Mon père
Ce soir, papa rentre très tard. Encore.
Je l'attendais devant les télé, les yeux rivés sur l'écran dans un noir presque complet, les genoux repliés devant moi, assis sur cet inconfortable canapé, presque perdu au centre d'un appartement aux senteurs de tabac froid.
Dès qu'il passa la porte, je tournais la tête vers lui. Il me demanda tout en essuyant ses chaussures couvertes de terre :
-Qu'est-ce-que tu fais debout ? Et le collège alors ?
-Y a grève demain, répondis-je en reportant mon attention sur l'écran.
-Hm.
Il finit par retirer ses vieilles baskets et s'assit à côté de moi.
-Il est quand même 2 heures du matin, tu ne devrais pas tarder à aller te coucher.
Je ne répondais pas.
-Hé ho ! Je te parle !
-J'ai entendu, répliquais-je, irrité.
-Et tu comptes m'obéir quand ?
Je me tus quelques secondes avant de sortir la question qui me trottais dans la tête depuis déjà près d'une semaine :
-Pourquoi ?
-Pourquoi quoi ?
-Pourquoi tu te forces à sortir aussi tard alors que t'es au chômage ?
Il resta silencieux quelques secondes puis me dévisagea d'un air interloqué, du moins c'est ce que j'ai cru voir grâce au peu de luminosité généré par la télévision :
-Qu'est-ce-qui te fait dire ça ?
-Fanny s'inquiétait pour ce que nous allions devenir. C'est elle qui m'a tout dit.
Le père de Fanny et le mien étaient collègues. Il est normal qu'elle soit au courant du licenciement de mon père. La seule chose anormale est que ce dernier ne m'ait rien dit, en plus du fait qu'il continue de quitter et revenir chez nous comme s'il bossait vraiment.
Mon père grogna et se leva et alluma la lumière. Son regard s'était fait grave.
-Fiston, j'ai quelque chose à te dire.
J'éteignis la télévision, baillai et le fixai dans les yeux.
-Vas-y, je t'écoute.
-J'ai trouvé un moyen de nous faire gagner de l'argent.
-Et comment ? Quel est donc ce plan génial ?
-Je n'ai pas le droit de t'en parler. Mais je te demande juste de me faire confiance.
-Hm...
Je ne le croyais pas. Il n'avait aucune raison de se taire là-dessus si cela ne craignait pas. Il m'avait toujours dit la vérité quelles que soient les circonstances. Quand lui et ma mère se sont séparés il fut le premier à me le dire et à me donner les vraies raisons de cette séparation. Il m'avait prévenu que ma grand-mère était mourante alors que cette dernière passait son temps à me dire qu'elle allait bien. Et encore, tout ceci n'étaient que les choses les plus importantes qu'il avait à me dire.
Mon père jeta son manteau sur le canapé, à côté de moi et souffla bruyamment.
-Bon, moi je vais me coucher, je te laisse. Si je ne t'ai pas entendu retourner dans ta chambre je te jure que je vais m'énerver.
Je ne répondis rien. Et dès qu'il fut hors de ma vue je me décidais de fouiller ses poches. Il devait être vraiment crevé pour avoir eu l'inintelligence de laisser son manteau à côté de moi. Je fouillais ses poches à la recherche de quelque chose qui aurait pu m'aider à comprendre ce qu'il avait l'intention de faire. Cependant je n'ai rien trouvé d'intéressant.
Pas si à la ramasse que cela finalement... Je décidais d'aller me coucher. Je n'avais pas envie de me faire chier avec ça aussi tard.
Je dormis d'un sommeil sans rêves, profond et long.
Seulement à mon réveil, l'homme que je croisais dans la cuisine était légèrement différent de la vision habituelle que j'avais de mon père. Ses cheveux semblaient encore plus grisonnants et son regard était plein de malice, alors que ses yeux exprimaient tout le temps une fatigue.
-Bonjour Noé. Bien dormi ?
Je répondis en hochant la tête de haut en bas et me fis un café.
Pourquoi je m'inquiète ? C'est vrai, je ne fais pas spécialement attention à ses cheveux, et puis si ça se trouve, il est juste de bonne humeur parce qu'il a bien dormi, je ne vois pas en quoi je devrais m'inquiéter plus que cela.
-Au fait, j'ai quelque chose pour toi.
Je me suis retourné. Il me fixait avec un léger sourire.
-Qu'est-ce-que c'est ?
Il se rapprocha de moi. Il me serra dans mes bras. Et je sentis une douleur aiguë dans mon ventre. Il recula et me regarda. Je baissais les yeux vers mon ventre, qui me faisait mal, qui commençait à être couvert de rouge.
Je tombais à genoux, appuyant mes mains sur ma blessure, suffoquant, à la fois choqué et souffrant. Je tentais de me calmer.
Comment... ? Pourquoi il avait fait ça ? Qu'est-ce-qui lui a pris bordel ?!
Papa... Mon papa... Je ne comprends pas...
-Et bien quoi Noé ? Ma surprise te déplait ?
Il fut secoué d'un léger rire puis se pencha vers moi.
-Tu as l'honneur d'être devenu ma première victime directe... Tu devrais me remercier.
Je le fixais d'un air affolé.
Je tentais de reculer, mais je ne pouvais pas aller plus loin que les placards de la cuisine. Je devais échapper à ce... monstre ou je ne sais pas quoi, mais je ne pouvais presque plus bouger.
Ma respiration se faisait plus laborieuse, je sentais un liquide épais couler abondamment sur le sol tandis que mes yeux commençaient à se fermer. Je me sentais très fatigué malgré la douleur.
-Tu passeras le bonjour à ton père.
Je sentis de nouveau la lame du couteau s'enfoncer dans mon corps à plusieurs reprises...
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro