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III - Chapitre 18 : Les choses qu'on ne dit pas

Et le nom de ce chapitre le fait pensé à une chanson de 1789 les Amants de la Bastille (Ne jugez pas j'ai eu ma grosse période comédie musicale au lycée). Bref, du coup je l'ai dans la tête alors que c'est looooin d'être la meilleur chanson de l'album (Nous suivons tous le même cortège le sang n'a pas de privilège, si l'Histoire s'en souvient l'avenir nous appartient ! Oh Oh Oh Oooooh

BREF J'ARRÊTE ! 

Nous voilà donc à ce fameux chapitre que j'ai adoré écrire. Enfin lui et celui d'après, je les mets ensemble parce qu'ils forment un bloc. Donc j'espère que vous l'apprécierais tout autant ! 

***

L'amour et l'ambition sont des passions ... l'amitié n'est qu'un sentiment. 

- Alexandre Dumas

*** 

Chapitre 18 : Les choses qu'on ne dit pas.

Il se pouvait qu'Octavia et moi ayons dépassé d'une heure le délai dans la bibliothèque des Bones, mais Simon n'avait pas râlé car il avait lui-même travailler ses cours de l'IRIS jusqu'à une heure avancée. Juste. En. Face. De. Moi. Et ça ne me gênait pas habituellement, mais là chaque mouvement, chaque son, chaque soupir de sa part avait crevé ma bulle de concentration et mon regard s'était mécaniquement aimanté sur lui. Alexandre était resté, observant la bibliothèque comme un enfant, tentant de s'intéresser à notre projet ou aux sorts que Simon pratiquait à même le sol, mais nous abandonna au bout de deux heures pour rentrer à Bristol – en train, comme il était venu en transplanage. Puis ce fut à mon tour de rentrer, après un dernier regard jeté à Simon qui gribouillait toujours des formules obscures sur un carnet, si concentré qu'il m'avait à peine adressé à un « au revoir ». Et alors que je descendais les marches recouvertes d'un tapis cramoisi, le malaise était revenu, inexplicable. Qu'avais-je encore fait de mal pour avoir la poitrine qui se serrait ainsi ? Alors que quelques heures plus tôt, elle battait, plus fort que les tambours de la Moria ?

Elle était pénible, cette sensation d'embarras qui ne me quittait plus depuis la fête de Slughorn. Toujours fugace, mais vivace, prenante, m'ébranlant assez pour que j'y repense chaque fois que j'étais seule. Mais chaque fois que je me retrouvais face à Simon, elle s'effaçait et le naturel reprenait le dessus. Je n'arrivais pas à mettre le doigt sur ce qu'il n'allait pas.

Et malheureusement, mon entourage n'aidait en rien.

-Tu as de la galante visite, Barbapapa !

-Fous-lui la paix, Barberousse.

Swan et Arnold se tenaient presque nez à nez, face à Eden et moi qui les contemplions comme des enfants subissant une dispute gênante au possible de leurs parents. J'avais particulièrement envie de rentrer sous-terre, malgré le souafle que je m'étais prise dans l'épaule et qui me valait une belle contusion – et en dix minutes de jeu, Dalia avait été furieuse. Elle avait toutes les raisons de l'être : nous n'avions pas eu l'occasion de briller. La stratégie avait été la même que face aux Frelons : frapper vite et assurer les points du Vif d'Or. Mettre l'équipe entière au service de Joana. La preuve que cette technique avait ses limites, c'était que l'attrapeuse adverse, une prodige transylvanienne, avait attrapé le Vif d'or et moi, peu protégée, avais peiné à assurer le score. Quelques arrêts, beaucoup de buts encaissés et la première défaite de la saison. Pas la meilleure des journées qu'Arnold et Swan avaient décidé d'encore assombrir en débattant sur la raison de la présence exceptionnelle de Simon dans les tribunes. Juste à côté de Lysandra, mais compte tenu des conséquences, son effort concernant sa tante ne suffisait pas à m'adoucir.

-On vient de perdre le premier gros test de la saison et vous ne retenez que ça ? cinglai-je, exaspérée.

Swan daigna se désintéresser d'Arnold pour m'adresser un sourire penaud.

-Il faut bien qu'on décompresse, Barbababa. Et franchement pour le match ... On perd des points, oui, mais il ne veut rien dire sur ton niveau. Il a duré quoi, dix minutes ?

-Sept et quarante-huit seconde, rectifia Eden, morose. J'ai à peine eu le temps de marquer deux buts ...

-Et moi deux arrêts ...

-Ça ne veut absolument rien dire, persista Swan. C'est ça, le Quidditch : on peut être la meilleure équipe ou les meilleurs à son poste et tomber sur un incroyable concours de circonstance. Vous n'étiez pas la clef de ce match et vous n'avez pas de responsabilité dans la défaite.

Son regard glissa ostensiblement du côté de Joana, qui se rhabillait à l'écart de tout le monde. A la fin du match, Dalia l'avait prise à part et la seule chose qu'on avait entendu était l'écho de ses cris. L'allemande était ressortie pâle, mais la tête haute et l'entraineuse en avait profité pour apostropher vertement Cameron qui avait failli dans sa protection de l'attrapeuse. Aucun mot ni pour moi, ni pour Eden et cela donnait raison à Swan : nous n'avions pas pesé un gramme, bon ou mauvais. Le match avait été bien trop court pour cela. C'était sans doute ce qui me permettait de ne pas être totalement affecté par la défaite. Swan nous gratifia d'un dernier sourire maternel puis s'en fut du côté de Joana, toujours occupée dans son sac. C'était dans ces moments-là que je comprenais pourquoi elle était la Capitaine de cette équipe : elle était le pendant de Dalia, la vieille sage, la mère tendre qui nous mettait en douceur face à nos défauts tout en nous rassurant sur notre niveau. Elle avait un discours calme, posé qui parlait à tous. C'était la personne qui, en cas en découragement, était là pour tendre la main comme elle le faisait à présent à Joana.

Profitant que Swan soit occupée, Arnold se tourna de nouveau vers moi, presque triomphant.

-Alors ? Ton ami est venu te voir ?

Je levai les yeux au ciel sur l'insinuation dans le mot « ami ». Malgré la vague de malaise que cela réveillait, je m'efforçai de passer dessus et de hocher sobrement la tête. Cela ne découragea pas Arnold qui poursuivit :

-Et c'est le neveu de l'épouse de Grims ? Drôle, ça. Oh, je ne dis pas que t'es pistonnée, calme-toi ! rit-t-il quand je lui jetai un regard indigné. Je t'ai vu jouer, Barbapapa, je sais ce que tu vaux. C'est juste ... marrant.

Je n'avais pas réalisé que je pourrais être considérée comme privilégiée par le lien entre Simon et Leonidas et l'idée me mit réellement mal à l'aise. Assez pour espérer que cela ne s'ébruite pas. Si je n'avais pas de doute sur la sincérité d'Arnold, Cameron ou Joana risquaient certainement de ne pas prendre l'information aussi sereinement. Je passai une main dans mes boucles trempées par ma douche, agacée.

Bon sang, Bones. C'est toi le boulet accroché à mon pied.

J'achevai de faire mon sac et souris à Eden avant de prendre congé. Si nous arrivions tous en même temps pour des raisons de protocole depuis le centre Plumpton, nous étions libres de repartir par nos propres moyens à l'issue du match. Mon sac sur l'épaule et mon balai en main, j'entrepris donc de tenter de me repérer dans les méandres du McFarlan Stadium, le stade écossais dans lequel nous venions de jouer. Les murs étaient aux couleurs des différents clubs locaux mais ça m'avait fait un bien fou de retrouver l'Ecosse. Nous étions certes bien plus au sud de Poudlard, mais le son des cornemuses dans le stade m'avait arraché un sourire et donné de la force. J'étais presque en train de me perdre lorsqu'une voix m'arrêta au détour d'un couloir.

-Par ici !

Je fis prestement volte-face pour voir Lysandra Grims arriver à l'autre bout du couloir, enveloppée dans sa cape d'hiver. Ses cheveux bruns étaient cette fois déployé autour de son visage fin et elle retirait de ses longues mains fuselées les gants qui l'avait protégée du froid.

-Leo vous pensait dans les vestiaires, il est parti vous chercher ... Pas trop déçue ?

C'était toujours une sensation très étrange de se faire vouvoyer. Le vouvoiement, c'était pour les adultes, les grandes personnes. J'étais une petite personne et une enfant dans le cœur et dans l'âme. Et au-delà de ça, ça me mettait sur un pied d'égalité avec la belle et élégante femme qui venait à présent de me rejoindre dans le couloir.

-Non, ça va. Je n'ai pas pesé dans le match et la saison est encore longue ...

Lysandra eut l'air soulagée sans que je ne comprenne pourquoi. Puis en détaillant son visage impassible et son sourire qui, comme celui de Simon, prenait régulièrement des accents de cynisme, je conclus que Lysandra Grims ne devait pas être femme à apprécier écouter les autres se plaindre. Elle rangea négligemment ses gants dans une poche de sa cape.

-Heureuse que vous le voyiez ainsi. Vous cherchez la sortie, je suppose ? Ce stade est un véritable labyrinthe, les Écossais n'ont jamais su faire quelque chose de claire et de lisible ... (Elle eut un sourire ironique). Il n'y a qu'à voir Poudlard pour s'en rendre compte !

Je lui emboitai le pas, incapable de lui répondre par autre chose qu'un hochement de tête. Elle marchait beaucoup plus vite que moi, d'une foulée fluide, volontaire et immense que lui donnait ses grandes jambes. J'en étais presque réduire à devoir courir pour rester à sa hauteur quand elle lâcha :

-Il me semble que j'ai oublié de vous remercier. Pour nous avoir servi d'intermédiaire ...

-Oh. De rien, un plaisir.

Les lèvres de Lysandra se pincèrent et elle ralentit un peu pour poser un regard sur moi.

-Non, ce n'était pas rien. J'ai un peu parlé avec Simon pendant le match ... C'est encore difficile pour lui, je le sens, mais quand je l'ai interrogé sur son traumatisme, il a laissé échapper que c'est vous, plus que Rose ou George, qui l'avait aidé. C'est aussi pour ça que je vous remercie ...

-S'il vous plait, tutoyez-moi, ne pus-je m'empêcher de demander. Le vouvoiement c'est ...

-Pour les vieilles personnes ? compléta Lysandra avec un petit sourire. Désolée, j'ai été élevée dans une famille où il était la règle, je vouvoyais ma mère. Toujours est-il que ... je te remercie d'avoir rendu à ma sœur son fils.

Devant la formulation, je jetai un regard incrédule à Lysandra. Mais elle s'était détournée et regardait droit devant elle, avec cette expression digne et fière que j'avais déjà vu chez Melania ou Octavia. Toutes les grandes dames du monde sorcier semblaient avoir été forgées dans le même moule. Avant que je me puisse répondre, nous atteignîmes une porte à double battant devant laquelle deux sorciers vigiles faisaient le guet en scrutant les allées et venues. Lysandra s'immobilisa et m'adressa un sourire aimable.

-J'ai proposé à Simon de venir chez moi un jour. C'est la maison dans laquelle j'ai grandi avec Cassie ... Bien évidemment, tu es la bienvenue. Bonne journée, Victoria.

Sans attendre une réponse, elle fit souplement volte-face et s'en retourna dans les entailles infernales du stadium. J'observai son rideau de cheveux noirs se balancer au fil de ses pas, stupéfaite, méditant encore sur la formule qu'elle avait laissé échapper. Et ce fut justement une autre voix en lien avec ses allégations qui me sortit de ma rêverie.

-Bon, tu sors ?

-J'arrive, répondis-je à Simon alors que Lysandra disparaissait à un angle de couloir. Je parlais avec ta ...

Mais l'écarquillement préventif des yeux de Simon me fit ravaler ma langue. Il se tenait dans l'encadrement des portes, enveloppée dans sa cape, son bonnet orange enfoncé jusqu'au raz de son front. Quelques mèches folles s'échappaient sur sa nuque et tremblait face à la brise hivernale. La cause de cette réduction au silence se matérialisa une seconde plus tard derrière lui sous la forme d'un immense sourire dévoilant des dents parfaites et incroyablement blanches du garçon sûr de lui.

-Ouais, grouille-toi Vic', je ne suis plus habitué à rester autant dans le froid !

-Davies !

Roger Davies, anciennement Capitaine de Serdaigle, me tendit triomphalement son poing et je cognai dedans avec un éclat de rire extatique. Bon sang, il y avait combien de temps que je n'avais plus vu mon ami ? Quatre, cinq mois ? Ses joues me semblaient plus remplies et il avait coupé très court sa flamboyante chevelure blonde, mais son sourire contaminateur et sa belle énergie semblait intacte.

-Mais qu'est-ce que tu fais là ? m'enquis-je immédiatement après sans cesser de sourire. Tu n'as pas un millier de cours à réviser pour ta formation ?

-Je prends une pause. Je t'avais dit que je viendrais te voir jouer, ma grande. Et regarde qui j'ai réussi à trainer !

Il tendit un bras fier vers Simon, qui leva les yeux au ciel, puis sur quelqu'un juste derrière lui. Et avec un véritable plaisir, je reconnus Emily. Mon amie me sourit et passa immédiatement un bras en dessous du mien.

-Et on va aller prolonger la fête puisque tu nous as offert que dix minutes de pause !

-Enfin votre attrapeuse, rectifia Roger avec un regard désolé pour moi. Mais la transylvanienne était franchement douée ! Elle faisait corps avec son balai, c'était incroyable ! Elle m'a un peu rappelée Viktor Krum ... Et puis bien sûr, tu as bien joué ...

C'était faux, je n'avais fait que deux arrêts très basiques mais à présent peu m'importait la défaite et la prestation de mon équipe. La seule chose que j'aurais eu à faire de ce temps libre était les recherches pour mon projet, puisque Tonks n'avait pas besoin de moi ce week-end alors quand Emily proposa qu'on déjeune chez elle, l'idée de refuser ne me traversa même pas l'esprit. Alors je la laissai me faire transplaner jusque son appartement dans la banlieue londonnienne, moi, mon balai et ma bonne humeur retrouvée.

***

C'était étrange d'expérimenter Emily et Roger en couple vivant ensemble. Loin de la niaiserie qu'avait supposé leur rendez-vous chez Madame Pieddodu l'année dernière, ils semblaient presque distants, chacun cantonné à un rôle. Emily qui cuisinait pendant Roger se muait en hôte parfait, dressant la table et nous proposant une bièraubeurre. Emily qui s'asseyait en tailleur dans le canapé quand Roger préférait la position droite d'un fauteuil. Emily qui débarrassait et Roger qui faisait la vaisselle. Malgré tout, c'était une certaine sérénité, parfois fendu d'un saut d'humeur d'Emily, suivi d'un éclat de rire de Roger. Tout semblait si naturel que je ne sus en réalité quoi en penser. Quand le couple s'isola dans la cuisine, Simon se glissa sur le canapé, à côté de moi. Sans que je ne puisse m'en empêcher, mes joues s'embrasèrent. Pour une raison qui m'échappait – et que je mettais sous le compte de mon observation de la relation de couple entre Emily et Roger – j'évitai soigneusement de me trouver trop proche de Simon depuis que nous étions arrivés. Mais tout le malaise s'effaça dès qu'il s'installa confortablement, la joue appuyée contre son poing et me toisant avec un vague sourire amusé.

-Du coup, tu parlais avec ma tante ?

-Oh. (Le sujet de conversation ventila le feu sur mes joues et je parvins à le regarder dans les yeux). Oui, elle m'a aidé à sortir du stade. Ça a été toi ?

Il se fendit d'un vague mouvement d'épaule qui se voulait nonchalant. Je jetai un bref coup d'œil à la cuisine ouverte où Emily et Roger, toujours de dos, surveillait les casseroles se laver seules en se chamaillant sur le meilleur endroit où les ranger. Simon suivit mon regard et constata qu'il pouvait parler librement :

-Oui, globalement ça a été. Cette fois, elle m'a laissée parler, on va dire, elle ne m'a pas pressée ni rien ... Elle n'a pas essayé de me parler de mes parents, juste ... d'apprendre à me connaître.

-Elle ne t'a pas parlé du tout de ta mère ?

Une petite couleur rose fit peindre les joues pâles de Simon. Il fit tourner son bonnet orange qu'il tenait toujours sur sa main et enleva précautionneusement quelques moutons de peluches.

-Juste pour me demander ce qui avait changé pour que ... j'accepte enfin, on va dire. Je lui ai dit que c'était toi qui m'avais un peu secoué.

-Un peu ?

Mon ton incrédule arracha un sourire à Simon, qui me lança un long regard désabusé. Il passa une main dans ses cheveux puis appuya son coude sur le dossier du canapé, la main toujours vissée à sa nuque, ce petit sourire teinté de sarcasme aux lèvres. Définitivement un sourire qui venait du sang maternel.

-Un peu beaucoup, d'accord. Le léger problème, c'est que tu continues de le faire.

Je dressai un sourcil et subitement, la vague d'embarras et de doutes revint m'assaillir. Sous ma paume pressée contre mon cou, mon pouls s'était mis à accélérer. C'est normal, c'est normal, c'est normal. Je glissai un coup d'œil à Emily, toujours au-dessus de sa casserole et sans la lâcher du regard, je demandai à Simon :

-C'est-à-dire ?

-C'est-à-dire que ... je sais que tu continues à t'inquiéter comme avant, mais ... tu n'as pas, d'accord ? Je suis lancé, maintenant. Je n'ai ...

Sa phrase resta en suspens et mon cœur manqua un battement quand je la complétais mentalement. Mon regard revint immédiatement sur Simon, légèrement écarquillé. Les mots parurent alors s'étouffer dans sa gorge et il perdit son sourire. Sa main quitta sa nuque pour effleurer ma main qui s'était crispée sur mon genou.

-Je vais rectifier, pardon. Evidemment que j'ai besoin de toi, c'est une évidence, on ne va pas se mentir. Mais ... Plus pour ça, tu vois ? Je suis décidé à avancer, Vicky. Il faut juste me laisser aller à mon rythme.

-Je n'ai rien ...

-Je sais. Mais j'ai senti venir l'interrogatoire.

Un sourire coupable s'étala sur mes lèvres alors que Simon me lançait un long regard entendu, sans agressivité ni amertume. Au contraire, je sentais se tendre entre nous ce lien qui nous unissait depuis l'enfance et qui lui avait fait comprendre comment se déroulerait le reste de la conversation. Instinctivement. Naturellement. Un naturel qui me détendit et me soulagea.

C'est normal. Evidemment que c'est normal.

-D'accord, cédai-je. Mais je veux un rapport régulier. Comme lorsque tu iras chez elle, d'ailleurs ...

-Ah. Ce ne sera pas utile. Ce jour-là, j'aurais besoin de toi.

J'éclatai de rire devant sa mine déconfite et cette conclusion en totale contradiction avec ce le message qui tentait de me faire passer. Il secouait la tête, désespéré face à mon éclat de rire quand Roger lança :

-Bones ! Tu voulais voir mes cours ?

Dès que sa voix fendit le silence, la main de Simon s'éloigna précipitamment de la mienne. Puis il se leva d'un bond, sans m'adresser un regard et suivit Roger jusqu'à une porte qui se referma sur eux. Je contemplai ma main et mes doigts qui se rétractèrent sur ma paume, glacés, vides. Je sentis mon sourire se faner sur mes lèvres et le rire mourir dans ma poitrine pour ne laisser que cette impression de malaise désormais familière. Je dépliai mes doigts pour chasser la sensation, agacée par tous ses sentiments que je ne comprenais pas. Et je n'eus pas le temps de m'interroger davantage car Emily vint me rejoindre sur le canapé, deux verres de jus de citrouilles à la main. Je pris le mien avec un sourire que mon amie ne me rendit pas. Elle s'installa devant moi, les genoux serrés, la bouche tordue et finit par lâcher du bout des lèvres :

-Victoria, il faut qu'on parle.

-Ouh la.

-Oui. « Ouh la », exactement.

J'avais rarement vu le visage d'Emily aussi sérieux et cela suffit à m'inquiéter. Sans y avoir toucher, je mis le verre de jus de citrouille sur la table basse et accordai toute mon attention sur elle. Elle glissa un bref regard sur la porte que venaient de passer les garçons avant d'entonner :

-C'était l'anniversaire de ma grand-mère la semaine dernière. Je ne devais pas y aller, je travaillais mais j'ai finalement pu le libérer. Evidemment, Gillian y était. Et pas seule.

Je hochai la tête en comprenant qu'il s'agissait de Miles. Depuis le temps, j'avais eu le temps d'ingurgiter cette information incongrue et je fus satisfaite de ne ressentir qu'une pointe de perplexité. Emily poussa un profond soupir et planta son regard sur moi.

-Ecoute, j'ai un peu parlé avec lui. A dire vrai, il se peut que le ton ait monté – je pense qu'il ne m'a jamais vraiment apprécié, enfin bref. Je t'ai défendue, Victoria, alors j'attends de l'honnêteté de ta part.

-Sur quoi ?

-Est-ce que c'est à cause de Simon que tu as quitté Miles ?

La phrase était dite très rapidement, chaque mot me heurtant comme autant de balles dégainées par une mitraillette et me laissa bouche bée. Je contemplai Emily, sidérée, incapable de comprendre d'où venait cette affirmation.

-Il t'a dit ça ?

-Peut-être pas dans ces termes, mais l'idée était là. Pourtant, je ne me souviens pas t'avoir jamais entendu mentionner Simon quand tu me parlais de lui mais ...

-Mais qu'est-ce que ça vient faire là ?!

Maintenant que l'idée était assimilée, la consternation laissa place à une colère froide et je regrettai de ne plus avoir mon verre pour m'occuper les mains. Faute de quoi, mes doigts s'enfoncèrent de rage dans un coussin qui meublait le sofa.

-Evidemment que je ne l'ai jamais mentionné parce qu'il n'y avait pas à le mentionné ! Enfin, pourquoi ... ?

-Vic', tu es proche de Simon, me coupa Emily d'un ton ferme. Très proche, même. Alors il ne m'a pas donné de détail, mais ne serait pas déconnant que Miles l'ait peu supporté et que ...

-Miles ne m'a jamais parlé de Simon.

Jamais. Et pourtant, c'était possible que j'aie craint qu'il le fasse, une ou deux fois – et notamment pour les quelques fois où j'avais dormi avec lui. Mais jamais il n'avait été au courant de ce détail. J'aurais compris qu'il l'aurait mal pris, mais ça ne signifiait rien. Emily plissa les paupières avant de s'enfoncer dans le canapé, les bras croisés.

-Donc tu me jures que Simon n'a rien à voir dans votre rupture ?

-Mais oui ! Bon sang, Emily, tu étais là : quel rôle il aurait pu avoir ?

Je m'étais efforcée de baisser mon inflexion quand la jeune fille coula un regard sur la porte, comme pour s'assurer que les garçons étaient toujours à l'intérieur – et hors de portée de voix. Ses lèvres se pincèrent.

-Je n'en sais rien. Moi, je n'ai rien vu. Mais je t'en avais parlé, la dernière fois ... Vic', notre groupe n'existait plus. C'est possible que j'aie manqué des choses tu ... étais plus avec lui qu'avec moi.

-Mais je te l'aurais dit !

Emily eut un pauvre sourire. Un sourire amer.

-Comme tu m'as dit que ton frère sortait avec Melania Selwyn ?

La réplique coupa court à tout ce que j'aurais pu rétorquer, à la bouffée de colère qui montait en moi et à tous les arguments que j'étais en train de planifier. Je me contentai de dévisager Emily, estomaquée, et réalisai subitement qu'elle était l'une des dernières au courant. Après Miles, Ulysse ... Octavia, sa rivale. Et la moitié de la Communauté sorcière qui commentait la rumeur survenue cet été.

-Em' ...

-Vic', je vais essayer de faire la vieille sage et prétendre que je ne t'en veux pas, m'interrompit-t-elle en levant une main. C'est faux, bien sûr, j'étais furieuse quand je l'ai appris et je le suis encore. Mais j'essaie de me dire que ... c'était compliqué l'année dernière. Pour toi, comme pour moi. Ce qui explique qu'on se soit caché quelques petites choses. Ne mets pas ma résolution à rude épreuve en me disant à quel point tu es désolée.

Je ravalai mes excuses au dernier moment devant les éclats de courroux qui animaient malgré tout le visage et la voix d'Emily. C'était contenu, sourd sous le ton posé, mais c'était là. Elle ferma les yeux et se massa la tempe d'une main.

-On n'était pas d'accord sur le contexte. J'aurais été de très mauvais conseil... C'est peut-être pour ça que tu ne m'en as pas parlé. Je ne sais pas, et je ne veux pas savoir, tout ce que je veux te dire c'est ... (Elle prit une profonde inspiration et rouvrit des yeux plus résolus sur moi). Je veux qu'on fasse table-raze de ce qui s'est passée l'année dernière, Vic'. On a merdé toutes les deux, on s'est cachée des informations essentielles toutes les deux, mais j'aimerais que ça se finisse. Tu es d'accord ?

Je contemplai Emily, ses traits encore tendus, son regard qui ne cessait de faire des allés-retours entre la porte et moi. Malgré les émotions fortes qui tourbillonnaient encore en moi, j'étais touchée par la main tendue qu'elle me présentait, comme une bouée de sauvetage pour notre amitié qui tanguait depuis quelques mois. Et comme j'étais une fille de paix et de la conciliation, je hochai la tête.

-Oui. Oui, c'est d'accord.

Un sourire soulagé ourla les lèvres d'Emily et elle avança sa main pour prendre la mienne, comme pour sceller ce nouveau départ.

-Donc. Tu me jure que Simon n'a en rien joué sur votre rupture ?

-Non. Je te le jure.

***

C'était un mensonge.

Enfin, à moitié.

Pas de mon côté. Je me souvenais encore de toutes les réflexions qui m'avaient secouées après les vacances de Pâques, après la première fois où j'avais fini par me rendre compte que je n'étais pas tombée amoureuse de lui : jamais, jamais, je n'avais songé à Simon. Il avait été totalement absent de mes réflexions.

Cela dit, je me souvenais avoir pensé à lui, quelques fois alors que nous avions dormi ensemble, pour me demander ce que Miles en penserait. Pas du bien, c'était évident. Et j'en avais conclu le point suivant : même s'il ne m'en avait jamais parlé, Simon, sa présence, son lien avec moi, avait dû jouer sur les réflexions de Miles sur notre relation. Et cela tordait mon ventre à n'en plus finir.

J'étais rentrée chez moi troublée, muette, plongée dans mes réflexions si bien que j'en avais justement oublié Simon à mes côtés. Et chaque intervention de sa part remuait tout ce marasme d'informations et de sensation indistinctes alors j'avais fait ce que je faisais de mieux en ce genre de circonstance : j'avais fui. J'avais prétexté une mission pour l'Ordre sachant très bien que c'était Tonks qui s'en occupait ce week-end et je m'étais enfermée une heure dans sa « grotte » au 12, square Grimmaurd en espérant y voir plus clair ou me changer les idées. Mais la seule chose qui naquit de cette heure, fut une idée absurde qui m'amena à Londres, sous la pluie et devant un entrepôt au plein cœur de la ville.

J'étais venue quelques fois à Londres, pour prendre le Poudlard Express ou pour venir au Ministère. Mais c'était la première fois que j'avais la sensation de véritablement être à Londres. En ce début d'hiver, la lumière avait vite décliné et je m'étais retrouvée devant les immeubles historiques éclairés et la tour de Big Ben qui illuminait le ciel comme un phare. La vision était quelque peu apaisante et permit à mon esprit de se tranquilliser : pourquoi n'avais-je fait que passer dans cette ville, sans m'y attarder, sans explorer ces richesses ? C'était indigne de l'historienne en moi. Mon observation de la rue, des beaux bâtiments et ma contemplation de la tour du parlement me fit passer le temps, mais je n'oubliais pas de régulièrement passer un regard à l'entrepôt.

La formation de l'Ordre du phénix avait fini par m'être utile : nous avions appris à repérer toutes les entrées des bâtiments magiques, de Ste-Mangoust au Chemin de Traverse jusqu'à quelques bars et club dissimulés dans le pays. Le Ministère avait changé sa politique concernant les entrées et les sorties en son sein. Seuls les hauts fonctionnaires étaient autorisés à relier leur cheminé directement à celles de l'institution. Les employés, eux, devaient utiliser à présent une autre voie qui débouchait ici. Il me fallut attendre trois quart d'heures sous le froid et la bruine, dissimulée sous la capuche de mon manteau bien moldu. Je sursautai chaque fois que la porte s'ouvrait puis déçue je m'éloignai pour observer les plans et les vitrines des magasins. J'étais en train de songer à aller me réchauffer dans une librairie quand Miles sortit enfin. Il s'était muni d'un parapluie moldu d'un vert assez criard et je lui en fus reconnaissant car sans cela je n'aurais jamais posé les yeux sur lui. Il avançait, tête baissée pour se protéger du froid et je me dépêchai de couper sa trajectoire. Il faillit me heurter et me jeta ce regard courroucé de tout Londonien pressé qui découvre un obstacle sur son passage. Puis il sembla me reconnaître et cessa enfin d'avancer pour me dévisager ouvertement.

-Vic' ?

Je restai plantée devant lui, frigorifiée sous la bruine et désagréablement silencieuse. J'aurais voulu le saluer, mais trop mots se battaient dans ma bouche et je doutai être capable de laisser échapper les bons. Mêmes les muscles de mon visage me semblaient atrophiés et ne laissaient même pas s'épanouir l'ombre d'un sourire crispé. Face à ma mine peu engageante, Miles recula d'un pas et embrassa l'espace du regard. Autour de nous, les passants commençaient à nous jeter des regards perplexes

-Bon sang, désolé, mais en te voyant surgir comme ça je me sens obligé de te demander ...

-Tu as un grain de beauté en haut de la cuisse gauche.

Les joues hâlées de Miles s'empourprèrent face au détail choisi. Mais de façon très honnête, c'était le plus sûr que j'avais trouvé pendant ma seconde de réflexion. Le seul qui n'attise pas la colère sourde qui s'insinuait en moi depuis qu'Emily était venue me parler. Miles trépigna, visiblement embarrassé avant de lâcher :

-D'accord, ça marche. Deuxième question, maintenant : qu'est-ce que tu fais ici ?

C'était une excellente question. A dire vrai, une petite voix continuait de me répéter que c'était une idée stupide d'être venue ainsi, à la tombée de la nuit, seule, dans l'un des endroits les plus susceptibles d'être visé par les Mangemorts. Mais j'avais préféré ça à attendre et à me laisser consumer par l'agacement et la colère. Il fallait que j'extirpe cela très vite.

-Pourquoi tu as dit à Emily qu'on s'était quitté à cause de Simon ?

Les mots s'étaient envolés de ma bouche, sans que je ne l'aie réellement décidé. Autour de nous, le temps et la bruine semblaient s'être suspendus et peu m'importait que les passants continuent de nous jeter des œillades curieuses, voire courroucées car nous étions en plein milieu du passage. Ce fut cela qui fit émerger Miles de sa stupeur et il me prit nerveusement par le bras pour m'emmener dans un coin moins fréquenté. La surprise passée, il semblait presque fulminer. Nous passâmes sous un réverbère qui éclaira la toile du parapluie et jeta une lumière verte sur le visage de Miles, découpant son profil de façon inquiétante.

-Elle ne perd pas de temps ... Je l'ai vue quoi, la semaine dernière ... ?

-Non mais je rêve, laissai-je échapper, incrédule malgré moi. Tu lui as vraiment dit ça ? Mais pourquoi ?

Je me défis sèchement de sa prise à présent que nous étions parvenus à l'entrée d'une ruelle. Il soupira et passa une main agacée sur son visage. Il avait encore cette barbe de trois jours qui le vieillissait, le rendait plus adulte et masquait les dernières rondeurs de l'enfance sur ses joues. Son regard semblait fuir le mien et cela ne fit que qu'attiser la colère qui était déjà présente, latente dans mes veines.

-Pourquoi ? insistai-je devant son mutisme.

-Ne me dis pas que tu es venue me voir juste pour ça ?

Je sentis mes joues s'empourprer mais parvins à garder mon regard dardé sur lui. La pluie s'intensifiait et je plongeai mes mains gelées dans mes poches de manteau. Mon souffle apparaissait sous la forme d'une trainée blanche que les gouttes percer.

-Peut-être, éludai-je rapidement. Du coup, pourquoi tu lui as dit ça ?

Les lèvres de Miles furent agitées d'un tic nerveux et il passa de nouveau la main sur sa mâchoire. Son regard se baissa enfin sur moi, songeur, tiraillé.

-Parce que c'est un peu vrai, Vic'.

Les mots me portèrent un coup au cœur. J'avais espéré qu'Emily ait mal compris, mais visiblement, Miles songeait réellement que Simon était responsable de notre rupture. Cela m'abasourdit assez pour que la colère retombe momentanément.

-Je ne me souviens pas qu'on l'ait évoqué quand on s'est quitté ..., fis-je remarquer, désemparée. Je n'ai pas ...

-Justement parce que je voulais éviter une scène. Je veux dire, pire que ce qu'on a eu. Je ne voulais pas ...

-M'énerver ?

Miles détourna les yeux et je compris que j'avais correctement complété la phrase. Et comme un signal, ce fut avec ce mot trahissant l'exaspération que la colère refit son apparition. Et visiblement, ce que Miles lisait sur mon visage ne lui plaisait pas car il recula d'un petit pas, emportant le parapluie et le peu de protection que j'avais avec lui. Cela acheva de m'exaspérer et il en rajouta une couche en s'expliquant :

-Vic', j'ai vu comment tu étais, vraiment énervée. Après Warrington. Sérieusement, ce jour-là j'étais persuadé que j'allais me prendre un sort ...

-Ça ne m'explique pas pourquoi Simon serait responsable de notre rupture, répliquai-je d'un ton sec. Je t'en prie, éclaire-moi parce que là je ne vois franchement pas.

Et cette allusion à l'attaque de Warrington n'aidait en rien. Je me souvenais de l'air déboussolé de Miles face à ma réaction, comment il avait reculé – comment il aurait pu reculer davantage s'il l'avait pu. C'était l'une des images qui m'avait permis d'acter que notre relation devait prendre fin.

Pas Simon.

Jamais Simon.

Et pourtant, j'avais tenté de lui parler de Miles, d'avoir son retour d'expérience avec Octavia. Mais il était demeuré coi, fuyant et m'avais laissé prendre seule la décision. Jamais il n'avait pesé sur notre relation, pas un instant.

Mais les paupières de Miles se plissèrent. Il paraissait commencer à s'agacer à son tour, comme le trahissait la main qu'il crispait sur le manche du parapluie.

-Réfléchis un peu Victoria je suis sûr que tu peux trouver toute seule !

-Bien éclaire-moi, je ne vois pas !

-Sérieusement ? Tu ne vois pas ?

C'était difficile de savoir si Miles était exaspéré ou incrédule – et la pénombre qui s'était installé n'aidait pas. Mais ses yeux étaient légèrement écarquillés et sa mâchoire contractée si fort que je doutais qu'il laisse échapper un mot de plus. Mais face à mon silence obstiné – et quelque peu perplexe – ses mâchoires finirent par se dessouder :

-C'était horrible, tu sais ? De savoir que je passais derrière tout. Mais le plus horrible, ça a été de comprendre que je passais derrière lui. Oh non, s'il te plait, n'essaie même pas de nier, me coupa-t-il quand j'ouvris la bouche pour protester. Vic', n'essaie même pas de nier, je pense que ça va m'énerver.

Je refermai la bouche, avant de la rouvrir, puis de la refermer. Ma confusion devait être visible et grognement de frustration à Miles.

-Et tu vois, c'était ça, le pire. Que tu ne t'en rendes même pas compte ...

-Mais compte de quoi ? m'agaçai-je finalement. Compte de quoi, sérieusement ? D'accord, je suis proche de Simon mais ça ne signifie pas qu'il y avait une hiérarchie entre vous et qu'il passait avant toi ...

-Oh arrête ! Toute l'année dernière n'a fait que tourner autour de lui ! Faire attention à Simon à cause de Cédric, faire attention à Simon à cause d'Ombrage, faire attention à Simon parce que Jugson ! Et il faut que je lui demande, et il faut que je lui dise : Vic', c'était horrible. Il était présent, partout, dans chacune de tes décisions. Et même quand tu ne disais pas son nom, je sentais qu'il était derrière.

Je le laissai me jeter les mots à la figure, écartelée quelque part entre la colère et la confusion. Miles se passa une main sur la bouche, comme pour se museler – mais si j'en croyais l'intensité de ces mots, ils les avaient retenus depuis trop longtemps. La vague de malaise me reprit d'un coup mais je la repoussai pour déclarer avec toute la conviction que j'avais :

-D'accord, si tu veux que je ne nie pas, je ne le nie pas. C'est quelqu'un d'important dans ma vie et il se peut que j'aie énormément pensé par rapport à lui mais Miles ...

En un éclair, je revis défiler l'année précédente et l'image de Simon sanglotant sur le pont ressortit de façon plus vivace, plus poignante que toutes les autres. Mon poing se referma mécaniquement contre ma gorge. Je ne pouvais pas raconter cela à Miles. Je ne pouvais pas lui expliquer pourquoi Simon avait tellement eu besoin de moi l'année dernière. Mais cela ne signifiait rien ... quel rapport avec nous ? Je pris une profonde inspiration et repris :

-Mais ça ne voulait pas dire que je te négligeais, qu'il passait avant toi. Tu n'avais pas ... je ne sais pas, moi à être jaloux de lui.

Parce qu'au final, c'était la seule chose que je comprenais. Sans que je le voie, Miles avait été jaloux de Simon. Un fin sourire retroussa les lèvres de Miles. Et lorsqu'une voiture passa et que ses phares jetèrent une lumière blafarde sur son visage, je compris que le sourire tenait plus de l'amère grimace.

-Pas dans ce sens-là. Mais il faut que tu ouvres les yeux Vic', il pompe énormément de ton attention, de ton énergie et ... de ton amour.

La voiture passa devant nous et roula avec fracas sur une flaque d'eau qui aspergea copieusement les passants du trottoir d'en face. Ils hurlèrent de rage et de surprise pendant que Miles me souriait toujours, de ce petit rictus, de ses yeux sûrs d'eux, à la fois blessés et victorieux alors que je m'enfonçais dans un mutisme qui sonnait de plus en plus comme un silence coupable.

Mais ce n'était pas cela. J'avais soudainement l'impression que mon cerveau s'était arrêtée de tourner et que j'étais spectatrice de la scène, incapable d'avoir le moindre contrôle sur les événements et mon corps. Tout en moi sonnait creux, faux, un vide désagréable qui s'était créé dès que Miles avait prononcé le mot « amour » et que mon esprit l'avait associé à « Simon ». Seuls mes sens fonctionnaient encore et ce fut en entendant le reniflement presque triomphal de Miles que ma langue daigna s'activer avec la réaction que me parut la plus en adéquation avec ce qui venait d'être dit :

-Mon amour ? Mais ça ne va pas !

Le cri que je poussai eut plus d'effet sur moi que sur le monde extérieur : Miles se contenta de dresser un sourcil pendant que mon estomac se contractait, mes joues s'échauffaient si fort que je craignis qu'elles fondent, et mon cœur monta dans ma gorge, amenant avec lui des pulsations qui cognait fort contre mes doigts. Je me dépêchai de les retirer pour les enfoncer dans mes poches. Le bout de mes phalanges étaient gelées contre mes paumes.

C'est normal, c'est normal, c'est normal.

-L'amour ça a plusieurs forme, Victoria, répliqua Miles, les joues rougissantes. Et je veux bien croire que ce n'est pas cette forme d'amour, mais je t'assure que ça en est.

Ses yeux roulèrent dans ses orbites et il exhala de nouveau un profond soupir qui se transforma instantanément en un panache de brume blanche. Il consulta sa montre et sa bouche se tordit.

-Et je ne vois même pas pourquoi je parle de ça avec toi ... Tu es assez grande pour comprendre, Vic'. Moi je dois y aller ...

-Sérieusement ? m'écriai-je en le retenant par un pan de son manteau.

-Victoria, je suis ton ex-copain ! Tu crois vraiment que j'ai envie de parler de ça avec toi ?

-Mais je ne comprends même pas de quoi on parle ! Miles !

Mais il s'était déjà éloigné à grand pas qui m'obligèrent à le suivre en courant. Un instant, je me demandai pourquoi il n'avait pas transplané avant de me souvenir que le Ministère avait instauré un périmètre de sécurité pour voir venir les Mangemorts et qu'il fallait dépasser ces limites pour utiliser ce mode de transport magique. Je marchai dans une flaque qui détrempa mon jean, bousculai une passante mais parvins à atteindre le bras de Miles que j'agrippai.

-Bon sang, Vic' ! râla-t-il sans ralentir.

-Je ne comprends pas pourquoi tu me lances ça maintenant ! m'énervai-je en tentant de suivre son pas. Sérieusement, tu me dis que j'ai été horrible, et tu me claques ça, que j'aimais trop Simon et que c'est pour ça qu'on s'est quitté ? Vraiment, Miles ?! Ça a été ça ta vision de notre histoire ?

Je préférais me concentrer sur cet aspect des choses, sur ma vexation qu'il réduise notre relation à sa frustration de passer derrière Simon, plutôt que d'admettre l'autre problème qu'il avait soulevé. Miles parut s'en rendre compte car il leva les yeux au ciel.

-La tactique de la fuyarde, très Victorien ...

-C'est moi qui fuie là ?!

-Mais qu'est-ce que tu veux que je te dise d'autre ? cingla Miles, exaspéré. Je t'ai tout dit, là ! D'accord je ne l'ai pas dit sur le coup parce que je ne voulais pas envenimer la situation, mais c'est une réalité : Simon a pesé sur nous. Peut-être que tu ne l'as pas senti parce que ça te paraissait normal mais crois-moi quand on est ton copain, on se rend vite compte que ça ne l'est pas.

-Mais enfin, bien sûr que c'est ...

-Non ! Victoria, tu n'as pas vu ton état à un moment : tu te rongeais littéralement les sangs à cause de lui, tu ne dormais plus – tu as loupé des cours, je doute que ça te soit arrivé dans toute ta scolarité ! Il te mettait dans un état impossible ! Ce n'est pas normal de se mettre dans des états pareils pour quelqu'un qu'on n'aime pas.

Si ma main n'avait pas été toujours agrippée au bras de Miles, je me serais immobilisée nette, comme frappée par la foudre. Mes doigts soudés à sa veste me forcèrent à garder le mouvement et la voix de Miles me parvint à travers des voiles innombrables de pensées et de sentiments indistincts :

-Tu te demandes si j'ai été jaloux ? Evidemment que je l'ai été ! Pas parce que je pensais que tu me quitterais pour lui mais juste ... Bon sang, Vic', tu lui donnais mille fois plus d'attention qu'à moi. Et moi, je sortais avec toi.

Je contemplai quelques secondes son visage, ses traits crispés par la colère et la frustration, mais qui se détendaient à mesure que les mots sortaient enfin. J'aurais voulu tenter de répliquer quelque chose, de le rassurer, de lui hurler mon désarroi face à ces sentiments, mais ma langue semblait s'être transformée en plomb. Je sentais à peine mes doigts, complétement gelés et soudés à sa veste et pire que tout, j'avais cette sensation étrange que mon esprit sombrait dans une sorte d'obscure torpeur. Je tirai sur sa manche pour le forcer à s'immobiliser avec moi.

-Miles, il fait froid.

La remarque était idiote, mais elle m'avait échappée, sonnant comme l'évidence. Il me jeta un regard torve.

-Normal, on est en décembre.

Mais ce n'était pas un froid de décembre. Ma peau n'était pas la seule à être affectée : j'avais l'impression de le ressentir dans ma chair, dans mon cœur qui s'était soudainement alourdi pour devenir une pierre dans ma poitrine, trop lourde à porter, dans mon âme qui semblait vibrer à la faveur des cris qui s'étaient mis à flotter dans mon esprit. Je fermai les yeux, inspirai plusieurs fois en espérant les chasser, mais ils revenaient, chaque fois plus distincts.

Il y a eu un accident ...

ASSEZ !

Je suis désolé ... Vicky, je suis désolé ...

Victoria ... Victoria ...

Mon sang se glaça dans mes veines. L'espace d'un étourdissement, cette sensation de lourdeur, de torpeur et désespoir me fut familière. Je l'avais déjà ressentie, trois ans auparavant mais de manière plus superficielle. Là, le froid me pénétrait jusqu'au fond de mon âme. Ma main se referma sur la baguette que j'avais cachée dans ma poche.

-Non Miles. Il fait froid. 

*** 

ça fait longtemps que je n'avais pas fini en suspens. ça m'avait manqué ! 

J'espère que le chapitre vous aura plu et on se retrouve la semaine pro sur La dernière page ! 

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