'était, si ça parvenait à ce qu'il s'exaspère contre sa mère, songeai-je seule, les yeux résolument rivés sur les carnets. Nicholas Bones avait une écriture serrée qui n'était pas sans rappeler celle de Simon – peut-être un gaucher comme lui. Les pages étaient pleines de notes, de petites recherches sur le village et ses anciennes familles. Je parvins à retrouver la section dédiée aux Dumbledore le temps que Simon rassemble ses idées. Je lui jetai un bref coup d'œil. Il avait laissé sa tête aller contre le canapé et fixait obstinément un point au plafond. Il frotta sa mâchoire avant de pousser un profond soupir.
-Je ne sais pas ... un peu ... mais ... Enfin, c'est difficile à aborder comme sujet, on n'en a jamais parlé, je ne t'ai jamais ...
-Simon, je viens juste d'avoir accès à la dernière pièce qui me manquait te concernant. Ne commence pas à creuser un autre fossé. Je peux tout entendre.
Il y avait de la fermeté dans ma voix mais pas d'aigreur, constatai-je, rassurée. Ni d'autoritarisme. Son regard alla se déloger du plafond pour de nouveau se river sur moi, indécis. Il lui fallut encore quelques secondes durant lesquelles il déglutit et crispa ses doigts sur le parquet rongé de la maison.
-Déjà avec Octavia, c'était quelque chose qui l'inquiétait, finit-il par avouer du bout des lèvres. Elle a failli ne pas me laisser aller à la Coupe du Monde de Quidditch parce qu'elle savait qu'on allait partager une tente à deux ...
-Pardon ? réagis-je, incrédule. Genre ... juste tous les deux ?
Après un moment d'indécision, Simon acquiesça en silence. Ses doigts s'étaient mis à jouer nerveusement sur le sol.
-J'avais quinze ans encore à l'époque. Enfin presque seize, mais je suis attaché au fait que j'en avais quinze. Et pour elle deux ados de seize ans dans une tente ... ça l'a inquiété.
-C'était pareil avec Caroline, non ? me rappelai-je soudainement. Elle faisait le mur pour rejoindre Andrew ...
-Elle était un peu plus jeune, quatorze ans ? se souvint Simon avec un froncement de sourcil. Ça s'est calmé dès qu'ils ont accepté Andrew à la maison ... et c'était surtout mon père, maman faisait plus l'arbitre.
La tournure calme de la conversation semblait l'apaiser : les mots sortaient avec une plus grande fluidité et il cessa progressivement de marteler sur le parquet pour ramener ses jambes contre sa poitrine. Sa bouche fut agitée d'un tic nerveux.
-Enfin bref, ce n'est pas un comportement neuf chez elle, résuma-t-il. Mais j'avais rassuré à l'époque en rappelant que j'avais quinze ans et qu'elle était idiote si elle pensait que je ferais ... quoique ce soit dans une tente avec les McLairds juste à côté. Je ne pensais pas qu'elle recommencerait maintenant alors que j'en ai dix-huit et que ... bon, c'est toi quoi !
Je m'interrompis brusquement dans mes recherches pour river sur lui un regard froid, les sourcils haussés.
-C'est moi ? C'est-à-dire ?
Simon parut brusquement ravaler sa langue en réalisant ce qu'il venait de sous-entendre. Et j'avais beau faire des efforts de bienveillance, m'adapter au rythme de Simon, ça demandait énormément de martelage mental de ma part. Ça n'a rien à avoir avec moi. Ça n'a rien à voir avec ... mon physique. C'était idiot, mais il fallait que je me le répète sans cesse : ce n'était pas une question de manque d'attirance. Et Dieu que c'était difficile à faire entrer dans le crâne d'une fille comme moi qui avait souvent complexé sur son corps. Mais de son côté, il fallait qu'il fasse l'effort de ne pas me donner cette impression et cette phrase venait de tout briser.
Octavia, c'était une fille avec qui on faisait « des choses » dans la tente. Pas Victoria.
-Mais non ! se défendit-t-il immédiatement. Je ne parle pas par rapport à ça ! Octavia elle ne la connaissait pas, mais toi elle te connait, elle pourrait avoir confiance, non ?
-Confiance en une fille de dix-neuf ans qui a déjà eu une relation longue pour garder chaste son petit garçon ?
J'avais conscience d'être un peu sèche et de paraître injustement blessée, mais les mots s'envolèrent seuls de ma bouche. La situation jetée si crûment au visage de Simon aurait pu définitivement transformer son visage en souafle mais il se contenta de pousser un grognement de frustration et d'enfouir son visage entre ses mains.
-Vicky ...
-Pardon, m'excusai-je en tentant de juguler la froideur dans ma voix.
Je baissai de nouveau les yeux sur les carnets mais je fixai les mots sans réellement les lire. Plutôt que de faire semblant, je me perdis dans la contemplation de la vieille photo de la maison, à la recherche d'un indice qui n'existait sans doute pas – simplement pour extirper les derniers mots de mon esprit. Et alors qu'il commençait enfin à s'apaiser, je sentis une présence derrière moi. J'eus à peine le temps de redresser la tête que Simon s'était laissé tomber dans mon dos et m'enlaçai par derrière. Il dégagea mes cheveux dans mon cou pour y déposer un baiser. Je laissai échapper un petit rire et m'écartai quelque peu pour le regarder.
-Quoi ?
-Tu fais la même tête que quand tu as dit que Gillian Fawley était plus jolie que toi. Tu en as dit des choses stupides Victoria Bennett mais celle-là elle est haut. Je dois maintenant te dire que tu es plus jolie d'Octavia McLairds ? Vraiment ?
Sa main continuait de caresser ma nuque et de repousser mes cheveux sur mon épaule. Je finis par agripper nerveusement une mèche et à détourner le regard. Non, c'était parfaitement idiot de lui demander une chose pareille. Je savais très bien que ce qu'il ressentait pour moi était à des années lumières de ce qu'il avait ressentir pour Octavia. Concernant Simon, je n'avais pas à me sentir inférieure à elle ... elle me répétait assez que « j'avais de la chance ». Qu'il n'avait jamais levé le doigt pour elle et que pour moi il déplaçait des montagnes.
-Non ... ça va, ça je le sais. C'est juste ...
J'eus un sourire penaud, suivi d'un petit rire étranglé que j'étouffai en allant presser brièvement mes lèvres contre celles de Simon.
-Rien, désolée. Je sais que tu fais des efforts.
-Je ne fais pas d'effort, Vicky.
La confession s'était envolée en un souffle et de nouveau ses joues rougirent légèrement. Néanmoins, ses doigts ne cessèrent pas de caresser ma nuque, de parcourir la ligne de mon cou jusqu'à atteindre distraitement ma mâchoire.
-Je te jure ... Chaque fois qu'on ... je ne sais pas, qu'on s'embrasse, qu'on est ensemble, je ne fais pas d'effort, je me laisse juste ... porter. Chaque fois que je fais quelque chose, c'est parce que j'en ai envie. Vraiment.
Il laissa échapper un petit rire nerveux et enserra mes cheveux de sa main.
-Désolée, ça a dû te mettre la pression que te dise que ... j'avais peur ...
-Je n'ai pas eu besoin que tu me le dises pour le savoir, objectai-je doucement. Ça crève les yeux que tu as un problème avec le principe de relation et avec tout ce qui touche au tactile. J'essaie juste d'apprivoiser les limites. Savoir jusqu'où je peux aller sans te faire peur ...
Simon garda le silence quelque secondes le silence, à jouer avec mes cheveux. Son souffle se répandait dans mon cou et effleurait ma joue à intervalle régulier et sa profondeur m'indiquait qu'il luttait pour garder son calme.
-Je ... je ne les connais pas vraiment, avoua-t-il dans un filet de voix. J'étais jeune avec Octavia et dès qu'elle a voulu accélérer les choses ...
-Sous la tente ?
A la façon dont Simon pressa les paupières, je regrettai d'avoir pris ce ton amusé. Son visage s'était crispé et quand il rouvrit les yeux, ses prunelles brillaient d'éclat sombre, amer. Presque blessé.
-Oui ... sous la tente. Mais j'insiste pour dire que j'avais quinze ans !
-Simon ? le coupai-je fermement. Tu n'as pas à te justifier. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
La tête de Simon oscilla nerveusement. Je n'en revenais pas d'être enfin sur le point d'apprendre jusqu'où il était allé charnellement avec Octavia McLairds, mais au vu de sa mine sombre, c'était loin d'être une victoire.
-Pas grand-chose ... je te dis, elle a voulu ... aller plus loin. Je ne pense même pas qu'elle voulait qu'on couche ensemble non, juste ... accéléré un peu les choses. Mais c'était à l'image de toute ma relation avec elle : artificiel, déconnecté. Là, on pouvait dire que je me forçais, jusqu'à ce que j'en sois ... simplement plus capable.
Il haussa les épaules.
-Je l'ai repoussé. Un peu violemment. (Il eut l'air brusquement penaud). OK, en pleine poitrine.
-Outch, gémis-je en croisant les bras sur la mienne.
-Voilà. Ce n'est vraiment pas ... un souvenir agréable. Et avant que tu me le dises, je sais qu'Octavia et toi ce n'est pas comparable ... Vraiment pas, ça ne sert à rien d'en parler à la limite. Les limites que j'avais avec elle ... ce n'est clairement celles que j'ai avec toi. J'avais du mal à la laisser me toucher, rien que prendre sa main c'était un geste qui ne me semblait pas naturel. Toi ...
Il hésita quelques secondes et finit par décider que le meilleur moyen de démontrer ses dires étaient les gestes. Son visage se pencha, s'inclina vers moi et j'eus juste à lever la tête pour combler les derniers centimètres qui me séparaient de lui. Il fut difficile pour moi d'effacer mon sourire pour adapter mes lèvres à celles de Simon : comme le soir de mon anniversaire, j'avais l'impression d'irradier d'une douce chaleur qui prenait naissance dans ma poitrine. J'aimais que Simon répète que j'étais spéciale, unique. Qu'avec moi, les règles qui régissaient son monde n'était pas les mêmes. Cela faisait naître en moi une sensation grisante, presque mégalomane mais qui effaçait mes complexes, mes doutes, mes interrogations. Dans ces bras, sous ses lèvres, je me sentais puissante, à ma place. Je n'avais pas de sentiment d'illégitimité qui pouvait parfois m'assaillir loin de lui. Et le plus d'enivrant, c'était de comprendre que ça agissait de même sur lui. Que dès qu'il m'embrassait, il était plus hardi, plus assuré, qu'il n'hésitait plus à me presser contre lui d'un bras et à utiliser sa main pour me caresser – cheveux, visage, bras ... Il poussa même le vice à caresser ma langue de la sienne, timidement mais le frisson que cela m'arracha fut tel que je crispai les doigts sur sa nuque. Ma bouche s'ouvrit plus franchement pour l'accueillir, approfondir le baiser.
Il ne connaissait pas ses limites avec moi ? Très bien. J'avais très envie qu'on les teste ensemble.
Alors avec douceur, profitant qu'il soit en pleine confiance, maître de ses gestes, je mis mes mains en mouvement, les faisant descendre jusque sa taille, observant ses réactions. Et comme leur position ne semblait pas le troubler outre mesure, je repoussai un pan de son tee-shirt et aventurai un doigt sur sa ceinture. Je suis là. Ça va ? L'espace d'un instant, j'eus l'impression que Simon cessait de respirer. Ses lèvres se figèrent contre les miennes et devant cette indécision manifeste, je commençai à retirer ma main. Mais il me surprit en me l'attrapant et en la guidant lui-même dans son dos ... sous le tee-shirt. J'eus l'impression de ressentir la chaleur de sa peau jusqu'au creux de mon ventre, qu'elle vint alimenter le trouble déjà présent, l'attiser. J'étais si prise de court que dans un premier temps ma main demeura immobile dans son dos : il fallut que les lèvres de Simon parcourent ma mâchoire jusqu'à déposer un baiser frissonnant au creux de mon cou pour qu'elle bouge, qu'elle parcoure la peau sur la longueur, que mes doigts se mettent à suivre le la ligne saillante de la colonne vertébrale. Les caresses parurent électriser Simon. Son souffle se fit plus chaotique, le mouvement de ses lèvres plus empressé. Elles parcouraient ma peau à un rythme effréné, suivant la ligne de ma gorge, de moins en moins chastes, arrachait chaque fois davantage de frisson. Face au rempart de toutes ses sensations, je ne sus réellement distinguer son souffle de ses lèvres ou sa langue : tout se mélangeait dans une chaleur exquise. Lorsque je la sentis du côté en bas de ma gorge, presque à la jonction avec mon épaule – le dernier morceau de peau accessible avant que mon tee-shirt ne réduise le champ des possibles, je le sentis hésiter. Sa bouche s'écarta et il préféra me caresser de l'arrête de son nez, presque hésitant. Je restai immobile quelques secondes, presque frustrée de sentir son souffle se répandre sur ma peau, de le voir s'arrêter en si bon chemin au moment où j'espérais que ses lèvres explorent ... Plutôt que de laisser éclater la frustration, je ramenai son visage à moi pour l'embrasser à perdre l'haleine, à me nourrir des braises qu'il avait laissé sur ma gorge, de la chaleur que mes doigts puisaient sur sa peau et de la pression des siens sur la mienne.
Je perdis complètement la notion du temps, mon univers était complètement réduit aux mains de Simon qui s'agitaient sur moi et à ses lèvres de plus en plus hardies sous les miennes. Je sus définir qui bascula en premier, qui entraina l'autre, mais soudainement Simon se retrouva sur le dos, allongé sur le plancher miteux de la maison, avec moi riante au-dessus de lui. Essoufflée, je me laissai aller contre son épaule alors qu'il se laissait doucement gagner à son tour par l'hilarité.
-Bon, on va peut-être s'arrêter là pour aujourd'hui, conclut-t-il en se massant la nuque. Aïe ...
-Excuse-moi, Simon Sirius Bones ? lançai-je en me redressant, un sourire mutin aux lèvres. C'est tout ce que tu as à dire ? « Aïe » ?
Les joues de Simon rosirent mais il retrouva l'aplomb nécessaire pour attaquer :
-Tu m'as fait tomber.
-On s'est fait tomber. Ne cherche pas un responsable, on l'est tous les deux.
Pour éviter qu'il ne répondre, je l'embrassai une dernière fois avant de me relever. Ma tête tourna un instant à mesure que je reprenais contact avec la réalité. C'était cela, Simon n'était pas une réalité. C'était une bulle complètement ostracisée où brusquement où mon esprit se déconnectait si fort de mon corps que je devenais une autre. Et à mesure que mes neurones se reconnectaient, les images des dernières secondes devenaient de moins en moins nettes – mais le souvenir des sensations restait. La chaleur dans mon ventre, la brûlure sur mes lèvres ... Je passai une main discrète dans mon cou, un petit sourire aux lèvres. J'avais presque la sensation que les fantômes des baisers palpitaient sous mes doigts. Non, c'était bien moi qui venais de passer dix minutes à embrasser furieusement Simon Bones à même le sol de la Maison Hantée. Si Chloé savait ça ...
Et comme toujours dès que l'esprit se réappropriait le corps, la gêne fit son apparition. Pour la contenir, je rajustai mes boucles, mon tee-shirt – à quel moment Simon avait-il passé la main dessous ? Je n'arrivai même pas à m'en souvenir – et ramassai le carnet de Nicholas que j'avais laissé choir sur le sol dès que Simon était apparu près de moi.
-Bien tu as eu ta partie, maintenant on explore, déclarai-je résolument. Si j'ai bien lu, ton grand-père a fait des recherches sur le village, sur son histoire sorcière ...
-Tu as été jusqu'où avec Miles, toi ?
Le carnet m'en échappa des mains. Simon me fixait avec un grand sérieux, troublé par un léger sourire qui ourlait ses lèvres, entre gêne et cynisme. Avec lenteur, je me baissai pour ramasser le carnet et ses feuilles volantes à présent éparses sur le plancher.
-Euh ... Tu ne te doutes pas ... ?
-Un peu, admit-t-il sans se départir de son sourire. Je voulais juste ... enfin, être sûr. Connaître tes limites.
Le ton équivoque qu'il utilisa me dit lever les yeux au ciel, mais me détendit également. Il avait fait l'effort d'être honnête, de tenter de m'expliquer. Heureusement pour lui, j'étais quelqu'un de beaucoup plus simple. Je fermai le carnet et me redressai avec un soupir pour rassembler mes pensées.
-Bien ... j'ai couché avec Miles, oui, explicitai-je, jouant la carte de la concision. Deux fois, quand je suis allée chez lui en avril dernier. Pas des sensations extraordinaires cela dit, mais c'était ... nouveau. Et avant de te mettre une pression idiote ... ce n'est pas toi. Autant que je ne suis pas Octavia ...
Il laissa échapper un petit rire et je caressai sa tête pour étayer mes dires. Il captura la main pour en embrasser la paume.
-Alors on repart de zéro, toi et moi ? conclut-t-il avec un sourire penaud.
-Et je pense qu'on va avoir du mal à rester à zéro. Il va falloir que tu convainques ta mère que tu es un grand garçon de presque dix-neuf ans et qu'on a le droit de fermer la porte si tu en as envie.
Le changement de conversation ravit à Simon son petit sourire. Il haussa les épaules dans un geste qui se voulait nonchalant mais qui mettait surtout en valeur sa crispation.
-Tu sais ... On reste tous des enfants pour nos parents.
-Simon. Même mon père nous laisse fermer la porte.
Les lèvres de Simon se tordirent pour me donner raison. Mon père, le pasteur, qui voyait en lui la personne qui allait définitivement lui prendre sa fille. Je me doutai que ce n'était pas une décision intuitive pour lui : c'était principalement parce que ma mère avait insisté. J'avais capté une conversation en allant chercher du jus de fruit dans le cellier, un soir où Simon était venu me retrouver dans ma chambre pour regarder un film. « Ils sont grands et ce sont des sorciers », disait ma mère à mon père, visiblement tourmenté. « S'ils veulent faire des galipettes, ils arriveront à trouver un moyen. J'ai trouvé le moyen contre mes parents, Alexandre l'a trouvé contre nous. Je préfère qu'ils soient en sécurité sous notre toit, pas toi ? ». Et mon père s'était incliné.
Si Simon ne parvint pas à répondre à l'argument, il ne promit pas pour autant de parler à sa mère. Sa réaction aujourd'hui prouvait était révélatrice : il en avait assez, mais préférait fuir plutôt que de l'affronter. Elle était intouchable, pour lui. Pour toujours la femme qui l'avait sortie du placard ... J'hésitai quelques secondes avant de lâcher du bout des lèvres :
-Elle te surprotège un peu ... non ?
-Venant d'elle, je comprends.
-Je sais, je sais ... mais ça suffit, non ?
Simon me jeta un regard en coin et dans l'acidité soudaine de ses prunelles, je compris que je venais de mettre un orteil sur une limite. Je levai les mains en signe d'apaisement.
-OK, gère ta mère comme tu veux ! Si tu aimes te réfréner ...
Je lui tournai le dos et plongeai résolument le nez dans les notes, un goût étrangement aigre dans la bouche. Les recherches de Nicholas Bones étaient à peine compréhensibles, sous formes de phrases brèves, de flèches et de mots clefs. « Début avéré de la présence 1778 », « voir archives magiques !! », « Procès de Perceval 1891 » => grand départ : début de la fin ? Consulter les archives judiciaires », « lieu de naissance d'Albus Dumbledore ». Je clignai des yeux, bouches bée.
-Dumbledore est né ici ...
-Sérieusement ?
J'avais à peine conscience de Simon derrière moi. Il s'était relevé et avait épousseté son jean pour se rapprocher de moi et du carnet que je tenais religieusement entre mes mains. Mais avant qu'il ne puisse lire le moindre mot, je m'étais ébrouée pour enfin partir à l'exploration de la maison, un œil sur le carnet, un autre sur les murs défraichis de la bâtisse. Le rez-de-chaussée fut décevant : il était vraisemblablement le repère de fumeurs et même de couples clandestins car nous trouvâmes un préservatif usagé dans la pièce qui devait jadis être la cuisine. L'escalier qui menait à l'étage était ruiné par les mites, et le gémissement qu'il poussa quand je posai le pied dessus fut si inquiétant que Simon nous fit transplaner à l'étage. Là, les fenêtres étaient barricadées, le couloir plongé dans la pénombre, l'odeur de moisissure si prégnante que j'en hoquetai. La baguette allumée de Simon fit trembloter la poussière en suspension devant nous.
-Seigneur, haletai-je, les larmes aux yeux.
-Attends ...
Il leva un peu plus sa baguette et la lueur au bout se fractura en une dizaine de petite bulles lumineuses qui allèrent se loger aux quatre coins de la pièce. Il s'agissait d'une ancienne chambre dont ne demeurait que le sommier et une vieille commode dont les tiroirs se désaxaient.
-« Procès Perceval » ..., lus-je sous une lumière alors que Simon faisait le tour de la pièce. Oh, attends, je crois qu'il y avait un arbre ... C'est ça, Perceval, c'est le père d'Albus ... OK ... hum ...
-Victoria, je te connais par cœur, mais le « OK, hum », j'ai encore du mal à le traduire.
Je répondis par un coup de pied qui cette fois l'atteint aux fesses. Il me jeta un regard outré et je cachai mon sourire mutin derrière le carnet. Assez vite, mes sourcils se froncèrent quand je suivis la flèche qui partait du « Procès de Perceval ». Mon sang se glaça dans mes veines.
-Il a agressé des moldus ...
-Qui ?
-Le père de Dumbledore. Il ... il a agressé trois moldus, il a fini à Azkaban pour ça. Des enfants.
L'information transformait mon estomac en plomb et mes doigts se crispèrent compulsivement sur le carnet. En un éclair, je revis mon directeur d'école, son regard bleu bienveillant, sa barbe de grand sage, me rappelait de son obstination à protéger les enfants de moldus ... alors même que son propre père avait été envoyé à Azkaban pour agression de moldu. Simon pressa mon épaule.
-Peut-être que son père n'était pas quelqu'un de bien mais ça ne change rien à l'homme. Regarde ton grand-père ...
-Je sais, c'est juste ... perturbant. Tu savais que Dumbledore avait des frères et sœurs ?
-Son frère tient la Tête de Sanglier, oui. Tante Amy me l'avait dit ... Mais une sœur ... ?
-Ariana, confirmai-je en montrant son nom sur le petit arbre généalogique. Elle est morte ... oh la la, à seize ans ...
Ce n'était pas la seule mention de la jeune fille : plus loin dans les notes de Nicholas, elle faisait l'objet de tout un paragraphe. « Destin d'Ariana ?? Pas de mention à Poudlard : pourquoi ? Cracmolle ? Pire ? » « Ariana => Godric's Hollow », « Enterrement de Kendra D. : où était Ariana ? », « BATHILDA TOURDESAC : infos sur Ariana dite 'fragile' ; fragile pourquoi ? Que cache fragile ? ». Les notes incomplètes me laissaient plus que perplexe. Que venait faire la plus grande historienne de la magie dans cette affaire ... ?
-Attends, ça n'a pas de sens ... Apparemment elle ...
-Victoria ?
-Quoi ?
Je relevai la tête des notes, hagarde. Je n'avais même pas remarqué que Simon ne me suivait plus dans la pièce : il s'était immobilisé face à une porte incrustée dans le mur. Assez surprise par son mutisme, je me rapprochai de lui mais il m'interrompit d'un geste de la main. Il fixait la porte, les yeux écarquillés, jusqu'à ce que brusquement, il eut un mouvement de recul. Faisant fi de son injonction, je me rapprochai de lui et lui agrippai le bras.
-Simon, qu'est-ce qu'il se ... ?
Je m'interrompis, brusquement figée. Je venais de poser les yeux sur la porte et alors que mon regard s'y attardait, une lumière verte sembla jaillir de l'autre côté, éclairant l'entrebâillement de façon sinistre, s'infiltrant dans les interstices resserrés du battant ... Le premier jet, à peine visible, me fit avoir un sursaut mais fit carrément blêmir Simon.
-On s'en va, annonça-t-il d'une voix blanche. Maintenant, Vicky. On y va, je ne veux pas, c'est ...
Sa voix se perdit dans un gémissement lorsqu'une nouvelle lumière jaillit de l'intérieur du placard, verte, froide, cruelle et cette fois je la vis distinctement apparaître derrière les stries resserrées du panneau, la silhouette repliée, découpée par la lueur diffuse ... Cette lumière ... Mes paupières papillonnèrent et chaque fois qu'elle se fermaient, des scènes défilaient dans mon esprit. La baguette de Maugrey pointée sur une araignée inerte, les pattes fatalement repliées sur son corps. Les échos dans la Forêt Interdite alors que Miles et moi courrions entre les immenses arbres ... Et quand je les ouvris de nouveau, elle balaya de nouveau la pièce, rayant le plancher d'ombre et d'éclat vert qui jouaient dans un silence glacial. Et toujours à l'intérieur, l'ombre de cette minuscule silhouette recroquevillée qui se devinait ... Le cœur battant à tout rompre dans ma poitrine, je lâchai brusquement le carnet pour mettre la main sur ma baguette et m'approcher de la porte. Il fallut que je passe devant Simon pour qu'il sorte de sa torpeur et tente de m'attraper par le bras.
-Vicky non, arrête ! C'est un ... !
Mais le brasier qui s'éleva et faillit nous engloutir noya complètement la fin de sa phrase.
J'eus à peine le temps de sentir la chaleur et la brûlure que j'en hurlai, paniquée. Les doigts de Simon se refermèrent sur mes bras et me tirèrent hors de flammes et je m'écrasai contre lui, tremblante de tous mes membres. Il me fallut plusieurs secondes pour reprendre mon souffle, et mes esprits avant de réaliser ce qu'il s'était passé.
Là où s'était tenue la porte de placard à la lumière verte se déployait à présent un feu infernal aux longues flammes rouges, orange, voire violette léchait les parois lambrissées des murs. Chaque gerbe semblait être une entité vivante, prête à narguer, dévorer, taquiner, flamboyant de son éclat infernal, irradiant d'une chaleur prête à me faire fondre le visage. Parfois, des crépitements se faisaient entendre et lâchaient des étincelles qui arrêtaient littéralement mon cœur. Je n'avais même pas la force de fuir, les jambes coupées : ma baguette pendant inutilement dans la main, aussi tremblante que moi. Jusqu'à ...
-Riddikukus !
Les flammes s'étrécirent jusqu'à devenir des feux d'artifices farceur, le genre que vendait le Dr Filbuste et se fractionnèrent en milles étincelles pour bondir dans toute la pièce. J'essuyai un rire incrédule qui fut complètement noyé dans un autre beaucoup plus sonore. C'est alors que je remarquai que Simon venait juste de sortir sa baguette, à l'écoute de ce rire tonitruant. Sans me lâcher, il fit volte-face et brandit sa baguette devant le visage à la fois souriant et furieux de ... Je ravalai toutes les émotions qui venaient de me bousculer, consternée.
-Vous ?
-Mais on ne vous a rien appris à Poudlard ? rouspéta Rita Skeeter. Mais j'ai cru que j'allais crever ma parole !
Elle s'épousseta les épaules, imperturbable sous le déluge de feu d'artifice. Ils étaient si chaotiques à présent que les étincelles se plantaient aveuglément contre les murs ou se précipitait contre les bulles lumineuses créées par Simon, provoquant un grésillement qui m'arracha un frisson. Reprenant lentement le fil des dernières minutes, ainsi que mon souffle, je finis par comprendre la nature réellement des gerbes de lumières qui continuaient de voltiger dans la pièce.
-Un épouvantard, murmurai-je, à la fois honteuse et saisie.
Je n'en avais jamais affronté. Lupin nous avait fait étudier la théorie, me souvins-je vaguement, pour pallier à nos manques béants en la matière. Mais j'étais une froussarde et j'avais eu bien trop peur que l'épouvantard prenne la forme du visage calcinée de Nestor Selwyn, révélant par là-même mon forfait. Ce n'était pas si éloigné, tout compte fait ... Encore chamboulée et vaguement honteuse de ne pas avoir reconnu la créature, je gardai le silence et laissai Simon, bien plus lucide que moi, crier à Skeeter :
-Mais qu'est-ce que vous faites-là ?!
-Mais comme vous les enfants, j'enquête ! annonça l'ancienne journaliste d'un ton presque méprisant. Je suis au chômage technique, il faut bien que je trouve de quoi m'occuper ...
Son apparence suggérait nettement le chômage, en effet. Elle n'avait même pas pris la peine de former les anglaises qu'elle abordait fièrement au Tournoi des Trois Sorciers : ses cheveux blonds étaient attachés en un vague chignon. Elle portait une robe de sorcière simple, des bottines de cuir souple. Les seuls vestiges de sa grandeur restaient ses lunettes incrustées de pierres et sa plume à papotte d'un vert criard qui dépassait d'une poche.
-Mais vous êtes là depuis longtemps ?! s'agaça Simon.
Son visage, livide face à la porte de placard, avait rapidement repris des couleurs. Rita haussa un sourcil et pointa le plancher de la maison.
-Ici ? Trois jours mon garçon. Arrête avec tes airs accusateurs. Je vous déconseille le grenier : il est si bouffé par les mites que j'ai failli m'y casser une jambe ... Et vous ?
-On habite ici, répondis-je âprement.
-Dans l'ancienne maison des Dumbledore, inhabitée depuis un siècle ? hasarda Skeeter avec un sourire cynique. J'ai un doute, ma jolie. Oh mais ...
Elle me dévisagea ouvertement, si intensément que j'eus un mouvement de recul qui me plaqua de nouveau contre Simon. Mon cœur s'arrêta de battre dans ma poitrine quand il referma ses doigts sur mon épaule. Je n'oubliai pas la dernière fois que j'avais croisé la journaliste. Aux Trois Balais. Mes larmes le jour de la Saint-Valentin. Après que Simon ait cassé sa tasse. Il suffit de chercher dans cette nuit-là. Rien n'est caché ...
-Tiens, lâcha Skeeter, et un lent sourire retroussa ses lèvres. Tu as trouvé ce que tu cherchais, alors ? Je crois que oui, répondit-t-elle d'elle-même quand son regard glissa sur Simon. Ne t'en fais pas mon grand, je ne vais pas la manger, tu peux la lâcher. Et baisser cette baguette. Oh je suis sûre que tu sais faire des merveilles avec, mais tu ne vaux pas ta mère sur ce point. Encore maintenant j'ai peur d'elle !
Simon se figea derrière moi et je lui jetai un petit coup d'œil pour constater qu'il fixait Skeeter, les paupières plissées. Il ne semblait pas autrement surpris de sa connaissance à son sujet mais son regard demeurait vitreux, ailleurs et je compris qu'il n'avait pas parfaitement récupéré de son face à face avec l'épouvantard. Indifférente à notre silence, Skeeter poursuivit joyeusement :
-Tu sais que c'est toi qui m'as mis sur la piste, petite ? Je m'ennuyais depuis quelques mois, sans projet, sans but ... On m'a muselé pendant un an, oh si vous saviez la douleur, tout ces mots qui restaient à fleurs de doigts sans pouvoir être couchés sur papier ... brr. Et notre conversation m'a ramené quinze ans en arrière. Et là, je me suis souvenue. De l'enterrement, la tombe. Wulfric Dumbledore. Moi qui pensais qu'ils étaient liés à Godric's Hollow ! Pouah !
-Vous enquêtez sur les Dumbledore.
Mon ton accusateur laissa Rita de marbre, mais moi je me dépêchai de ramasser le carnet que j'avais laissé choir sur le sol. Hors de question que cette plume à scandale ait accès aux cherches de Nicholas. Mon geste fit pouffer Rita.
-Je te l'ai dit, je suis au chômage, il faut bien que je trouve une occupation ... et les Dumbledore, quel vaste projet ... ! (Elle nous fit un vague signe de la main destiné à nous faire fuir). Allez, oust ! Allez batifoler ailleurs, je suis presque sûre d'avoir entendu une séance de bécotage il y a dix minutes ... Laissez-moi travailler, sinon le marché que j'ai passé avec Leonidas Grims ne tient plus et demain la moitié des journaux titreront que le dernier des Bones a survécu ...
-Allez-y, la défia Simon, les yeux étincelants.
Rita papillonna des yeux, un peu surprise. Puis un nouvel éclat de rire la secoua, paniquant complètement l'épouvantard sous forme d'étincelle qui s'agita désespérément.
-Ouh, mais c'est qu'on se rebelle ! C'est Rose qui doit être ravie ... Oh, regardez, l'épouvantard panique !
Les étincelles venaient en effet de se regrouper pour former une larve coupée en deux qui n'avait rien d'effrayant. Le sourire de Skeeter se fit railleur.
-Si j'étais vous, je déguerpirais ... Parce que dans pas longtemps, il va redevenir un feu flamboyant ou une porte de placard et là je ne serais plus là pour vous sauver la mise.
Cette menace-là, elle, atteint son but. Je crispai mes doigts sur les carnets de Nicholas et Simon blêmit d'un coup. J'aurais voulu répliquer, ne pas laisser Rita gagner ainsi, mais il m'attrapa par le bras et nous fit transplaner sans même demander son reste, sous le regard triomphant de la journaliste.
Nous atterrîmes dans le jardin de la maison Hantée – la maison des Dumbledore – jardin en friche, complètement envahi par les mauvaises herbes. Le visage fermé, Simon me lâcha et se laissa aller sur la terrasse en expirant tout l'air de ses poumons. Même le soleil peinait à lui faire reprendre des couleurs et ce ne fut qu'une fois sortie de la maison que je réalisai à quel point sa respiration était chaotique. Il plongea son visage dans ses mains, tentant désespérément de retrouver le fil de son souffle et je mis une main timide sur son épaule.
-Ça va, me dit-t-il immédiatement d'une voix étouffée. Juste ... j'ai besoin de quelques minutes.
-Prends ton temps, soufflai-je. C'est bon maintenant, je sais que tu n'as plus besoin de moi ...
Il laissa échapper un petit rire étranglé et après avoir plaqué un baiser dans ses cheveux, je le laissai tranquille. Depuis sa redécouverte dans le grenier, j'avais l'impression qu'il était entré dans une nouvelle phase où il avait besoin d'apprendre à gérer seul ses émotions et son traumatisme. Dans un éclair, je revis la porte au battant strié, la lumière glaciale qui balayait le plancher, et la silhouette, cette silhouette découpée dans l'ombre ... Mon cœur se brisa face à l'image et je battis des paupières pour refouler les larmes. La plus grande peur de Simon, ça n'avait pas été ce moment. C'était lui. Ce qu'il avait été, dans ce placard. Immobilisé, passif, impuissant. Entravé par le destin.
C'était en tout cas bien plus profond et plus intime que celle qui m'avait effrayé. Rien de plus trivial et destructeur qu'une flamme ... comme pour me rappeler que le 5 Novembre était toujours là, quelque part et que même des années plus tard, j'avais toujours peur de prendre feu. Je me sentais stupide d'avoir paniqué ainsi face au brasier. Que Simon se fige, rien de plus normal. Mais le feu ? Seigneur j'étais une sorcière. Une vraie, diplômée, forte de ses talents. Le feu je pouvais l'éteindre aussi aisément que je pouvais voler. Mais dès que la chaleur m'avait atteinte, j'avais été paralysée ... comme sur le bûcher du 5 Novembre. Je croisai les bras sur mon ventre. Malgré la caresse du soleil, je frissonnai.
-Encore, Vicky ?
Je me retournai pour voir que Simon s'était quelque peu redressé. Sa peau était encore pâle, ses épaules s'élevait à intervalles réguliers, mais profonds. Son regard était toujours un peu voilé, lointain, mais bien rivé dans ma direction. Je sentis ma cage thoracique se resserrer sur mon cœur et presser toutes mes émotions pour les faire ressortir. Ma voix était éraillée lorsqu'elle s'échappa de mes lèvres :
-Pour toujours, je pense ...
-Tu t'occupes tellement de moi que j'oublie tu as tes propres fantômes, murmura-t-il, hagard. Complètement ...
Il y avait une certaine amertume dans son ton, amertume qui paradoxalement m'arracha un sourire et desserra quelque peu l'étau dans ma poitrine. Je haussai les épaules pour minimiser la chose.
-Ne t'en fais pas, la plupart du temps j'oublie aussi. Tu m'aurais demandé quelle forme prendrait mon épouvantard ... Peut-être à une époque évidemment que je t'aurais parlé du 5 Novembre. A Poudlard. Avant ... Seigneur, tellement de chose. Mais plus maintenant ... Je ne pensais pas ... (de nouveau, je haussai les épaules, mais le geste me crispa davantage). Comme quoi ...
Je pressai le carnet de Nicholas contre ma poitrine et gonflai mes poumons pour ensuite expirer les restes d'angoisses qui demeurait dans mes membres. C'était absurde ... comme toutes les peurs d'enfants, réalisai-je, blasée. Et c'était ce que j'avais été sur ce bûcher. Une fillette terrifiée. Je pensais qu'elle avait grandi, cette fillette ... Qu'elle était devenue forte, femme, sorcière. C'était dur d'être à nouveau confronté à elle. Et comme la tension peinait à pleinement me quitter, il fallut que Simon s'arrache à la terrasse et vienne m'enlacer. Juste d'un bras, à peine une étreinte, mais je me laissai aller contre lui, éreintée. Heureusement qu'il avait appris à se gérer seul. Aujourd'hui, face au spectre des flammes, je n'avais pas l'énergie pour le porter.
-Allez viens, on rentre, souffla-t-il en replaçant une mèche derrière mon oreille. Je pense que tu as besoin de Disney et de chocolat. Et je suis presque persuadée que la harpie nous espionne depuis l'étage ...
-Quelle saloperie, marmonnai-je en me laissant entrainée, consternée. Imagine qu'elle apprenne que le père de Dumbledore a agressé des moldus ...
Un frisson me parcourut. Simon dut le sentir, car il frictionna distraitement mon bras. Il attendit qu'on se soit extirpé définitivement de la maison et retrouvé la route pour répondre sombrement :
-Elle va tomber dessus. C'est certainement dans les archives juridique ... ça m'étonne même que ce ne soit jamais sorti, tiens. Comme quand Lucius Malefoy était chef du conseil d'administration et qu'il essayait de le faire renvoyer, par exemple ... Mais Dumbledore a une telle aura, qui oserait y toucher ... ?
-Elle. Elle ne va pas se gêner ...
Je n'éprouvai aucun remords à me trouver acerbe. Je n'oubliai pas que Rita Skeeter était celle qui, avec Octavia, m'avait mise sur la piste de l'identité de Simon, mais elle l'avait fait dans un moment de faiblesse, enivrée par l'alcool et les souvenirs. Mais ça n'effaçait pas le reste, ses articles venimeux contre Harry pendant le Tournoi, son mépris de Cédric, son indécence face aux malheurs. La revoir dans cette maison, prête à déterrer les squelettes et à les exposer triomphalement à la face du monde, m'avait donné la nausée.
J'évacuai la frustration en marchant rapidement, ma main nichée dans celle de Simon. Nous passâmes devant la maison de l'Ancien et mon pas ralentit alors que j'observai les murs, perplexe. Son frère était entré chez les Dumbledore, réalisai-je brutalement, glacée. Il me l'avait avoué, quand je l'avais ramené chez lui ... Son frère était entré chez les Dumbledore ... et n'avait plus jamais été le même. Avec un malaise croissant, je pressai les carnets de Nicholas contre mon cœur et suivit Simon dans notre fuite en avant. Quelque part dans mon esprit, des flammes dansaient toujours mais m'étreignaient d'une sensation glacée. Oui, j'allais avoir besoin de Disney et de chocolat pour me réchauffer ...
***
ALORS ?
En vrai la scène tombe assez mal parce que tout le traumatisme de Simon est étudiée quelques chapitres avant, donc ça vient en décalage. Après ça me permet aussi de marquer qu'il apprend à se gérer seul, et je n'exclue pas de compléter cette scène d'une partie de Bonus sur Simon (pas celle-ci, mais un moment où il reviendrait affronter l'épouvantard pour se tester, si on veut)
Mais je ne voulais pas y renoncer, je l'avais en tête depuis le début ou presque, cette exploration de la maison des Dumbledore avec les épouvantards. ça m'aurait fait mal au coeur. Donc voilà je veux bien votre avis !
A dans une semaine pour LDP et dans deux pour le prochain chapitre <3
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