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II - Chapitre 30 : Ce que l'on fait par amour

BONJOUR A TOUS ! 

Je me prépare à deux jours de voyage pour rentrer de Toscane donc je préfère poster maintenant l'avant-dernier chapitre de la deuxième partie maintenant ! J'espère que vous avez passé de bonnes vacances ! 

Donc on s'approche de la fin. La troisième partie avance pas à pas - sachant qu'avant, je posterais un bonus en trois partie. Donc promis, vous vous ne retrouverez pas sans rien ! 

Je ferais sans doute un bilan dans deux semaines - du même style que j'ai fait dans Lucy. Normalement c'est à la fin mais ... je pense pas que vous vous souviendrez des deux premières parties à la toute fin ahah ! 

ALLEZ, bonne lecture ! 


Chapitre 30 : Ce qu'on fait par amour.

C'était incroyable. Incroyable comment le changement d'une seule personne pouvait changer l'ambiance d'un endroit.

Dumbledore était revenu et l'humeur de l'école s'en ressentait. C'était comme si la lumière avait fendu le brouillard et que le monde était redevenu en couleur. Tous les décrets avaient été annulés, Ombrage était calfeutrée à l'infirmerie, et la vie reprenait ses droits au sein des vieilles pierres du château. Même McGonagall après les soins à Ste Mangouste était de retour, appuyée contre une canne, mais l'air toujours aussi digne et revêche et son apparition dans la Grande Salle lui avait valu un tonnerre d'applaudissement. Il avait fallu attendre la dernière semaine, mais je retrouvais enfin le Poudlard que je connaissais et cela coulait en moi comme une source régénératrice. Dans ce cadre idyllique où la joie et l'espoir faisaient loi, difficile de croire que dehors, le monde se déchainait. Le seul indice était Harry Potter, qui semblait hanter le château comme une âme en peine depuis son retour du Ministère de la Magie, où, d'après les rumeurs, il avait de nouveau affronté son ennemi juré et révélé enfin son existence au monde entier. Les fils du destin entre eux deux semblaient se resserrer d'année en année de façon inexplicable. Autour de moi, les gens murmuraient, se demandaient ce qui poussait le Mage Noir à détruire par tous les moyens possibles ce garçon. Un mystère qui s'épaississait et qui rendait l'aura autour de Harry encore plus nébuleuse.

Fudge avait fini par publiquement admettre son erreur : Lord Voldemort était de retour. Les résistaient qui avaient suivi l'aveuglement du Ministère en étaient tombés des nues et même ceux qui avaient fini par croire Harry avaient accusé le coup. C'était une chose quand la menace était à peine perceptible, c'était autre chose de la voir étalée en Une de La Gazette. Emily nous évitait depuis avec un soin tout particulier. Roger m'avait avoué qu'elle avait honte, honte d'elle, honte des propos blessants qu'elle avait pu sortir, honte de ne pas nous avoir cru. Elle n'osait tout simplement plus nous regarder en face après cette immense désillusion. J'avais décidé de lui laisser le temps et avait forcé Simon à faire de mêmes. Ce n'était pas une gloire d'avoir eu raison. A présent, c'était à elle de faire le point, et ça prendrait du temps. J'avais d'autres choses à me préoccuper que les états d'âmes de mon amie.

Plus le temps avançait, plus je songeais sérieusement à accepter la proposition de Dumbledore concernant l'Ordre du phénix. J'avais beau garder une sorte d'amertume à l'idée qu'il ait utilisé mon histoire pour atteindre mon grand-père, j'avais besoin de cette activité. J'étais préparée à l'éventualité depuis près d'un an et Simon depuis plus encore. La perspective m'effrayait toujours mais j'avais été rassurée de voir le calme de Simon et je ne voyais pas d'autre manière de m'engager dans la lutte. Le Ministère n'avait rien fait pendant un an et avait été inefficace pendant la première guerre : il faudrait passer outre.

Simon et moi avions tenté de deviner à quels autres élèves de notre année Dumbledore avait bien pu faire la proposition. Les jumeaux Weasley avaient dû être contactés, peut-être également Roger qui semblait bien silencieux depuis quelques jours ou Angelina qui paraissait irritable ... Et bien entendu, en tête de notre liste demeurait Renata Morton, qui depuis la fin des épreuves et le retour officiel de Voldemort s'était encore plus enveloppée dans le mutisme et la solitude, écartant même sa sœur jumelle. Mais le 24 juin, un an jour pour jour après la mort de Cédric et alors que je me dirigeais avec un bouquet de fleur vers le terrain de Quidditch, je l'avais croisé sur les gradins, solitaire, la tête basse. Déposant les fleurs au centre de la pelouse, je l'avais laissée à son recueillement – et à sa réflexion. Pour elle comme pour Emily, j'avais fini par comprendre que j'étais inutile. Seul le temps et silence l'était.

Mes essais arrivèrent dans ce moment confus. J'avais passé la journée à sillonner l'Angleterre, mon sac sur l'épaule et le balai de Judy dans une main. Durant le week-end, je m'étais entrainée dur avec Angelina, Roger, Alicia, Evelyn et même Smith et je volais chaque jour sur le balai de Judy. Le rythme injecté fut salvateur : j'eus l'intuition d'avoir réussi les tests. Je n'avais pas d'idée réelle sur le niveau attendu et les entraineurs de chaque équipe n'avaient pas laissé filtrer la moindre information. Mais j'avais donné le meilleur dont j'étais capable, presque mon maximum et j'arrivai chez mes grands-parents totalement rincée, vidée, courbaturée. Les délicieux sablés de Jaga ne suffirent pas à me donner de l'énergie et je laissai mon grand-père lire La Gazette de la veille à voix haute :

La déclaration du ministre a été accueillie avec consternation et inquiétude par la communauté des sorciers qui, pas plus tard que mercredi dernier, recevait du ministère l'assurance qu'il n'y avait « aucune espèce de vérité dans les rumeurs persistances selon lesquelles Vous-Savez-Qui se manifesterait à nouveau parmi nous ». Rah, ça vous apprendra à élire un imbécile ... Mettez Dumbledore à la tête du pays, quel meilleur homme pour lutter contre votre magicien de pacotille que le vainqueur de Grindelwald ?

-Arrête de faire la comparaison tout le temps, ce n'est pas la même guerre, répétai-je pour la dixième fois depuis que j'étais arrivée. Voldemort n'est pas assez fou pour chercher la confrontation avec Dumbledore comme l'a fait Grindelwald, bien au contraire, il est plus insaisissable, c'est un serpent de fumée. D'ailleurs, je ne suis pas sûre que Dumbledore veuille quitter l'école, il est bien où il est.

Miro parut dubitatif. Après avoir achevé l'article qui finissait sur une hypocrite éloge de Harry, il replia le journal en deux et le repoussa.

-Boh, des conneries, tout ça. Et le pire c'est qu'il ne parle absolument pas de démissionner ... On a une idée de ce qu'il s'est passé dans le Département des Mystères ?

-Pas vraiment. Apparemment, Harry Potter devait y aller, il a emmené un groupe d'élève avec lui et ils sont tombés sur des Mangemorts ... Voldemort a fini par les rejoindre. Après, le pourquoi du comment, Dumbledore a été avare de détail dessus ...

-Hum ... Il doit exister des choses étranges au Département des Mystères ... Peut-être que Voldemort voulait s'adjuger une nouvelle magie, une nouvelle technologie qui y avait été développée ...

Je l'écoutais à peine. Je feuilletais La Gazette de vendredi et j'étais retombée sur un article noyé dans la masse d'information qui annonçait la mort de Sirius Black, le partisan de Voldemort et qui avait causé la mort de treize moldus. Cette annonce était presque passée inaperçue face au retour du Mage Noir, et malgré tout, je trouvais le journal étrangement sobre et discret sur la fin d'un feuilleton qui avait défrayé la chronique. Rien n'était dit sur les circonstances de sa mort et je ne pouvais m'empêcher de songer que cela avait un rapport avec ce qui s'était passé au Ministère jeudi soir.

-En tout cas, il n'a pas réussi, intervint Jaga d'un ton cassant. Maintenant peut-on parler d'autre chose ?

-Ouais, approuvai-je en repliant le journal. Où est Alex ? Je pars dans une heure, moi ...

Alexandre devait me rejoindre ici avant que je ne retourne à Poudlard. Chourave m'avait prévenu que je pouvais faire ce que je voulais de mon temps, du moment que ça comportait les essais et que j'étais de retour à l'heure convenue. Mes parents étant tous deux occupés aujourd'hui, j'avais décidé de me faire violence et de rendre visite à Jaga et Miro. J'avais failli défaillir lorsque Miro m'avait ouvert d'un coup de sa nouvelle baguette magique achetée au Chemin de Traverse qu'il avait découvert avec George Bones. Elle était en bois de vigne et contenait une plume de phénix, ce qui était presque à l'opposée de la première baguette qu'il avait acheté avant son entrée à Durmstrang. C'était pour lui le signe définitif qu'il n'était plus le même homme et il avait pu s'adonner au réapprentissage de la magie en toute quiétude. Dumbledore avait raison, il avait gardé quelques excellents réflexes dans la gestuelle, mais il se trouvait obliger de prononcer toutes ses formules et de s'entrainer sur les sortilèges les plus complexes. Si sa tentative de patronus n'avait pas été une franche réussite – mais il m'avait avoué à mi-voix qu'il n'avait jamais réussi à faire apparaitre un patronus corporel – mon colibri avait grandement intrigué ma grand-mère. Je voyais que cette magie utilisée à tort et à travers la troublait, mais elle s'efforçait de s'y intéresser pour atténuer l'appréhension.

-Il devait repasser chez lui se changer avant de venir, je crois, me répondit Jaga en me resservant du thé.

-Et vous avez réussi à lui faire arrêter l'envoi des lettres à Mel ?

-Je pense, affirma tranquillement ma grand-mère. On l'a invité plusieurs fois et on a beaucoup parlé, y compris d'elle ... Je pense qu'il a compris que pour leur bien à tous les deux, il valait mieux qu'il la laisse partir.

J'acquiesçai, la gorge compressée. Puis mon regard se porta sur notre portrait de famille au-dessus du canapé et mon cœur se serra davantage.

-Vous avez parlé à tante Beata ?

Les doigts noueux de Jaga se crispèrent sur sa tasse et elle échangea un long regard avec Miro.

-Pas encore. Elle sort de maladie ... Ta mère nous a demandé d'attendre, d'attendre qu'elle-même intègre totalement la réalité.

-Ça n'a pas été trop difficile ? D'en parler à maman ?

Miro poussa un grognement d'ours qui m'arracha un sourire et caressa sa barbe mal taillée.

-Evidemment que ça a été dur. Mais étrangement, elle m'a très vite cru, très vite assimilé – apparemment, elle savait déjà que je n'étais pas son père ... Mais le pire a été quand j'ai évoqué Agata. Ça, je pense qu'Edward ne me l'a pas pardonné, à dire vrai et il ne le fera pas. Je ne le blâme pas, je ne me pardonne pas moi-même ... Mais les parents du moustique étaient là, ils m'ont aidé, notamment concernant l'utilité que je reprenne la magie.

-Simon, rectifiai-je avec un vague sourire amusé. Le moustique s'appelle Simon.

Mais à présent que j'y songeais, il y avait une certaine ressemblance entre Simon et le jeune « Moustique » de Merlin l'Enchanteur. Mon grand-père eut un vague mouvement d'épaule.

-Hum. Il a appris à fermer son esprit, lui ?

A dire vrai, Simon s'intéressait de très près à l'occlumencie depuis qu'il s'était retrouvé face à Miro, son esprit mis à nu, dénué de la moindre protection. C'était quelque chose qui l'avait effrayé et je pensais qu'il était terrifié à l'idée de rencontrer à nouveau mon grand-père. J'assurai à Miro qu'il essayait et il se fendit d'un grognement satisfait. Je consultai ma montre. J'avais devoir songer à rentrer à Poudlard, mais j'aurais aimé voir mon frère avant ... J'avais beau fini les cours dans moins d'une semaine, je voulais tout de même m'assurer qu'il allait bien.

-Je vais aller chez Alex, décidai-je en me levant. Si je l'attends, je vais arriver en retard à l'école.

-Aucun problème, perelko, fit ma grand-mère avant de se redresser à son tour. Je vais te préparer des sablées et une gamelle pour lui, il mange mal en ce moment.

Elle disparut dans la cuisine et mon grand-père la regarda faire amoureusement, un sourire entendu aux lèvres. J'avais craint que la révélation sur sa véritable nature ne fasse voler la famille en éclat, mais c'était tout le contraire qui s'était produit. Face à la menace imminente, nous nous étions tous resserré les uns sur les autres. J'y voyais la preuve que Miro et Jaga, malgré leurs mensonges, avaient bâti une famille solide, unie, solidaire. Si elle pouvait survivre à cela, alors rien ne pourrait l'ébranler. Et alors que je constatai cela, une grande quiétude s'empara de moi. Mon monde qui avait paru tanguer si fort qu'il allait s'en écrouler se stabilisait de nouveau, pilier par pilier. Et c'était grâce à cette force que je pourrais rester debout face à la guerre qui se profilait. Jaga revint de la cuisine avec trois gamelles pour Alexandre et une boite en fer contenant les sablée, et mon grand-père me raccompagna sur la plage.

-Je ne préfère pas encore transplaner, m'apprit-t-il d'un ton bourru. Je n'aimais déjà pas ça avant ...

-Ça va revenir, c'est comme tout. Tu étais un grand sorcier et qui sait, peut-être que maintenant que tu es en plus en paix tu réussiras des choses que tu n'avais jamais atteintes en Pologne.

Miro m'adressa un sourire en s'immobilisant. Le vent emmêlait sa crinière grise qu'il n'avait pas pris le temps d'attacher et il tira sur le col de sa chemise avec une grimace. Le soleil brillait sur cette partie de l'Angleterre et laissait présageait un été agréable.

-Et toi, perelko ... Tu sais combien de sorciers meurent sans jamais réussir à produire un patronus corporel ?

La fierté qui brillait dans le regard de mon grand-père m'embarrassa autant qu'elle me remplissait de joie. Je fis tourner ma baguette plusieurs fois dans la main, résistant à la tentation de faire de nouveau apparaitre le colibri d'argent qui m'avait prouvé que, même magiquement, j'étais capable de grandes choses.

-Je ne sais pas comment j'ai fait, je t'avoue ...

-Tu y étais prédisposée. Comme l'occlumencie et les sortilèges informulés, ce sont deux arts magiques qui demandent une grande force mentale et un grand contrôle de soi. Le patronus, lui, réussit bien aux personnes au cœur pur qui se battent pour de nobles idéaux. Si tu ne corresponds pas à cette description alors je veux bien casser ma baguette de nouveau.

Un léger rire me secoua et je souris à mon grand-père. Une partie de moi m'aliénait encore et m'empêchait d'être totalement naturelle, de l'enlacer comme j'aurais envie de le faire ... Mais elle s'amenuisait de jour en jour. Je n'avais pas de place à donner au doute et à la méfiance dans les jours qui venaient. Nous restâmes un moment immobile l'un en face de l'autre, figé face à ce mur invisible qui se dressait toujours entre nous.

-Si on va à Cracovie cet été, entonnai-je lentement, tu viendras ?

Miro se raidit et une flamme embrasa ses iris. J'avais prévu cette réaction : la Pologne était le berceau de douloureux souvenirs pour lui. Et, contrairement à Jaga, il risquait de croiser à Cracovie des anciennes connaissances, des sorciers et des sorcières qui le croient morts depuis près de cinquante ans. Je comprenais qu'il soit réticent à faire le voyage.

-Je vais y réfléchir, Perelko, promit-t-il d'une voix lente. Mais comprends bien que ma sœur, ses enfants et ses petits-enfants vivent encore là-bas, le centre politique sorcier se trouve encore à Cracovie ...

-Je comprends. C'était juste ... pour savoir. Mais on aura le temps d'en rediscuter. A plus, papy.

Je gratifiai mon grand-père d'un signe de la main avant de reculer d'un pas. Comprenant ce que j'allais faire, je vis une pointe d'envie transpercer son regard alors que je tournai sur moi-même. Ma magie m'emporta dans ce désagréable tube qui me broya et m'empêcha de respirer durant quelques secondes et je me retrouvai haletante dans la ruelle adjacente à l'immeuble d'Alexandre à Bristol. Grimaçant face à la douleur de mes muscles qui avaient été réveillés par l'exercice, je me mis difficilement en marche, dissimulant mon balai tant bien que mal le long de mon corps avant d'entrer dans l'immeuble. Il régnait dans les rues un indéniable parfum d'été. En cette douce chaleur de juin, les gens en profitaient pour ouvrir les fenêtres et sortir les jupes et sandales. J'entendais même des rires gars et sonores en provenance du toit de l'immeuble d'Alexandre, trahissant la présence de jeunes profitant du beau temps. J'avais eu l'occasion de voir la moto de mon frère garée dans la rue, solidement accrochée entre quelques vélos et ce fut assurée de le retrouver dans son appartement que je pris l'ascenseur. J'étais incapable de monter jusqu'au troisième étage ainsi et je me fis vaguement la réflexion en entonnant mon ascension qu'il faudrait que je m'habitue à une vie faite d'effort physique à présent que je me dirigeais vers le Quidditch. Ce ne serait plus des matchs trois fois par an, mais tous les mois juègvv, avec des entrainements presque tous les jours de la semaine. Un rythme harassant pour lequel il faudrait que je me refasse une santé. J'étais en train de préparer mentalement un planning de remise en forme lorsqu'une fille me heurta de plein fouet dans le couloir, me faisant lâcher mon balai et mon sac d'affaire et réactivant toutes mes douleurs musculaires. Je raffermis au dernier moment ma prise sur la pile de gamelle que m'avait confiée ma grand-mère et évitai que ses rognons de bœuf ne finissent par tapisser le sol.

-Aïe !

-Mon dieu je suis désolée, je ne voulais pas, c'est juste ...

La fille s'arrêta de babiller en posant les yeux sur le balai que j'avais précipitamment ramassé, rouge de gêne. Puis nos regards se croisèrent et nous nous figeâmes toutes deux.

-Mel ?

-Victoria ? Mais qu'est-ce que tu fais ici, tu devrais être à Poudlard !

Et elle ne devrait pas être là, songeai-je avec une certaine colère. Pourtant, c'était bien Melania Selwyn qui se tenait devant moi, sa longue chevelure châtain ramenée en une tresse sur son épaule et baguette à la main. Ses yeux gris luisaient dans la semi-obscurité du couloir et elle me paraissait fort agitée. Perplexe, je levai la main qui tenais mon balai.

-Je suis libérée pour des essais de Quidditch. Et toi, qu'est-ce que tu fais ici ?

Le ton accusateur rembrunit Melania et elle jeta un regard nerveux par-dessus son épaule. Elle n'avait même pas pris la peine de s'habiller comme une moldue et portait une légère cape d'un mauve sombre à attache d'or. Elle parut hésiter quelques secondes jusqu'à ce que les larmes lui montent aux yeux.

-Je ... je ne sais pas si Ulysse t'a parlé des lettres ...

-Si, mais je pensais que c'était réglé ...

Le silence de Melania fit lentement monter la peur en moi. Mes doigts se crispèrent fort sur mon balai que mes jointures en blanchirent.

-Mel, lâchai-je d'une voix résolument calme, c'est réglé, pas vrai ?

Mais Melania plaqua une main contre sa bouche en fermant les yeux, étouffant ce qui semblait être un gémissement angoissé. Mon cœur manqua un battement et je voulus la dépasser pour m'élancer dans le couloir qui menait à l'appartement de mon frère. Mais elle m'attrapa fermement par le bras, le visage défait.

-Je suis déjà allée voir. Sa porte est grande ouverte, les clefs sont sur la serrure mais ... il n'est pas à l'intérieur ...

Une larme dévala la joue de Melania.

-C'est Nestor ... Il est entré dans ma chambre, il a découvert les lettres, il a compris ... Je suis tellement désolée, j'ai été si idiote ...

L'angoisse courut si rapidement mes veines que je m'en trouvais paralysée, la bouche béante et l'esprit figé. Le souffle coupé, je m'appuyai contre le mur, tentant désespérément de mettre de l'ordre dans mes pensées qui s'embrouillaient depuis plusieurs secondes, couvrant divers scénarios. Chaque image pompa l'adrénaline et l'effroi en moi.

-Tu penses ... tu penses qu'il ... ?

Melania acquiesça. Elle se tordait les mains si fort que ça devait en être douloureux.

-Je suis venue dès que j'ai pu ... Je suis rentrée du Ministère et j'ai vu notre elfe de maison brûler les lettres, elle m'a dit que c'était Nestor qui lui avait demandé, qu'il venait de sortir... (elle plaqua ses mains contre son visage). Bon sang, Victoria, je ne sais pas où ils ont pu l'emmener, où il ...

J'agrippai le bras de Melania, le cerveau surchauffant totalement pour m'éviter de sombrer dans la panique. L'odeur d'huile de moteur que dégageait Alexandre lorsque je l'avais enlacé presque deux ans plus tôt, me jurant de le protéger si un jour le partie sombre de mon monde le menaçait m'emplit douloureusement les narines. Puis ce furent des rires gras qui transpercèrent mon espace auditif et je levai instinctivement les yeux au plafond. Melania suivit mon regard avant de reporter son attention sur moi. Ses prunelles luisaient d'effroi mais aussi d'une furieuse détermination.

-Tu penses qu'ils seraient montés ?

Je haussai les épaules, incertaine pour être honnête, mais je m'élançai tout de même vers la cage d'escalier que je savais mener au toit. Je n'avais pas commencé à grimper les marches que mon cœur s'arrêta net de battre : des voix indistinctes me parvenaient, ainsi que l'air doux et caressant qui s'échappait de la porte ouverte. Melania me dépassa prestement et je laissai tomber mes affaires dans l'escalier pour la suivre. Elle avait passé prudemment sa tête par l'entrebâillement, la baguette tirée. Ses yeux s'étaient asséchés et son visage étaient animé d'une telle fureur qu'il en devenait inquiétant.

-Espèce d'immonde petite pourriture ...

-Ils sont là ? Et Alex ?

Mais Melania me fit rapidement le signe de me taire et se pencha un peu plus pour tenter d'apercevoir la scène. L'angoisse grignotait mes entrailles comme un poison et je n'y tins plus : je montai jusque elle et jeta un coup d'œil sur le toit. Il me fallut quelques secondes pour m'accoutumer au soleil, mais je finis par les voir, les quelques hommes et femmes qui riaient à gorge déployée en touchant du bout du pied un corps inerte étalé sur le sol. Les battements de mon cœur se firent si assourdissant que je n'entendis plus que cela. Impossible de ne pas reconnaitre la tignasse brune d'Alexandre. Mon souffle se bloqua dans ma gorge et j'agrippai machinalement le bras de Melania. Elle serra ma main en retour et je sus que nos émotions étaient l'écho l'une de l'autre. Un seul ne riait pas. Sans doute parce que cela étirerait trop cruellement les terribles cicatrices sur son visage et annihilerait cet air de profond dégoût qui semblait animer ses traits alors qu'il fixait mon frère.

-Qu'est-ce qu'on va faire de ce sale petit rat ? s'enquit l'un des compagnons en poussant la main d'Alexandre du bout du pied. On le réveille pour jouer un peu ?

Il tourna la tête vers l'un des hommes, qui semblait plus âgé, plus mûr et plus en retrait. Grand et massif, ses cheveux blonds étincelaient sous le soleil. Malgré le soleil implacable il portait une longue cape noire dont le col était remonté sur son visage. Une grimace de dédain vint déformer ses lèvres et il se détourna lentement du spectacle.

-J'avoue que lorsque vous m'aviez dit que vous allions servir l'œuvre du Seigneur des Ténèbres, je m'attendais à mieux ... Je suis déçu.

-C'est un immonde bâtard ! protesta l'homme qui l'avait interpellé. Raconte-lui, Nestor !

-Il a souillé ma sœur, confirma Selwyn d'une voix grave et menaçante. Ce sale détritus pas même digne de torcher ses gaudasses a posé ses doigts dégueulasse sur ma jumelle, a tenté de mêler son indigne sang au mien ...

Melania fut piquée au vif par la réponse et voulut soudainement sortir de notre cachette mais je la retins par le bras, paniquée. Ils étaient cinq, dont le grand homme dont je me doutais qu'il était plus expérimenté que les jeunes, et avec cette révélation elle ne serait pas mieux considérée qu'Alexandre ... Elle avait exposé le sang pur des Selwyn à la souillure et je doutais que Nestor puisse lui pardonner l'affront. Elle me jeta un regard furibond.

-Victoria, tu as compris ce qui se passe ? Tu as compris ce qu'ils allaient lui faire ?!

Mon sang se figea dans mes veines. Bien sûr que j'avais compris, bien sûr que je l'observai comme elle cette lueur meurtrière dans les yeux de Nestor Selwyn et cet air d'avidité impatiente qui se peignait sur le visage de ses compagnons. Comme pour faire montrer notre pression, l'homme à la cape noire répondit d'un ton sec :

-Et c'est en donnant des coups de pieds que vous le punissez ? Vous pensez que c'est en jetant des sortilèges aussi minables que les vôtres que Lucius Malefoy a consenti à me présenter à notre Maître ? Vous êtes des enfants ... Vous ne méritez pas d'avoir l'infime honneur d'avoir la marque tatouée sur votre bras ...

-Toi non plus, tu ne l'as pas, répliqua une fille avec un amusement sadique.

L'homme sortit sa baguette si vite que mon œil ne put percevoir le mouvement. En revanche, j'entendis clairement le cri de douleur qui déchira l'air estival, perçant mes tempes et m'obligeant à me courber contre Melania pour échapper à ce son de pure détresse humaine, un son arraché à la chair, au tréfond de l'âme et qui semblait douloureusement résonner dans la mienne. Melania referma ses bras sur moi et ce ne fut que lorsqu'elle me serra contre elle que je compris que je tremblais. Et pourtant, c'était une parfaite inconnue qui hurlait, une inconnue qui menaçait mon frère, mais je me sentais frémir d'horreur. Puis enfin, le cri cessa enfin, et la voix de l'homme blond claqua comme un fouet :

-J'espère que tu as compris. Ce ne sont pas vos sorts d'enfant plein de bons sentiments qu'Albus Dumbledore vous a appris qui fera de vous des serviteurs de notre Maître. Par ailleurs, cette chose n'est pas l'unique responsable. C'est ta sœur Selwyn qui a trahi votre sang, ta sœur la pure sorcière qui a exposé ta famille à la dégénérescence. Si tu veux vraiment servir notre Maître c'est elle qu'il faudra punir. Si elle a pu coucher avec cette sale engeance, elle sera le refaire avec un autre.

-Le châtiment de Melania sera prévu, assura Nestor avec une sorte de fureur sourde qui rendait sa voix presque inhumaine. Mais je commencerais par lui apporter la tête de son moldu.

Je poussai un couinement de souris dans le cou de Melania, littéralement pétrifiée. Tout mon être se rebella face à l'image qui venait de s'imposer dans mon esprit, cette image sanglante et révoltante qui fit trembler mon âme. Je vous protégerais. Je vous jure que je vous protégerais. Alors pourquoi avais-je l'impression que mes jambes étaient soudainement incapables de bouger, incapable de s'arracher à la torpeur ? Melania m'avait serrée un peu plus fort contre elle, tremblante comme moi de tout son dégoût, toute sa peur, tout son amour.

-Ecoute-moi bien Victoria, chuchota-t-elle à mon oreille. Il va falloir être forte, d'accord ? On n'a pas le temps, il faut faire vite. Je vais y aller, les faire parler. Je vais te mettre sous un sortilège de désillusion, tu vas contourner la porte et te tenir prête, dès que tu as la moindre ouverture, d'accord ?

Ce fut mon cœur plus que ma tête qui hocha frénétiquement la tête contre son épaule, déterminé malgré les tremblements qui me secouaient toujours.

-D'accord ... La première qui atteint Alex transplane chez les Bones. Immédiatement.

Melania mit un certain temps avant de lentement acquiescer. Puis elle se détacha enfin de moi et leva sa baguette. Lorsqu'elle l'abattit sur ma tête, je sentis un liquide froid glacer ma peau et me rafraichir les idées, réaffirmant ma détermination. Lorsque je baissai les yeux sur les mains, elles se fondaient avec le gris terne des escaliers au sol. Melania pressa une dernière fois mon épaule et, sans attendre, s'élança hors de la cage, prenant toute la lumière sur elle en s'écriant :

-Inutile d'attendre, mon frère, je suis là !

Je ne restais pas contempler la réaction des aspirants Mangemorts – et à ce stade, j'étais persuadée qu'ils l'étaient – et bondis hors de notre cachette avant de me tapir dans le premier coin d'ombre que j'atteins. Le sortilège de désillusion était facilement détectable en pleine lumière et le toit était inondé de soleil. Melania ne prit pas la peine d'avancer, restant proche de la porte pour espérer aspirer les assaillants vers elle et qu'ils découvrent Alexandre. Ils s'étaient tous mis à murmurer à l'apparition de Melania, la lorgnant d'un air ravi qui me semblait indécent et me donnait envie de rendre les sablés de ma grand-mère. Nestor considéra longuement sa sœur jumelle et durant un affreux moment, ils se ressemblèrent affreusement : leurs yeux gris et luisaient, leur chevelure châtain agitée par la brise, le visage animé d'une identique fureur.

-Comment tu as pu oser, entonna Nestor d'une voix sourde. Toi, la fierté de père, la tête de proue de la famille ... Nous trahir si ignoblement ...

-C'est toi qui as trahi notre famille et ses valeurs, cracha Melania en reculant un peu plus. Les Selwyn ne sont pas des meurtriers, ils ne s'adonnent pas à la magie noire, ils exècrent les gens comme Tu-Sais-Qui qui mettent notre monde et notre puissance en péril ...

Nestor avança de plusieurs pas vers elle et ses camarades suivirent mécaniquement, l'entourant tels des conseillers démoniaques, un sourire insidieusement radieux sur leurs lèvres. Avec un grognement de frustration, je constatai que l'homme plus âgé lui était resté en retrait, lorgnant Alexandre avec un mépris palpable. Et avec une horreur encore plus grande, je vis les doigts de mon frère tressauter, signe qu'il revenait lentement à lui. Je n'ai juste qu'à le stupéfixier ... Le stupéfixier et courir vers Alex, et transplaner ... Si seulement ils pouvaient s'éloigner un peu plus ... Mais ils étaient encore trop proche pour que je puisse attaquer l'homme et atteindre mon frère pour que j'en sorte indemne, même sous sortilège de désillusion.

-Les grands principes de père ne sont là que pour cacher sa faiblesse ! protesta Nestor, brandissant sa baguette face à sa sœur. Il n'a pas la force de conserver la pureté de notre race, il s'abaisse à commercer avec ces rats ... il ne comprend pas qu'avec de telles bassesses, il nous affaiblit ! Mère et moi avons tenté de lui faire entendre raison mais il n'écoute pas ... il t'écoute toi, c'est toi qui provoques notre déchéance, mais je n'avais pas compris à quel point ... Tu ne sais pas, non, tu n'as pas idée à quel point leur sang peut être nuisible, destructeur ... Non, tu ne sais pas ...

Sa baguette tremblait et je sus que c'était mon visage qui apparaissait devant ses yeux furieux, mon visage le jour où j'avais mis le feu à son écharpe et où sa vie s'était embrasée. Bien sûr, il ne pouvait pas asséner cet argument ultime que le sang moldu était malveillant par nature : la fierté le forcer à contracter à la mâchoire et à planter un regard ardent sur sa sœur. Mais elle avait parfaitement compris les mots qui se trouvaient derrière la colère brûlante de son frère, la douleur qu'il ne pouvait laisser éclater et cela parut un instant l'ébranler.

-Nestor, souffla Melania. Nestor, tu n'es pas obligé de répondre à la violence par la violence ... ça aussi, c'est de la faiblesse. D'ailleurs si vraiment c'était le destin que tu t'étais donné, il y a longtemps que tu le ferais mais non ... Il a fallu que tu attendes ... attendes que Tu-Sais-Qui se montre ... attendes de trouver les lettres et une raison valable d'agir ... ça montre bien que tout ne va pas que de soi. Que même dans ta tête il n'y a pas un ordre absolu de l'univers ... Sinon tu n'aurais pas attendu ce moment pour agir.

-Oh, assez parlé, lâcha l'homme blond d'une voix sonore. Si vous voulez suivre la voie tracée par notre Maître et espérer le servir, vous savez ce qu'il faut faire à cette traitresse à son sang. Qu'elle serve d'exemple à tous ceux qui auraient l'idée impure de fricoter avec les moldus. A vous de prouver que vous êtes dignes du Seigneur des Ténèbres et ça ne passe pas par des paroles. Ça passe par des actes. Des actes comme ceux-là. Endoloris !

Il pointa la baguette sur Alexandre qui venait d'ouvrir un œil hagard sur le ciel. Je me figeai, me collai, m'imprégnai totalement de la terre lorsque le sort le frappa et que le cri de mon frère s'éleva, inhumain, que son corps d'arcbouta pour échapper à la souffrance, que Melania hurla en écho, horrifiée, folle de douleur mentale. Elle voulut lancer un sortilège à l'homme, mais tous les compagnons de Nestor firent barrage, baguette tirée, pendant que lui protestait en tentant de couvrir les cris de sa voix :

-Non ! Non, ils sont à moi ! A moi, vous m'entendez ?

Mais la bataille s'était engagée entre ses amis et sa sœur et Alexandre hurlait toujours sous les yeux sadiques de l'homme en noir. Alors mon cœur et ma chaire ne purent en supporter plus et je bondis de ma cachette pour me fendre et atteindre la baguette destructrice d'un sortilège de désarmement. Alors enfin, mon frère cessa de s'époumoner et retomba sur le sol, tremblant, cherchant désespérément son souffle. Le soulagement eut à peine le temps de m'envahir que l'homme avait les yeux dardés sur ma silhouette rendue visible par le soleil de plomb.

-Il y en a une autre ! cria-t-il aux garçons qui s'acharnaient sur Melania. Là !

Faisant prestement volte-face, je parai le premier sortilège qui tenta de m'atteindre et usai de ma transparence relative pour surprendre les deux hommes qui s'étaient retournés sur moi. Je maudissais intérieurement ma lenteur : paralysée par le cri de mon frère, je n'avais pas su me dépêcher de le mettre à l'abri et l'homme en noir se précipitait maintenant vers sa baguette qui avait roulé quelques mètres plus loin. La jeune femme et le garçon face à moi étaient relativement jeunes, de l'âge de Nestor et Melania et seul lui maîtrisait parfaitement les sortilèges informulés. Je me baissai pour éviter un éclair rouge tout en jeta un sortilège de stupéfixion qui atteignit sa camarade en pleine poitrine. Alors que je me détendais enfin en me retrouvant à force égale, je vis ma main apparaitre devant moi. Mon regard se porta sur la scène derrière mon assaillant : Melania, acculée par trois adversaires, était tombée à terre, touchée par un sortilège qui lui avait entaillée sérieusement le bras. Sa puissance magique vacillante, son sortilège de désillusion fut brisé et Nestor, qui regardait sans intervenir, écarquilla les yeux en me voyant brusquement apparaitre. Pendant un instant, j'eus l'impression d'être projetée dans cette froide nuit de novembre et la lueur des sortilèges se mua en cruelles étincelles. Mon cœur se mit à battre à tout rompre dans ma poitrine, mais avant que lui ou n'eûmes pu bouger un muscle, le garçon me lança un sortilège qui me plaqua au sol. Mes poumons se vidèrent sous le choc qui réveilla les blessures de l'attaque des Serpentard et ma baguette m'échappa. Le garçon se précipita vers moi, frémissant d'excitation à l'idée de m'avoir à sa merci mais je réagis instinctivement en dressant brusquement la jambe qu'il enjamba : les parties intimes heurtées, il poussa un gémissement pitoyable et s'écroula à genoux. J'eus alors le loisir d'enfoncer le clou d'un coup de pied dans le visage qui le projeta par terre, totalement sonné et profitai du répit pour récupérer ma baguette. Ce fut au moment où je rampais que je m'aperçus que l'homme en noir avait récupérer la sienne et qu'il la pointait sur moi avec un sourire cynique. J'eus à peine le temps de déployer un bouclier avant que le sortilège ne fuse et me dépêchai de me relever, les membres douloureux après ma chute. J'étais presque certaine que l'une des mes côtes s'était fêlée. L'homme n'attendit pas un seul instant et attaqua, plus vite, plus fort et plus vivement que ne l'avais fait les camarades de Nestor et je fus réduite à parer, parer encore et encore chaque éclair de couleur sombre qui fonçaient vers moi, présageant des sortilèges bien plus ravageurs et avancés que semblaient capable de produire les autres. L'homme eut une moue contrariée.

-Mais c'est qu'elle est coriace ... Mais est-ce que tu pourras parer ça, ma jolie ? Endoloris !

Je fis un bond sur le côté pour éviter le sort qui frappa le mur de brique derrière moi, explosant certaines d'entre elles, et me baisser précipitamment quand le second jaillit. Mon rythme cardiaque s'emballa si fort que je crus que mon cœur allait sortir de ma poitrine. C'est comme éviter un cognard, Victoria ... C'est comme éviter un cognard ... Le troisième fut lui dévié par Nestor, qui surgit avec un rugissement de frustration en refermant sa main sur le bras de l'homme pour l'abaisser. Son regard brûlait plus ardemment que les flammes qui lui avaient mangé le visage le soir du cinq novembre.

-Elle aussi, elle est à moi, tu m'entends Rowle ? Si quelqu'un soit l'entendre hurler, c'est moi !

Sa voix fut couverte du cri que poussa Melania : par-dessus un corps inerte, elle se tordait de douleur alors qu'un des compagnons de son frère éclatait d'un rire jouissif.

-Je le fais ! Regardez, je le ... !

Mais la fin de sa phrase s'étouffa et il s'effondra sur le sol. Derrière lui se tenait Alexandre, haletant, une barre de fer à la main. Tremblant de rage, il asséna un coup dans les côtes de l'homme à terre en assénant à chaque fois :

-Ne ... la ... touche pas !

Un autre se précipita pour le mettre hors d'état de nuire mais Alexandre se retourna souplement et lui asséna la barre de fer en plein visage. Melania en profita alors pour récupérer sa baguette et lui jeter un maléfice du saucisson qui l'envoya au tapis. L'homme en noir devant moi arracha sa prise à Nestor et lui adressa un sourire cynique.

-D'accord, la danseuse est à toi. Moi, je vais faire voler les tourtereaux.

Il para avec une facilité déconcertante le maléfice que je tentai de lui lancer et sans attendre la riposte, fit volte-face vers Alexandre qui aidait Melania à se redresser. Aussitôt, elle se posta devant lui malgré sa faiblesse manifeste et le regard de mon frère accrocha le mien. Ma gorge se comprima, et je me serais sans doute mis à pleurer de frayeur et de soulagement si Nestor n'avait pas choisi ce moment-là pour hurler :

-Endoloris !

Je fis prestement un bond sur le côté et profitai de l'énervement de Nestor pour jeter un sortilège cuisant à Rowle. Hurlant de rage et de douleur, il se détourna du couple pour revenir sur moi. Melania, qui semblait s'affaiblir chaque seconde davantage, accrocha mon regard et hocha lentement la tête, me faisant comprendre qu'elle n'avait pas oublié notre plan de départ. Alors rassemblant ses dernières forces, elle agrippa Alexandre par le bras et pivota prestement. Comprenant ce qu'elle voulait faire, mon frère tenta de se dégager et j'eus le temps de l'entendre hurler :

-Tory !

Et ils disparurent tous deux avec un « crac » sonore. Je voulus faire de même, profiter de leur stupéfaction pour leur échapper, mais avant que je ne puisse mobiliser ma magie, Rowle pointa sa baguette sur le sol et les dalles de béton se veinèrent d'éclair bleuâtre. Un sourire sinistre s'étira sur ses lèvres. Il se tenait toujours le bras qui avait reçu mon maléfice et qui gonflait de manière anormale et sans doute douloureuse.

-Sortilège antitransplanage, petite danseuse. Il semblerait qu'ils ne restent que nous sur ce toit ...

Je savais qu'il ne mentait pas : je sentais comme des attaches invisibles s'enrouler autour de mes chevilles et bloquer ma magie voyageuse. La panique se mit à me faire perdre le sens commun et je jetai un regard de bête prise au piège aux alentour. De toute manière, je ne me sentais pas assez forte pour transplaner : entre la peur, les douleurs et la fébrilité, j'étais certaine de manquer de Détermination et de me désartibuler. Mais cela restait mon unique moyen de partir d'ici ...

-Non, répliqua Nestor en pointant sa baguette sur ma tête. C'est entre elle et moi.

Oui. En un sens, toute cette histoire absurde, c'était entre lui et moi. Je levai ma baguette, prête à me défendre comme ce soir de cinq Novembre où tout avait commencé, mon cœur battant la panique et la fureur de vivre exactement comme ce jour, exactement comme lorsque je m'étais tenue à la merci de la baguette de Kamila Tokarsky. Respectant sa volonté, Rowle s'était détourné avec un ricanement.

-Je t'en prie, fais-toi plaisir. Vu sa tête, elle doit être à Poudlard, c'est à ta portée ...

-En réalité ça ne l'est pas, rétorquai-je d'une voix tremblante. Mais je suppose que tu te souviens, Nestor ? Remember, remember, the fifth of November ?

Nestor blêmit sous ses cicatrices et je profitai de son trouble pour me fendre d'un sort désarmement que Rowle para à sa place. Certaines autres commençaient à bouger, et je me retrouverais bientôt drastiquement inférieure en nombre. Déjà que le presque-Mangemort semblait bien trop coriace pour moi ... Je jetais un autre regard paniqué au toit, dépourvu de solution : Rowle me bloquait l'accès à la porte. Rien que des dalles grises sous l'implacable soleil et le vide derrière. Je posais un regard désespéré sur la porte qui m'était bouchée et je vis un morceau de bois bloquer la fermeture de la porte lorsque Rowle la rabattit négligemment. Une idée folle prit forme dans mon esprit mais avant que je ne puisse l'élaborer, Nestor cria :

-Stupéfix !

Mais je parai sans difficulté. Et alors qu'il s'engageait avec plus de vigueur dans le combat, hurlant ses formules comme si sa puissance vocale pouvait lui donner plus de force, je compris ce que Melania voulait dire lorsqu'elle avait suggéré que Nestor était gérable. Il ne maîtrisait rien, l'énervement rendant des gestes approximatifs et l'empêchait de se concentrer assez pour taire ses formules – si tant est qu'il en soit capable. Cela fit naitre un rire absurde dans la poitrine, absurde car deux de ses camarades venaient se de lever pour observer le duel que j'étais en train de dominer, de plus en plus largement face à la fureur croissante de Nestor. Certes, cette colère profonde et destructrice donnait aux plus noirs de ses sortilèges une force inouïe, mais son manque de précision et le prononcement de ses formules me permettait de facilement les éviter, magiquement ou physiquement. Un de mes sortilèges cuisant l'avait atteint au pied et il se déplaçait à présent difficilement, luttant contre mes maléfices qui se faisaient plus attaquants, plus pressants. Les deux amis debout derrière lui se tenaient prêts à le suppléer et Rowle observait la scène, vaguement intrigué par le potentiel destructeur que pourrait avoir Nestor, me barrant toujours l'accès à la porte. N'ayant plus d'autres choix pour m'en sortir que l'idée inconsciente que j'avais eue, j'en fus réduite à attendre que Nestor me laisse une ouverture. Mais pour qu'il fasse des erreurs, il fallait attiser sa rage.

-Je dois te remercie, en fait ! lançai-je en tentant de mettre toute ma conviction dans mes mots. C'est grâce à ce qui s'est passé ce soir-là que j'ai pu découvrir que j'étais une vraie sorcière ! La magie coule dans mes veines de née-moldue, tu me l'as prouvée !

Le visage de Nestor se crispa de manière inquiétante et il marqua un temps d'arrêt qui me permit de glisser les yeux vers la porte. Le mouvement de baguette que je fis ne fut pas perçu par Nestor, qui hurla avec hargne :

-C'est faux ! C'est une magie impure, un simulacre de poussière, quelque chose d'infime, d'impur, de mauvais ...

-Mais ça a suffi à te brûler le visage ! Alors qui gagne, la née-moldue ou le Sang-Pur ?

Avec un hurlement de rage, Nestor se rua vers moi, la baguette brandit, la bouche ouverte en un sort qu'il ne put prononcer car je le cueillais d'un maléfice du saucisson en pleine poitrine. Je n'attendis pas qu'il s'écrase sur le sol pour faire volte-face et réceptionner le balai de Judy qui s'était élancé, mu par mon sortilège d'attraction. Un sort me frôla le bras et je me dépêchai de l'enfourcher, les mains tremblantes et tendue comme je l'avais rarement été sur un balai.

-Tu ne peux pas t'enfuir, la petite danseuse ! s'écria Rowle en pointant sa baguette sur moi.

Mais j'avais déjà frappé un grand coup sur le sol et mon équilibre de gardienne me permit de lâcher le balai d'une main pour parer sommairement les sortilèges qui fusaient vers moi alors que je m'élevai dans le ciel de Bristol. Ma main trésaillait si violemment que j'avais peur d'être touchée mais bientôt le toit de l'immeuble disparut à ma vue et leurs silhouettes furent réduit à des points noirs derrière moi. Le vent hurlant à mes oreilles et les battements affolés de mon cœur devirent bientôt ma seule réalité et je me couchai sur le balai, épuisé et haletante pendant que Bristol défilait sous moi et que l'adrénaline quittait mes veines. Et alors que je m'éloignais enfin, je me détendis face à la sensation familière du balai sur moi, de l'air qui me chatouillait les joues et ébouriffer mes boucles, de cette sensation incroyable de liberté qui s'éprenait de moi chaque fois que je volais.

***

Je ne songeais même pas à tenter de transplaner : j'étais éprouvée par le duel, incapable de me concentrer sur ma destination, et les essais de Quidditch avaient réveillé de vieilles douleurs. Alors je poursuivis ma course, volant vite et haut pour éviter d'être vue des moldus. Le ciel sans nuage offrait peu de cachette mais à l'altitude et la vitesse à laquelle j'étais, j'espérais qu'ils me prendraient pour un étrange oiseau. Je descendais aléatoirement pour suivre la route jusque chez moi et je vis arriver avec un indicible soulagement la belle maison victorienne des Bones. J'atterris lourdement dans le jardin, le souffle court, le corps broyé. Ce fut George, posté dans la terrasse à m'attendre, qui m'atteint le premier. Les jambes tremblantes et l'adrénaline s'effritant pour ne laisser qu'un épuisement moral et physique, il dût me porter jusque la maison où m'attendaient Alexandre, secoué, choqué mais indemne et Melania, le bras enveloppé dans une tonne de tissu et qui devrait sans doute faire un passage à Ste Mangouste pour cette blessure. Amelia était également présente, prévenue par Rose qui était allée avertir les Aurors qu'une attaque contre un moldu était en cours à Bristol. Possédant les rudiments de la magie curative, elle m'avait examinée et ressoudée les deux côtes qui s'étaient cassées dans ma chute mais j'avais bien senti que son esprit était à mille lieues de cette maison.

-Ils ne perdent pas de temps, râla-t-elle après m'avoir aidé à me redresser. Et même pas des Mangemorts, des aspirants d'aspirants, des gens qui profitent du retour de Vous-Savez-Qui pour accomplir des « exploits » personnels en espérant que les temps troublés les couvrent et que les Mangemorts les revendiquent ... C'était déjà comme ça pendant la première guerre, des cas extrêmement difficiles à établir car on n'arrivait pas à tisser un lien tangible avec Lui. Regarde, ce n'est pas comme si Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom leur avait demandé de châtier Alexandre ?

-Mais ils ne l'auraient pas fait si son retour n'avait pas été officiel, protesta faiblement Melania.

Elle avait le teint blême du fait du sang qui s'écoulait toujours de sa blessure. Malgré tout, ni George ni Amelia ne préférait lui faire subir le transplanage, de peur d'aggraver la plaie magique. Alexandre était assis sur le bras de son fauteuil, prêt à la soutenir si jamais elle défaillait, mais la jeune femme se tenait aussi éloignée de lui que possible et évitai soigneusement de le regarder. Je la comprenais : il portait les stigmates des tortures qu'on lui avait fait subir, avec sa pâleur, les lèvres et le tee-shirt maculé du sang qui avait coulé de son nez cassé, et se tenait également les côtes d'une main. Amelia avait voulu plusieurs fois l'ausculter mais il avait refusé, préférant qu'elle s'occupe de Melania et moi en premier. La jeune femme avait les larmes aux yeux.

-Mais même là ... Je ne pensais pas qu'il aurait la force ... Qu'il aurait l'audace ... Je veux dire, ça ne fait que trois jours que Fudge a admis son retour et Nestor ...

Sa voix se brisa et elle pressa ses paupières pour retenir ses larmes. Elle devait sans doute se maudire d'avoir gardé ces lettres qui l'avaient découverte aux yeux de son frère jumeau et mis le feu aux poudres déjà fort inflammable de Nestor. George tapota son épaule avec douceur.

-Ne t'en veux pas, tu n'y es pour rien dans ce qui s'est passé. La seule personne à blâmer, c'est son frère et ... (il nous interrogea tous du regard). Qui était avec eux ? Rowle ?

-Thorfinn Rowle, oui, confirma Melania sans rouvrir les yeux. Je l'ai reconnu tout de suite, il sert de secrétaire à Lucius Malefoy, son père est issu d'une grande famille de Sang-Pur ...

-Je vois parfaitement qui sont les Rowle, ça ne me surprend pas que l'un d'entre eux passe Mangemort, maugréa Amelia. Tu aurais d'autres noms à nous fournir ? Avec la fuite de Victoria, je doute qu'ils y en aient beaucoup qui soient restés sur place, les Aurors n'auront pas grand-monde ...

Melania acquiesça avec une lenteur qui trahissait sa faiblesse. Alexandre la contemplait et je sentais que tout son être ne souhait que l'envelopper de ses bras, pourtant il demeura immobile sur le bras du fauteuil. Mes entrailles se contractèrent quand je pris conscience des chocs physiques et émotionnels qu'avaient dû subir mon frère cette dernière heure. Tout ce quoi j'aurais voulu le protéger depuis des mois lui étaient tombé dessus avec une violence brutale.

-Alex ... Je suis tellement désolée ...

Mon frère vrilla son regard gris et étrangement éteint sur moi. Lentement, il se leva pour se laisser glisser dans le fauteuil d'à côté et pouvoir laisser enfin s'exprimer toute la fatigue qu'il devait ressentir. Il se frotta la mâchoire puis le visage, comme s'il espérait se réveiller d'un cauchemar.

-Ecoute, Tory ... Je ... je n'ai pas encore assimilé tout ce qui s'est passé, alors ... Est-ce qu'on peut juste ... Je ne sais pas, m'expliquer ce qui s'est passé, en fait ?

Melania tourna la tête pour ne pas avoir à affronter son regard et je vis les larmes emplir ses yeux gris. Amelia et George parurent comprendre qu'il nous fallait de l'intimité car ils s'isolèrent dans la cuisine pour attendre le retour de Rose. Ravalant ses pleurs, Melania se fit violence et finit par lâcher du bout des lèvres :

-Disons que ... Tu as eu une rencontre un peu brutale avec mon frère jumeau ...

Elle porta son poing au creux de sa gorge et s'interrompit, visiblement incapable de poursuivre sans craquer. Mon cœur saigna pour elle qui devait tant culpabiliser de la situation, mais je partageais sa responsabilité dans ce qui s'était passé. Ce fut pour cela que je poursuivis d'une voix éraillée :

-La famille Selwyn est l'une de celles qui considère que parce qu'ils n'ont eu que des sorciers dans leur famille, ils valent mieux que les autres, et surtout mieux que les non-magiques. Alors ce ne sont pas les pires, le père a fini par comprendre que leur monde changeait et ils n'aiment pas la Magie Noire, mais ... ils ont produit tout de même un cas extrême en la personne de Nestor. (Je déglutis pour faire passer la boule chauffée à blanc qui s'était formée dans la gorge). Quand j'étais en première année, il a voulu me faire payer d'avoir donné un coup de pied à leur petit frère qui m'avait insulté et ... en me défendant, j'ai brûlé son écharpe, sans le faire exprès ... et ...

Mais je n'eus besoin de poursuivre, Alexandre avait compris. Il avait vu les terribles cicatrices qui mangeaient une partie de la mâchoire de Nestor Selwyn. Il se prit la tête entre les mains avec un soupir avant de m'observer à travers ses doigts écartés, l'horreur et la colère se battant dans ses prunelles. Je reconnus là le frère qui m'avait toujours protégé : peu importait que j'aie accidentellement brûlé le visage de Nestor Selwyn. Ce qui comptait, c'était que lui m'avait attaqué et qu'Alexandre n'avait pas été là pour me défendre. Mais avant qu'il n'ait pu s'indigner, la voix de Melania s'éleva faiblement :

-Personne n'a jamais rien su sur ce qui s'était passé, mon père a voulu étouffer l'affaire parce que Nestor était en faute et Victoria n'a jamais rien dit parce qu'elle avait peur des conséquences. Mais il n'a jamais oublié, cette nuit-là a été lourde d'incidence pour lui ... au-delà de la perte d'une partie de son visage ... Alors quand on s'est rencontré je ne savais pas ... j'étais loin de me douter, jamais ... (elle se couvrit les yeux d'une main). Je t'ai caché que j'étais une sorcière parce que je préférais attendre d'être sûre que ce soit solide entre nous avant de te l'avouer. A dire vrai, j'étais déterminée à le faire ... Mais Simon Bones m'a reconnue et a prévenu Victoria de qui j'étais. La sœur de qui j'étais. Nestor était déjà assez instable et ma famille bancale alors ... alors ...

-Alors tu m'as quitté, acheva Alexandre d'une voix morte, sans la regarder. Parce que tu as pensé que ça me protégerait de ton psychopathe de frère ...

Il s'était tendu et les traits de son visage s'étaient crispés, animés par une sorte de colère froide. Mais il y avait quelque chose de positif dans la voix d'Alexandre, un peu rancœur, certes, mais aussi une vibration qui ressemblait à celle de l'espoir. Ce n'était pas l'amour la cause de cette rupture. Puis son regard se posa sur moi et cette fois j'y vis une touche de reproche.

-Et tu as approuvé ça, Tory... ?

Mon souffle se bloqua dans ma gorge mais je hochai la tête. La lueur s'embrasa dans les yeux de mon frère et il se leva de son fauteuil en grimaçant, malgré Melania qui s'était retournée vers lui pour la première fois depuis que j'étais revenue.

-Alex, on voulait t'éloigner de Nestor, me défendit-t-elle. Ça fait des années qu'il rêvait de se venger de Victoria et mon père et moi espérions réussir de le maintenir du bout côté de la magie ...

-C'est une réussite ...

-Je ne le nie pas, admit Melania en pâlissant encore. Il m'a prouvé aujourd'hui que peu importe ce qu'on aurait fait, il a une prédisposition pour la magie noire et un penchant pour les forces de Tu-Sais-Qui ... Mais même dans cette optique ... on pensait que si je te quittais, ça augmentait les chances que Nestor s'intéresse à Victoria et seulement à Victoria. Que tu puisses rester en dehors de ça ...

-Alors c'était ça votre plan brillant ? explosa Alexandre, laissant éclater sa colère. Votre plan brillant c'était de me briser le cœur pour laisser ma petite sœur seule face au danger, c'est ça ?!

Melania détourna les yeux face à ceux furieux de mon frère. Malgré ses douleurs manifestes aux côtes, celui-ci se mit à faire les cent-pas dans le salon des Bones, tournoyant tel un lion en cage.

-Et vous avez fait tout ça dans mon dos ... Vous ne m'avez caché ça, vous ne m'avez même pas laissé voix au chapitre !

-Evidemment qu'on ne l'a pas fait, Alex ! m'exclamai-je, par souci ardent de justifier ce que je lui avais fait. Parce qu'on te connait et qu'on sait très bien que peu importe le nombre de danger qu'on t'aurait miroité, tu t'en serais fichu. Tu es du genre à foncer tête baissée, sans réfléchir et moi je ne pouvais pas permettre ça, je ne pouvais pas permettre que tu te mettes plus en danger que tu ne le serais déjà ! Bon sang, tu as vu ce qu'il s'est passé ?! Tu peux m'en vouloir d'avoir voulu éviter que ça t'arrive ?

-Mais c'est arrivé, Tory ! C'est arrivé, ils m'ont assommé quand je sortais de mon appart et amené sur le toit pour ... (il se prit la tête entre les mains et je sus qu'il ressentait l'écho de ce que Doloris lui avait fait ressentir). Je ne savais même pas ce que c'était, j'ai simplement cru que j'allais en mourir ...

Melania amorça un mouvement pour se lever, mais à peine redressée elle vacilla et devint blanche comme un linge avant de se laisser retomber sur le fauteuil. Dos à elle, Alexandre n'avait pas fini d'étaler son trouble et poursuivit avec ardeur :

-En plus derrière j'apprends que ma copine était une sorcière – et après avoir appris que papy l'était, qui plus est ! Bordel, si quelqu'un de mon entourage est sorcier sans me le dire, qu'il parle maintenant ou se taise à jamais !

-Votre grand-père ? s'étonna Melania dans un filet de voix.

-Pas biologique, rectifiai-je avant qu'elle n'ait pu s'imaginer qu'Alexandre ait du sang sorcier. Une longue histoire, elle attendra ...

-Mais tu t'imagines ce que ça a été pour nous ? s'enquit mon frère à mon adresse. Pour papa, pour maman, d'apprendre que papy était un sorcier en plus de ne pas être notre grand-père ? Sans compter que lui avait le droit de savoir, lui avait le droit de se battre ?

-Lui a une baguette ! rétorquai-je. Lui peut se défendre si des sorciers viennent et nous attaquent, Alex, pas toi !

-Alors pardon ! Pardon d'être la sorte de rat et de vermine inutile qu'ils tabassent sans qu'il ne puisse rien y faire, même pas assez important pour qu'on puisse lui permettre de tout comprendre ! Parce que c'est ça, si j'avais eu la magie, vous m'auriez tout dit, vous ne m'auriez pas laissé à l'écart, mais je suis un pauvre « moldu » !

-Alex ...

Il y avait la moitié d'un sanglot dans le gémissement de Melania et cela parut momentanément apaiser le courroux d'Alexandre. Je m'étais moi-même recroquevillée contre le canapé, recevant les mots de mon frère comme des lames glacées plantées dans mes entrailles. Il y avait du vrai et de l'inacceptable dans ces paroles qui firent remonter la bile dans ma gorge. Mais avant que je n'aie pu trouver une réponse acceptable à lui fournir, des flammes émeraudes envahirent la cheminée, faisant faire un véritable bond à Alexandre qui se tenait devant elle et Rose émergea, affolée. Elle poussa un immense soupir de soulagement en me remarquant dans le canapé et se précipita sur moi pour m'enlacer.

-Mille gorgones tu vas bien ! J'ai eu peur, si tu savais ...

J'agrippai le bras de Rose, rassurée moi aussi de retrouver sa douce présence au moment où mon cœur semblait se déchirer. Et alors que je m'autorisais enfin à me détendre, une voix bourrue retentit derrière elle depuis la cheminée :

-Dépêchons-nous, Bones, la gamine doit retourner à Poudlard. J'ai promis de faire vite à Dumbledore.

Poudlard. Ça faisait plus d'une heure que devait être de retour à l'école ... A regret, Rose se détacha de moi pour porter un regard peu amène sur l'homme qui se tenait toujours devant la cheminée. C'était quelqu'un de massif à la longue crinière grise qui n'était pas sans rappeler celle d'un vieux lion et aux lunettes cerclées de fer. Melania écarquilla les yeux, s'affalant toujours plus sur son canapé et George, qui était revenu dans la pièce au retour de sa femme, se rembrunit.

-Et pourquoi le directeur du bureau des Aurors vient-il en personne ?

-Parce que ça concerne Vous-Savez-Qui, Bones. Il n'y a pas une seconde à perdre.

Un rire absurde me déchira la gorge et j'y portais la main pour le réprimer. Mais l'Auror m'avait perçu et darda un regard de glace sur moi. Rose se plaça devant moi en un geste protecteur pour me dérober aux yeux de l'homme.

-En réalité, je doute que ça concerne directement Vous-Savez-Qui, Scrimegeour, comme j'ai tenté de vous l'expliquer, cingla-t-elle d'une voix froide.

-C'est plus de l'ordre d'un gang de sympathisant qui ont voulu faire un coup d'éclat, enchérit Amelia. Mais si vous voulez vous donner bonne conscience ...

Scrimegeour contempla la directrice de la Justice Magique avec une certaine stupeur, ne s'attendant sans doute pas à trouver sa patronne ici. Derrière lui, un autre homme en blouse bleue s'était approché de Melania et examinait son bras d'un œil critique.

-Mrs. Bones, je vous pensais en réunion avec le ministre ...

-Une réunion pour déterminer la meilleure stratégie pour éviter son éviction, renifla Amelia avec un souverain mépris. J'ai mieux à faire de mon temps, Scrimegeour, les jours de Fudge sont comptés. Il n'en a simplement pas encore conscience. Par ailleurs, vous l'avez dit vous-même, Victoria doit vite rentrer à Poudlard alors si vous pouviez cesser de rester planter là et d'enfin faire le travail qu'on attend d'un Auror, j'en serais heureuse.

-Attendez, vous allez la renvoyer dans son école juste comme ça ? intervint Alexandre, incrédule. Après ce qui s'est passé ?

-Mon sortilège de guérison est fragile et elle a besoin des soins de l'infirmière de l'école, précisa Amelia. Et je pense que malgré tout, Victoria voudra profiter de ses derniers jours à Poudlard ...

Mon cœur manqua un battement face à ce rappel que je vivais mes derniers instants dans l'école qui m'avait accueilli pendant sept ans. Je hochai la tête à l'adresse d'Amelia Bones qui eut un léger sourire, entendu. Melania, malgré le guérisseur qui s'occupait de son bras de sa baguette magique, intervint à son tour :

-Vous pouvez même la faire rentrer tout de suite, j'expliquerais tout à monsieur Scrimegeour, sans rien omettre. J'ai identifié mieux qu'elle les personnes qui étaient sur ce toit ...

-Mais ..., protestai-je faiblement.

-Excellente idée, je pense par ailleurs que Victoria a besoin de se reposer et se défouler sur mon neveu pour les prochaines heures, approuva Amelia avec un fin sourire.

La référence arracha un impensable sourire à Alexandre et cela me soulagea assez pour que j'arrête de protester contre mon renvoi à Poudlard. De toute manière, j'étais trop épuisée pour lutter contre la volonté de fer d'Amelia Bones. Rose m'aida à me relever mais avant de rejoindre George qui devait me raccompagner à Poudlard, je me précipitai vers Melania. La jeune femme se dressa maladroitement sur ses pieds pour m'étreindre de son bras valide. J'ignorais ce qui se serait passé si elle n'avait pas été là, si l'amour ne l'avait pas conduite à craindre pour mon frère et si elle n'avait pas été assez courageuse pour se dresser, seule face à toute cette bande enragée, prenant toute la lumière au risque d'en perdre la vie.

-Merci ...

-Ne me remercie pas, tu as été extraordinaire, souffla-t-elle avant de se détacher de moi et de caresser mes cheveux. Tu es une battante, Victoria et une très bonne sorcière. Ils ne t'auront pas comme ça.

J'opinai du chef, la gorge serrée. C'était au moins ce que j'avais appris sur ce toit alors que les sortilèges fusaient de partout et que même sans baguette j'arrivais à leur échapper : j'en étais capable. J'avais l'énergie et la puissance magique nécessaire, une force que je ne soupçonnais pas et qui m'avait poussé à prendre ma baguette et avancer sur ce toit pour sauver mon frère. Au fond de moi, j'avais ce feu essentiel pour lutter et qui brûlait de milles flammes différentes : l'amour, la soif de justice, la volonté de ne pas se laisser faire ... La proposition de Dumbledore me revint à l'esprit. Je comptais l'accepter, l'accepter malgré les risques, malgré ma peur de ce que cela pourrait engendrer mais ce qui s'était passé raffermi ma résolution. Je ne pouvais plus laisser ça arriver et j'étais capable de le faire. Melania m'adressa un dernier sourire avant que George ne me prenne par le bras et ne m'emmène vers le jardin. Je n'osais regarder Alexandre, dont les mots m'avaient blessée, ni Scrimegeour qui me fixait avec une certaine désapprobation. Je suivis George sur la terrasse, vannée mais avant qu'on ne puisse descendre la volée de marche qui menait à la pelouse, la porte s'ouvrit à la volée.

-Tory, attends !

Alexandre me retint par le bras et m'attira contre lui si brusquement que cela réveilla la douleur de mes côtes. Malgré tout, je me laissai faire, trop heureuse de pouvoir me plonger dans cette étreinte, enserrant son corps de mes bras, savourant son contact. Seigneur, j'aurais pu jamais le reprendre dans mes bras ... Cette réalité que j'avais tenté d'occulter de mon esprit pour ne pas me troubler m'écrasa alors de tout son poids et je me sentis trembler. Alexandre raffermit sa prise sur moi.

-Ecoute ... Je ne réalise pas réellement ... Et je t'en veux mais ... Juste ... merci d'être venue. Vraiment. Je ne pensais pas que ma petite sœur était devenue une grande ... mais ça m'a permis de le voir. Tu es devenue grande, Tory.

L'émotion menaça de me submerger alors que j'enfouissais un peu plus mon visage dans le tee-shirt de mon frère. George ne songea pas à nous séparer : il nous laissa nous étreindre, nous rappeler à quel point nous comptions l'un pour l'autre et l'un sur l'autre, malgré ma tromperie, malgré sa non-magie, malgré tout. Au bout de ce qui me sembla une éternité, je parvins à me détacher d'Alexandre. Il s'éloigna d'un pas, le regard toujours voilé. Sa lèvre tressaillit en l'ombre d'un sourire.

-Rappelle au crapaud qu'il a promis de prendre soin de toi en mon absence. Je le saurais s'il ne le fait pas.

-Oh Seigneur, il va me tuer ...

-Il n'a pas intérêt, je suis toujours plus fort que lui.

J'essuyai un petit rire et enlaçai une dernière fois mon frère avant de m'éloigner en compagnie de George dans le jardin. Je doutais avoir la force nécessaire pour transplaner alors il me prit le bras avec une certaine douceur, m'adressant un sourire qui fit pétiller ses yeux d'un vert chatoyant dans lesquels le soleil faisait réfracter des éclats d'or.

-Tu es prête ?

Je hochai la tête. Oui, j'étais prête. Prête à transplaner et affronter la mauvaise humeur de Simon lorsqu'il apprendrait ce qu'il s'était passé. Prête à recommencer, à saisir ma baguette si Nestor tentait à nouveau de s'en prendre à mon frère. Prête à me battre, encore et encore, de me laisser consumer par la fureur de vivre avant de retourner à la poussière. Mais pour l'heure, il ne s'agissait que de transplaner alors la poigne de George se fit plus ferme. Alors sa magie nous emporta sous les yeux déchirés d'Alexandre. 


VOILA. 

On se retrouve dans deux semaines pour le dernier chapitre ! Bonnes fin de vacances à tous et toutes ! 

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