Réveil Brutal
-ROSE !!!!
Arsenic se redressa, haletante. Elle commençait à en avoir marre de la redondance de ses cauchemars, toujours aussi semblables mais toujours aussi poignants. Elle soupira et balança ses couvertures au sol en poussant un léger grondement. Elle regarda autour d'elle pour constater qu'elle s'était encore endormie dans son laboratoire, plus précisément sur son canapé. Autour de celui-ci étaient éparpillées différentes notes.
Ses sœurs entrèrent dans le labo, une légère forme d'inquiétude sur le visage.
-Quel est le problème, demanda Night ? Encore un cauchemar ?
-Ouais, plutôt, répondit la cadette en baillant. Retournez vous coucher, j'ai du boulot.
-Et demain matin quand on viendra te réveiller à 11h30 tu nous salueras avec des mots gracieux et élégants tels que "va te faire foutre" ou "encule-toi sur un chêne", ricana l'aînée ?
Arsenic sourit et remarqua qu'Elsa était en train de s'endormir debout, ce qui déclencha un fou rire fatigué chez les deux rouquines, réveillant la petite sœur qui leur lança un regard rempli de fatigue, d'interrogations et d'agacement avant de retourner se coucher.
Night réussit à se calmer tant bien que mal et finit par imiter la jeunette, laissant la rouquine à ses réflexions. Elle eut une pensée pour Hélène et Marie-Antoinette, dont la chambre était juste au-dessus de la pièce qu'elle avait aménagé en temps que laboratoire. Elle se dit que ça n'allait pas arranger l'humeur de l'ancienne reine de France.
Quand son aînée et les adolescentes étaient revenues avec en prime un dieu corneille blessé, Arsenic s'était dit qu'ils avaient eu de la chance que les deux femmes aient été contraintes de s'absenter pour faire un rapport de leur expédition chez les elfes aux employeurs d'Hélène. Crow était arrivé quelques temps après pour récupérer Raven tandis qu'elle se chargeait d'apprendre ce qu'il s'était passé auprès de Night, qui avait tenté de lui faire un résumé des évènements le plus complet possible.
En apprenant que c'était Colombe qui les avait mis dans ce état et qu'Ophélie avait pu boire le sang de cette dernière pour la faire fuir, Arsenic s'était alarmée, et elle qui voulait dans un premier temps cacher ce qu'il s'était passé avait changé d'avis avec la ferme intention de protéger tous les habitants de la maison. De ce fait, lorsque tout le monde fut à peu près soigné, elle avait parlé de cela à Hélène et Marie-Antoinette, et si la première s'était montrée compréhensive et avait fait preuve d'une inquiétude manifeste envers les deux ados, la seconde s'était énervée et ses remontrances avaient déclenché une dispute entre la mère et la fille. Résultat : Ophélie se retrouvait privée de sortie, et elle refusait de sortir de la chambre de Luna pour autre chose que les allers-retours toilettes et douche.
Aussi Arsenic tentait de son mieux de retrouver la formule du poison qui avait tué ce baron il y a des années de cela, ce baron non-humain qui était en réalité le dieu-ours. Un type qui voulait faire fructifier son entreprise en épousant la fille d'une riche famille, mais qui s'était révélé être gênant pour beaucoup de monde.
Ce poison pouvait tuer n'importe quel être, et se trouvait être très efficace contre les dieux anciens. Cependant elle en avait perdu la formule en même temps que son cirque. Elle se souvenait cependant de la base de cette dernière, et elle faisait de son mieux pour l'exploiter, mais le manque de temps dû à la protection de la maison qu'elle assurait et les commandes qu'elle devait remplir.
Elle avait décidé de s'y intéresser avant de tomber dans les limbes du sommeil en s'écroulant sur son canapé, ce qui n'était absolument pas prévu, pas plus que son mauvais rêve.
La démone contempla un petit instant les bagues qu'elle portait à ses annulaires. La noire, vestige de sa défunte femme, était à ceignait celui de sa main droite. La rouge, reste de feu son mari, ornait l'autre annulaire. Elles étaient étonnamment bien conservées au vu de leurs âges respectifs. Ils lui manquaient, mais elle faisait avec.
Arsenic soupira en se tirant de ses rêveries et monta les escaliers, se décidant à se faire un bon thé, et peut-être piquer un peu de chantilly. Et pendant que le thé à la réglisse était en train d'infuser, elle vida sans la moindre discrétion la moitié de la bombe de chantilly dans son gosier.
Désireuse de profiter de la nuit, elle sortit avec son thé dans le jardin, passant devant le salon où Gauthier et Luna étaient en train de discuter en les ignorant volontairement. Elle savait que le jeune homme vivait au grenier depuis qu'il avait mis un pied à l'intérieur de la maison, mais comme elle ne le considérait pas comme une menace, elle s'était tue à ce sujet.
Allongée dans l'herbe, elle fixa la voûte étoilée qui déroulait son panorama sombre constellé de diamants sous ses yeux. Elle restait silencieuse, profitant de l'instant, lâchant des râles de mécontentements accompagnés d'insultes fleuries à l'attention des voitures qui troublaient le calme nocturne.
Mais bien vite, une étoile filante d'une blancheur immaculée troubla son repos.
-Bonsoir, démone.
Arsenic se redressa, un air assez méchant sur le visage en voyant que Colombe troublait son repos :
-Qu'est-ce-que tu me veux connasse ? Non parce que ce soit clair, j'ai pas envie de m'énerver ce soir, alors t'es priée de bien vouloir dégager de ce jardin, parce que non seulement c'est une propriété privée mais en plus t'es pas la bienvenue.
"Enfin, ce n'est pas comme si tu pouvais entrer dans la maison, pensa la rouquine."
-Je tiens juste à faire passer un message, je m'occuperai de tes péchés un autre jour.
-Dois-je te rappeler QUI a foutu ma vie en l'air, grogna Arsenic, tentant de calmer sa respiration saccadée par la haine ? Je me demande sincèrement qui est la plus pécheresse de nous deux.
-Je n'ai tué que quand c'était nécessaire, mais là n'est pas le débat. J'ai un message à faire passer à Hélène Faust. Et à Marie-Antoinette également. Je leur demande de me confier leurs filles.
-Et pourquoi ça ?
-Parce qu'elles sont dangereuses et qu'elles doivent être éliminées.
-Tu te fous de moi j'espère ?! Elles ont 16 ans, c'est pas parce que leurs puissances sont très importantes qu'on doit forcément les faire disparaitre ! Ce genre de choses, on apprend à les contrôler, on s'en débarrasse pas pour garder son cul bien au chaud à l'abri d'une potentielle menace, sinon il y a longtemps que, selon tes propres critères, tu serais morte.
-Je suis raisonnable, pas elle.
Arsenic se retint de crier :
-Toi, raisonnable ?! On bute quelqu'un que tu apprécies de façon définitive et toi, ta réaction, c'est de buter tous ceux à qui les assassins tiennent !!
-Tu agis exactement de la même manière.
-Sauf que moi je ne suis pas raisonnable imbécile !!
Colombe leva la main, lui faisant signe de se taire, et changea de sujet :
-Rajoute à mon message la chose suivante : si ces femmes refusent de me confier leurs enfants pour que je les mène à la mort, alors je serai contrainte de les assassiner elles. Elles ont 3 jours pour se décider. Sur ce, au revoir.
Avant qu'Arsenic n'eut pu laisser libre cours à sa colère, Colombe s'éleva dans le ciel nocturne.
La démone poussa un profond soupir énervé, donna un grand coup de pied dans son thé bouillant et entra dans la maison en se retenant de claquer la porte. Peu lui importait que sa logeuse et l'ancienne reine de France soient en train de dormir, c'était un cas de force majeur. Elle ouvrit à la volée la porte de la chambre, découvrant Hélène était en train de lire et Marie-Antoinette réveillée en sursaut. Elle ne prit pas le temps de les saluer ou d'attendre que l'endormie soit bien réveillée et leur relata la conversation qu'elle a eu avec la déesse à peine quelques secondes plus tôt.
Les deux femmes restèrent silencieuses quelques instants avant qu'Hélène ne prenne la parole :
-Bien, j'irai faire mon testament demain matin. Je suppose que Colombe me trouvera bien toute seule.
-Attend, tu vas quand même pas céder, protesta une Marie-Antoinette éberluée ?!
-Je n'ai aps le choix, même si je voulais rester ici toute ma vie, il y aurait forcément un moment où l'une de nous sortira. Je compte donner ma vie à ma fille, comme j'ai prévu de le faire à sa naissance si ça se révélait nécessaire.
Arsenic ne montra aucune émotion. Hélène lui sourit et lui dit :
-De toutes façons, toi, tu récupéreras mon âme, n'est-ce-pas ?
-Madame Faust, laissez-moi vous avouer que je n'en ai pas envie. Je laisserai votre âme sauve, votre mort est malheureusement prématurée, j'estime donc n'avoir aucun droit sur elle.
-Pourquoi me vouvoyer d'un coup, sourit l'humaine ?
-Il parait que c'est ce qu'il faut faire avec les gens que l'on respecte. Marie-Antoinette ?
-Je... Je vais mourir aussi, mais... Il... Il faut que je m'habitue à cet état de fait, je...
-Tu as peur, Marie, demanda son amie en passant un bras par dessus son épaule ?
-O-oui...
-Il faut que tu t'habitues au fait que tu vas mourir. Je sais ce que tu ressens, tu es oppressée, perdue, tu penses à toutes les choses que tu aurais aimé faire et à toutes celles que tu regrettes, et surtout tu as peur du souvenir que tu laisseras derrière toi à ton enfant.
Marie-Antoinette eut l'air surprise :
-Comment une démone telle que toi peut-elle être consciente de telles choses ? Tu lis mes pensées ?
-Non, je l'ai simplement vécu. Bonne nuit mesdames, et, surtout, essayez d'avoir le sourire demain.
La démone quitta la pièce à pas de velours, laissant les deux femmes accepter leurs sorts... chacune à sa façon.
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