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III - Chapitre 38 : Virage à 180°

WAHOUUU je pensais que j'aurais jamais le temps de le reprendre ce soir 

Mais j'avais besoin de poster, j'ai besoin de vous (et de vos commentaires <3). D'ailleurs un immense merci à vos réactions du dernier chapitre, ça m'a franchement fait plaisir et rassuré un petit peu ! 

Pfiouh après deux semaines de vacances sportives je vais pouvoir chiller ... une soirée. Puis retrouver l'Hydre demain <3 (Cazo sera dans nos cœurs). Puis reprendre le travail. Nettement mais alors nettement moins réjouissant. 

Bon pour ce chapitre. Il est long. J'en reviens pas qu'il fasse moins de 10 000 mots. Le pire que c'est que c'est un chapitre "bonus" genre je venais de faire le plan de la fin de la partie 3 et il n'était très clairement pas inscrit au programme dans cette forme (le début devait être couplé au chapitre suivant). 

Et un petit mots sur les JO quand même ! KING QUENTIN FILLON MAILLET S'IL VOUS PLAIT MAIS QUEL HOMME ! 5 médailles, il a fait mieux que MARTIN FOURCADE ! Et mention particulière à Justine Braizaz qui est une biathlète qui aurait très clairement méritait d'être dans les toutes meilleures si elle était plus régulière au tir, donc sa médaille d'or est magnifique ! 

Malheureusement JO tâché pour beaucoup de chose (choix du site de Pékin, l'affaire de dopage de Kamila Valieva qui a pas mal secoué ...). Mais je choisis de retenir la sportivité, l'événement qui rapproche les peuples et les nations, le seul moment où tout les jours on découvre des sports et des histoires différentes. Et où on peut se passionner pour le curling. Incroyable n'est-ce pas? Les JO sont fantastiques. 

Oh encore une intro de trois kilomètres de longs. Bon, on va s'arrêter là et vous souhaiter une bonne lecture <3 

Citation pas ouf. Mais je trouve qu'elle allait bien là ! (et quel film, ça me donne envie de le revoir !) 

*** 

Père bien aimé, veille sur ma femme et mon fils l'épée à la main. Murmure-leur que je ne vis que pour les retrouver, car tout le reste n'est que poussière. 

- Maximus

Gladiator

***

Chapitre 38 : Virage à 180°.

-Ce n'est pas vrai.

Ma mère avait plaqué ses deux mains contre son visage, la bouche béante d'hébétude. Mon père avait une réaction plus mesurée, mais je sentais la stupéfaction dans l'écarquillement de ses yeux et dans la façon qu'il avait de remplacer cent fois la banane en équilibre dans la corbeille à fruit. Même Archimède y allait de ses commentaires réguliers en poussant des cris stridents qui devaient alerter les voisins. J'aurais pu être rongée par la nervosité à me tordre les mains à n'en plus finir, mais l'appréhension était atténuée par la présence d'Alexandre à mes côtés. Il était avachi sur sa chaise, les bras croisés sur sa poitrine, à toiser mes parents tour à tour, comme pour les mettre au défi de mal réagir. Mais pour l'instant, ils semblaient trop sonnés pour faire quoique ce soit.

-Simon Bones ? répéta ma mère, ahurie. Le gringalet blond que tu tapes depuis que tu as l'âge de le faire ?

-D'après Lysandra, il ne voulait pas me prêter ses jouets donc c'est entièrement sa faute.

-Mais c'est bien du même Simon qu'on parle ?

-Maman, persiffla Alexandre, irrité. Je sais que c'est surprenant, mais ne fais pas la débile non plus.

Ils se défièrent un instant du regard mais ma mère abandonna vite pour reporter son attention sur moi. Cela paraissait peut-être exagéré, mais je préférais l'incompréhension de ma mère au silence prolongé de mon père. Le pire était que ce mutisme était accompagné d'un long regard planté sur moi, si intense qu'il semblait me percer le front. Même la main de ma mère qui s'abattit sur son bras de ne le perturba pas.

-Oh la la ... Chéri, je crois j'ai besoin d'être Saint-Thomas, là. Il faut que je le voie pour y croire.

-Tu vas te cacher derrière un buisson pour les voir s'embrasser ? railla Alexandre avec un ricanement. Arrêtez, vous avez bien dû voir que ça fait un moment qu'ils ont dépassé l'étape « on se tape dessus », non ?

Je sentis mon cœur se gonfler de reconnaissance pour mon frère. J'avais appréhendé sa réaction et Simon m'avait complètement pris au dépourvu chez mes grands-parents. Mais de toutes les réactions que j'avais reçu, c'était celle qui m'avait paru la plus normale : un léger choc d'un prime abord puis une rapide compréhension que ce n'était que la conséquence de ce qu'il observait depuis quelques mois et une immense joie à l'idée de voir celui qu'il considérait comme son petit frère se rapprocher de la famille. De toute manière, Alexandre avait été le premier à avoir confiance en Simon pour veiller sur moi – c'est qu'au fond, dans son esprit, il était le seul digne de sa petite sœur.

Ma mère baissa enfin son autre main de sa joue pour la plaquer sur la table. Son alliance accrocha un rayon de lumière qui m'aveugla momentanément.

-Oui, c'est vrai ... mais de là à vous voir sortir ensemble ... C'est un virage à cent-quatre-vingts degrés.

-Et bien, considérez qu'on l'a pris, ce virage, lançai-je en tentant d'être ferme. On l'a fait lentement, mais l'a pris.

Le coin de la bouche de mon père tressaillit – et ce fut un tic qui n'échappa à personne. Ma mère parut brusquement outrée et poussa une exclamation désapprobatrice.

-Mais enfin, Edward ! Ils ont mis dix-huit ans à en arriver là, tu crois vraiment qu'ils ont déjà couché ensemble ? C'est ta fille, bon sang, tu n'arrêtes pas de t'en vanter alors accorde-lui un peu de crédit !

Un bref sourire passa sur les lèvres de mon père et ses épaules se détendirent. Je me sentis brusquement honteuse en songeant que le crédit accordé l'était injustement. J'étais certes la fille de mon père, ce n'était pas lui qui avait géré mon éducation sexuelle et ma mère avait veillé à ce qu'on soit élevé avec la possibilité de faire nos propres choix, et pas nécessairement de se plier le dogme religieux. Et concernant la sexualité, je ne l'avais pas suivi. Ils n'étaient simplement pas au courant. Et plus que Simon lui-même, c'était tout ce côté-là de ma vie que j'avais peur de révéler. Leur petite fille n'était plus pure.

-Ça ne m'a même pas effleuré l'esprit, mentit mon père en s'efforçant d'agrandir son sourire. Disons que j'essaie juste ... de me faire à l'idée. Ça va bouleverser quelques petites habitudes, ça fait longtemps que je suis rôdé à vous séparer ...

-Vraiment ? grogna Alexandre, incrédule. Personnellement ça fait un an que j'ai compris que c'était inutile. Vous les auriez vu à mon balcon l'année dernière, pour peu j'ai cru qu'ils allaient se faire un câlin ...

Je le toisai avec une certaine irritation, les joues rougissantes. C'était en effet ce qu'il nous avait raconté chez nos grands-parents : lors de la soirée où il avait rencontré Miles pendant les vacances de Noël, il nous avait surpris sur le balcon, avec un Simon qui avait passé une main dans mon dos. Un geste simple, que j'avais cru complètement innocent à l'époque mais maintenant que je savais tout, tout prenait une coloration différente. Toujours était-il qu'Alexandre avait dès lors décidé de surveiller notre relation et son évolution, sans être certain de rien.

Ma mère eut un sourire penaud. C'était le premier qui franchissait ses lèvres depuis que j'avais prononcé les mots « je suis avec Simon ».

-C'est comme à noël ... Je vous ai vu sous le porche, quand vous vous offriez vos cadeaux ... (Elle accrocha le regard de mon père). Et il a mis tellement de zèle à trouver le bon hibou, tu ne trouves pas ... ?

Mon père tourna le visage vers Archimède, qui avait décidé de se faire oublier en lissant son plumage tacheté. Mes parents étant moldus, ils avaient missionné Simon pour le choisir sur le Chemin de Traverse. C'était également lui qui avait choisi ma montre, me souvins-je en caressant son cadre métallique sur mon poignet. J'ai envoyé plusieurs modèles à Susan et Simon – celle-ci était son choix, j'ai considéré qu'il était peut-être celui qui connaissait le mieux tes goûts, avait écrit Rose dans la lettre qui avait accompagné son cadeau. Avec un pincement au cœur, je songeais à Simon qui devait être en ce moment même en train d'avoir la même conversation avec ses propres parents.

-Oui, c'est vrai, admit mon père en hochant la tête. Et c'est vrai que ça fait longtemps que ... tout est plus calme entre vous. Mais de là à vous mettre ensemble ...

-Quitte à ce qu'elle ait quelqu'un, autant que ce soit Simon, non ? s'agaça Alexandre. Vous le connaissez depuis qu'il est petit et vous avez confiance en lui, non ?

-Bien sûr, confirma ma mère avant de prendre une grande inspiration. Bien sûr, tu as raison ... s'il faut quelqu'un, autant que ce soit lui. C'est même ... une drôle de marque du destin.

Ma gorge se ferma lorsque ma mère sourit avec nostalgie. Quelque part loin dans mon esprit, un écho finit par me parvenir et à souffler à mon oreille : « et nous, c'est le destin ? ». Ma mère passa une main discrète sur son ventre et ajouta d'une voix rauque :

-On est tombée enceinte en même temps avec Cassiopée ... Elle et moi on ignorait le sexe mais lorsqu'elle est venue me voir avec son petit garçon dans les bras, elle m'a demandé si on les fiançait toute de suite ou si on attendait un peu ...

-C'est vrai ? soufflai-je, sonnée.

Ma mère acquiesça lentement, une main toujours crispée sur son ventre, comme pour caresser le souvenir de l'arrondi qui m'avait un jour dissimulé. Son regard s'était mis à luire étrangement mais elle trouva la force de me sourire.

-Alors réglons cela en disant qu'on exauce un des vœux de Cassiopée.

-Tu étais amie avec elle ? demanda Alexandre, un peu perplexe.

Ma mère perdit quelques couleurs et mon père couvrit immédiatement sa main de la sienne pour presser ses doigts. Son autre main était toujours pressée sur son ventre mais elle finit par l'arracher pour la poser bien à plat sur la table, dans un geste réellement peu naturel.

-Disons que c'est quelqu'un qui m'a aidé à un moment où je n'étais pas forcément très bien, avoua-t-elle, visiblement peu désireuse de s'étendre sur le sujet. Mais je pense qu'elle aurait été heureuse que ça se passe comme ça. Vraiment très contente ...

-Il faudra en faire part à Simon, alors, songea mon père avant de reporter son attention pour moi. Parce que je suppose que si tu nous en parles, c'est qu'il est en train d'en parler à Rose et George ?

-Oui, c'est ça. On s'est dit que ce serait bien de le faire avant mon anniversaire ...

-Ton anniversaire, répéta mon père, un peu hébété. Oui, effectivement, c'est dans deux jours ... dix-neuf ans, c'est ça ?

-Dix-neuf ans ...

Mes parents me contemplèrent longuement, de ce regard bien connu qui indiquait très clairement qu'il ne me voyait pas moi, mais le bébé qu'ils avaient tenus dans leurs bras à la maternité, la petite fille qui avait vacillé sur ses premiers pas dans ce jardin, l'enfant qu'ils avaient laissé tremblante de peur à George Bones pour qu'il puisse l'amener à King's Cross vers un nouveau monde. Je voyais littéralement ma vie, ma croissance, mon évolution défiler dans leurs yeux et soudainement quelque chose au fond de leurs prunelles se figea et je sus qu'ils me voyaient de nouveau telle que j'étais, celle que j'étais devenue. Et très brusquement, le regard de mon père s'humidifia et il porta une main à sa bouche.

-Oh Seigneur ... ma chérie, ça fait combien de temps que tu n'as pas passé ton anniversaire à la maison ?

-Huit ans, répondis-je dans un filet de voix. Le dernier c'était mes onze ans ...

Je ne l'avais pas réalisé, mais c'était une éternité qui s'était écoulée depuis ce jour. La dernière fois que j'avais fêté mon anniversaire chez moi, je ne savais même pas que j'étais une sorcière. Après un instant de sidération, ma mère décida de prendre les choses en main : elle se leva énergiquement de la table et asséna avec un ton péremptoire qui lui ressemblait plus :

-Et bien ça se fête ! Alexandre, préviens Melania : vous venez dîner jeudi soir. Et évidemment je veux que Simon soit là – Seigneur il faut que je voie ça, sinon ça ne restera qu'à l'état d'hypothèse dans ma tête ! Bien sûr George et Rose seront les bienvenus ... peut-être même que tu veux inviter quelques amis ? Je ne sais pas, Chloé, Ethan ... et ... les autres ? ...

Elle détourna le regard et me tourna même le dos pour ranger les verres dans l'évier alors que sa voix se mourrait. Elle était incapable de citer le nom du moindre de mes amis à Poudlard, pour la simple et bonne raison qu'elle avait sciemment ignoré cet aspect-là de ma vie pendant plusieurs années. Elle avait fait des efforts considérable – et sa caresse à Archimède le prouva une nouvelle fois – mais le gouffre entre nous était encore trop grand. Ce fut sans doute pour cela que, alors qu'elle poursuivait à voix haute ses préparatifs et ses directives, je continuai de scruter mon père. Il observait ma mère, un léger sourire aux lèvres, mais je ne pouvais m'empêcher de trouver une certaine crispation dans ses traits et le regard singulièrement lointain. Il finit par se lever à son tour avec un éclat de rire et posa ses deux mains sur les épaules de ma mère :

-Je suis sûr que ce sera parfait, ma chérie ... Je vais vous laisser, j'ai encore quelques travaux à faire à l'église ... Dont le sermon pour dimanche, maintenant que j'y pense. A toute à l'heure.

Il l'embrassa tendrement sur la joue, m'adressa un sourire, serra l'épaule d'Alexandre et s'en fut d'un pas tranquille, une main vissée sur la nuque. Dès que la porte claque derrière lui, ma mère se retourna et nous nous mîmes à tous nous interroger du regard. La mâchoire contractée, Alexandre finit par lâcher durement :

-Bon ? Quel est le problème ? Le fait que ce soit un sorcier ou qu'il menace la chasteté de sa petite fille ?

-Je ne sais pas, concéda ma mère, visiblement contrariée. Et encore, c'est bizarre ... Attends, qu'est-ce que tu fais ? Victoria !

Je venais de me lever, de façon assez subite – si subite que ma chaise vacilla et fut rattrapée in extremis par Alexandre. Sans même le remercier, j'attrapai ma veste posée sur le plan de travail et lançai à la volée à ma mère :

-Je vais lui parler. A toute !

-Victoria ...

Mais je ne l'écoutai pas et me dépêchai de sortir. Je poussai un grognement de frustration en constatant que mon père était parti en voiture. J'aurais pu transplaner, mais je préférai sortir mon vélo. L'air était frai et humide après deux jours de pluie et la grande inspiration que je pris calma immédiatement les nerfs. Les premiers coups de pédales se chargèrent eux d'expier la colère sourde qui s'était éprise de moi dès que mon père était sorti de la pièce.

Ce comportement, je le connaissais. Par cœur. Il m'avait accompagné six longues années, pendant chaque vacances, chaque retour de Poudlard jusqu'à ce qu'enfin mon père accepte que je sois une sorcière. Tout le monde s'accordait à dire que j'étais la reine de la fuite, mais la vérité était que j'étais que l'élève – et le maître était mon père. La stratégie de l'évitement, c'était précisément ce qu'il avait mis en œuvre pour occulter le côté magique de sa fille. Que voulait-il fuir à présent ? Seule face à la route, les mains gelées et crispée sur mon guidon, je laissai échapper un cri de frustration. Je n'étais pas sûre de supporter de nouveau une telle situation. S'il y avait un problème, qu'il en parle et qu'on le règle.

Et intérieurement, après tout ça, je n'en revenais pas que Simon, le garçon à qui il avait donné sa guitare, qu'il avait protégé toute notre enfance, soit un problème.

Je jetai presque mon vélo dans la pelouse qui bordait l'église St-Edward – une drôle de coïncidence qui faisait rire les villageois. Les deux ifs qui me semblaient éternels se tenaient de chaque côté de la porte, elle-même surmontée de carreaux colorés rendu ternes par le temps morne. L'absence de luminosité rendait ses pierres ordinaire couleur miel un peu grise et sa tour carré, dans un style très anglo-saxon, se fondait presque dans le ciel tapissé de nuage qui ne semblait pas avoir fini de déverser ses larmes. Je repérai la voiture de mon père garée sur le petit parking sur le côté et entrai sans attendre dans la petite église. Aussitôt, le temps parut se suspendre. C'était une impression que j'avais eue chaque fois que j'entrai dans un édifice religieux : cette impression que tout était figé dans l'éternité, hors du temps, de l'espace et loin du marasme d'émotion dans lequel l'univers était enfermé. Tout était plus calme. Plus rien n'existait, dès qu'on entrait dans la maison de Dieu.

L'église suivait un plan très simple : une longue nef supplantée de deux rangées de banc en bois qui s'alignaient jusqu'au maître-autel. Il était surplombé du seul vitrail coloré représentait le Christ en majesté, les bras ouverts pour accueillir ses fidèles. Et alors que je détaillai les boiseries qui décoraient le plafond, mon regard finit par tomber sur les premiers rangs où mon père était assis, en face du crucifix planté sur l'autel. Mes pas résonnèrent sinistrement dans l'espace ouvert : petite, j'aurais été intimidée par l'échos et je me serais évertuée à faire le moins de bruit possible. Mais aujourd'hui, peu m'importait de réveiller les saints qui dormaient ou les morts qui reposaient derrière l'église : j'avalai rapidement les derniers mètres qui me séparaient de mon père. Il dût m'entendre mais ne tourna pas la tête, pas même lorsque je m'assis à côté de lui. Il fixait le crucifix d'un regard intense, luisant, mais étrangement calme, serein. Chaque fois que mon père entrait dans une église, il paraissait prendre en stature et en aura : ce n'était plus que mon père, il devenait infiniment plus.

-Tu es venu prier pour quoi ? demandai-je dans un murmure.

Ce n'était pas haut, mais cela parut résonner dans toute l'église et emplir complètement l'espace. L'écho arracha un sourire à mon père.

-Comme d'habitude. Rachat des pêchers de l'humanité. Espoir d'un monde meilleur. Santé et bonheur pour les miens. Que du grand classique ...

-Papa ...

-Je sais que je n'ai pas très bien réagi, me coupa-t-il d'un ton calme, mais ferme. Je sais que j'aurais dû te dire que je suis heureux pour toi. Que Simon est quelqu'un de bien et peut-être est-il l'une des seules personnes au monde à qui je peux confier ma fille sans crainte. Que c'est un garçon que j'aime beaucoup et que je serais vraiment honoré qu'il entre un jour dans la famille. Mais peut-être que c'est justement ça qui me fait peur ...

Une sentit une grosse boule de dépit se former dans ma poitrine à ces mots et je jetai un regard furieux au Christ de cristal devant moi, les bras ouverts comme s'il voulait m'engloutir.

-Ça fait entrer un peu trop de magie dans ton monde, c'est ça ? Moi ... Mel ... Simon c'est la goutte de trop ?

Je n'avais pas pu me contrôler et un soupçon d'amertume s'était immiscé dans ma voix. Mon père le perçut pertinemment car son regard se glissa ostensiblement vers moi. J'avais ses yeux, je le savais, les yeux en amande aux iris oscillant entre le bleu et le gris selon la luminosité. C'était peut-être la seule chose que je tenais physiquement de lui. Alexandre lui ressemblait davantage avec les cheveux d'une teinte plus claire et d'une texture plus malléable que la boucle, le visage allongé et le nez droit. Il poussa un profond soupir dont chaque note alla se répercuter sur les pierres froides de l'église.

-Si je dois être parfaitement honnête, Mel m'a fait un plus gros choc que Simon. Ce n'était plus sur toi que je comptais pour avoir une famille « normale », si on veut, mais sur Alexandre. Personne ne s'attendait à ce qu'il trouve une sorcière ... Alors que toi, c'était prévisible. Il y a longtemps que je me suis fait à l'idée qu'un jour, tu allais nous ramener un sorcier. Je devrais être très heureux que de tous, tu aies choisi de nous amener Simon ...

-Alors c'est quoi le problème ? Papa, ne nies pas, tout en toi crie qu'il y a un problème, je le vois. Dis-le-moi. Je préfère que tu me le dises maintenant plutôt que de l'ignorer comme on l'a fait ces dernières années ...

Mon père pressa ses paumes l'une contre l'autre et noua ses doigts étroitement. La lumière blafarde se reflétait spectralement dans ses lunettes et peinait à faire scintiller l'or sur l'anneau qu'il portait à l'annuaire.

-Chérie, peut-être que tu ne réalises pas, mais ça a été très difficile pour nous d'être séparé de toi toutes ses années, souffla-t-il, comme un affreux aveu. Ça a été très difficile pour moi ... le jour où tu es partie pour la première fois, tu avais des larmes dans tes yeux. Je sentais que tu n'avais pas envie d'y aller et si j'avais pu je t'aurais gardé, oh oui, gardé pour te préserver, pour te garder pour moi ... Parce que tu es ma petite fille et que je t'aime plus que tout.

L'émotion manifeste dans la voix de mon père fit fondre la boule de colère qui brûlait dans ma poitrine et quand je battis des paupières, j'y découvris une humidité suspecte. Il essuya un petit rire étranglé.

-Oh, autant que ton frère, bien entendu mais ... toi et moi, on a été tellement proches. J'ai mis des barrières entre nous avec toute cette histoire de magie et je n'en excuserais jamais assez. Et maintenant que j'ai l'impression de te retrouver enfin, je découvre que ma petite fille est une femme et qu'un homme va me la prendre ...

J'aurais dû répondre quelque chose de rassurant, prendre mon père dans mes bras pour le remercier de se livrer ainsi à moi, lui assurer que personne ne me prendrait et que je serais pour toujours sa « petite fille ». Mais la première chose qui franchit mes lèvres fut :

-Ce n'est pas un homme, c'est Simon.

Cette fois, ce fut un franc éclat de rire qui s'échappa de la gorge de mon père et se répercuta joyeusement dans toute l'église. J'avais l'impression que cent fantômes riaient avec lui en une symphonie mystique. Dans un élan tendre, il passa un bras derrière mes épaules et m'embrassa sur le sommet du crâne.

-Oui, c'est vrai, ça devrait me rassurer ! Oh la la ... (Il appuya sa joue contre mes cheveux et je me laissai aller contre lui, la gorge serrée). Mais en même temps, c'est peut-être ça qui me fait peur ... Vous avez une telle relation ... Vous êtes sur la route. Alors, si, il est la personne qui me volera ma petite fille.

Je sentis ma gorge se fermer à la conclusion de mon père. Je fermai les yeux pour calmer ma respiration qui s'était mise à dérailler mais aussitôt des mots flottèrent dans mon esprit, comme chuchoter par les saints qui hantaient l'église.

C'est là depuis l'enfance. Ça ne fait que grandir. Jamais ça ne disparaîtra.

Et nous ? C'est le destin ?

Qu'est-ce que ça fait Perelko ? D'avoir trouvé la personne ...

Même Simon s'interrogeait. Et pour que Simon, le sceptique des relations, celui qui avait affirmé qu'on ne pouvait pas tomber amoureux à seize ans et que la jeunesse ne connaissait rien de l'amour, s'interroge, c'était qu'il devait y avoir une évidence qui crevait les yeux. Mais c'était vertigineux. C'était effrayant. C'était ce qui avait paralysé Simon pendant deux ans et ce que j'avais occulté en proposant de « vivre ce qu'on avait à vivre ». Mais c'était plus que cela. Il était tellement plus ... Jaga avait raison, je m'appartenais plus totalement. Il n'y avait qu'à voir tout ce que j'étais capable d'endurer pour lui, ce que j'étais capable de faire pour lui, ce que j'étais capable de perdre pour lui ...

Je ne veux pas que tu meures, Vicky.

Mon souffle se raccourcit si fort que j'en demeurais suffoquée et un éclair de panique me traversa pour me faire dire :

-Arrête, on n'en sait rien ... C'est juste ... juste ...

Mais mes mots fondirent sur la langue, incapable de prendre forme car il était difficile de mentir dans la maison de Dieu. Mon père dut sentir mon trouble, dans le tremblement de ma voix ou dans la façon dont je m'étais brusquement raidi dans ses bras car il raffermit sa prise sur moi avec douceur.

-Oh ma chérie ... Tu verras bien. Mais vous ne vous seriez pas mis ensemble pour rompre dans un an, je me trompe ? Pas vous, pas avec votre histoire ... Vous allez faire en sorte que ça marche.

La gorge serrée, je finis par acquiescer. Oui, ça ne pouvait que marcher. Je ne supporterais pas que ça s'arrête. Rien que l'idée provoquait une angoisse plus prégnante que celle qui m'avait envahi à l'idée de passer ma vie avec Simon Bones. J'expirai lentement, en espérant qu'avec mon souffle s'échapperait ma panique et mes doutes pour ne laisser que de la sérénité. C'était ce que j'avais ressenti en embrassant Simon pour la première fois. C'était ce que j'avais ressenti quand il s'était livré pendant notre promenade dans les campagnes de Terre-en-Landes. De la sérénité. De la certitude. C'était si évident face à lui, mais une fois Simon loin, l'évidence s'effritait pour laisser apercevoir le doute et la panique.

Mon père frotta doucement mon bras.

-Ce n'est pas Simon, Victoria. Ce n'est même pas le fait qu'il soit un sorcier ... C'est juste douloureux de voir ma fille grandir alors que j'ai l'impression que j'ai loupé la moitié de sa vie.

-Mais je reste ta fille, tu sais, murmurai-je, la gorge serrée. Quoiqu'il arrive. Tout ce que j'ai de meilleur en moi, je le tiens de toi. Tout ce que tu m'as appris, je l'ai porté comme un talisman à Poudlard ... Être juste, bienveillante ... Tout ça c'est toi ...

Mon père laissa un échapper un souffle tremblant dans mes cheveux, accompagné d'un son inarticulé qui ressemblait à s'y méprendre à un sanglot étouffé.

-Ma chérie ...

Je me raccrochai à son bras et enfouis mon nez sous mon épaule, les paupières pressées pour retenir mes larmes. J'avais craint de l'indifférence voire de la distance de la part de mon père, mais c'était tout l'inverse qu'il se découvrait. En fin compte, il n'avait toujours été qu'un père qui avait peur de voir sa fille grandir ...

***

-Et Vanlerenberghe effectue un virage à cent-quatre-vingt degré avec le souafle ... et il marque ! Ah non Barbapapa l'a arrêté ! Putain je l'ai vu dedans !

-Tout de suite, les commentaires manquent de professionnalisme, fis-je remarquer avec un sourire sarcastique.

Je soupesai le souafle en lorgnant Arnold, assis négligemment sur son balai. Nous n'étions plus que trois sur le stade : Eden et moi qui continuions à nous entrainer et le Batteur qui n'était là que pour jouer le speaker. La séance qui devait nous opposer à l'équipe A avait été écourtée : la nouvelle nous était parvenu que le match en cours entre les Harpies de Holyhead et les Flèches de Appleby avait été interrompu en raison de suspicion d'une attaque sur l'Ovale, le principal stade anglais – celui qui avait accueilli la Coupe du Monde. De fait, les spectateurs avaient été évacué, la ligue suspendue et les présidents de clubs appelaient au siège pour faire le point. Après cette interruption, tous avaient été libéré, mais Eden et moi étions restés nous entrainer.

Arnold me gratifia d'un sourire qui fendit sa barbe.

-C'est pour ça que je ne pouvais pas être commentateur sportif, ma grande : je m'emballe trop.

-Tu n'as pas une femme, toi ? lui lança Eden en s'épongeant le front. Et un gosse ? Genre qui vient de naitre ?

-Hé ! Faith a deux mois. Deux mois que je ne m'autorise aucune pause alors laissez-moi profiter de vous, petites canailles. Dommage que Black Swan ne soit pas restée ... Mais bon trois enfants, ça m'étonne déjà qu'elle ait le temps d'être Capitaine de l'équipe. Quelle femme incroyable.

Je pensais surtout que le Quidditch était la bouffée d'air frai de Swan, comme elle le devenait pour Arnold depuis que sa fille était née début mars. Un moyen d'échapper à la lourdeur des rôles du quotidiens, d'expier les frustrations ... d'oublier que dehors, c'était la guerre. C'était ça qu'avait représenté le sport pour tous, moi compris : une bulle incroyable imperméable à l'ombre que Voldemort plongeait.

Jusque maintenant.

Je revis le visage marqué de Leonidas lorsque l'officiel du Ministère était venu quérir sa présence, ainsi que l'empressement des joueurs à fuir la place, comme si c'était le centre Plumpton qui allait être attaqué. Certain avaient eu l'air de tomber des nues, comme s'ils découvraient que dehors, une guerre était en cours. Le sport, pourvoyeur d'oubli, était en train d'être perverti.

-Ça m'étonne qu'ils ne s'y soient pas penché plus tôt, soufflai-je.

-Quoi ?

Eden s'était rapproché de moi et freina in extremis de son balai, exécutant ainsi un spectaculaire demi-tour sur place qui donnait l'impression qu'il venait de glisser. Il se permettait parfois de frimer devant tous, par des acrobaties ou des idioties – en tout cas, Swan avait été pliée lorsqu'il s'était mis debout sur son balai et qu'il avait fini par y tomber.

-Rien, soupirai-je en lui lançant le souafle qu'il rattrapa souplement. Je suis juste ... très surprise que le sport n'ait pas été utilisé avant. C'est une bonne machine de propagande – et effectivement, des événements populaires où il est facile de créer le chaos.

-Ah ça ..., ricana amèrement Arnold. Tout le monde se souvient des Jeux Olympique de 72 ...

-Les quoi ? se troubla Eden.

-Un grand événement sportif moldu qui a lieu tous les quatre ans, expliquai-je succinctement avant de me tourner vers Arnold. Et je pensais plus à ceux de Berlin en 1938 ... Jesse Owens, le sprinteur noir qui a fait trembler Hitler !

-Grand moment s'il en est, mais ça c'est le côté propagande, Barbapapa. Le chaos, c'est 1972 – définitivement, l'Allemagne doit être maudite ... Bref, ça concerne le conflit israélo-palestinien, pour le coup. Des athlètes israéliens ont été assassiné par des terroristes palestiniens. Terrible.

Ma bouche se tordit nerveusement devant le récit, trop semblable à ce que l'on pouvait redouter. Le regard d'Arnold s'était brusquement fait aussi sombre que l'onyx.

-Et ne sois pas naïve de croire que la guerre ne s'est pas déjà infiltrée dans le milieu du Quidditch. On brasse beaucoup d'argent et de visibilité : on n'est clairement pas quantité négligeable pour le Ministère. Ça se passe plus du côté de la ligue professionnelle : ils répètent leurs consignes à chaque match et je suis presque persuadé aussi qu'ils s'en servent pour appas pour des Mangemorts ... Enfin bref. Si ça devient trop concret, ils finiront par arrêter ...

-Quoi ? s'exclama Eden, abasourdi. Tu crois qu'ils vont suspendre la Ligue pour de bon ?

-Peut-être pas la Ligue, mais nous, la Petite Ligue, sans doute. Ils mettent déjà énormément les moyens d'assurer les matchs des pros ... Pour l'instant ça tient, mais là ça fait de long mois que la guerre a commencé. Les dossiers se multiplient, la lassitude commence à peser, il y a les premiers blessés chez les autorités ... Ils vont commencer à mieux répartir nos forces et on risque d'être sacrifié. Je crois que c'est ce qui s'était passé pour la première guerre. Ils avaient maintenu la Ligue, mais pas les matchs des réserves.

Eden et moi échangeâmes un regard effaré qui dérida Arnold : il éclata de rire et donna une bourrade au jeune homme.

-Pas de panique, on continuera certainement à s'entrainer. Il faut quand même qu'on soit prêt à remplacer les titulaires en cas de blessure ... surtout toi, Barpapa, j'ai entendu dire que Leonard Spielman était très mauvais en ce moment et que Parkin commençait à pester contre lui. Ça sent bon pour toi l'année prochaine ...

Je me mis à rougir et préférai ignorer la pique. Ce n'était pas la première personne qui me faisait part des difficultés du gardien titulaire ces derniers matchs : lors de la dernière séance contre l'équipe A, l'une des poursuiveuses m'avait souri et gratifié d'un malicieux « à l'année prochaine ». Pourtant je ne me sentais pas personnellement progressé : je prenais confiance dans les matchs parce que j'avais appris à relativiser les performances et j'avais fini par intégrer les préceptes de Dalia, mais ce n'était pour autant que je me trouvais meilleure. Mais était-on réellement son meilleur juge ? Néanmoins je l'avouais, l'équipe professionnelle était une perspective que je craignais. J'avais des difficultés à trouver un équilibre, je me sentais étouffée. Je n'avais le temps de rien. Dans la fleur de l'âge, je peinais à pleinement profiter de ma vie – et les rares fois que je m'y autorisai, c'était avec Simon. L'évoquer réduisit mon estomac à un amas de bouillie informe. Je ne l'avais pas vu depuis que nous avions pris la décision d'annoncer notre relation à nos parents. Je lui avais bien envoyé Archimède pour lui assurer que mon père était l'homme le plus formidable sur terre qui soit, mais je n'avais pas reçu de réponse.

Et je ne voulais pas frapper à la porte des Bones et me retrouver devant George. Ou Rose. Le « jamais ! » qu'elle avait lancé résonnait encore dans tout mon être.

Mes songes finirent par me distraire du jeu et Eden finit par marquer deux pénalties avant qu'Arnold ne décrète que la séance avait assez duré et qu'il était temps pour tout le monde de retourner à la vraie vie. Je réussis à avoir la douche la première et Eden me succéda rapidement, me laissant seule avec Arnold à essuyer mes longues boucles mouillées. Il me jeta un regard malicieux.

-Alors Barpapaba ? Avec mon congé paternité, on ne s'est pas beaucoup vu ... Comment ça avance avec le neveu de Grims ?

-Ferme-la, le tançai-je en lui jetait ma serviette humide au visage.

-Oh tu n'es pas drôle ! Allez, on est juste entre nous, promis je garderais ça pour ...

Nous fûmes interrompus par un « BIP » strident venant du sac d'Arnold. Il perdit son sourire et y enfouit précipitamment ses mains pour en sortir un boitier noir dont il en consulta la trancha, les sourcils froncés.

-Et merde ... bon, je vais attendre un peu pour retrouver ma fille, le devoir m'appelle.

-Ah bon ? commentai-je distraitement, occupée à ranger mes affaires.

-Oui, je suis d'astreinte ... je dois aller à la caserne.

Je rejetai mes cheveux humides en arrière, perplexe et glissai un regard circonspect sur la mine renfermée et prudence d'Arnold. Je réalisai alors que si je savais tous sur sa vie de famille, sur sa jeunesse à Poufsouffle, sur sa vie de trentenaire accro au Quidditch, je ne savais rien de son métier. Le « caserne » était peut-être le premier indice qu'il laissait échapper.

-La caserne ? répétai-je. Je ne savais pas que les sorciers en avaient ... militaire ?

Arnold soupira bruyamment et rangea rapidement ses dernières affaires. Il attendit que son sac soit fait pour s'approcher de moi, un sourire aux lèvres qui tenait plus du rictus.

-Allez, à toi je te le dis parce que je sais que tu ne jugeras pas et que je t'en fais baver avec mes questions. Je suis sapeur-pompier.

-C'est bien, dis-je, un peu perplexe.

-Chez les moldus, Barbapapa.

Cette fois je papillonnai des yeux, sous le choc. Arnold s'esclaffa devant ma mine ahurie et m'ébouriffa joyeusement les cheveux.

-Ne me fais pas regretter de te l'avoir dit ! Seule Swan et l'administration sont au courant, je ne tiens pas à ce que ça s'ébruite, surtout par les temps qui courent. On m'a pété ma baguette à Poudlard pour moins que ça ...

-Je me doute, soufflai-je, interdite. Moi on m'a cassé le nez ...

Et attachée sur un bûcher en voulait me faire passer pour Guy Fawkes, voulus-je ajouter, mais les mots restèrent bloquer au fond de ma gorge. Même maintenant, des années plus tard, après Kamila, l'amnistie de Dumbledore, le reste, je peinais à me confier sur le 5 Novembre. Arnold eut un sourire amer et posa une main sur mon épaule. C'était incroyable que le dénominateur commun des nés-moldus à l'école soit les persécutions. C'était incroyable que rien n'ait été changé, fait contre ça. Et j'avais parfaitement conscience que toute cette franche indifférente qui avait laissé des petites brutes nous casser nos baguettes et nos nez seraient le terreau parfait pour l'épanouissement de Voldemort.

Seigneur ... il faut que je termine mon livre. Vite. Il faut inverser la tendance ...

-Je me doute, lança Arnold en écho. Mais ne crois pas que ça a influé ce que je voulais faire : j'adore être un sorcier – et rien que pour le Quidditch et le balai ... mais mon père et mon grand-père étaient pompiers, c'était mon rêve depuis tout petit. J'ai décidé qu'être sorcier ne me ferait pas renoncer à mon rêve ... Les professeurs ont essayé de me dissuader, mais j'ai fini par être soutenu par Dumbledore en personne.

-Mais ça ne pose pas des problèmes de logistique ?

-Tu veux parler de l'argent ? Bien sûr que ça pose des problèmes. Le change de gallions à la livre se fait assez facilement. En revanche, quand tu viens avec des livres que tu veux transformer en gallion, la procédure est beaucoup plus ardue et tu te heurtes à la réticence des gobelins. En plus ils n'acceptent que des petites sommes, j'ai dû faire un emprunt pour acheter mon balai pour entrer dans l'équipe de réserve. Alors maintenant la réserve justement c'est ce qui me permet d'avoir un équilibre livre/gallion, mais ce n'est pas comme si on avait un gros salaire. Et surtout, je veux mettre ces gallions de côté ... Mes enfants sont des sorciers, il faudra bien que je leur paye tout leur attirail le jour de la rentrée.

Et cela coûtait une fortune, me souvins-je pour avoir tenue ma bourse serrée contre moi en faisant mes premiers achats avec George Bones à onze ans, effrayée par mon nouvel environnement et par les sommes astronomiques qui m'étaient demandées à chaque comptoir. Arnold laissa échapper un ricanement.

-C'est en parti pour moi et mes difficultés financières que Grims a mis en place le système de bourse pour la réserve ... J'avais demandé mon salaire plus tôt pour pouvoir m'acheter le Nimbus, comme on venait de signer le partenariat avec eux ... Tout le monde le déteste parce qu'il est américain et qu'il « dénature le club », mais moi je trouve que c'est quelqu'un de bien.

-C'est pour ça que tu le défends tout le temps, compris-je.

-Oui. C'est le seul ici qui m'a écouté et aidé sans me juger et ... (Le boitier qu'il tenait toujours à la main bipa de nouveau et Arnold grimaça). Bon, je vois vraiment y aller ... Ravi d'avoir pu partager ça avec toi, Barbapapa.

-Pareil ... Oh et Barberousse ?

Arnold s'immobilisa dans l'embrassure de la porte et se retourna d'un quart de tour, tout ouïe. J'esquissai un sourire incertain avant d'avouer :

-Garde-le pour toi mais ... je suis avec Simon.

J'ignorai pourquoi je le lui disais – sans doute parce qu'une confidence en appelait une autre et que je voulais me sentir digne de sa confiance. Je m'attendais à une réaction vive, emblématique du colosse et sa bonne humeur parfois dévorante, mais cette fois il se contenta de sourire et de lever le pouce.

-C'est bien, Barbapapa. Profite. La vie est courte.

Et il s'en fut rapidement, courant presque dans le couloir pour s'adonner au métier qui faisait sa véritable passion – sauver des vies. Et moi je saisis mon sac pour le suivre tout aussi précipitamment. Il fallait que j'apporte ma pierre à l'édifice.

***

« L'année zéro ». Le terme est abusif, mais assez marquant pour qu'on s'y attarde. 1689, date de la signature du Code Internationale du secret magique qui oblige les sorciers à la clandestinité la plus totale. Le péché originel pour les uns, l'acte de paix fondateur pour les autres. Qu'on soit d'un avis ou d'un autre, ce qui est certain c'est que c'est cette année-là qu'a été érigée une barrière institutionnelle entre moldus et sorciers. Ce n'était plus de l'ordre de la volonté individuelle : c'était inscrit dans la loi de chaque sorcier de ce monde. Ce qui était un droit de chacun est devenu un devoir, stricte, passible parfois de la peine capitale. Les sorciers doivent se cacher. C'est vital. Il en va de notre survie.

Il est intéressant de constater que le code a été décrié par les deux camps – les Sangs-Purs désireux de pouvoir exercés leur magie librement, et les proches des moldus qui souhaitaient continuer à user de leur pouvoir pour les aider. Malheureusement, cette franche de la population magique a décrus dans des proportions importantes le long du Moyen-âge en raison des persécutions diverses contre ceux que les moldus considéraient comme « sorciers ». Même les sorciers les plus aimables finissaient par être accuser et condamner aux bûchers – même si peu d'entre eux en sont réellement morts. Ne restait alors que le feu et le sang des deux côtés.

Alors dans les faits, nous l'avons longuement prouvé, les sorciers s'étaient au XVIIe siècle largement retranchés sur eux-mêmes pour éviter d'avoir à faire à la fureur moldue attisée par quelques attaques de sorciers suprémacistes. Le Code International semble donc être rien de plus que l'officialisation d'une situation qui s'était déjà installée des décennies auparavant. Mais voilà, pour certain c'est une prévision des droits et surtout ça a signé le point de non-retour pour la communauté magique. Plus d'échange, plus de dialogue : chacun chez soi.

Oui, 1689, c'est l'année zéro, l'année du schisme, l'année après laquelle rien ne sera plus jamais pareil. Maintenant, ce n'est plus simplement dangereux, immoral (ou moral selon les opinions), ou prudent : c'est interdit par la loi et la loi ne compte pas changer. La société sorcière s'est enterrée, pour le bien de sa magie, pour sa survie et celle du monde moldu.

Culturellement parlant, c'est ainsi que le temps s'est arrêté pour la communauté magique. Quand nous observons bien notre monde de vie et de fonctionnement, beaucoup de nous outils sont datés de l'époque où les interactions avec les moldus proliféraient – plumes, parchemins, mode ...

-Vicky ?

Je relevai le nez de la machine à écrire pour voir la tête de Simon dépasser de l'embrassure de la porte. Il avait sa cape d'été sous le bras et un sac passé en bandoulière ainsi qu'une tache d'encre sur la joue après avoir passé toute l'après-midi sur des calculs extrêmement difficiles pourtant nécessaire à la création de certain sortilège. Je savais qu'il devait passer chez Julian lui rendre ses conclusions – un peu en retard – et en profiter pour dîner avec lui et son « compagnon ». Seul. Comme un grand.

-J'y vais, j'ai laissé un mot à mes parents pour dire que tu travaillais, qu'ils ne s'étonnent pas ... Normalement ils ne vont pas tarder à rentrer.

Concentrée toute entière sur mon parchemin et les lettres scripturales qui s'y alignaient les unes après les autres, j'appréhendais à peine la nouvelle. Je ne m'étais pas retrouvée devant Rose et George depuis qu'ils savaient. Visiblement, Simon était plus nerveux que moi car il entra plus franchement dans la pièce pour s'assoir sur la chaise à côté de la mienne.

-Ça va aller ... ?

-Simon, je connais tes parents depuis que je suis petite. Oui, ça va aller. (Je cessai de taper et je lorgnai du coin de l'œil). Pourquoi ? Ils l'ont bien pris, non ?

Simon haussa passivement les épaules. Ses doigts se mirent à pianoter sur la table de façon machinale.

-Si, si. Enfin, surpris, comme tout le monde. Je pense qu'ils ont du mal à réaliser, mais ils finiront par s'habituer. Ma mère m'a demandé au moins cinq fois de répéter ...

J'essuyai un petit rire, mais il ne suffit pas à couvrir la voix insidieuse de Lysandra dans mon esprit. « Tu sais dans quoi tu t'engages avec les Bones ? ». Je replaçai nerveusement une mèche derrière mon oreille. Lysandra et Rose ne s'appréciait pas : cette inimitié jouait nécessairement sur le jugement l'une de l'autre. Je m'imprégnai de cette idée pour chasser l'appréhension et gratifiai Simon d'un sourire rassurant.

-C'est pareil pour ma mère, tu sais. Elle dit qu'on est le chat de Schrödinger. Tant qu'elle n'a pas ouvert la boite, elle ne sait pas si le chat est mort, vivant ou les deux.

-Et c'est nous le chat ? devina Simon avec l'ombre d'un sourire.

-Exactement.

Je me concentrai à nouveau sur ma page en cours d'écriture et mes doigts se remirent à taper avec habilité. J'avais pris en fluidité à au fur et à mesure des semaines : je devenais de plus en plus rapide et les feuillets se succédait à un rythme appréciable. Ma discussion avec Arnold m'avait mis dans une véritable frénésie : je m'étais précipitée chez les Bones, bien décidée à prendre ma part dans le combat. Simon avait raison : c'était peut-être ce que j'étais capable de faire de mieux, de plus utile, de plus concret. Une guerre passait par les mots. Il prit par ailleurs le temps de poser son sac et de relire les derniers feuillets que j'avais tapé – et même de corriger quelques fautes qui m'avaient échappé de la pointe de sa baguette.

-Vous avez encore beaucoup à écrire ? s'enquit-t-il.

-Encore une dizaine de chapitre, je dirais ... Octavia réfléchit même à prendre un mi-temps pour qu'on puisse le finir cet été. Elle n'a pas besoin d'un gros revenu, elle ne quittera pas ses parents tant qu'elle n'aura pas une bague au doigt ...

-Oh, les McLairds sont assez modernes dans leur genre. La posture stricte et traditionnelle d'Octavia, c'est plus pour les Selwyn que pour ses parents ... Oh la la, tu as vraiment un problème avec « discours ». C'est un « s » au bout, pas un « t », espèce de minus.

Il me donna une pichenette sur la tempe, comme si cela pouvait faire rentrer l'information plus facilement. Puis son pouce caressa l'endroit qu'il venait de frapper, comme pour s'excuser et ses doigts finirent par se saisir d'une mèche avec laquelle il joua nonchalamment. J'avais fini par comprendre qu'il avait un véritable problème avec mes cheveux : plus la confiance s'installait, plus il s'y aventurait, les examinait, comme pour déterminer leur couleur exact ou simplement tester l'élasticité de la boucle.

-Tu sais, je peux repousser avec Julian ... Je peux y aller demain.

-Ça fait déjà deux jours que tu dois lui rendre ça, objectai-je en levant les yeux au ciel. Ça va aller ... D'ailleurs je veux toujours interroger ton père sur les carnets qu'on a trouvé dans le grenier, ce sera l'occasion ... Et arrête de stresser, je vais finir par vraiment croire qu'il y a quelque chose qui ne va pas !

-Mais tout va bien, s'empressa de m'assurer Simon. Je ne veux juste pas avoir l'impression de t'abandonner face à eux ...

A la fois amusée et touchée, j'eus un petit rire avant de me pencher vers lui et de poser mes lèvres sur les siennes pour définitivement le rassurer. Avec un soupir qui sonnait comme une reddition, Simon aventura ses doigts plus franchement dans mes cheveux avant de les glisser sur ma nuque. J'aurais pu très facilement me laisser tenter par ce baiser, complètement emportée par les frissons, mais mes doigts demeuraient scotchés à la machine et je finis par m'écarter avant de perdre de vue ce pourquoi j'étais venue – et pour une fois, il ne s'agissait pas de Simon.

-Allez, file. On se revoit demain, l'entrainement est annulé ...

-Encore ?

Je haussai les épaules, ne sachant si j'étais contrariée ou soulagée par la chose. Nous étions dans le flou total depuis l'évacuation de l'Ovale en début de semaine mais d'après les pages sportives de La Gazette, la Petite Ligue était menacée pour porter toute la protection sur la Ligue professionnelle. Les sourcils de Simon se froncèrent ;

-Hum ... Tu veux que j'envoie une lettre à Leonidas ?

-Non, je finirais bien par avoir des nouvelles ... par contre, je vais me renseigner sur La Voix du Chaudron, je suis curieuse de voir ce à quoi peut ressembler une ligne éditoriale qui n'est pas celle de La Gazette ...

-C'est vrai que ça m'avait intrigué quand ils en ont parlé, avoua Simon. Puis Julian a lâché que mon frère sortait avec ta prof d'étude des moldus et tout est parti en vrille ...

Mes doigts s'agitèrent compulsivement sur les touches et mon regard tomba sur la dernière phrase que j'étais en train d'écrire. « Culturellement, le temps s'est arrêté pour la communauté magique ». Ils nous avaient également tant séparé des moldus qu'ils étaient devenus une espèce à part, une espèce qu'on étudie, pas avec laquelle on cohabite. Je pris un parchemin à l'aveugle pour rajouter cette réflexion et répondit distraitement à Simon :

-Et bien profites-en pour l'interroger un peu ... et file, bon sang !

-Rôh, j'y vais ... A demain.

Il me pressa fugacement l'épaule avant de prendre son sac et d'enfin partir. La porte n'avait pas encore claquée en bas que je m'étais remise à la rédaction, sans me soucier du temps qui défilait où du soleil qui disparaissait derrière les arbres puis l'horizon. J'avais juste pris le temps d'allumer la pièce de ma baguette lorsque la luminosité fut insuffisante. Le tas de feuillet à côté de moi s'épaississait, prenait de la consistance mais d'envola quand je sursautai après qu'une voix ait claironné :

-Tu es toujours là ?

-Rose !

Je me penchai pour ramasser mes feuilles, paniquée à l'idée de perdre la moindre d'entre elle. Rose, toujours de cape vêtue et un sac au creux du coude, se pencha pour m'aider à les récupérer, visiblement contrite.

-Oh la la, désolée... Je ne pensais pas te faire peur, je suis seulement étonnée que tu sois encore là à cette heure-ci ...

-Quelle heure ... ?

Je contorsionnai mon poignet pour jeter un coup d'œil à ma montre : il était presque vingt-deux heures. Je clignai des yeux, soufflée. J'étais restée le nez collé à ma machine plus de deux heures.

-Oula.

Un sourire retroussa les lèvres de Rose et elle me tendit mon paquet de feuille sommairement rassemblé. Elle avait toujours un chapeau de sorcière vissé sur sa tête et surplombant un chignon sophistiqué qui retenait ses cheveux bruns sur sa nuque.

-Oui, en effet ... tes parents vont s'inquiéter, tu ferais mieux de rentrer. Viens, je te raccompagne.

Et elle posa une main douce sur mon bras, une main qui me rassura comme le sourire maternel qu'elle m'adressa. Rien n'avait changé, j'avais l'impression de rester la petite Victoria qu'elle avait pris sous son aile le jour où elle m'avait appris que j'étais une sorcière. C'était de sa bouche que je l'avais appris, elle qui avait prononcé les mots fatidiques, elle qui m'avait soutenu depuis. La montre sur laquelle je venais de lire l'heure, c'était elle aussi. J'avais toujours la lettre qui l'avait accompagnée, cachée dans le dictionnaire de rune à côté de celle que ma mère m'avait envoyé l'année dernière après avoir appris qui elle était vraiment.

Je remballai mes affaires, rangeai soigneusement mes feuillets et la machine dans sa boite et suivis Rose à l'extérieur de la bibliothèque. Je pris un instant avant de m'aventurer sur l'escalier et le dévalai si vite que j'en dépassai Rose. George était assis sur le canapé, La Gazette déployée devant lui. Le journal s'abaissa dès qu'il m'aperçut pour me dévoiler son grand sourire.

-Mais c'est notre petite cachotière ...

Je ne sus quoi répondre à la pique et aux yeux étincelants de George et me contentai de rougir. Il replia son journal sur lui-même et se leva, toujours avec cet immense sourire qui fendait sa barbe de rouille et de fer. Rose soupira derrière moi.

-Oh, laisse-la tranquille ... elle doit rentrer chez elle ...

-Tu ne veux pas dîner ici ? proposa gentiment George, le regard pétillant. Il me semble que Simon a dit qu'il rentrait et ...

-Vous voulez vraiment le voir de vos propres yeux, compris-je, vaguement amusée.

George ne chercha même pas à nier et s'esclaffa joyeusement. Ses éclats de rire me réchauffèrent le cœur. J'ignorais quand j'avais vu George Bones si heureux. Peut-être jamais, maintenant que j'y pensais : c'était une personne que j'avais toujours considéré comme douce, bienveillante, un peu maladroite dans ses propos et ses gestes mais jamais complètement expansif.

-Oh que oui !

-Mais il me semble que Simon a dit qu'il dînait avec Julian, rappela Rose d'un ton pincé avant de pousser un soupir. Bon sang, je savais que j'aurais dû insister pour qu'il ait un autre tuteur ...

La phrase jeta un froid dans la pièce et me glaça les veines. Le rire de George mourut sur ses lèvres et il jeta un long regard acéré à sa femme.

-Julian a été impeccable de discrétion jusqu'à ce que ce soit Simon qui comprenne et vienne lui parler. Lui, de son propre chef. Tu ne peux rien faire contre sa volonté.

-Mais il ... Enfin, George, tu sais que ...

-Non justement, je ne sais plus rien. Il a changé par rapport à ça et je ne l'ai pas trouvé particulièrement bouleversé quand il est sorti du grenier avec Lysandra. Au contraire, même ...

Son regard glissa sur moi et je hochai la tête en signe d'assentiment, soulagée que George ait perçu la même chose que moi. Oui, quelque chose avait changé dans le grenier. Quelque chose qui lui avait fait accepter, qui avait enfin recoller les morceaux épars de son identité. Quelque chose qui lui permettait d'aller dîner chez Julian Shelton sans que je ne lui tienne la main ... Mais les lèvres de Rose se pincèrent et elle croisa les bras sur sa poitrine.

-Oui mais à quel prix ... ? On ne sait pas les conséquences que ça peut avoir sur lui, il est instable avec cette histoire ... Aujourd'hui ça va, mais demain il risque de vouloir partir en croisade ou de nous faire une dépression ...

-Je ne crois pas, objectai-je en douceur. Je pense que ça fait plusieurs mois qu'il est sur la même dynamique et ... Rose, je pense qu'il s'est enfin stabilisé. Il faut le laisser faire, maintenant ...

-Et si jamais les choses tournent mal on sait maintenant qu'on peut à cent pourcent compter sur Victoria pour nous aider, ajouta George en mettant une main sur mon épaule. Enfin, on le savait déjà avant, mais il y avait toujours le risque que l'aide se traduise par un coup ...

-Le risque existe toujours, ne vous en faites pas, plaisantai-je avant de me rétracter devant le visage figé de Rose : enfin pas de vrai ! C'est bon, c'est fini l'époque où je lui cassais le nez ... Depuis longtemps.

Maintenant que j'y songeais, depuis très longtemps. Le dernier vrai coup que j'avais porté à Simon était une gifle la veille de son anniversaire, après qu'il soit revenu de France en m'ayant laissé faire tout l'été le deuil de Cédric seule. Et même cette gifle était un cas isolé dans la période, le coup d'encore avant remontait si loin que je ne sus le retrouver. George essuya un petit rire et me pressa l'épaule.

-Mais on sait, ne t'en fais. Nous ne sommes pas aveugles non plus, on a bien vu que ça allait mieux entre vous ...

-Mais de là à en arriver ..., ajouta Rose d'un ton prudent. C'est ... improbable, il faut le dire.

Ce fut peut-être mon imagination. Ou peut-être étais-je toujours influencée par les doutes de Lysandra. Mais il me semblait que par-dessus ma tête, George jeta un regard sévère à sa femme qui contracta brusquement la mâchoire, comme pour bloquer sa pensée. Mais l'impression fut fugace et avant même que je n'eus le temps de m'interroger, elle me sourit.

-Cela dit, on est curieux de voir ce que ça va donner ... Bon, je suis épuisée, je monte me coucher ... Bonne nuit, rentre bien !

-Et je te raccompagne, je veux vérifier que tu transplanes bien, renchérit George en me faisant pivoter vers la porte d'entrée.

Je fronçai les sourcils. D'habitude, je transplanai seule dans le jardin entouré par les champs et les pâturages – là où personne ne pouvait voir la magie. Mais George me mena d'une main ferme jusque la terrasse qui bordait le fronton de la maison, avec quelques mètres plus loin la rue qui se perdait dans l'obscurité grandissante. D'un coup de baguette, il alluma les lumières extérieures et sa main se détendit sur mon épaule.

-Il ne faut pas en vouloir à Rose d'être inquiète, souffla-t-il une fois la porte refermée. Depuis quinze ans, elle a vu Simon faire crise sur crise dès qu'il s'agissait de ses parents ou de ses frères. Et c'est elle qui a dû toutes les essuyer, les gérer, le gérer ... moi ... moi je n'étais pas assez fort pour ça.

-Je comprends, affirmai-je, à moitié sincère. J'espère juste ... enfin, qu'elle ne va pas ... m'en vouloir ...

Les mots refusaient à s'aligner correctement, mais George eut un sourire indulgent. Sa bienveillance m'apaisait et me rassurait : de toutes les personnes qui avaient appris la nouvelle, il était de loin celui qui avait la réaction la plus appréciable à mon sens. Lysandra était restée froide, mon père avait craint de me perdre, ma mère répétait qu'elle attendait de le voir et Alexandre avait un brin surréagi. George paraissait être le seul à être simplement heureux pour nous.

-Rose a une relation privilégiée avec Simon, murmura-t-il, comme s'il craignait que sa femme l'entendre. Personnellement, je n'ai jamais su m'immiscer entre eux. Personne n'a pu. Sauf toi. Il faut juste le temps qu'elle s'y habitue ... mais ça se fera. Elle t'adore.

La réponse ressemblait beaucoup trop à un « oui mais » pour me rassurer complètement. Je croisai les bras sur ma poitrine et frottai la peau hérissée de chair de poule. Pourtant, l'air était doux en ce début de mai : le ciel était clair, dégagé, les branches des arbres aussi immobiles que des statues et la lumière tamisée du porche n'éclipsaient pas les étoiles.

-On verra, éludai-je finalement. Je pense que tout le monde a besoin de temps pour réaliser ...

-Pas moi. Je dirais même qu'il y a un moment que j'ai assimilé.

Je levai les yeux au ciel, un brin gênée par le sous-entendu. Même George, qui paraissait si réservé la plupart du temps, si en retrait, parfois maladroit et bourru, l'avait vu. Avais-je été aveugle à ce point ? Plutôt que de débattre avec moi-même, je descendis la volée de marche qui me séparait de la route et me retournai pour faire mes adieux à George lorsqu'une question d'une nature complètement différente me revint.

-George ? Dans le grenier, on a trouvé des carnets qui appartenait à votre père ... Nicholas je crois ...

Un sourire fit frémir sa barbe. Il s'adossa nonchalamment à une poutre. La nuit était complètement tombée et la lumière de la terrasse découpait sa silhouette en contre-jour, pourtant je perçus nettement l'étincelle nostalgique de ses prunelles vertes.

-Oh ... Tu l'aurais aimé mon père. C'était ma mère la grande juriste dans la famille, elle était au Mangemagot, influente, des horaires de dingue ... Alors mon père s'occupait de nous. Il avait un poste modeste dans les archives magiques. Il adorait son travail et dans la fin de sa vie il s'est mis à faire des propres recherches et à se rêver historien. Il n'a pas eu le temps de réaliser son rêve ...

-C'est ça qu'il y a dans ses carnets ? Ses recherches ?

George opina du chef.

-Il y en a un peu partout, dans la bibliothèque, le grenier ... Chaque fois qu'on bouge quelque chose dans cette maison, on retrouve un feuillet de mon père. Il ne chômait pas ...

-Et il travaillait sur quoi ?

-Il a beaucoup retracé les origines de notre famille, répondit George et sous mes yeux je revis l'arbre généalogique finement tracé des Bones. Mais sur les dernières années ... Je crois que c'était Terre-en-Landes, son thème. C'était un fort village sorcier, tu sais ? Je crois que ça l'intéressait de comprendre ... comment on a pu y arriver là.

Il m'adressa un nouveau sourire, celui-là si tendre que mon cœur s'en serra. Difficile de croire que je l'avais vu dans cette même maison hurler contre Rose à propos du retour de Voldemort, plus d'un an plus tôt. La plupart du temps, George Bones était la douceur même. C'est le sourire qu'il fait à Susan, réalisai-je, saisie, si bien que la suite vint avec un naturel qui me ferma la gorge :

-Tu peux y jeter un coup d'œil si ça t'intéresse, me proposa-t-il avec douceur. Après tout ... maintenant tu fais officiellement un peu partie de la famille. 

***

Quel sucre définitivement ce George vous ne trouvez pas ?

J'espère que vous avez aimé le chapitre !

Oui la guerre me sert bien pour expliquer l'effacement du Quidditch mais honnêtement je n'ai pas le temps pour tout traiter ! Parfois je regrette un peu je pense que j'aurais dû sacrifier soit l'Ordre soit le Quidditch ..  m'enfin c'est pas grave !

À la semaine pro pour les lecteurs de La Dernière Page et à dans deux semaines pour les autres <3

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