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II - Chapitre 7 : Une sombre Histoire


Bonjour ! 

Chapitre 7 ! Je poste en coup de vent alors je vais me contenter de dire : bonnes fêtes de fin d'année, profitez bien et n'abusez pas du chocolat ! 

(Je plaisante, abusez) 


Chapitre 7 : Une sombre Histoire

-McGonagall s'est déjà fait examinée, marmonna Emily en touillant négligemment ses céréales. Je suis déçue.

C'était le petit-déjeuner, et nous étions assises devant nos bols respectifs, amorphes et les paupières lourdes. Nous avions passé une partie de la nuit à achever un devoir particulièrement ardu de Métamorphose, et n'avions jamais autant haïs McGonagall qu'en cet instant. Si bien que, comme Emily, j'aurais été ravie de voir Ombrage débarquer pour l'inspection du cours. Mon amie avait appuyé la joue contre son poing, les paupières mi-closes, la cuillère suspendue au bout de son bol sans qu'elle ne se soucie de celui-ci. Personnellement, j'étais encore si fatiguée que je n'avais pas moindre envie d'avaler quoique ce soit, et je considérais cela comme un miracle d'avoir réussi à me servir mon chocolat. Mais même la substance brune et crémeuse ne suffisait pas à me donner envie. Un sac s'abattit à côté de moi, et je fis un effort monumental pour lever les yeux sur les traits tirés de Mathilda.

-Devoir de métamorphose ? devina-t-elle avec l'ombre d'un sourire.

-On l'a fini à trois heures du matin, confirma Emily, qui fixait sa cuillère l'œil vide. Ou quatre ? Je ne sais plus, j'ai perdu le compte.

-On a mis du temps aussi avec Erwin. J'ai essayé d'aller le réveiller mais je n'ai pas l'impression qu'il y soit disposé. Simon m'a dit qu'il le ferait.

-Mon dieu le carnage ...

Carnage il devait y avoir eu, car Simon et Erwin descendirent quelques minutes plus tard, l'un souriant et bondissant, et l'autre les cheveux ébouriffés, jetant des regards noirs un peu partout – et particulièrement sur Simon. Il ne prit pas le temps de saluer Mathilda lorsqu'il s'assit à ses côtés, et mit sa tête entre ses bras pour finir sa nuit. Je dressai un sourcil à l'adresse de Simon.

-Qu'est-ce que tu lui as fait ?

-Oh, trop fois rien ..., dit-t-il, le regard brillant.

-Trois fois rien ? répliqua Erwin en relevant la tête. Ma couette m'a prise par les pieds et tiré hors du lit ! J'ai dû me retenir aux barreaux du lit pour ne pas tomber !

-Oh vraiment une petite tragédie, lança ironiquement Emily alors que Mathilda ne pouvait retenir un éclat de rire.

Elle l'étouffa en pressant sa main contre ses lèvres, mais s'attira tout de même le regard vexé de son petit-ami. Mais elle haussa les épaules, et présenta son poing à Simon qui y toqua sien avec un clin d'œil complice. Je m'apprêtais à enfin me préparer une tartine de marmelade quand Angelina vint prendre la place vide à côté de moi, l'air affolé.

-Victoria, tu sais que je ne demanderais pas ça en temps normal, mais tu as fait la traduction de rune ?

-Une partie, répondis-je, perplexe. Mais c'est pour demain et ...

-J'ai entrainement ce soir, rétorqua Angelina en se mordant la lèvre inférieure. Enfin « entrainement » (elle fit des guillemets avec ses doigts) car Harry a encore décidé de se faire coller donc je n'ai toujours pas mon équipe au complet et je vais finir par lui arracher la tête mais passons.

-Je ne suis pas sûre qu'il l'ait décidé, fis-je doucement remarquer pour apaiser Angelina. Mais j'ai fini ma recherche de vocabulaire, tu veux au moins ça ?

-Hey ! protesta Simon, indigné. Je te l'ai demandée hier, tu as refusé !

-Tu as une équipe de Quidditch à gérer ? répliqua Angelina, les yeux plissés.

-Non, une équipe de préfet – et en parlant d'arracher la tête de quelqu'un, où est Malefoy ? Bref, crois-moi je gagne là-dessus, Johnson.

Les yeux d'Angelina se plissèrent d'avantage, et elle en détourna les yeux que lorsque je lui tendis mon rouleau de parchemin. Simon poussa un grondement sonore.

-Quelle injustice ...

-Ne râle pas, je t'aiderais ce soir, promis-je en réprimant le soupir qui me venait.

-Tu me sauves la vie, exhala Angelina, ses grands yeux sombres parcourant mes notes. Je dois préparer la séance de ce soir, voir comment je fais sans Harry ... Par Merlin, je n'ai fait qu'une séance avec le groupe complet. Il ne pourrait pas se retenir ? C'est si difficile de prendre sur lui et de se la boucler ?

-Visiblement, beaucoup trop, cingla Emily.

Pour pallier à toute réponse impromptue, j'assénai un coup au tibia de Simon, qui venait de lui adresser un regard circonspect. Il grimaça, mais resta coi. Emily repoussa son bol en un geste impatient.

-Sérieusement, cette histoire devient absurde ... Il voit bien que personne ne le croit, alors pourquoi il continue à vouloir faire peur à tout le monde comme ça ?

-Il faut bien que quelqu'un le dise.

Le regard de la table se tourna vers Renata. La jeune fille déjeunait non loin, son bol de thé entre ses mains dont la chaleur embuait les lunettes, et un grimoire juché sur la cruche de lait. Elle ne nous avait pas adressé le moindre coup d'œil mais ses doigts semblèrent se crisper sur son bol.

-Mais bon, je suppose que tu ne reçois pas le message, Emily.

Emily cligna des yeux, interdite, avant d'échanger un regard avec Mathilda. La jumelle de Renata rentra la tête dans les épaules et se trouva soudainement absorbé par le lait qui tourbillonnait dans sa tasse.

-Et toi, tu as reçu celui du Ministère ? rétorqua-t-elle finalement. Tu crois vraiment que nos dirigeants ne feraient rien si le Mage Noir le plus puissant que l'Europe ait connu était revenu d'entre les morts ?

-Hep hep hep ! la coupai-je en levant une main. Et Grindelwald dans tout ça ?

-Et combien de fois il va falloir te dire qu'il n'était pas mort Emily ? ajouta Simon d'un ton sec.

-S'il n'était pas mort Simon, qu'est-ce qu'il était ?

Simon garda le silence, révélant ainsi son ignorance et Emily se fendit d'un petit « hum » satisfait.

-Bien. On ferait bien de se dépêcher, ça ne va pas tarder à sonner, et personne ne veut arriver en retard chez McGonagall.

-Oui, parce que c'est ce qui importe, murmura Renata, récoltant l'œillade assassine d'Emily. Etre à l'heure en cours ...

La préfète poussa un soupir excédé, et attrapa son sac pour quitter la table, sa queue fouettant furieusement l'air à mesure de ses pas. Angelina, après s'être murée dans un silence embarrassé, me remercia à nouveau et retourna à la table des Gryffondors. Ce fut le moment que choisit Mathilda pour poser brusquement son bol sur la table, faisant gicler des gouttes de lait sur moi et le grimoire de sa sœur, et faisant vivement sursauter Erwin.

-Arrête avec ça, Rennie.

Renata leva enfin les yeux et contempla sa jumelle sans un mot, un sourcil dressé. La mâchoire de Mathilda se crispa, et comme Emily elle se leva d'un bond.

-Je sais ce que tu penses, et je comprends, mais ce n'est pas pour ça que tu dois attaquer toutes les personnes qui ne pensent pas comme toi. C'est ...

-Ce n'est pas comme si c'était une simple opinion, Mathie, répliqua Renata. Ce n'est pas un fait qui dépend des esprits des gens : c'est une réalité qu'il faut accepter si on veut pouvoir s'en sortir.

-Certaines personnes ne sont pas prête à l'entendre, plaidai-je avec douceur. Même si je suis entièrement d'accord avec toi, Renata. Mais tant que le Ministère dit que tout va bien et que Voldemort ne se montre pas, ce sera difficile de convaincre les gens.

Mathilda et Simon eurent un hoquet d'horreur lorsque je prononçai le nom du Mage Noir, mais un fin sourire ourla les lèvres de Renata.

-Tommy, lança Simon en pointant sur moi un index tremblant. Je préfère Tommy.

-Tommy, répéta Renata, l'air vaguement amusé. Je peux savoir pourquoi ?

-Monsieur le grand manitou nous dit que son vrai nom c'était Tom Jedusor, expliquai-je succinctement en désignant Simon du menton.

-Vraiment ? s'étonna Mathilda en écarquillant les yeux. Je veux dire ... il avait un nom ... avant ?

-Non, ses parents avaient des goûts douteux et l'ont appelé « Voldemort » à la naissance, raillai-je. Oh Seigneur, remets-toi, râlai-je à l'adresse de Simon.

Il avait renversé une partie de son café sur sa manche et je lui jetai sèchement une serviette au visage. Cette fois, ce fut carrément un éclat de rire qui franchit les lèvres de Renata.

-Tommy. J'adore.

-Vraiment ? répéta Mathilda, tout aussi abasourdie.

-Vraiment. Une façon comique de lui refuser son pouvoir. On le mystifie beaucoup trop à refuser de prononcer son nom ...

-Amen ma sœur, acquiesçai-je avec un sourire.

Mathilda secoua la tête, interdite, et finit par prendre son sac pour quitter à son tour la pièce. Erwin la suivit précipitamment, sous le regard désapprobateur de Renata. Simon la contemplait, ébahi.

-Renata ? Comment ça se fait que ... tu crois à son retour, comme ça ?

-Dumbledore nous l'a dit, répondit-t-elle en toute simplicité. Ça semblait logique en fin d'année dernière. Je ne vois pas pourquoi ça aurait changé l'été passé. Et je ne crois pas que Cédric soit mort dans un accident.

Là dessus, elle referma son grimoire et le rangea dans son sac. Je vis une lueur appréciatrice briller dans le regard de Simon. Nous la suivîmes hors de la Grande Salle, et j'eus juste le temps de croiser Miles et de lui arracher un baiser avant de devoir courir en métamorphose, sous les sifflements moqueurs de Simon. Je rendis mon devoir, et pris mes notes sur les métamorphoses humaines et animales avant d'abandonner mes camarades pour aller en Histoire de la Magie. Nous n'étions que deux à poursuivre cette matière et je suivis à quelques mètres Octavia McLairds. La Serdaigle entra dans la pièce sans saluer notre fantomatique professeur, Mr. Binns, qui lui rendit l'impolitesse. Il flottait à quelques mètres du tableau, la tête appuyée contre sa poitrine, comme assoupi – si tant était qu'un fantôme pouvait s'assoupir. Je m'assis à l'opposé d'Octavia, dans le fond de la salle, lorsque la voix monocorde du professeur fendit l'air :

-Rapprochez-vous, Baker. Mettez-vous à côté de Miss McLairds.

Je fronçai les sourcils sans relever la façon dont il avait écorché mon nom. J'y étais habituée et n'étais même plus vexée par le fait qu'il prononçait parfaitement celui d'Octavia. J'avais depuis appris que sa famille était une vieille famille sorcière, peut-être pas de Sang-Pur, mais assez puissante pour avoir donné un Ministre de la Magie à l'Angleterre. Peut-être Binns avait-il connu le Ministre en question de son vivant. Avec d'infinies précaution, j'agrippai mon sac et m'approchai d'Octavia. La jeune fille me jeta un regard de coin alors que je m'asseyais. Elle avait relevé sa magnifique chevelure d'acajou en un chignon délicatement exécuté sans que cela ne fasse trop « dame ». Je m'efforçai d'ignorer son regard inquisiteur sur moi et levai les yeux vers Binns. Ce qui était agréable avec les professeurs fantômes, c'était que je pouvais étudier la carte des villages magiques plaquée près du tableau tout en donnant l'impression de fixer ledit professeur.

-Bien, entonna Binns sans même poser les yeux sur nous. Vous avez décidé de poursuivre l'exigeante matière que peut être l'Histoire de la Magie, et j'aime que mes étudiants de dernière année s'adonnent à la recherche, comme vous avez pu l'expérimenter en fin d'année dernière. Je dois même admettre que j'ai été agréablement surpris par la qualité de vos travaux en les relisant cet été ...

Pour la première fois de ma scolarité, je croisai les yeux spectraux de mon professeur, et il sourit. D'une manière inexplicable, je compris que ce sourire m'était adressé, à moi et non à une anecdote qu'il avait en tête. Je passai une main gênée dans mes boucles.

-McLairds, votre étude sur la construction du Secret Magique Internationale était très bien documentée et très pointue du point de vue de la réflexion. Quant à vous Baker, j'avouais être sceptique sur votre sujet sur la Pologne sous Grindelwald – nous avons très peu d'archives sur ces pays dans notre bibliothèque – mais vous avez su admirablement bien vous en tirer avec le peu d'information que vous avez, et le témoignage des élèves de Durmstrang. Et le lien que vous avez fait avec le monde moldu ... vraiment surprenant.

-Merci professeur, bredouillai-je, ne sachant que dire d'autre.

Il était rare que le professeur s'adresse à nous. Même l'année dernière alors que nous étions que deux, Binns avait poursuivi sur sa lancée des cinq premières années en nous ignorant superbement. L'une des rares fois où il l'avait fait avait été en fin d'année dernière au moment de nous rendre nos travaux, après la mort de Cédric. Il nous avait laissé partir en vacances sans nous les rendre, nous donnant notre année avec une sorte de bienveillance émotive que j'avais liée au contexte. J'y avais vu le signe que, malgré sa forme fantomatique, sa voix monocorde et son absence d'émotion, Binns gardait des traces d'humanité.

Malgré tout, celle-ci ne dura pas, car il se détourna de nous pour se mettre à flotter par dessus son estrade, comme un professeur l'arpentant le menton relevé, et la poitrine bombée :

-Devant vos qualités aux antipodes et la complémentarité que peuvent connaître vos travaux, j'ai eu cette été une idée inédite ...

-Mille gargouilles, lâcha Octavia d'une voix froide. Vous allez nous faire travailler ensemble ?

Binns lui jeta un coup d'œil irrité, visiblement mécontent d'avoir été interrompu. De mon côté, je ne pris pas le temps d'être vexée par le ton dubitatif d'Octavia pour rentrer la tête dans mes épaules, également sceptique. J'étais une solitaire : j'avais apprécié travailler seule sur mon projet l'année dernière. Et travailler avec Octavia McLairds, avec laquelle je ne m'étais jamais entendue ... Non, je ne pouvais pas dire que ça m'enchantait.

-La coordination est l'une des principales qualités de l'historien, répliqua sèchement Binns. Vous devez absolument savoir travailler ensemble, déléguer le travail, regrouper vos recherches, partager vos idées, entremêler vos pistes et vos points forts.

-Mais professeur, tentai-je de protester, on n'a jamais fonctionné comme ça ...

-Vous apprendrez, Baker. Je vous libère pour cette heure, mais je veux vendredi une ébauche de sujet commun, ne serait-ce qu'une piste. Vous travaillerez là dessus toute l'année durant. Inspirez-vous de vos sujets de l'an deniers, des enjeux communs et des difficultés d'aujourd'hui. Je compte sur vous.

Octavia et moi nous accordâmes pour le gratifier d'un long regard dubitatif que Binns ignora. Sans plus de cérémonie, il fit volte-face et traversa le tableau noir pour disparaître. La Serdaigle se pencha pour récupérer son sac, les traits figés en un masque d'impassibilité. Néanmoins, la crispation dans sa mâchoire signifiait son mécontentement. Un muscle tressautait sur le bas de sa joue.

-Bien, lâchai-je d'un ton prudent. Euh ... Tu pourrais peut-être me donner tes notes de l'année dernière, pour ... qu'on puisse définir un sujet commun ?

Elle me jeta un nouveau regard de coin, avant de pousser un soupir résigné.

-Très bien, je te donnerais ça ce soir. Prépare les tiennes.

-D'accord. (Je chargeai mon sac sur mon épaule, et lançai un ultime regard embarrassé à la jeune fille). A ... à plus tard alors.

Octavia me répondit d'un simple hochement de tête, et je me dépêchai de quitter la pièce, les doigts crispés sur la lanière de mon sac. Il ne manquait plus que ça, une année à potasser un projet avec Octavia McLairds ...

***

-Mais sur quoi est-ce que vous allez bien pouvoir travailler ? Vous n'avez aucun point commun ! Je te donne une heure avant que vous ne vous jetiez des sorts !

-Tant d'optimisme, ça fait plaisir, Emily.

J'étais assise en tailleur sur le sol de la bibliothèque, à côté de la table étroite qu'occupaient Emily et Roger Davies. En ce samedi pluvieux, la pièce était pleine à craquer d'élèves qui souhaitaient se protéger du froid tout en trouvant de l'occupation, et j'avais été forcée de m'asseoir à même le sol pour relire les notes d'Octavia McLairds. Je parcourrai son écriture élégante, griffonnant quelques idées à l'aveugle sur un parchemin à côté de moi.

-Elle a travaillé sur le Code du Secret Internationale Magique, fis-je néanmoins remarquer. Je pense qu'on aurait moyen de faire quelque chose sur le lien qui unit la communauté magique à la communauté moldue avec cet exemple ...

-Tu peux travailler sur comment les moldus nous ont forcé à nous cacher, hasarda tranquillement Emily.

Je lui jetai un regard courroucé qu'elle ne remarqua pas, tout occupée qu'elle était à rédiger son devoir de Potion. En revanche, Roger le vit, et parut vite comprendre l'origine de mon agacement car il ajouta :

-Ce serait une façon négative de voir les choses, je pense. Il ne faut pas oublier que si les moldus avaient une mauvaise opinion des sorciers, c'était que certains d'entre nous les persécutaient. Ils ont voulu se protéger de nous – de manière violente, mais on n'a pas forcément été mieux qu'eux.

-Vision intéressante des choses, approuvai-je en annotant les mots de Roger. L'escalade de la violence entre moldus et sorcier qui aurait mené à la création code. Merci, Davies.

-Qu'est-ce que tu crois, Bennett, quatre ans d'Etude des Moldus ça aide à relativiser.

Il me présenta sa main, et je me hissai de ma modeste taille pour taper dans sa paume. Emily nous contempla par dessus ses lunettes, l'air perplexe.

-Je ne comprendrais jamais que tu continues Etudes des moldus alors que tu es née-moldue, Vic' ...

-Parce que dans ces cours, on parle de musique que je connais, de Shakespeare, et que je peux parler de « Shoah » dans qu'on ne me jette un regard dérouté.

Regard dont me gratifia Emily. Celui de Roger était plus inquisiteur, comme curieux.

-Ah oui, Burbage a dit qu'on en parlerait cette année, se souvint-t-il vaguement. Mais elle n'a pas expliqué ce que c'était ...

-Et c'est quoi ? s'enquit Emily à mon adresse.

-Un moment assez sombre de l'Histoire Européenne. Hitler, tu connais ? (Roger hocha la tête). Un dictateur allemand qui a voulu envahir l'Europe en 1939 pour faire un « Reich qui durerait mille ans » où la race allemande pourrait prospère en paix. Et il avait identifié un ennemi à la base de tous les maux Allemands, les juifs, alors pour régler la question il a ... construit d'immense centre de travail ou de mise à mort où il les envoyait par trains entiers. La Shoah signifie « catastrophe » en hébreux, parce que c'est que ça a été pour les juifs. Une grande partie de la population Européenne a été décimée.

-Mais c'est barbare, s'indigna Emily.

-Tu sais, entonna lentement Roger avec un regard oblique pour la jeune fille, les Sangs-Purs ne font pas forcément mieux avec les moldus et nés-moldus. Imagine si on leur laissait les clefs du pouvoir, qu'est-ce que tu crois qu'il adviendrait des gens comme Vic' ?

Emily s'empourpra et je baissai mon nez sur mes notes, les entrailles nouées. J'ignorais ce que pensait Roger du retour de Voldemort, s'il savait à quel point ses paroles pouvaient être réelles et angoissantes pour moi.

Si Voldemort parvenait à prendre le pouvoir en profitant de l'attentisme du Ministère, qu'adviendrait-il des gens comme moi ?

Qu'adviendrait-il de moi ?

Une bouffée d'angoisse me fit suffoquer. C'était d'autant plus affolant que je n'avais aucune idée de ce qui pouvait se passer à l'extérieur. La Gazette ne laissait rien filtrer – sans doute ne s'y intéressait-elle même pas. Pourtant il devait avoir avancer dans ses projets, depuis quelques mois qu'il était revenu. J'aurais voulu ne pas y songer, mais les mots de Roger avaient planté la graine dans mon esprit et je laissai aller ma tête contre la pierre froide qui constituait le mur, et mon regard se perdit à travers la fenêtre un peu plus haut. De grosses gouttes glacées s'écrasaient contre la vitre et résonnaient de façon assourdissante dans la bibliothèque. Lentement, la graine qu'avait plantée Roger germa dans mon esprit et fleurit en une volonté étrange, mais qui me sembla irrépressible. J'hésitai encore quelques minutes, pesant intérieurement le pour et le contre. Mon corps parut prendre la décision avant mon esprit car je commençai à ranger machinalement mes affaires.

-J'y vais, annonçai-je à Emily et Roger, qui avait repris leurs travaux. On se voit au dîner ?

Emily m'adressa un bref sourire, et je fis volte face, mon sac à l'épaule et mes doigts tordant ma chaine entre les doigts. Avant de m'éclipser définitivement, je jetai un petit regard derrière moi. Emily était penchée sur son parchemin, les sourcils froncés au dessus de son nez et quelques mèches de mousseline blonde tombant élégamment devant ses yeux. Et en observant Roger, aussi beau qu'elle était belle avec son visage aux traits fins, sa mâchoire volontaire, et son regard charmeur, je pus m'empêcher de remarquer qu'il levait souvent les yeux sur elle et que chaque fois qu'il le faisait, un sourire inexplicable effleurait ses lèvres.

-Oh, lâchai-je à part moi, attendrie. Une affaire à creuser ...

-Pardon ?

Je baissai prestement les yeux sur le jeune garçon assit à même le sol, adossé à l'étagère. Il me fixait les yeux écarquillés, perplexe. Mes joues s'enflammèrent, et je haussai les épaules avant de prendre la fuite à travers les rayonnages, embarrassée. Mes jambes me guidèrent seules jusqu'au deuxième étage, en des coins reculés que visitaient rarement les élèves. Je m'arrêtai devant une gargouille, cette gargouille si laide devant laquelle nous avait amené la préfète de Poufsouffle qui m'avait accueilli en première année, Penny Haywood. Je me souvenais de cette visite qu'elle avait tenu à nous faire le premier week-end comme si c'était hier. Et de la frayeur de petite fille qui m'avait envahi lorsque je m'étais trouvée face à l'immonde gargouille.

-Quelqu'un sait ce que cette gargouille dissimule ? demanda Penny à la cantonade.

Les premières années face à elle se resserrèrent les uns sur les autres, se répugnant à prendre la parole.

-Un monstre qui va te dévorer tout cru, Vicky, souffla une voix à mon oreille.

Trouvant en cette pique la force de chasser la frayeur que m'inspirait la gargouille, je donnai un coup à l'aveugle derrière moi, et le « aïe » étouffé m'indiqua que j'avais visé juste. Je gratifiai Simon d'une œillade victorieuse. Il se tenait le nez en gémissant.

-Bien fait.

-Mais je vous jure, bouda Emily un peu plus loin. Quelle gamine, celle-là, je vous jure !

-Tais-toi ! lui intima Cédric, qui était aux premières loges. Penny parle !

La préfète nous contemplait l'air sévère, avant de promener des yeux blasés sur sa jeune assemblée. Même l'insigne qui brillait sur sa poitrine semblait terni. Ce fut finalement Simon qui la tira de son embarras en levant la main.

-La Chambre des Secrets ?

C'était dit sur le ton de la plaisanterie, et un rire secoua les premières années. Moi je clignai les yeux, me sentant complètement stupide de ne pas comprendre la référence, et me retranchai un peu plus dans l'ombre, derrière ce grand garçon qui partageait le dortoir de Simon. Penny leva les yeux au ciel mais un sourire amusé effleura ses lèvres.

-Presque, c'est tout aussi mythique même si c'est moins dramatique. C'est ce qui dissimule le bureau de Dumbledore.

-Oooooh, laissèrent échapper les élèves, ébahis.

Je ne l'étais pas, moi. Je me contentais d'être effrayée par la méchante gargouille. Le nom de Dumbledore ne m'était rien – juste ce vieux monsieur bizarre qui était le directeur de l'école. Je ne l'avais pas revu depuis le banquet de rentrée, où je n'avais pu qu'apercevoir, cachée derrière Simon, que sa barbe et ses cheveux exagérément long – à en faire s'étrangler d'indignation l'Ancien, qui ne jurait que par la coupe militaire, courte et rasée. Penny hocha la tête, l'air ravie de son effet.

-Hey oui ! Personnellement, je n'y suis jamais allée – il faut avoir fait une belle bêtise ou un bel exploit pour y entrer – mais c'est d'ici qu'il nous dirige, et qu'il mène ses expériences de grands sorciers – vous savez à quel point c'est un immense sorcier ...

Si elle le disait, songeai-je alors que les autres opinaient vigoureusement du chef. C'était ce que Caroline Bones m'avait dit, aussi. « Dumbledore est le plus grand sorcier de tout les temps, et c'est lui le directeur de Poudlard ! » avait-elle clamée en se bombant le torse.

-Poudlard, murmurai-je pour moi-même, puisque j'étais si retirée que personne ne m'entendait. Pou-de-lard, ajoutai-je en détachant chaque mot que j'entendais. Poux-de-lard ... Cette école a vraiment un nom stupide.

-Je ne peux qu'être entièrement d'accord.

Je sursautai en pivotant, une main sur le cœur, imitée par une partie de mes camarades. Derrière se tenait le vieil homme bizarre que j'avais pu apercevoir au banquet. Il était plus grand que je ne l'aurais cru, si bien que je dus me tordre le cou pour apercevoir ses yeux pétillant d'amusement derrière ses lunettes demi-lunes. Un sourire indulgent fit frémir sa longue barbe argentée.

-Il faut dire que nos fondateurs avaient un sens de l'humour particulier, poursuivit-t-il d'un ton badin. Il fallait en avoir pour faire cette marche piégeuse au sixième étage : je me suis cassée une cheville en deuxième année en me coinçant le pied dedans.

-Pro-professeur, bredouilla Penny, prise de court. Je ... je faisais simplement visiter Poudlard aux nouveaux ... juste ... pour qu'ils ne soient pas trop perdus.

-C'est une excellente initiative, miss Haywood, la rassura immédiatement le directeur. Et il n'y a rien d'illogique à ce que mon bureau fasse parti de votre cursus.

-Mais monsieur le directeur, entonna timidement Charles Callawader, comment on fait pour rentrer ? Il n'y a pas de porte.

Je fus secrètement rassurée de ne pas être la seule à m'être posée la question. Même Penny fronça les sourcils et observa la gargouille, perplexe. Les yeux bleus de Dumbledore étincelèrent.

-C'est très simple, mon cher : pour découvrir ma porte, il suffit juste de trouver ma friandise préférée. Un peu d'enfant.

-Des patacritrouilles ? hasarda Charles.

-Chocogrenouilles ?

-Ballongomme ?

Face au sourire bienveillant de Dumbledore tous se prirent au jeu et proposèrent des friandises les plus farfelues les unes que les autres. J'écarquillai les yeux à mesure que les mots fusaient, abasourdie. Il y avait vraiment des bonbons qui se nommaient « nids-de-cafard » ? La bile me monta à la gorge lorsque j'imaginais ce à quoi ça pouvait ressembler. Finalement, ce fut quand cette pimbêche d'Emily s'écria « baguette réglisse ! » que la gargouille s'anima. Je fis un véritable bond qui me rapprocha de Simon, et me cachai derrière sa carcasse pas plus épaisse que la mienne. Je le bousculai au passage, et il me repoussa l'air agacé :

-Bouge, Vicky !

-Regardez ! s'exclama Mathilda en pointant la gargouille.

Elle venait de s'écarter, emportant avec elle un pan entier du mur qui dévoila un bel escalier de colimaçon qui s'enroulait autour d'une colonne de marbre. Notre petit groupe se fendit d'un « whao » admiratif et le directeur inclina humblement la tête.

-J'aurais été ravi d'enrichir la visite de votre préfète et de vous faire visiter mon bureau mais j'ai malheureusement du travail qui m'attend là-haut et que je ne peux pas remettre à plus tard. Mais sachez tous que mon bureau vous restera ouvert. Il suffira juste de trouver la friandise.

Notre groupe le contempla, estomaqué, et la préfète Penny papillonna stupidement des paupières. J'eus un sourire. Finalement, j'aimais bien ce vieil homme bizarre. Avant de s'engouffrer dans l'escalier, il sembla m'adressa un discret clin d'œil et la gargouille referma le mur sur lui. Mon sourire se mua en une moue lorsque je me retrouvai à nouveau face aux traits creusés et hideux de la gargouille. Ce fut finalement Simon qui rompit le silence en demandant, consterné :

-Comment il fait pour aimer la réglisse ?

-Moi j'aime la réglisse, protesta Cédric alors qu'Emily et Mathilda s'esclaffaient.

-Toi tu mangerais tout ce qui te passe sous le nez, rétorqua Simon.

Cédric rougit et un sourire adorablement embarrassé s'étira sur ses lèvres. Penny nous gratifia d'un sourire presque maternel, et nous fit un signe de main pour nous attirer plus loin dans les couloirs :

-Prochaine étape, les toilettes de Mimi Geignarde ! Vous devez les connaître, les filles : ne faites surtout pas l'erreur d'aller dedans ...

-Il reste combien d'étage ? gémit Charles en lui emboitant le pas.

-Cinq, répondit sèchement Renata.

-Hey. (Cédric tapota doucement mon épaule). Tu t'appelles Victoria, c'est ça ?

Intimidée, je me contentai de hocher la tête. Peu de personne m'avait adressée la parole depuis que j'avais posé le pied à Poudlard – à part Simon pour toutes les amabilités coutumières. Alors j'étais surprise que Cédric, ce garçon qui paraissait si à l'aise et qui en une semaine s'était déjà fait nombre d'amis, le fasse. Il me servit un sourire éclatant.

-Moi c'est Cédric. Cédric Diggory. (Il se gratta la tête, gêné) Je ne sais même pas pourquoi je dis mon nom de famille, je me rends compte que maintenant que c'est idiot.

-Un peu, admis-je, la commissure des lèvres relevée. Mais moi je m'appelle Bennett. Enfin Victoria Bennett.

-Tu es née-moldue ?

Je rentrai la tête dans mes épaules. J'étais toujours mal à l'aise avec le mot, cette étiquette dont m'avait affublée Caroline Bones lorsque j'étais venue la voir pour en savoir plus sur le monde des sorciers. « Tes parents sont moldus, donc tu es née moldue. – Mais je pensais que j'étais une sorcière ? – Tu es une sorcière née-moldue, Vic' ! ». Un terme qui me mettait comme à l'écart du monde ordinaire des sorciers.

-Mes parents ne sont pas des sorciers, oui, préférai-je préciser.

-D'accord. Et ça va, tu ne te sens pas trop ... perdue ?

Il était l'un des premiers à me poser cette question, à s'intéresser à mes sentiments – comme cette professeure si gentille qui s'occupaient des Poufsouffles. Les yeux gris du garçon brillaient de sollicitude et une chaleur bienfaisante se diffusa dans ma poitrine.

-Un peu, avouai-je, mise en confiance. Tout est si différent de chez moi ...

Et chez moi, ça me manquait. Terre-en-Landes me manquait. Alexandre me manquait. Cédric parut lire en moi comme dans un livre ouvert, car il posa une main bienveillante sur mon épaule.

-Ne t'inquiète pas, moi aussi je suis paumé. Je n'avais jamais vu autant de magie accumulée en un seul endroit ... Rien que le plafond de la Grande Salle, tu as vu ça ? Je ne savais même pas que c'était possible !

-Mais tu es un vrai sorcier ...

-Toi aussi tu es une vraie sorcière, Vicky, rétorqua Simon devant nous avec un certain agacement.

-Il a raison, approuva Cédric avec un sourire. Tu es une vraie sorcière, toi aussi. Il faut juste que tu apprennes. (Il pointa Simon du doigt). Même lui a besoin d'apprendre. Sinon on ne serait pas dans une école.

Simon poussa un grognement qui ne sonnait ni comme une approbation, ni une désapprobation. Cédric m'adressa un sourire rassurant, et posa un doigt sur ses lèvres lorsque Penny reprit la parole devant les fameuses toilettes de Mimi Geignarde. Je souris en retour. Lui aussi je l'aimais bien.

-Oh, Cédric.

J'étais en proie à un grand désarroi. Je ne m'étais pas attendue à ce que ce souvenir s'imprègne autant en moi en me retrouvant face à ce visage repoussant de pierre, qui me fixait de ses yeux vides. Je poussai un gros soupir en me laissant aller vers l'avant, les mains sur les genoux, et le visage penché vers le sol. Ma respiration s'était faite laborieuse et ma vision fut obscurcie par une foule de boucles noires. J'attendis quelques minutes de mon souffle se fasse plus régulier, et que le souvenir de Cédric s'échappe par mes lourds soupirs, avant de me redresser, hors d'haleine. J'étais venue ici pour un but précis, même si maintenant que j'étais devant la gargouille, ça me semblait moins évident.

Une friandise, Victoria. Tu devrais pouvoir trouver ça ?

-Patacitrouille ? tentai-je sans y croire.

Et la gargouille resta immobile, comme je m'y attendais. Je tentai toutes les sucreries sorcières que je connaissais et qui me passaient par la tête, et lorsqu'elles finirent par se tarir, j'en proposai des moldues. J'en étais arrivée à un point où j'étais assise en tailleur devant cette gargouille qui semblait me narguer de ses yeux figés. Je plissai les paupières, agacée.

-Allez ma grande, laisse-moi passer. Tu veux des bonbons au citron ?

Non seulement la gargouille ne bougea pas d'un poil, mais en plus je me rendis compte que j'avais déjà proposé cette friandise. J'appuyai ma joue contre la paume de ma main, blasée.

-Je suis à court, là. Tu ne veux pas m'aider ?

-J'ignore si elle vous répondra, mais personnellement je serais ravi de vous aider, miss Bennett.

Je fis un véritable bond qui me remit sur pied d'un saut, le cœur battant la chamade. Dans une élégante robe de sorcier d'un prune brodée d'étoile dorée, et abordant un léger sourire, Albus Dumbledore marchait vers moi d'un pas tranquille, les mains jointes derrière son dos. Je mis une main sur ma poitrine et exhalai un nouveau soupir pour expier les dernières traces de terreur.

-Monsieur le directeur !

-Victoria, salua poliment Dumbledore, l'air amusé. Je suis navré de vous avoir effrayé, mais que me vaut ce sit-in devant mon bureau ?

J'observai le professeur, ordonnant silencieusement à mon cœur de calmer ses pulsations. Depuis cette brève apparition pendant la visite de Penny Haywood, je n'avais pas échangé le moindre mot avec l'illustre directeur de Poudlard. Mais cette rencontre avait marqué un tournant dans le rapport que je pouvais avoir à lui : dès lors, j'avais appris à le respecter, et au fil de mes découvertes de néo-sorcière, à admirer ses exploits avant de l'admirer lui, comme l'immense majorité des sorciers de Grande-Bretagne. Mais il avait fallu la mort de Cédric, le retour de Voldemort et qu'il parvienne à ses oreilles que j'avais brûlé il y avait quelques années le visage de l'un de mes camarades pour provoquer une seconde rencontre, sur les gradins du stade de Quidditch. Les doigts tordirent machinalement la chaine qui soutenait ma médaille de baptême.

-Oui professeur, je suis désolée. Mais ... J'aurais besoin de vous parler. Si vous avez le temps, bien sûr. Et que ça ne vous dérange pas.

Je m'empourprai au fil des mots, me sentant totalement stupide. Quelle idiote j'étais, d'ennuyer le plus grand sorcier de tous les temps, qui devait avoir des choses autrement plus importantes à traiter ... Je baissai les yeux, honteuse et peu assurée, alors que Dumbledore passait devant moi.

-Bien entendu, Victoria. Je vous attendais même un peu plus tôt, pour être honnête. Hum ... Mon temps est précieux, mais je pense pouvoir vous accorder quelques minutes si cela vous agrée. Au fait, j'aime beaucoup les suçacides.

Je relevai la tête, surprise par la rapide acceptation, et par la gargouille qui pivota pour dévoiler l'escalier tournant de colimaçon. Avec un gracieux mouvement de la main, Dumbledore m'invita à passer devant lui. Je franchis le trou dans le mur et posai un pied sur les marches avec une certaines déférence. J'étais su révérencieuse que je faillis tomber lorsque l'escalier s'anima, tournant sur lui-même en un mouvement ascendant qui me donna le tournis. Mes joues rougirent de nouveau et je n'osais me retourner affronter le regard de Dumbledore. L'escalier m'amena sur un pallier et je posai le pied dessus pour fuir les marches mobiles. Elles menaient à une belle porte de chêne munie d'un heurtoir en forme de griffon. Le directeur passa la porte et s'effaça pour me faire entrer.

-Soyez la bienvenue, Victoria. Prenez un siège.

M'asseoir ne fut pas la première chose à laquelle je songeai en entrant pour la première fois dans le bureau du directeur. Je dévorais la pièce des yeux, tournant sur moi-même pour en admirer chaque détail. C'était une pièce lumineuse – quoique la lumière fût gâchée par la pluie qui battait les vitres – et baignée dans un constant bourdonnement qui émanaient de différents instruments ornant les étagères. Au centre trônait un bureau massif aux pieds de serres derrière lequel Dumbledore s'installa. J'eus un mouvement de recul en me tournant vers lui. Quelques dizaines de paires d'yeux peints m'observaient, certain avec curiosité, d'autre avec désappointement, d'autres carrément l'air sévère. Dumbledore dressa les sourcils, et jeta un bref regard derrière son épaule pour voir ce qui me troublait.

-Ah ... Victoria, je vous présente mes illustres prédécesseurs.

-Qu'est-ce qu'elle a fait, celle là ? s'enquit l'un des hommes dans son portrait.

-Je vous prierais de ne pas nous interrompre, Phineas.

L'homme fronça du nez, visiblement mécontent. Il avait l'air singulièrement désagréable et je le fusillai du regard. La commissure des lèvres de Dumbledore se retroussa légèrement, mais je ne pus m'empêcher de remarquer que son regard étincelait moins que te coutume. Intriguée par sa gravité, je pris place sur la chaise en face du bureau. Pendant un instant, rien d'autre ne résonna dans la pièce que la pluie qui frappait violemment la fenêtre. Dumbledore ne me lâchait pas du regard, sans ciller. J'avais l'impression que cet été, ses rides s'étaient creusées, et la lueur lasse que j'avais entraperçue lors de notre discussion sur les gradins vivifiait dans son regard.

-Euh ... Hum. Vous allez bien ?

Je me mordis la lèvre inférieure, me sentant à nouveau comme une idiote. Mais un éclat d'amusement chassa la lueur lasse dans les prunelles bleues du directeur.

-Je vais bien, Victoria, c'est gentil à vous de vous en inquiétez, répondit-t-il poliment. Même si je trouve que la priorité serait de vous demander comment vous allez vous.

-Moi ? répétai-je en luttant contre le froid qui voulait ankylosait mes entrailles. Ça va professeur, ne vous en faites pas.

Et c'était étrangement vrai. Ça allait mieux depuis quelques jours : j'avais repris une certaine routine, entre révisions de mes ASPICs et les entrainements de Quidditch qui apportaient une certaine stabilité à ma vie. De quoi effacer quelque peu le spectre qui flottait sans cesse au dessus de moi. Dumbledore eut un hochement de tête satisfait.

-Je suis ravi de l'apprendre. Et j'ajouterais si vous le permettez que je trouve que l'insigne de Capitaine vous va à ravir.

-Merci, professeur, répondis-je en rougissant. Euh, professeur ... j'aurais des questions pour vous.

-Concernant ton grand-père ou concernant Voldemort ?

La question posée si directement me prit de court. Dumbledore avait croisé les doigts devant son visage et me fixait de ce regard si intense qui donnait l'impression qu'il lisait en vous. Un regard qui me rappelait mon grand-père, indéniablement. Je déglutis.

-Bien ... Maintenant que j'y pense, sans doute les deux. Mais j'avais voulu commencer par Voldemort.

-Vous vous êtes décidée à utiliser le nom qu'il s'est choisi, apprécia Dumbledore avec un léger sourire. C'est bien, c'est quelque chose que j'approuve. Que voulez-vous savoir, Victoria ?

-Ce qu'il en est. Je veux dire ... je me doute que vous savez des choses, et que vous ne pourrez sans doute pas tout me dire mais ... (Je me mordis la lèvre inférieure). Comprenez-moi, professeur, La Gazette ne dit rien, on est complétement à l'aveugle ...

-Oui, il est naturel que vous vous posiez des questions, consentit Dumbledore en inclinant la tête. Vous avez pu remarquer que le Ministère – et donc La Gazette n'ont absolument pas chanté leur ligne de conduite depuis notre conversation en juin dernier ...

Je hochai la tête, les mains crispées sur mes genoux. Dumbledore garda le silence un long moment, le regard perdu rivé sur la fenêtre et la pluie qui la battait sans ménagement. Sans doute essayait-il de faire le tri entre ce qu'il pouvait me révéler ... et ce qui relevait du secret.

-Je n'ai en réalité que peu d'information à vous transmettre, finit-il par lâcher sur le ton du regret. Voldemort profite du répit donné par le Ministère pour rassembler les fidèles qui sont restés en liberté après sa chute il y a quatorze, jusqu'au moment sans doute où il sera assez puissant pour se montrer au grand jour ... Un certain nombre déjà l'ont rejoins, et il essaie de réactiver d'ancien réseau à l'étranger, notamment dans les anciens pays sous le joug de Grindelwald, où son idéologie a une certaine résonnance.

-Et ... les Détraqueurs ?

Le regard de Dumbledore s'assombrit d'avantage, et un frisson inexplicable me parcourut l'échine devant l'éclat féroce qui brilla soudainement dans ses prunelles. Le directeur n'était pas connu pour son amour de ses sombres créatures.

-J'ai tenté de prévenir le Ministre de la Magie de ce qui lui coûterait de faire confiance à de telles créatures. Bien sûr, Cornelius a fait la sourde oreille, mais selon les informations que j'ai il semblerait que j'ai eu raison. Il y a eu des anomalies dans la gestion des Détraqueurs ces derniers temps et il semblerait que certains se balade dans la campagne anglaise sans l'autorisation du Ministère.

-Ils échappent à son contrôle, compris-je. Pour se mettre sous celui de Voldemort.

Je songeai à l'audience du 12 août qui avait obsédé Susan, et dont elle était persuadée qu'elle concernait Harry, et à l'avertissement d'Amelia Bones concernant les gardiens d'Azkaban. Il fallait réellement que je me mette à m'exercer au sortilège du Patronus : ce n'était pas Ombrage qui me l'enseignerait.

-Mais vous faites quelque chose ? m'enquis-je timidement, du bout des lèvres. Contre ... je ne sais pas, la réactivation du réseau, la recherche de soutien, vous ...

Je déglutis, prise de peur d'être trop présomptueuse et embarrassée par le regard incisif que me lança Dumbledore. Devant son silence, je tentai d'expliciter mon propos :

-Je veux dire ... Si sur cette terre vous ne faites rien, je ... je ne sais pas qui pourrais faire quelque chose.

-Je ne reste pas inactif, finit par admettre Dumbledore. Mais comprenez qu'avec la présence de la sous-secrétaire d'état dans nos murs, je ne puisse pas m'étendre sur mes activités concernant Voldemort.

-Je comprends, approuvai-je précipitamment, les joues rouges d'embarras. Désolée professeur c'est juste que ... j'aimerais avoir, ne serait-ce qu'un semblant d'idée de ce qui se passe ... pour pouvoir me défendre le jour où j'en aurais besoin. Parce qu'en tant qu'enfant de moldu, un jour ... j'en aurais besoin pas vrai ? Voldemort ne restera pas tapis dans l'ombre, il tentera de prendre le contrôle et ce jour-là ...

Les mots s'effondrèrent pêle-mêle dans ma gorge et je pinçai des lèvres, incapable de poursuivre. Ce jour-là, on retrouverait des Marques des Ténèbres au dessus des maisons de moldus. Ce jour-là, on retrouverait des enfants morts dans les bras de leurs parents, comme ça avait été le cas pour la famille Bones. Et ce jour là, j'ignorais ce que je devrais faire. Dumbledore parut comprendre mes craintes informulées car une lueur de compassion brilla dans son regard et il dénoua enfin ses doigts pour poser ses mains sur son bureau.

-Bien sûr, vous avez raison. Un jour il se révélera au grand jour, jouissant de la préparation accordée par l'attentisme du Ministère et de l'effet de surprise, et notre monde s'en trouvera de nouveau chamboulé. Et bien sûr, les enfants de moldus comme vous l'êtes devront être les premiers les plus vigilants, mais ne voyez pas cela comme la priorité de Voldemort. Il y a quatorze ans, les attaques contre les moldus et nés-moldus étaient nombreuses, certes, mais le principal pour lui était d'agir contre le Ministère : de l'infiltrer pour pouvoir un jour le renverser, et de détruire les résistances qui s'organisaient contre lui. Il lui fallait cette guerre avant d'instaurer le règne de terreur contre les nés-moldus, et il n'y ait parvenu que partiellement parce qu'il n'avait pas le contrôle des institutions. Alors tant que ce sera le cas, Victoria, ne vous affolez pas de votre condition d'enfant de moldu. Vous ne serez pas plus en danger que n'importe quel sorcier sur cette terre qui s'opposera à Lord Voldemort.

Je fronçai les sourcils, assez surprise par la façon dont Dumbledore présentait les choses. Lentement, je me fis une idée de ce à quoi pourrait ressembler cette guerre, puisant dans ce que je savais de la première et de mes connaissances concernant Grindelwald. Dans un premier temps, la guerre de l'opinion : rassembler des partisans, s'attirer une foule conciliante et réceptive à ses idées. Ensuite, la guerre de pouvoir : prendre le pas sur le Ministère pour prendre le contrôle du pays. Enfin, quand ce jour funeste serait arrivé, appliquer les idées pour lesquelles les foules vous avez monté aux cieux. Nous n'étions encore qu'à la première phase, et je n'étais pas immédiatement en danger, pourtant la peur me prit aux trippes. Il ne fallait pas attendre que Voldemort ait pris les rênes du pays pour agir : il serait déjà trop tard pour moi. C'était dès maintenant qu'il fallait faire quelque chose, mais comment faire quand les plus hautes autorités refusaient d'écouter ? Encore une fois, je songeai à Amelia Bones, à son indécision.

-Tout le Ministère pense comme Fudge ? demandai-je après quelques instants de silence. Que Harry ment et ... ?

« Que vous êtes fou ». Je ne l'avais pas prononcé à voix haute mais Dumbledore parut comprendre. Il écarta ses mains en signe d'impuissance.

-C'est un peu partout pareil, Victoria. Comme à Poudlard, il y a des gens qui ont vu et compris les signes. Parmi ceux là il y a ceux qui se taisent parce qu'ils ont mieux à faire ou parce qu'ils ont peur de perdre leur travail, et il y a ceux qui luttent. Il s'agit d'une infime minorité, mais une minorité qui compte.

-J'ai rencontré Amelia Bones, cet été, révélai-je avec lenteur.

-Vraiment ? Une sorcière remarquable. Dans quel contexte ?

-J'habite à Terre-en-Landes, pas loin de chez son frère George Bones.

Il me semblait qu'une lueur nostalgique passa fugacement dans les prunelles de Dumbledore, mais j'ignorais à quoi elle était dû. Il m'incita silencieusement à poursuivre. Je me trémoussai, gênée.

-Simon et moi avons parlé avec elle, et ... il me semblait qu'elle se laisserait convaincre.

-Amelia est une sorcière extraordinaire et une femme très intelligente. Je n'ai rarement vu de préfète-en-cheffe aussi capable qu'elle et elle est la meilleure cheffe de la Justice Magique que nous ayons eu ces dernières années. Très personnellement, je la vois même prendre un jour la tête du Ministère, quand le temps de Fudge sera passé. Je ne suis pas surpris qu'elle envisage le retour de Voldemort comme une possibilité. Mais je crains que la famille Bones ait déjà payé un lourd tribu dans la guerre ...

-Edgar, traduis-je avec un pincement au cœur. Et sa femme, et ses deux fils. Je sais.

Les traits de Dumbledore se crispèrent un peu plus. La pluie avait fini par cesser dehors, mais les fenêtres ruisselaient encore des larmes qu'avait déversées le ciel.

-Aout 1981, précisa le directeur avec une infinie tristesse dans la voix. Edgar était aussi exceptionnel que peut l'être Amelia, et Cassiopée ... était une sacrée tête de mule. Matthew l'était aussi, personne n'a été surpris quand il a été réparti à Gryffondor comme sa mère, et le professeur McGonagall et moi présagions que vous aurions beaucoup de mal à tenir cet enfant ... Finalement, j'aurais préféré avoir ce mal.

-C'est vrai que Matthew était encore à Poudlard ... 

-Au moment où il a été tué, il venait de finir ses études, oui. Un garçon turbulent, mais assez attachant et très social. Une langue acérée. Parfois, votre ami Simon Bones me le rappelle un peu.

-Ah.

Je m'étais figée, les mains tordues sur mes genoux telles des serres blanchies par la crispation. Plus j'en apprenais sur ses garçons, plus quelque chose se creusait en moi, comme une perte que je n'avais pas connue, mais que je ressentais tout de même. Matthew Bones. Gryffondor. Turbulent. Attachant. Et quelque chose de Simon. Peut-être que dans une autre vie, j'aurais pu le connaître, lui et son frère Spencer. Dans une autre vie, ils auraient été les cousins en vie de Simon. Spencer était âgé de huit ans à sa mort, soit cinq ans de plus que nous : je l'aurais connu à Poudlard, et Matthew serait sans doute souvent venu à Terre-en-Lande visiter son oncle et sa tante. Je les aurais connu comme Simon avait plusieurs fois vu ma cousine Marta, que nous associons à nos jeux lorsqu'elle nous visitait. Songer à Marta appela un autre visage à mon esprit, et l'angoissa chassa la profonde mélancolie dans laquelle j'étais plongée. Je rivai à nouveau mon regard sur le directeur.

-Si ça ne vous dérange pas ... quand les choses ... changeront de manière radicale, pourriez-vous me tenir au courant ? D'une manière ou d'une autre ?

-Cela va de soi, Victoria.

-Bien. Merci. Alors dans ce cas nous pourrons peut-être passé à ... l'autre sujet.

-Votre grand-père, explicita Dumbledore d'un ton léger.

Un coup étouffé vint frapper mon estomac mais je m'efforçai de garder contenance. Maintenant que la conversation s'orientait vers un sujet qui était sans doute pour lui de moindre gravité, les rides de son visage qui me paraissait si creusées parurent se détendre et s'effacer, et il redevint le vieux sage sans âge tel qu'il m'était toujours apparu. Une image rassurante, mais qui n'était pas sans me rappeler celle de mon grand-père.

-Vous ... vous avez eu le temps de faire des recherches ?

C'était une phrase lancée sans espoir : je me doutais pertinemment que Dumbledore avait eu des choses autrement plus importantes à songer qu'à l'histoire d'un certain Miroslav Liszka. Mais il me surprit en acquiesçant.

-Quelques unes, oui. C'est peu, mais j'ai pu apprendre que l'ancienne Ministre de la Magie polonaise Dominika Liszka avait deux jeunes frères : Aleksy a été tué par une foule en colère immédiatement après la chute de Grindelwald, et Miroslav, dont on perd totalement la trace vers 1949. Vous savez en quelle année est né votre grand-père ?

-1925, répondis-je après un long instant de calcul. Ou peut-être 1926 ... Oh. (Je venais de remarquer le regard long et entendu de Dumbledore sur moi). Les dates correspondent, c'est cela ... ?

-Effectivement. Le Miroslav dont je parle est venu au monde le 4 septembre 1925.

Mon esprit tangua, déboussolé. C'était la date d'anniversaire de mon grand-père. Il se plaignait tous les ans que je ne puisse être présente car je prenais le train le premier jour de septembre. Mais chaque année ma première lettre était pour lui, et lui fêtait cette année de plus qu'il avait passé à nos côtés. Dumbledore dut remarquer mon trouble, car un triste sourire s'étira sur ses lèvres.

-Vos dates correspondent-elles aux miennes ?

-Oui ..., admis-je en un souffle.

-Et je suppose que vos grands-parents ont émigré en Angleterre vers 1949 ?

-Ma mère est née en 1950, et ils étaient en Angleterre depuis quelques temps, avouai-je, vaincue. Ils nous ont toujours raconté qu'ils ont quitté la Pologne pour fuir le Communisme et tout ce qu'il imposait, vivre dans un monde meilleur et plus libre et ... oublier la guerre.

-Je pense qu'oublier la guerre devait être l'une de leurs principales préoccupations, effectivement Victoria. Il ne vous pas menti là dessus. Si votre grand-père est en effet le sorcier que nous pensons qu'il est, il avait à peine vingt ans au moment où j'ai vaincu Grindelwald – et il faut que vous sachiez que les dix dernières années étaient dans doute les plus dures, les plus cruelles et les plus sanglantes de son règne.

Au moment où, côté moldu, l'Europe et le monde se déchirait entre impérialisme, racisme, libéralisme et espoir, songeai-je distraitement. Deux mondes, deux miroirs, une balance. Quand un poids était mis sur un plateau, l'autre en était mécaniquement modifié.

-Et ma grand-mère était juive, ajoutai-je, sans savoir pourquoi. Elle a survécu à Auschwitz, je ne sais pas si ...

-Je sais parfaitement ce qu'est Auschwitz, Victoria, m'interrompit Dumbledore d'une voix qui s'était faite plus dure. C'était vraiment une sombre période, que ce soit du côté moldu, ou du côté sorcier.

J'acquiesçai en silence. Ma grand-mère avait toujours été d'une avarice effrénée en ce qui concernait son passage dans le plus grand centre de la mort construit par les nazis, et nous n'avions que comme marque de son passage cette sinistre série de chiffre tatouée sur son bras. Mais maintenant que j'y réfléchissais et que la possibilité que mon grand-père soit un sorcier grandissait, je me demandais s'il n'avait pas quelque chose à voir avec sa survie miraculeuse dans un camp où tout était étudié pour qu'un détenu survive au maximum six mois. Toute la famille de ma grand-mère y était morte, et pourtant elle était toujours là.

-Peut-être que mon grand-père l'a sauvé, réfléchis-je à voix haute, avant d'ajouter amèrement : mais ça ne l'a pas empêché de tuer une mère devant sa fille avant.

-Ah, cette fameuse histoire qui vous a valu les griefs de miss Kamila Tokarsky ... J'ai également retrouvé sa trace. Après la guerre, Marceij Liszka, le père de Miroslav et Ministre de la Magie polonais, a décidé de punir tous les crimes dû au règne de Grindelwald – crimes perpétré avec son entier consentement, et même souvent de son propre fait, mais vous remarquerez qu'il est plus aisé de charger un homme déjà condamné, n'est-ce pas ? C'est ainsi que l'affaire de notre amie Tokarsky a été jugé par une cour exceptionnelle pour punir ces crimes, et que j'ai par ces archives pu retrouver la trace d'un homme qui se trouve actuellement dans la prison d'état de Grindelwald, Nuremgard, Roman Dambek. Il a été emprisonné pour le meurtre d'une certaine Agata Tokarsky et de l'estropiassions de sa jeune enfant.

-Mais Kamila a dit ...

-Oui, mais vous vous doutez que le Ministre de la Magie de l'époque, Marcej Liszka, n'allait pas mettre son jeune fils en prison. Son premier fils avait déjà été assassiné ... Non, il y a envoyé un subalterne, qui a participé à l'opération dans les alentours de Gdansk qui devait permettre d'arrêter des rebelles, a sans doute commis de terribles forfaits et ne manquerait à personne une fois en prison. En remerciement, on lui évite simplement la peine de mort. Enfin, c'est ce qui est ressorti de mon entretien avec ce cher Roman.

-Vous avez été jusqu'à Nuremgard ?

J'étais estomaqué de l'apprendre, mais Dumbledore se contenta de pencher humblement la tête et balaya ma consternation d'un geste de la main.

-Je m'étais rendu en Allemagne pour les affaires que nous connaissons, Nuremgard n'est pas un détour, loin de là. Ce fut même particulièrement instructif ... à bien des égards.

Les rides se creusèrent encore plus encore sur le visage de Dumbledore et une nouvelle fois j'eus l'impression qu'il se transformait en vieillard sous mes yeux, et qu'il était écrasé par le poids des années et des souvenirs. Puis l'impression passa, et quand il me sourit d'un air fin, il redevint le tout-puissant directeur de Poudlard, l'homme qui avait mis Grindelwald à genoux et maintenait Voldemort à distance.

-Mes informations vous satisfont-elles ?

-Bien, elles m'apprennent que mon grand-père a probablement tué une femme il y a cinquante ans, estropé sa petite fille, et laisser quelqu'un aller en prison à sa place, lâchai-je avec un goût amer dans la bouche. Et quand bien même mon grand-père et cet homme aurait la même date de naissance, et seraient partis au même moment de Pologne, rien n'explique pourquoi ma mère et sa sœur sont des moldues alors qu'il serait un sorcier.

-Votre dernier mystère, admit Dumbledore en inclinant la tête. Mais ce mystère là, seule vous pouvez le résoudre. Vous rentrez bien à Terre-en-Landes pour Noël ?

-Euh ... Sans doute.

-Et vous fêterez sans doute Noël en famille ? Avec vos grands-parents ?

Je hochai la tête à contre cœur. Nos Noëls étaient soigneusement organisés avec un repas de réveillon avec mes grands-parents maternels et un passage par la messe de la Nativité prodiguée par mon père vers minuit, et nous visitions le lendemains Miro et Jaga dans leur maison au bord de la mer, non loin de Bristol. Mon cœur dévala ma poitrine. Seigneur, Dumbledore avait raison.

-La confrontation me semble donc inévitable, conclut Dumbledore avec un léger sourire. Puis-je vous conseiller de dénouer tout cela avant les fêtes, afin ne pas gâcher votre Noël avec de telles explications ?

-Professeur ... (Poussée à bout, je me pris la tête entre les mains). J'en suis incapable, je ... Je l'ai croisé cet été, j'aurais pu, j'aurais dû essayer de tirer le vrai du faux, quitte à l'oublietter si je me trompais mais ... je suis une fuyarde, je préfère fuir qu'avoir à faire face à ce genre de situation. Je ne me sens pas capable de gérer un truc pareil ...

Je détournai le regard, honteuse de ma lâcheté. Mais j'avais toujours fonctionné ainsi : une fois que la peur s'éprenait de moi, je fuyais le problème comme la peste. J'avais fui Miles parce que j'avais peur des sentiments que j'éprouvais pour lui, par exemple. Maintenant je fuyais mon grand-père, parce que je me savais incapable de contenir si je me trouvais de nouveau face à lui, et que j'avais une trouille monstre de ce qu'il pourrait bien me révéler.

-Allons Victoria ... Vous n'allez pas pouvoir fuir votre grand-père toute votre vie, non ?

Je relevai le regard, adoucie par la compassion que j'avais entendue dans la voix du directeur. Son regard était doux, son sourire compréhensif : il ne me jugeait pas d'être lâche.

-Votre peur est naturelle, me rassura-t-il. Comme l'a été celle qui vous a envahi le soir où vous avez brûlé Nestor Selwyn. Mais pour éviter une catastrophe comme celle-ci, prenez les devant, et maitrisez votre peur, Victoria. Allez au devant d'elle, prenez la par les cornes pour enfin l'annihiler. Car tant que vous n'auriez pas réglé ce problème, la peur vous rongera chaque jour un peu plus, grandira et un jour vous ne saurez plus la maitriser, et il arrivera des catastrophes, comme ce fameux soir du cinq novembre. Vous ne trouvez pas qu'il vaudrait mieux l'extirper le plus tôt possible ? Disons, ce Noël ?

J'ignorais si c'était ce sordide rappel de ce qu'il s'était passé cinq ans plus tôt, ou cette échéance qui me semblait à la fois si proche et si loin, mais je me sentis complétement blêmir. Devant mon émoi, Dumbledore leva une main douce mais ferme et poursuivit :

-Vous avez le temps, Victoria. Il vous reste deux mois, prenez le temps de réfléchir à toutes les possibilités et ne restez pas seule face à cela. Vous avez parlé de cette affaire à quelqu'un ?

-Simon. Simon Bones.

Un sourire presque attendri se dessina sur les lèvres de Dumbledore, qui hocha la tête avec approbation.

-Bien. Alors s'il est ... le digne neveu d'Edgar, gageons qu'il sera de bon conseil avec vous.

-Oh, je sais déjà qu'il ira dans votre sens, mais il est plus courageux que je ne le suis. Ce n'est pas pour rien que le Choixpeau a failli l'envoyer à Gryffondor.

-Oh, vraiment ?

Je hochai la tête, assez gênée d'avoir laissé échapper cette information personnelle. Ce n'était certes plus un secret que le Choixpeau ait longuement hésité entre Poufsouffle et Gryffondor pour Simon, cela restait quelque chose qui lui était propre et une information dont il pouvait disposer à sa guise. C'était assez déloyal de ma part d'en faire part au directeur, qui s'était fendu d'un sourire étrange.

-Aah. Alors peut-être le digne neveu de Cassiopée. Bref, parlez-en avec lui. N'oubliez pas que vous n'êtes jamais seule dans ce que vous entreprenez, Victoria et qu'à Poudlard, une aide sera toujours apportée à ceux qui la demandent. Maintenant, sans vouloir vous mettre dehors, j'ai une conférence de cheminée qui commence dans ... (il tira une montre à gousset d'argent de sa robe et la consulta) deux minutes, alors je me vois contraint de mettre fin à cet entretien.

-Je comprends, lançai-je en me dressant précipitamment sur mes pieds. C'est déjà très gentil de m'avoir reçu, et d'avoir récolté toutes ses informations, je vous remercie vraiment, professeur ...

-Si vous voulez vraiment me remercier, parler à votre grand-père et résolvez les derniers mystères de cette affaire. Je suis assez curieux d'avoir le fin mot de cette histoire.

-J'essaierais, promis-je en chargeant mon sac sur mon épaule. Encore merci, professeur et ... Bonne conférence de cheminée.

Un léger rire secoua la poitrine du directeur et il se leva pour m'accompagner jusque sa porte qu'il m'ouvrit en un geste galant. Je me retrouvais devant l'escalier de colimaçon et m'apprêtait à poser le pied sur la première marche lorsque la voix de Dumbledore s'éleva de nouveau :

-Victoria ?

Je fis volte-face, et ramenai précipitamment mon pied contre l'autre avant que l'escalier ne s'anime et ne m'aspire vers le bas. Dumbledore, tenant toujours la poignée de sa porte dans sa main, me fixait d'un regard intense qui me figea sur place.

-Lorsque nous nous sommes parlés au terrain de Quidditch l'année dernière, vous sembliez déterminée à vous battre en mémoire de votre ami Cédric Diggory. Est-ce toujours le cas ?

Mes doigts se crispèrent machinalement sur la lanière de mon sac. Je me souvenais parfaitement du feu de la révolte qui m'avait envahi lorsque j'avais compris que Cédric était l'une des premières victimes de Voldemort, et que celui-ci en ferait beaucoup d'autre – et j'avais plus particulièrement songé à ma famille. Si j'admettais que le courage n'était pas ma première qualité, je refusais de rester inactive face à l'homme qui m'avait pris Cédric et menaçait ceux qui m'étaient chers.

-Si votre question est : est-ce que je compte attendre sagement que Voldemort vienne me prendre ma baguette et tuer mon frère et mes parents, la réponse est non. Si je peux faire quelque chose pour arrêter sa progression, je le ferais, même si je doute d'être d'un quelconque danger.

Dumbledore continua de me fixer longuement de ses yeux graves, avant de hocher la tête avec une certaine solennité.

-C'est bon à savoir, Victoria. Bon courage.

Et il referma la porte sur moi après un dernier salut du chef. Le verrou d'activa avec un bruit métallique qui retentit sèchement dans la cage d'escalier. Je croisai mes bras sur mon ventre où mes entrailles s'étaient nouées. Trop de pensée se bousculaient dans ma pauvre tête, et je me forçai à me calmer avant de poser le pied sur la première marche. L'escalier s'activa et m'avala vers le bas, et me fit quitter le monde savoureux des informations. 



Je ne sais pas à qui j'ai piqué la "conférence de cheminée", à Anna je pense, mais je suis sûre que c'est du piquage manifeste. 

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