Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

II - Chapitre 1 : L'accident de voiture


Bonjour à tous ! J'espère que vous allez tous biiien ! 

Allez, c'est parti pour la seconde partie ! Donc ce sera un premier chapitre très calme, avec un bilan et des rappels histoire de commencer en douceur ahah. J'espère que ça vous plaira quand même ahah. 

Bonne lecture ! 


Chapitre 1 : l'accident de voiture.

-Arthur, regarde des deux côtés avant de traverser ! Tu n'as pas entendu ? L'ami de Victoria s'est fait renversé par une voiture ! Tu veux qu'il t'arrive la même chose ?

-J'ai toujours dit que la prolifération de voiture serait dangereux pour nous. Le pauvre gamin, dans la fleur de l'âge ...

-Mais c'est l'adolescence, ça. Combien parie-t-on qu'il était bourré sur la voie publique ? J'ai vu la petite Bennett se bourrer la gueule avec son frère l'été dernier, pas de doute qu'elle ne doit pas fréquenter que des saints dans son école ... d'ailleurs il faut bien l'alcool pour supporter l'Ecosse. Franchement ces jeunes de nos jours ...

Chaque villageois y allait de son petit commentaire, de sa petite interprétation : la faute à la voiture, au garçon, à l'alcool. On s'en servait comme d'un sermon au mieux, ou comme d'un ragot juteux qui en amenaient d'autres – ceux-ci parfaitement inventés, déduis d'une fausse conclusion. A Terre-en-Landes, peu de choses croustillantes passaient sous la dent des villageois. Alors lorsque le Pasteur Bennett avait admis à l'épicière Elizabeth Fisher que sa fille avait subi la perte d'un ami très cher, renversé par une voiture près de son pensionnat en Ecosse, ça avait fait le tour du village. Cette simple phrase, faite simplement pour expliquer la morosité soudaine de la si vive Victoria, avait vite était répétée, déformée et amplifiée. Après un mois, les gens en parlaient toujours impunément au coin de la rue, chaque fois qu'une remarque sur la sécurité routière ou l'alcoolisme juvénile était prononcée, sans se soucier de vérifier qui entendaient leurs absurdités.

J'étais la petite Victoria Bennett, la gamine qui avait pris une cuite avec son frère l'été dernier, la fille du Pasteur et également la pauvre enfant qui avait perdu son ami dans un tragique accident de voiture. Et contrairement à ce que pensaient mes voisins, j'entendais tout ce qu'il se disait sur le village.

Assise sur la balançoire la plus haute du parc de jeu pour enfant, j'agitai passivement mes jambes dans le vide, mes orteils nus frôlant le sol sableux par intermittence. L'Angleterre connaissait l'un des ses étés les plus chauds, et j'avais relevé mes boucles brunes sur le sommet de ma tête, et sortis les shorts et les débardeurs. Cette partie du parc était à l'ombre de quelques frênes et j'appréciais grandement la fraicheur que cela m'apportait. La sueur collait les mèches qui s'échappaient de mon chignon contre ma nuque et les tempes, et mes mains moites glissaient sur les cordes de la balançoire. Des voix lui parvenaient de l'autre côté de la haute haie d'arbustes qui coupaient le parc de la route adjacente : j'étais persuadée qu'il s'agissait d'Elizabeth Fisher l'épicière et de son mari Gordon :

-... Regarde franchement comment roule Jane Cooper : elle a son permis depuis à peine deux semaines et elle file déjà comme une cingée ...

-Dans quelques jours on apprendra qu'elle a renversé quelqu'un ...

Je levai les yeux au ciel, flottant entre colère et douleur sourde. Agitant toute ma petite carcasse, je mis la balançoire en mouvement. Les anneaux de fer grincèrent l'un sur l'autre en un gémissement d'agonie qui était insupportable, mais sonore. De l'autre côté de la haie, les voix des Fisher s'étaient tues et les pas précipités m'indiquèrent qu'ils quittaient la place. Satisfaite, je laissai la balançoire osciller jusqu'à ce qu'elle s'immobilise. Les derniers grincements résonnèrent tristement dans le parc avant qu'il ne replonge dans le silence.

Seigneur, quel mensonge absurde.

Mais c'était le plus plausible qu'avaient trouvé mes parents lorsque j'étais revenue de mon école pour l'été. Ils avaient alors raconté à mes grands-parents, à ma tante Beata et ma cousine Marta, que mon ami Cédric avait été renversé par une voiture.

Mais ce n'était qu'une façade destinée à tromper ceux qui n'étaient pas au courant de ma vraie nature. Un mensonge nécessaire, mais qui me blessait chaque fois que quelqu'un le prononçait – que ce soit les villageois ou mes amis ou encore ma famille. Il me semblait que chaque fois que j'acceptais ce mensonge, je trahissais la mémoire de Cédric. Je fermai mes paupières, et son visage rendu blême par la mort flotta un instant dans mon esprit.

Il n'était pas mort tué par une voiture. Un Mage Noir l'avait assassiné.

Ces deux faits faisaient parti des secrets les mieux gardés au monde : j'étais une sorcière et Lord Voldemort était de retour.

Je ramassai le petit sac à dos qui ne me quittait jamais et qui contenait mon nécessaire vitale dans une journée : un livre pour m'évader, les deux rouleaux de parchemins qui constituaient le devoir d'Histoire de la Magie que j'avais à faire pendant les vacances, des chocogrenouille, des patacitrouilles, un paquet de Prince, et surtout, rapidement accessible dans la poche extérieure, ma belle baguette en bois de Saule. Je descendis de ma balançoire et ramassai les sandales que j'avais déchaussées, faisant jouer ma baguette entre mes doigts. Je m'approchais du filet de corde dans lequel les enfants étaient censés grimpés, mais la moitié des cordes étaient si usées que le prochain gamin qui y poserait le pied choierait immédiatement sur le sol. Je pointai ma baguette dessus.

-Reparo.

Les fibres se ressoudèrent les unes aux autres et les cordes se tendirent à nouveau. Comme chaque fois que je lançai un sort à l'air libre, un sourire retroussa mes lèvres et une immense sensation de satisfaction m'envahit. Après cinq ans de frustration où les vacances arrivant j'étais forcée d'aller contre ma nature et oublier la magie car la loi n'autorisait pas les sorciers de premier cycle à user de leur baguette en dehors de l'école, je pouvais enfin me libérer. Faire enfin de la magie quand je me souhaitais et avais besoin avait fait parti de mes rares rayons de soleil de l'été, et je profitai de cette nouvelle liberté dès que je le pouvais : réparer des petites choses dans le village, faire ma vaisselle du déjeuner, faire taire l'insupportable perruche de notre voisin qui me réveillait en pleine nuit.

Je consultai la montre que m'avait offerte les Bones à mes dix-sept ans. Midi était passé, et mes parents devaient m'attendre pour le repas. J'attrapai mon vélo que j'avais abandonné à l'entrée du parc, et l'enfourchai. Un instant plus tard, je roulai dans les rues de Terre-en-Landes. Certains passants me jetèrent des regards insistants, et d'autres m'adressèrent un sourire et je n'en roulais que plus vite. Avant j'étais une gamine parmi d'autre, la fille du Pasteur. Maintenant j'avais l'impression qu'à cause de mon drame personnel, tout le monde se croyait obliger d'agir différemment avec moi, de m'accorder plus d'attention. C'était agaçant. Je préférais lorsque j'étais invisible.

Ma maison fut alors en vue et je garai mon vélo contre le mur du garage avant de monter les marches du porche à la volée. La porte était grande ouverte pour laisser l'air s'engouffrer dans la maison.

-C'est moi !

-Téléphone, Victoria ! me cria ma mère depuis le salon.

-Je ne prends pas – sauf si c'est Alex, maugréai-je en la rejoignant.

Ma mère m'adressa un sourire désabusé avant de me tendre le combiné d'un air entendu. Chacun disait que je ressemblai énormément à ma mère avec nos boucles brunes et nos traits slave – et pire que tout, la taille de naine dont j'avais hérité. Je pris le téléphone avec un soupir et m'installai à côté d'elle en le portant à mon oreille.

-Salut lâcheur.

-Salut cachottière ! Quoi de beau dans le monde merveilleux de Terre-en-Landes ? Il fait un soleil magnifique à Bristol !

-Ferme-la.

Ma mère me gratifia d'un regard torve et je levai une main pour m'excuser. Alexandre était mon frère de quatre ans mon aîné, et depuis le printemps il avait pris son indépendance pour habiter à Bristol, à une heure et demi de la maison familiale. J'avais visité son appartement au début des vacances, et il m'avait proposé de passer quelques jours chez lui ... pour me forcer dès le premier jour à aller déjeuner chez nos grands-parents maternels, Miro et Jaga Liszka. Ça avait été une épreuve de rester assise face à mon grand-père, immobile, l'esprit tourbillonnant de mille formules que je ne pouvais pas exprimer à voix haute. J'avais prétexté un mal de ventre pour vite partir, et était retournée à Terre-en-Landes le jour d'après. Depuis, Alexandre me tannait pour que je revienne mais c'était au dessus de mes forces. Je ne voulais pas croiser de nouveau le regard de mon grand-père. Pas maintenant.

Alors plutôt que de m'aventurer là-dessus, j'attaquai sur une pente plus savonneuse pour lui.

-Comment va Mel ?

Car ça avait été la grande information de l'été. Alexandre avait une petite-amie. Et une petite-amie dont il avait parlé au parent, ce qui en disait long sur le sérieux de la relation.

-Et toi, comment va Miles ?

Ah. Le problème avec cette information avait été que j'avais été forcé d'admettre que j'étais aussi en couple depuis le mois de mai, avec l'un de mes camarades de Poudlard Miles Bletchley. Mais c'était une information que je gardais secrète aux parents, alors je m'efforçai de garder un visage impassible face à la pique d'Alexandre.

-Très bien. Maman te dit bonjour.

-Je le lui ai déjà dit, s'étonna ma mère.

Mais Alexandre comprit ainsi que notre mère était à côté et qu'il serait dangereux de parler de Miles, et bon frère qu'il était il embraya :

-Mel va très bien aussi. Attends ... (sa voix cria dans la pièce) : ma sœur te dit bonjour, tu veux lui dire quelque chose ?

-Bonjour à elle ! répondit une voix étouffée, mais indéniablement féminine.

L'intervention de la fameuse Mel m'arracha un sourire, mais me mit également en garde. Pas de discussion sur la magie. Dieu que c'était pénible d'être une sorcière chez les moldus.

-Tu sais, si tu veux la rencontrer, il va falloir venir chez moi, m'attaqua une nouvelle fois mon frère avec malice. Disons, ce week-end ?

-Je suis très pris en ce moment. Et pas question ce week-end, je suis en mission.

-Aaaaah c'est vrai, la fameuse mission. Qu'est-ce que tu as prévu ?

-Tout dépendra s'il rentre avant, ou après le 7 août.

-Tu lui as trouvé un cadeau ?

-Ouaip.

-Parfait. Bon, quoiqu'il arrive prends des photos, et envoie-les moi, d'accord ? Je dois aller manger, on va au ciné cette aprem alors ...

-D'accord. Alors ... Bonne journée.

-Toi aussi. Et prends soin de toi, Tory.

Les tonalités du téléphone me heurtèrent les tympans une fois qu'Alexandre eût raccroché. Je remis le téléphone sur son socle, et captai le regard inquisiteur de ma mère sur moi.

-Tu parlais de Simon Bones ? s'enquit-t-elle de but en blanc.

-Euh ... ça se pourrait.

Les lèvres de ma mère furent déformées par une moue désapprobatrice. Pas qu'elle n'aimait pas Simon, mais elle avait toujours eu des réserves sur son côté sorcier. Ma mère n'était pas une grande fan de la magie : la religion et la science suffisaient amplement à faire tourner son monde. Mais la magie était une donnée avec laquelle elle n'arrivait pas à exister, ce qui faisait que j'en parlais le moins possible à la maison – et surtout, en faisait le moins possible.

-Ils rentrent quand de France ? s'enquit-t-elle poliment, malgré ses sourcils froncés.

-Bientôt, répondis-je en me trémoussant, gêné. Enfin, c'est ce que Susan m'a dit dans sa dernière lettre ...

Qui datait de la semaine passée. C'était l'un des mes griefs à leur égard : après m'avoir promis qu'ils seraient là pour moi, et m'écrieraient, leur hibou grand-duc Ogma s'était fait attaqué par une créature au début de l'été. Son aile s'était cassée, et la convalescence s'ajoutant à sa vieillesse relative, il ne pouvait plus faire de long voyage. Pour le laisser se reposer, ils l'avaient laissé chez eux, me permettant de l'utiliser pour envoyer des lettres à mes amis – Emily, Miles et même mes camarades de Gryffondor Angelina et Alicia. Mais j'aurais voulu avoir plus de nouvelles de Bones, plus que les deux petites lettres que j'avais pu recevoir. Simon avait vécu au milieu des moldus toute sa jeunesse : il devait être capable d'envoyer une carte postale.

La vengeance n'en sera que plus terrible, Bones.

-A TABLE !

Je grimaçai au cri de mon père, qui voulait couvrir les bruits de fritures et de vaisselles qui emplissaient la cuisine.

-Nuggets maison, ratatouille et pomme-de-terre, annonça-t-il gaiement quand ma mère et moi le rejoignîmes.

Un sourire effleura mes lèvres lorsque j'avisai le tablier ridicule qu'il avait passé. Mon père était un homme d'une humeur toujours égale, et toujours d'un calme absolu. Un sourire flottait continuellement sur ses lèvres, et ses yeux gris pétillaient sans cesse derrière ses lunettes rectangulaires. Ses cheveux tenaient maintenant plus du sel que du poivre, mais il relativisait en songeant que ça lui donnait plus de crédibilité en tant que Pasteur de la paroisse.

-Edward je t'en prie, râla ma mère en jetant un regard dégoûté au tablier. Si les gens te voyaient ...

-Je pense que tu devrais célébrer la messe comme ça, plaisantai-je en me servant en ratatouille. Beaucoup plus de gens viendraient.

-Victoria !

Mais mon père me gratifia d'un clin d'œil, et retira le tablier pour contenter ma mère.

-La prochaine fois ma chérie, tu n'auras qu'à faire la cuisine, et le tablier restera rangé.

-Hey bien vous aurez le droit à du surgelé.

-On ne mange pas de surgelé dans cette maison.

-Et je ne cuisine pas, il va falloir arriver à un compromis...

-J'en ai un : je cuisine avec le tablier.

Ma mère poussa un profond soupir, mais un sourire s'étira sur ses lèvres, et mon père couvrit sa main de la sienne. Je détournai le regard et commençai à manger, sachant très bien qu'à côté de moi mes parents se regardaient tendrement dans le blanc des yeux. Puis les bruits de couverts s'entrechoquant avec l'assiette me donnèrent l'autorisation d'à nouveau lever la tête.

-Tu ne manges que ça, chérie ? me demanda mon père.

Même s'il souriait toujours, je voyais bien la lueur alerte dans ses yeux, l'inquiétude au plus profond de son regard.

-Je n'ai pas très faim, prétendis-je en sachant très bien que ce n'était pas la phrase qu'il fallait répondre.

-Prends au moins un peu de pomme-de-terre, m'enjoignis mon père en me faisant glisser le plat. Je les ai cuites au beurre, à la française – et s'il y a bien un domaine dans lequel ils nous surpassent, c'est ça.

J'adorais mon père. Réellement. Malgré ses convictions religieuses, il n'avait jamais été ouvertement hostile à la magie – contrairement à ma mère – et depuis que j'étais rentré, les pincettes avec lesquelles il me prenait étaient douces, invisible. Jamais il ne me forçait, jamais il ne faisait ouvertement quelque chose simplement parce que mon meilleur ami était mort au mois de juin. Sa compassion et sa façon d'être là étaient discrètes, mais présente et c'était sans doute grâce à lui que j'arrivais si bien à supporter l'été et les rumeurs de Terre-en-Landes. Pour lui faire plaisir, je pris quelques pomme-de-terres, tout en sachant qu'elles resteraient sans doute dans mon assiette. Ma mère était moins discrète : je sentais son regard insistant sur moi, inquiet et inquisiteur, chaque fois que je détournai les yeux.

-Au fait, le sergent McCaught vient manger dimanche soir, nous apprit mon père.

-L'Ancien ? m'étonnai-je. Mais il est déjà venu la semaine dernière ...

-Chérie arrête de l'appeler comme ça. C'est un homme vénérable qui s'est battu pour notre pays, il mérite notre respect. Sa fille a déménagé dans le nord du pays, près de Newcastle, il se retrouve souvent seul, c'est notre devoir de faire en sorte qu'il ne se retrouve pas totalement isolé.

-Je serais chez Ethan.

Mais ma mère me lança un regard paniqué, le genre qui disait « ne me laisse pas seule ! ». Evidemment que ma mère était en accord avec la charité de mon père, elle était également profondément croyante et au fond, sous des tonnes d'irascibilité et de nervosité, elle était une bonne personne. Mais elle en voulait au Sergent McCaught d'avoir harcelé Alexandre pour qu'il s'engage pour aller combattre en Irak pendant la guerre du Golf. Je levai les yeux au ciel, cédant :

-Enfin, je pourrais peut-être m'arranger ...

-Ce serait parfait, Victoria, sourit mon père. Je te remercie.

-Oui ma chérie, merci.

Ma mère me tapota la main avec un sourire complice qui provoqua le froncement de sourcil de mon père. Il avala sa bouché de nuggets avant de me demander du bout des lèvres.

-Et tes amis de ton école ? Tu as des nouvelles – je veux dire, à part Simon ?

-Edward, enfin, lâcha ma mère en perdant son sourire.

J'étais moi-même si surprise que je ne sus quoi répondre, ma fourchette de ratatouille restant suspendue à quelques centimètres de mes lèvres. La seule personne que j'avais pu voir était mon petit-ami Miles, il y avait une dizaine de jour, mais j'avais dû ruser : j'avais pris le bus jusque Oxford pour m'éloigner un maximum de la maison, feignant rejoindre mon amie Chloé qui y était pour son stage de football. Et si je rusais, c'était justement parce que je savais que mes parents verraient d'un mauvais œil la venue de sorciers chez eux.

-Euh ... assez peu, éludai-je en laissant retomber ma fourchette. Ils ... euh ... n'utilisent pas la poste comme ...

-On sait comment ils communiquent, Victoria, me coupa ma mère, l'air de vouloir abréger la discussion le plus vite que possible.

Oui, je n'étais pas prête d'oublier l'expression de son visage la première fois qu'une chouette de l'école s'était engouffrée dans le salon. Les oreilles des murs saignaient encore du cri qu'elle avait poussé.

-Pas même le téléphone ? insista néanmoins mon père.

-Edward !

-Marian ?

Devant l'expression presque hostile du visage de ma mère, je laissai tomber mes couverts et me lever, mon assiette à la main.

-Je vais y aller ...

-Non ... Chérie ... (elle se prit le visage entre les mains en poussant un gros soupir). Je suis désolée, ma puce ... Simplement ...

-Je sais, maman, répondis-je d'une voix cordiale qui me parut fausse. Ne t'inquiète pas.

Je posais mon assiette dans l'évier, et sortis de la cuisine sans demander mon reste, la poitrine comprimée. Oui, je savais. Je savais qu'elle trouvait ça absurde, qu'elle n'arrivait pas à assimiler la moindre parcelle de mon monde – pas même moi. J'attrapai ma baguette et sortis dans notre jardin. Le soleil au zénith, il faisait une chaleur presque étouffante qui avait forcé les voisins à se barricader dans leurs maisons, fermants les volés pour garder la fraicheur de l'ombre. J'étais tranquille, au milieu des haies et je pus pointer ma baguette vers le ciel.

-Protego maxima.

Ma baguette trembla entre mes doigts et l'espace d'une fraction de seconde, un dôme apparu autour de ma maison avant de s'évanouir tout aussi vite. C'était l'unique chose que mes parents me laissaient faire depuis que j'avais expliqué comment était mort Cédric, et qu'un dangereux mage noir évoluait maintenant autour de nous. C'était peut-être parce qu'elle avait entendu plus de mot magique en une soirée qu'en cinq ans que ma mère était aussi nerveuse. Mais elle n'avait pas eu le choix : j'étais en larme, paniquée, les suppliant de me laisser jeter des sorts autour de la maison. Ils avaient accepté plus par désarroi que par réelle compréhension.

-Victoria ?

Mon père venait d'apparaître sous le porche, les mains dans les poches. Surprise, je dissimulai ma baguette derrière moi pour la soustraire au regard de mon père.

-Désolée.

Je ne savais pas franchement pourquoi je m'excusai. D'utiliser la magie ? D'être revenue dans un état déplorable ? De leur imposer ça ? Mon père soupira, et s'assit sur les marches avant de tapoter la place à côté de lui. Je le rejoins avec appréhension, tentant toujours de cacher ma baguette.

-C'est moi qui suis désolé. Avec ce qu'il t'arrive, on devrait te laisser parler plus librement de ça.

C'était la première fois que mon père me parlait de la mort de Cédric aussi ouvertement depuis le soir où il m'avait autorisé à lancer des sorts autour de la maison. La douleur toujours en embuscade dans ma poitrine choisit ce moment pour m'assaillir et les larmes me montèrent mécaniquement aux yeux.

-Ne t'en fais pas. Ça va, je suis habituée.

Mon père me contempla longuement de ses yeux gris – couleur dont j'avais hérité. Peut-être l'unique chose que je tentais de lui, avec cette capacité agaçante à faire passer les besoins des autres avant les miens. Son regard tomba sur ma main, et sa bouche se tordit en un pli indécis.

-Je peux ?

Je mis un long moment à comprendre qu'il me demandait ma baguette. Le choc chassa la douleur et les larmes. C'était proprement surréaliste. Par automatisme, je tendis la mince tige de bois et mon père la prit avec révérence. Il l'examina, l'effleurant du bout des doigts, presque fasciné.

-Elles sont toutes comme ça ?

-Non, répondis-je, toujours hébétée. Il y en a de tout bois, de taille, et de cœur différent.

-Cœur ?

-La substance magique qui donne ses pouvoirs à la baguette. La mienne contient du crin de licorne.

Mon père se fendit d'un « ah » qui se voulait compréhensif, mais qui sonna plus comme l'expression de son incompréhension.

-Elle est en bois de Saule, ajoutai-je avec douceur. Ollivander, l'homme qui me l'a vendu, m'a dit que la baguette choisissait son sorcier, et c'est elle qui m'a choisi.

-Et celle de Simon est différente ?

-Je ne me souviens plus de son bois, mais lui a une plume de phénix, je crois.

-Je vois.

Après une dernière inspection, il me rendit ma baguette par la pointe. Je la fis tourner entre mes doigts et sans que je ne le décide, des étincelles dorées jaillirent soudainement, faisant sursauter mon père.

-Désolée, m'excusai en posant ma baguette sur mes genoux. Elles sentent nos troubles et parfois ça se déclenche tout seul.

-Rose Bones nous avait expliqué que tu n'avais pas le droit de faire de la magie tant que étais mineure, alors comment ... ?

-La majorité des sorciers est à dix-sept ans, expliquai-je, mal à l'aise. Donc maintenant je peux utiliser la magie. Enfin, en théorie.

Mon père me contempla un long moment, ses yeux parcourant mon visage comme s'il voulait le graver dans son esprit. Il effleura tendrement mes cheveux.

-Seigneur, oui c'est vrai, tu as dix-sept ans ... Je te vois à peine grandir.

-Ça c'est parce que j'ai la même taille qu'à dix ans.

Un rire secoua la poitrine de mon père, mais il ne me lâcha pas du regard. Après quelques minutes où je me trémoussai, embarrassée, il tapota mon épaule et se leva.

-Allez viens. Dix-sept ans, c'est l'âge où j'ai appris à conduire : à ton tour.

***

-Combien de fois ?

-Quatre, et arrête de rire.

-Tu as calé quatre fois ?!

Ethan rejeta sa tête en arrière et s'esclaffa bruyamment. Nous revenions de Ellen's Café, l'unique restaurant du coin et une couleur indigo s'étendait dans le ciel. C'était un dimanche, et les automobilistes se faisaient rare, si bien que nous marchions à même la route, les mains dans les poches. Je plantai mon coude dans ses côtes.

-Arrête de rire. Sinon j'irais dire à Tracy Connelly que tu as flashé sur elle.

Ethan s'étrangla d'indignation qui vainquit son hilarité. C'était un garçon avec quelques formes, adaptes de jeux vidéo et de jeux de plateau, aux cheveux bruns et au visage franc et rond. Et d'une incroyable naïveté – penser que personne n'était au courant de son béguin pour la serveuse du café ... Il était l'un des uniques vestiges de notre groupe de Terre-en-Landes : Chloé était à son stage à Oxford, Simon en France, Tracy, un an plus jeune que nous, avait travaillé tout l'été dans le café de sa mère, et son grand frère Liam, le meilleur ami d'Alexandre, était allé vivre à Gloucester. Alors puisque tout le monde nous abandonnait nous restions à deux. Ethan tira sur la cigarette qu'il venait d'allumer.

-Un coup bas, ça Vic'. J'ajouterais que si tu fais ça je dirais à tes parents pour ton mec.

-Fais donc. Je crois qu'il y a un trou de creusé au cimetière : je sais pour qui il sera.

-J'en reviens pas que tu t'aies un copain, d'ailleurs. Je te pensais du genre à finir célibataire. Ça fait combien de temps ?

-Trois mois. T'as des nouvelles de Chloé ?

Ethan expira un nuage de fumé malodorant et me te tendit sa cigarette, le sourcil haussé de façon entendue. Maugréant silencieusement contre ma faiblesse, je la pris entre mes doigts et tirai une bouffée qui brûla mes poumons mais détendit mes muscles. Je ne fumais pas souvent : seulement pendant les vacances, et souvent lorsque l'alcool m'y poussait, mais je m'étais autorisée quelques écarts cet été en piquant les réserves d'Ethan. Il finit par me l'arracher des mains en constatant que j'avais grillé la moitié de la cigarette.

-T'es vraiment une ruine, râla-t-il en levant les yeux au ciel. Achète-toi un paquet, ma grande. Bref, sinon, Cholé rentrera pas avant mi-août, après son stage elle part voir sa sœur à Brighton. Il faut se faire une raison, ma grande : on grandit. Certains vont en vacance, d'autres prenne des boulots, Simon et toi qui êtes partis les trois-quarts de l'année, et un jour on se retrouve à devoir quitter le village. C'est la vie.

-C'est déprimant.

-Je n'ai pas dit le contraire mais c'est la vie.

Comme la vie était cruelle ... Avant de ne m'enfoncer dans la mélancolie, je secouai ma tête, me concentrant sur le fait qu'Ethan lui était là – et vivant – et que je devais vite passer chez les Bones pour le courrier. Leur maison était en vue, et je sortis les clefs que Rose m'avait confiées de mon sac à dos. Ethan s'installa à même la pelouse, sortant comme par magie sa gameboy : il avait compris que je ne préférais pas qu'il rentre. Après tout, il était moldu ... et je voulais pouvoir lire La Gazette tranquillement. J'insérai la clef dans la fente et la porte s'ouvrit avec un grincement sinistre. Ça me faisait toujours un drôle d'effet d'entrer dans une maison vide : j'avais l'impression de violer l'intimité de quelqu'un, d'entrer dans un lieu dans lequel je ne devais pas poser les pieds. Après avoir vérifié qu'Ethan était bien absorbé par son jeu, je sortis ma baguette pour allumer les lumières de la maison et fermer les volets pour la nuit. Le lampadaire près de la cheminée éclairait le visage de George Bones, et de ses frères et sœur : Edgar et Amelia. Et sur la console dans l'entrée, des photos attiraient irrémédiablement mon regard. Une de la famille Bones dans son ensemble : George et Rose se tenaient par les épaules devant une Susan qui levait sans cesse la main devant son visage pour ne pas être photographiée. Caroline, l'ainée, souriait au contraire franchement à la caméra, et Simon, qui avait à peine douze ans sur l'image, se cachait derrière sa mère. La seconde était celle de deux garçons : le premier était un adolescent d'une quinzaine d'année au sourire malicieux, et le second bien plus jeune, peut-être six ans, qui agitait sa petite main d'un air craintif. Le premier tentait de faire des oreilles de lapin à son frère mains une main féminine surgissait du cadre pour l'en empêcher. Il s'agissait des enfants d'Edgar Bones, tués avec lui et sa femme près de quinze ans auparavant par des disciples de Voldemort. Mue d'une impulsion soudaine, j'ouvris le cadre pour en extraire l'image. A l'arrière, au crayon de bois quelques mots étaient griffonnés.

Matthew et Spencer, 7 août 1978.

7 août 1978. Je fouillai le décors du regard : ça pouvait correspondre à une chambre d'hôpital. C'était le jour de la naissance de Simon : ils avaient dû aller visiter leur nouveau cousin. Je fixai les mots griffonnés d'un regard vide. C'était la première fois que je découvrais le prénom des garçons, et cela me fit un drôle d'effet. Comme si je leur donnai une identité. Et savoir que ces deux êtres humains nommés Matthew et Spencer avaient été tués trois ans plus tard laissait un goût amer dans ma bouche. Mon regard se posa plus particulièrement sur le plus jeune d'entre eux, ses cheveux clairs et cet air timide typique de l'enfance ... 

C'était ce à quoi il fallait s'attendre, maintenant. A voir des enfants mourir.

Ce furent les hululements stridents d'Ogma qui m'arrachèrent à ma rêverie. Je rangeai la photo dans son cadre et abandonnai les deux gamins sur la console. De l'autre côté de la maison, Ogma pillait, agitant passivement ses grandes ailes en dardant sur moi ses yeux jaunes.

-Ça va, j'arrive, marmonnai-je en extrayant du tiroir les miam-hiboux. T'es revenu quand, toi ?

Pour toute réponse, Ogma lâcha un cri strident et prit si vivement la friandise que j'en retirais rapidement la main, prise de peur pour mes doigts. Maintenant que l'oiseau était satisfait, je pouvais détacher la lettre qui pendait à sa patte. Elle venait de ma meilleure amie, Emily. Elle avait vu Roger Davies pendant les vacances, me racontait-elle, et son frère Sullivan n'était pas guéri de son crush pour Susan Bones. Cédric lui manquait, mais elle allait mieux, m'assurait-t-elle – même ses parents avec qui elle s'entendait mal y veillait. Je rangeai la lettre dans mon sac, soulagée. Emily s'était totalement écroulée à la mort de Cédric, si bien que j'avais crains que son état ne s'empire pendant l'été. J'avais essayé d'aller la voir, mais chaque fois elle avait décliné, jurant qu'elle allait bien. J'espérai de tout cœur que c'était vrai : il serait lourd d'avoir à la rentrée, en plus du fantôme de Cédric flottant dans les couloirs de Poudlard, une Emily éplorée à soutenir.

Après avoir nourri Ogma, et nettoyé sa cage, je retournais dans le vestibule où une pile de Gazette du sorcier prenait la poussière. Un autre numéro ainsi que plusieurs lettres s'étalaient sur le sol, signe du passage des hiboux et du courrier. Je ramassai le courrier pour le mettre sur la table de la salle à manger, avec les autres lettres. Beaucoup étaient frappées du sceau du Ministère de la Magie, où les époux Bones travaillaient. Oubliant Ethan qui m'attendait dehors, je m'installai sur une chaise pour déplier La Gazette, intriguée. Je lus plusieurs articles, mais deux me frappèrent. Le premier racontait l'histoire d'une femme, Alma Thomasson, persuadée que son voisin moldu s'introduisait chez elle pour voler son journal, et en avait alerté jusqu'aux Aurors pour que cela cesse. « Une histoire abracadabrante digne de Harry Potter ! » écrivait ensuite le reporter. Le second concernait mon directeur, Albus Dumbledore, à qui il était question de lui retirer l'ordre de Merlin.

-On croit rêver, marmonnai-je en refermant le journal.

Ce n'était pas les premiers articles du genre que je lisais depuis le début de l'été. La Gazette prenait un malin plaisir à glisser de genre de petite phrase concernant Harry Potter, sur les bases d'un article qu'avait écrit une journaliste, Rita Skeeter, présentait le garçon comme fou. Quand à Albus Dumbledore, c'était par le Ministère qu'il était malmené. Pas plus tard que la semaine dernière, ils l'avaient poussé à quitter la présidence du Magenmagot. Les deux harcèlements avaient un même but et une même tête : Cornelius Fudge refusaient qu'on croit ce que Harry et Dumbledore clamait depuis la mort de Cédric.

Il avait été tué par Lord Voldemort. Et celui-ci était de retour.

Je reposai La Gazette au milieu des autres, déprimée par les nouvelles. Fudge était un idiot de ne pas croire Dumbledore, et en plus de ça il nous mettait tous en danger. A l'heure actuelle et en toute impunité, le mage noir devait reformer son armée sans être inquiété. Sans compter que c'était une criante insulte à la mémoire de Cédric. Peut-être que Dumbledore pouvait faire quelque chose ... Mais que se passait-il si Dumbledore était seul ? Seul contre Voldemort et son armé ?

Et comment ça se passerait à Poudlard, maintenant que Dumbledore avait perdu la confiance du Ministère ?

Les interrogations me reprenaient chaque fois que je passais la porte des Bones. Ce qui faisait que chaque fois j'en ressortais avec un goût amer dans ma bouche, le cœur serré et la tête pleine d'une tonne de pensée négative. Cette maison était mon petit sanctuaire de magie dans un monde qui en était dépourvue – tout comme Susan et Simon représentaient ma maison une fois à Poudlard. Mais c'était devenu un sanctuaire vide et déprimant que je quittais sans me retourner. Ethan se redressa en entendant la porte se refermer et rangea prestement son jeu dans sa poche.

-Tu rentres chez toi ? s'enquit-t-il alors qu'on s'éloignait de la maison.

-Ouais, mon père a invité l'Ancien à manger ...

-Outch. (Il tapota mon épaule d'un geste compatissant). Bonne chance ma vieille. Tu me diras combien de fois il répétera qu'il a vu deux femmes se battre pour un rognon de cheval.

J'eus un sourire amusé et le saluai d'un signe de main à l'intersection.

Seigneur oui. Ça allait être folklorique.

***

Et Dieu que ce le fut.

Le Sergent Jeremy McCaught était un homme qui avait dépassé les quatre-vingt dix ans, et qui se déplaçait depuis dix ans et une opération de la hanche en fauteuil roulant. Vétéran des deux guerres mondiales, il était le premier à chanter le God Save the Queen que ce soit lors de la fête nationale ou pendant un match de foot, à se mettre au garde à vous chaque fois qu'il passait devant l'Union Jack et qui tout les dimanches revêtait son vieil uniforme de militaire. C'était le cas ce soir, et il mangeait son képi posé à côté de lui, ses décorations luisant sur sa poitrine creuse. A présent, il flottait dans son uniforme et ses mains parcheminées se crispaient telles des serres osseuses sur ses couverts. Ses lèvres fines étaient sans cesse relevées en un rictus et ses petits yeux luisaient d'une désapprobation continuelle. Tout comme sa langue, qui fourchait à mesure que le repas avançait et que le niveau de vin diminuait :

-Et t'as vu la nouvelle coupe de la petite Connelly ? A quoi ça lui sert franchement, d'avoir des cheveux rouges comme ça ? J'aime pas. Ça fait pute.

-Excusez-moi Sergent, intervint mon père avec un sourire tendu. Mais il y a des mots qui se prononce pas, ici ...

-Scuse-moi Edward. Le dessert est très bon, Marian.

-C'est moi qui fait la cuisine.

-Aaah.

Ses yeux se posèrent sur ma mère avec une certaine désapprobation. Il était inutile de préciser que l'Ancien était de l'ancienne école, et qu'une femme qui ne faisait pas la cuisine était une femme inutile. Ce fut avec un soulagement infini que je le vis finir sa part de tarte, et je me dépêchais de débarrasser les assiettes pour monter le plus rapidement que possible dans ma chambre. Mais à peine avais-je posé le pied sur l'escalier que la voix de ma mère fusait :

-Chérie ? Tu peux raccompagner le Sergent chez lui ?

-J'ai besoin de personne, Marian, et surtout pas de ta gamine. T'as vu sa taille ? Vous lui avez donné quoi à manger ?

Le tint de ma mère devint cramoisi, et ses yeux flamboyèrent si fort que je me recroquevillais.

-On ne va pas vous laissez rentrer seul, Sergent, intervint mon père pour éviter l'incident diplomatique. Il fait noir, soyez raisonnable ...

C'était demandé un miracle, songeai-je en me rapprochant du fauteuil de l'Ancien. Il n'était pas connu comme étant un homme raisonnable. Avec un regard noir pour mes parents qui m'infligeaient une telle épreuve, j'aidais mon père à faire descendre les marches au fauteuil, et en empoigner les poignées pour avancer dans la rue. Les réverbères jetaient une lumière froide sur les rues, quand ils n'étaient pas éteints, nous plongeant dans l'obscurité. Les roues du fauteuil crissaient affreusement sur le béton, et pourtant l'Ancien trouvait le moyen de les couvrir de sa voix criarde :

-Et franchement vous les jeunes ne sait pas pourquoi vous avez besoin de toute ses choses, comme les gadgets qu'a Ethan Smith là. Ça va vous abrutir totalement, comme la télévision franchement ! Mon petit-fils passe sa vie devant cet écran, il en devient complétement débile ! A quoi ça vous sert franchement ? C'est inutile, du superflue ! Moi quand j'étais petit je n'avais que des jouets de bois et des soldats de plomb, et j'étais très content !

-Ah ...

-Au moins on avait de vrais rapports, on allait dehors, on s'amusait d'un rien ! Et on a pas été traumatisé, non non. Ça nous a servi pour plus tard : crois-moi ma petite, il fallait être un petit peu social pour survivre dans les tranchées. Parler, on avait que ça entre deux feux ...

-C'est vrai ?

-Bien sûr que c'est vrai petite cruche ! Franchement la société d'aujourd'hui, vous avez beaucoup trop de trucs. C'est les américains ça : ils ont inondé notre monde de trucs inutiles ! Alors qu'on a dû se battre, ha ! Moi ma petite, après la seconde guerre mondiale j'ai vu deux femmes se battre pour un rognon de cheval !

Ah. Il faudrait que je raconte ça à Ethan. Je tournais à l'angle de la rue qui abritait la maison de l'Ancien, l'une des plus reculée et des plus vieilles du village. Beaucoup de maison était d'un style victorien qui aurait pu être plaisant si elles n'étaient pas totalement délabrées. L'une d'entre elle était même dans un tel état de dégradation qu'on l'avait surnommé la « maison hantée » de Terre-en-Landes. Je savais que Chloé et Ethan y passaient leurs Halloween – quand ce n'était pas carrément dans le cimetière.

-Entre jamais là-dedans.

-Pardon ?

Le visage fermé, l'Ancien désigna la maison hantée. Presque toutes les fenêtres du premier étage étaient cassées et plusieurs tags décoraient les murs.

-Cette maison. Y'a une drôle de famille qui y habitait, dans le temps. Des gens bizarre. Mon grand frère Stephen aimait bien aller voir s'qui s'y passait avec ses copains. Une fois il est revenu ... Jamais été le même. 'Fin c'est mes parents qui m'ont raconté, c'était avant ma naissance. Juste après la famille bizarre a fichu le camp, et plus personne n'est resté plus d'un an dans cette maison. Bref, cette maison est maudite.

-Ah.

Mais cette fois c'était un vrai « Ah » intéressé, et je contemplai la maison avec un regard nouveau. J'ignorais que la sombre réputation de la maison nous précédait, et avec mes connaissances ça faisait sens. Je savais que Terre-en-Landes avait été un ancien village à forte population magique mais qui se dépeuplait de sorcier avec les décennies. Ne restaient que les Bones et les MacDougal qui habitaient l'autre bout du village et dont l'aînée devait entrer à Poudlard cette année. Peut-être que la famille étrange qu'évoquait l'Ancien était une famille sorcière – et ça rendait la maison d'autant plus intéressante.

Celle de l'Ancien fut bientôt en vue, et je le laissai sur son parvis avec un « au revoir » marmonné entre les dents. Son salut fut encore plus bref, un simple grognement sonore alors qu'il ouvrait sa porte. Alors que je repartais dans la rue, j'entendis ses marmonnements inintelligibles puis enfin sa porte se referma sur lui, et je levai le visage vers le ciel avec un gros soupir.

-Amen.

Mon regard resta fixé sur les cieux et je finis par m'immobiliser au milieu de la route, les mains enfoncées dans les poches de ma veste. La pollution lumineuse nous empêchait d'apprécier la réelle beauté du ciel. Mon père m'avait un jour raconté qu'une chandelle à un kilomètre rendait les étoiles moins visibles à nos yeux. La lumière tuée par la lumière. Je songeai vaguement, le cœur étreint par la douleur, que Cédric figurait à présent parmi ces étoiles qui tremblotaient dans le ciel.

Son sourire aimable et ses yeux gris et rieurs flottèrent un instant dans mon esprit. Cédric avait été mon socle pendant des années. Il était celui qui m'avait pris par la main pour m'intégrer à ma Maison, me poussant à entrer dans l'équipe de Quidditch, à m'ouvrir à Emily et arbitrant mes disputes avec Simon. Mon ange gardien, en un sens car ma vie à Poudlard en avait été transformé. Le premier septembre, je ferais ma première rentrée sans lui, et plus le temps avançait, plus j'appréhendais ce moment. J'ignorais comment j'arriverais à avancer sans Cédric.

Réprimant les larmes et repoussant le fantôme de mon ami, je me remis en marche. Mes pas m'amenèrent devant la Maison Hantée. Intriguée par les paroles de l'Ancien, j'avançais vers elle. Je passai les haies qui poussaient de façon diffuses, si bien que j'avais l'impression de passer une véritable jungle. Les marches gémirent sous moi et la fenêtre brisée me renvoya mon visage blafard. Entre la crasse et les souillures, et la lumière froide des réverbères j'avais l'impression d'être le fantôme qui hantait la maison. La porte restée ouverte des décennies durant était déjà entrouverte et je n'eus aucun scrupule à la passer.

La pièce principale était affreusement vide, couverte de poussière et l'odeur de renfermé qui émanait de l'air me fit froncer du nez, puis m'arracha une quinte de toux. Les yeux larmoyants, je sortis ma baguette de ma poche.

-Lumos.

Un faisceau de lumière éclaira la poussière en suspension dans l'air, rendant la pièce encore plus trouble. Ne restait comme unique ameublement un vieux sofa dont la couleur était passée et les ressorts avaient depuis longtemps percé le tissu. Je laissai ma main courir sur la plinthe près de la porte, rendue rugueuse et irrégulière par les ans. Un jour mon professeur de sortilège, Filius Flitwick, nous avait expliqué que les enchanteurs les plus doués pouvaient sentir la vibration de la magie en effleurant un objet. J'aurais aimé être capable d'entendre cette tonalité, de sentir le cœur battant de l'enchantement au sein de cette plinthe, mais la seule chose que je récoltais en y passant mes doigts fut une écharde qui se planta dans mon doigt.

-Aïe !

-Toujours aussi maladroite, Victoria.

Affolée, j'agrippai ma baguette et pointai le faisceau lumineux sur la porte où une silhouette venait de se découper. Une silhouette familière qui avait grandi de quelques centimètres et dont les cheveux décolorés par le soleil étaient plus blonds que jamais. Elle ouvrit les bras de façon théâtrale.

-Salut ! s'exclama Simon Bones avec un immense sourire. Alors, à une demi-heure de mes dix-sept ans, qu'est-ce que tu as prévu ?

Je restai un instant stoïque, le cœur battant d'effroi. Puis une colère sourde et soudaine vint courir les veines, et je lâchai ma baguette pour gifler Simon à toute volée. 

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro